Enseignement : questions générales
PRINCIPES GÉNÉRAUX
Obligation scolaire
Obligation scolaire – Instruction dans la famille – Contrôle – Résultats insuffisants – Mise en demeure d’inscrire l’enfant dans un établissement scolaire – Procédure obligatoire
T.A. Rennes, 12 février 2016, n° 1404163
Selon l’article L. 131-10 du code de l’éducation, lorsqu’un enfant soumis à l’obligation scolaire reçoit l’instruction dans sa famille, l’autorité compétente en matière d’éducation doit au moins une fois par an vérifier que l’enseignement dispensé est conforme au droit de l’enfant à l’instruction tel que défini à l’article L. 131-1-1. Les résultats de ce contrôle sont notifiés aux personnes responsables avec l’indication du délai dans lequel elles doivent fournir leurs explications ou améliorer la situation, et des sanctions qu’elles encourent dans le cas contraire. Si, au terme d’un nouveau délai fixé par l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation, les résultats du contrôle sont jugés insuffisants, les parents sont mis en demeure d’inscrire, dans les quinze jours suivant la notification de cette mise en demeure, leur enfant dans un établissement d’enseignement public ou privé.
En l’espèce, le 20 février 2014, l’inspecteur d’académie, directeur académique des services départementaux de l’éducation nationale (I.A.-DASEN), avait effectué un contrôle de l’instruction reçue dans sa famille par l’enfant X. Jugeant les résultats de ce contrôle insuffisants, l’I.A.-DASEN avait avisé les parents le 27 mai 2014 qu’un nouveau contrôle serait effectué le 1er juillet 2014 et leur avait demandé de lui faire parvenir des éléments attestant de « la progression globale actualisée dans chacun des sept domaines de compétence déclinés dans le socle commun ». Le 18 juillet 2014, l’I.A.-DASEN avait mis la mère de l’enfant en demeure d’inscrire celui-ci dans un établissement d’enseignement dans les quinze jours et avant le 2 septembre 2014.
La mère de l’enfant demandait au tribunal administratif de Rennes l’annulation de la décision de l’inspecteur d’académie du 18 juillet 2014, en faisant notamment valoir que la procédure de contrôle telle que définie à l’article L. 131-10 du code de l’éducation n’avait pas été respectée.
Le tribunal administratif de Rennes a relevé que les résultats du contrôle effectué le 20 février 2014 n’avaient pas été notifiés aux parents de l’enfant avec l’indication du délai dans lequel ils devaient fournir leurs explications ou améliorer la situation, ni des sanctions dont ils seraient l’objet dans le cas contraire. Dans ces conditions, il a annulé la décision du 18 juillet 2014 en retenant qu’elle avait été prise en méconnaissance des dispositions de l’article L. 131-10 du code de l’éducation et que cette irrégularité de procédure avait privé la mère de l’enfant d’une garantie.
N.B. : La notification des résultats du contrôle, prévue par l’article L. 131-10 du code de l’éducation, est logiquement regardée comme une garantie au sens de la jurisprudence Danthony (C.E. Assemblée. 23 décembre 2011, n° 335033, au Recueil Lebon). Aussi, lorsque, comme dans la présente espèce, les parents ont été effectivement privés de cette garantie, le juge accueille le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure.
Dans une affaire similaire, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision d’un I.A.-DASEN enjoignant aux parents d’un enfant recevant l’instruction dans sa famille d’inscrire leur enfant dans un établissement d’enseignement au motif qu’elle avait été prise à l’issue d’une procédure irrégulière. L’I.A.-DASEN avait en effet pris sa décision sans accorder aux parents de l’enfant le délai prévu à l’article L. 131-10 du code de l’éducation afin de fournir des explications ou d’améliorer la situation (T.A. Paris, 3 juin 2014, n° 1313801, LIJ n° 185, novembre 2014). 
