bo Le Bulletin officiel de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports

Le Bulletin officiel de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports publie des actes administratifs : décrets, arrêtés, notes de service, etc. La mise en place de mesures ministérielles et les opérations annuelles de gestion font l'objet de textes réglementaires publiés dans des BO spéciaux.

Personnels

Politique disciplinaire

Instruction de politique disciplinaire concernant les faits portant atteinte à l'intégrité physique ou morale des mineurs

NOR : MENH1610908J

Instruction n° 2016-071 du 20-4-2016

MENESR - DGRH B2

Texte adressé aux rectrices et recteurs d'académie ; aux vice-rectrices et vice-recteurs de Mayotte, de la Nouvelle-Calédonie, de la Polynésie française et de Wallis-et-Futuna ; aux inspectrices et inspecteurs d'académie-directrices et directeurs académiques des services de l'éducation nationale ; à la cheffe de service de l'éducation à Saint-Pierre-et-Miquelon

Le respect de valeurs d'exemplarité, d'obligations et de règles déontologiques est inhérent à l'exercice de toute fonction publique. Du fait de leurs missions spécifiques de protection des mineurs, les personnels de l'éducation nationale en contact habituel avec des mineurs se doivent d'avoir, en toute circonstance, un comportement irréprochable, tout particulièrement sur le plan des mœurs.

La révélation d'affaires graves et douloureuses a frappé l'ensemble de la communauté éducative et fait naître des interrogations chez les parents d'élèves sur la capacité de l'institution scolaire à être informée des condamnations prononcées à l'encontre d'agents en contact habituel avec des mineurs, voire d'en tirer toutes les conséquences au plan disciplinaire.

Il ne saurait être question de les ignorer. C'est pourquoi des inspections ont été diligentées par les corps d'inspection à ma demande. Des mesures fortes ont déjà été prises, conjointement avec le ministère de la justice.

La loi n° 2016-457 du 14 avril 2016 relative à l'information de l'administration par l'autorité judiciaire et à la protection des mineurs, dont le décret d'application sera pris dans les plus brefs délais, permet désormais d'encadrer de façon précise les conditions dans lesquelles l'autorité judiciaire doit informer les administrations, et en particulier le ministère de l'éducation nationale, lorsque des agents publics sont mis en cause sur le plan pénal. Le partenariat entre les services a été renforcé par un réseau de référents pour améliorer le suivi et le traitement des signalements. Enfin, le contrôle des antécédents judiciaires de l'ensemble des agents en contact habituel avec des mineurs, en cours de carrière, a été engagé depuis le mois de février dernier pour identifier les agents publics qui auraient été condamnés sans que cette condamnation ait été portée à la connaissance de l'administration. Il a donné lieu à l'instruction du 25 mars 2016 publiée au B.O.E.N. du 31 mars dernier.

Mieux informé, le ministère de l'éducation nationale doit ainsi être en mesure de prendre au meilleur moment les éventuelles mesures conservatoires nécessaires et d'engager l'action disciplinaire dès que les faits fautifs sont établis.

Dans ce contexte, et afin que l'action disciplinaire que vous conduisez pour des faits portant atteinte à l'intégrité physique et morale des mineurs s'exerce avec l'efficacité requise par leur gravité et de manière homogène sur l'ensemble du territoire, je souhaite à la fois vous rappeler, s'agissant de l'enseignement scolaire public et privé, les orientations de la politique ministérielle en la matière et fixer, en écho aux affaires passées, les règles permettant d'en tirer tous les enseignements pour l'avenir.

Pour vous accompagner dans la conduite des procédures, le vademecum sur l'action disciplinaire et les obligations des personnels sera actualisé très prochainement. Il rappellera les règles applicables à ces procédures en prenant notamment en compte les évolutions jurisprudentielles et les modifications issues de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

Des formations seront également proposées à vos collaborateurs. Une première formation sera dispensée auprès des directeurs des ressources humaines à la fin de l'année scolaire, une seconde suivra au cours du 1er trimestre de la prochaine année scolaire pour les référents « justice » et les personnels en charge des affaires disciplinaires. Je souhaite par ailleurs que des formations sur les procédures disciplinaires soient intégrées aux plans académiques de formation.

1/ Une exigence d'exemplarité des personnels relevant de l'éducation nationale en contact habituel avec des mineurs au regard des missions qui leur incombent

Les personnels relevant de l'éducation nationale (1), en contact habituel avec des mineurs, ont une mission permanente de protection de la jeunesse dans l'exercice de leurs fonctions comme en dehors du cadre professionnel.

Il arrive que l'on constate chez certains personnels des comportements répréhensibles à l'égard des élèves, tant sur le plan du langage que de la proximité physique. Il peut s'agir de propos déplacés à connotation sexuelle, échangés dans le cadre scolaire ou sur les réseaux sociaux, de gestes ambigus ou encore de manœuvres de séduction. Sans préjudice d'une éventuelle qualification pénale, de tels comportements ne sont pas acceptables et doivent être sanctionnés de façon proportionnée dès les premiers constats afin d'éviter que ne s'installent de mauvaises postures.

D'autres agissements par ailleurs pénalement répréhensibles, contreviennent de façon plus grave encore aux exigences de la fonction : propositions de nature sexuelle, attouchements, agressions sexuelles, consultation/diffusion d'images pédopornographiques, etc. Ils peuvent être commis au sein de l'École comme en dehors du cadre scolaire. Ils doivent être signalés auprès du procureur de la République dans les conditions rappelées ci-dessous et donner lieu à des sanctions sévères.

Je vous rappelle que l'exigence d'exemplarité s'impose, en toute circonstance, aux personnels. Tout agissement d'un agent qui porte atteinte à la réputation ou à l'image de l'administration, qui jette le discrédit sur la fonction exercée ou est incompatible avec la nature des fonctions, l'honneur professionnel ou la qualité d'agent public, constitue une faute disciplinaire devant donner lieu à procédure, sans considération de l'existence ou non de poursuites au plan judiciaire même s'il est intervenu dans le cadre de la vie privée.

2/ Une obligation d'information et de signalement de tout fait grave commis par des personnels de l'éducation nationale

Comme cela a été régulièrement précisé par plusieurs circulaires (2), je rappelle que tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit, doit en donner avis sans délai au procureur de la République, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale, et transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

Le fait pour un agent de se soustraire à cette obligation et, par là même, de mettre en danger la sécurité des élèves, est de nature à engager sa responsabilité individuelle, disciplinaire et pénale.

Les agents doivent également informer immédiatement leur hiérarchie de tout fait ou de toute condamnation susceptible de porter atteinte à l'intégrité physique et morale des mineurs dont ils ont connaissance afin que le recteur d'académie ou l'inspecteur d'académie-directeur académique des services de l'éducation nationale puisse notamment prendre toutes les mesures nécessaires à la protection des enfants.

Vous veillerez à rappeler ces règles à l'ensemble des personnels de votre académie, en particulier aux chefs d'établissement et aux directeurs d'école, de l'enseignement public et privé, au regard des missions qui leur sont dévolues.

Pour permettre à chaque acteur d'exercer pleinement ses responsabilités et éviter la déperdition d'informations, vous identifierez clairement le circuit des remontées de faits graves susceptibles de mettre en cause des personnels au sein des départements et des académies. Les référents « justice » et les directeurs des ressources humaines seront au centre de ce dispositif.

En cas de suspicion de faute grave, une mesure de suspension, dont je vous rappelle qu'il s'agit d'une mesure conservatoire, sera prononcée sur le fondement de l'article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ou sur le fondement de l'article R. 914-104 du code de l'éducation s'agissant des maîtres de l'enseignement privé sous contrat.

3/ Un engagement de la procédure disciplinaire dès que la matérialité des faits est établie

L'établissement de la matérialité des faits est un préalable obligatoire à l'engagement de la procédure disciplinaire. L'administration doit, en effet, recueillir tous les éléments d'appréciation sur les faits reprochés et sur les circonstances de leur commission pour être en mesure de prononcer une sanction proportionnée à la gravité de la faute.

Lorsque les faits ont été commis dans la sphère privée, l'autorité disciplinaire peut se trouver en difficulté car elle ne dispose, bien souvent, que du jugement pénal pour apprécier leur nature et leur gravité. Or, celui-ci peut ne pas être explicite sur ces points. L'infraction pénale d'agression sexuelle sur mineur, par exemple, recouvre des situations très diverses, du baiser aux attouchements les plus graves et l'autorité disciplinaire doit être en mesure de cerner précisément les faits pour conduire efficacement la procédure disciplinaire.

Dans de tels cas, des informations ou pièces complémentaires devront être systématiquement sollicitées auprès du procureur de la République, via les référents « justice ». Vous pourrez dès qu'il aura été publié, formuler vos demandes en prenant appui sur le décret d'application de la loi n° 2016-457 du 14 avril 2016 précitée qui prévoira expressément ces cas. Toute difficulté que vous pourriez rencontrer dans le recueil d'informations devra être signalée, en temps utile, à mes services, pour qu'ils puissent intervenir auprès de ceux de la justice.

Par ailleurs, je rappelle que lorsque l'administration décide d'attendre l'issue de la procédure pénale pour engager la procédure disciplinaire, elle ne saurait remettre en cause la matérialité des faits établie définitivement par le juge pénal. En revanche, elle n'est pas liée par l'appréciation que le juge a des faits. Il appartient, en effet, à l'autorité disciplinaire de définir le degré de la sanction résultant de sa propre appréciation des faits au regard des obligations professionnelles de l'agent.

4/ Une vigilance permanente des autorités disciplinaires pour prononcer une sanction proportionnée à la gravité de la faute

Les affaires de mœurs sur mineur revêtent une sensibilité particulière pour notre ministère et requièrent la plus grande vigilance de la part des autorités disciplinaires compétentes. C'est pourquoi je demande aux recteurs d'académie et aux inspecteurs d'académie-directeurs académiques des services de l'éducation nationale de présider personnellement les commissions administratives paritaires ou les commissions consultatives mixtes réunies en formation disciplinaire lorsque sont en cause des affaires de mœurs concernant des mineurs.

Au surplus, dans un souci de cohérence d'ensemble de la politique disciplinaire pour ces affaires, je souhaite qu'un regard croisé soit porté en amont de la prise de décision afin que la sanction la plus adaptée puisse être prononcée. À cette fin, les recteurs d'académie transmettront à mes services, à l'issue de la procédure disciplinaire, l'ensemble des dossiers relatifs à ces affaires, y compris ceux pour lesquels la procédure disciplinaire a été conduite par les inspecteurs d'académie-directeurs académiques des services de l'éducation nationale.

   

La vigilance dans la conduite de la politique disciplinaire relative aux affaires de mœurs mettant en cause des mineurs est une exigence absolue. Elle est nécessaire pour assurer la protection des mineurs, qui est une responsabilité commune à l'ensemble des personnels du ministère. Elle est une condition aussi pour que les comportements d'une infime minorité ne mettent pas en cause la réputation des personnels relevant du ministère qui, dans leur immense majorité, sont engagés au quotidien pour la réussite scolaire et le bien-être des enfants.

Je sais pouvoir compter sur votre implication personnelle et votre sens des responsabilités pour mettre en œuvre ces orientations.

  

Fait le 20 avril 2016

La ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche
Najat Vallaud-Belkacem

   

(1) Les personnels des établissements d'enseignement privés sous contrat et hors contrat qui n'ont pas la qualité d'agents publics, y compris les personnels de direction et les personnels chargés de la surveillance, peuvent également se voir infliger des sanctions disciplinaires par le recteur d'académie en application de l'article L. 914-6 du code de l'éducation.

(2) Voir notamment la circulaire n° 97-175 du 26 août 1997 concernant les violences sexuelles et la circulaire n° 2001-044 du 15 mars 2001 relative à la protection du milieu scolaire et à la lutte contre les violences sexuelles.

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