Enseignement supérieur et recherche
ADMINISTRATION ET FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
Questions communes
ÉLECTIONS AUX INSTANCES DES ÉTABLISSEMENTS
Élection des représentants des étudiants à la commission de la recherche du conseil académique des établissements – Collège des usagers – Qualité d’électeur et éligibilité des internes en médecine
C.E., 10 février 2016, Intersyndicat national des internes, n° 381709
C.E., 10 février 2016, Union nationale des étudiants de France, Université Paris-XIII, Intersyndicat national des internes et autres, n° 384473
Aux termes de l’article L. 712-5 du code de l’éducation : « La commission de la recherche comprend de vingt à quarante membres ainsi répartis : (…) 2° de 10 à 15 % de représentants des doctorants inscrits en formation initiale ou continue (…). »
L’article D. 719-6 du même code prévoit que : « Pour l’élection des membres de la commission de la recherche du conseil académique ou du conseil scientifique ou de l’organe en tenant lieu, les électeurs concernés sont répartis en collèges électoraux dont la composition est fixée sur les bases suivantes : (…) II. Pour les usagers, le collège comprend les personnes mentionnées au II de l’article D. 719-4 [à savoir les étudiants régulièrement inscrits dans l’établissement] suivant une formation de troisième cycle relevant de l’article L. 612-7. »
Le Conseil d’État était appelé à se prononcer sur le point de savoir si le II de l’article D. 719-6 du code de l’éducation, en limitant le collège électoral des usagers aux étudiants suivant une formation de troisième cycle relevant de l’article L. 612-7, et en excluant par conséquent les internes en médecine de la possibilité d’être électeurs ou éligibles à la commission de la recherche, méconnaissait l’article L. 712-5 du même code.
Le Conseil d’État a jugé « qu’il résulte de la combinaison des dispositions [des articles L. 612-7, L. 632-4, L. 632-5, D. 613-7 et R. 632-14 du code de l’éducation] que les doctorants pouvant, en application de l’article L. 712-5 du code de l’éducation, siéger en qualité de représentants des usagers à la commission de la recherche du conseil académique des universités sont seulement les étudiants qui suivent une formation de troisième cycle à la recherche et par la recherche dispensée au sein d’une école doctorale dans les conditions définies à l’article L. 612-7 du code de l’éducation, c’est-à-dire ceux qui préparent le diplôme du doctorat prévu au 14° de l’article D. 613-6 du même code pour les disciplines autres que celles de la santé et au 23° de l’article D. 613-7 du code pour les disciplines de santé ».
Il a précisé « que les internes en médecine, qui suivent la formation théorique et pratique prévue par l’article L. 632-5 du code de l’éducation en vue d’obtenir le diplôme d’État de docteur en médecine prévu à l’article L. 632-4 [du code] et au 13° de son article D. 613-7 et non une formation à la recherche par la recherche, sauf s’ils préparent le doctorat prévu au 23° de l’article D. 613-7, comme ils peuvent le faire en application de l’article R. 632-14 du code, ne relèvent donc pas de [la] catégorie [des doctorants au sens de l’article L. 712-5] ».
Il a ajouté « que la représentation des disciplines de santé à la commission de la recherche prévue par l’article L. 712-4 est assurée par les étudiants préparant le doctorat prévu au 23° de l’article D. 613-7 ».
Le Conseil d’État en a conclu « qu’en limitant le collège électoral des usagers de la commission de la recherche aux étudiants "suivant une formation de troisième cycle relevant de l’article L. 612-7", le II de l’article D. 719-6 du code de l’éducation ne méconnaît pas les dispositions de l’article L. 712-5 du même code », pas plus qu’il ne crée par ailleurs d’« inégalité de traitement entre les étudiants suivant une formation de troisième cycle relevant de l’article L. 612-7 et les internes en médecine injustifiée au regard des attributions de la commission de la recherche dès lors que (…) cette différence de traitement résulte de la loi ».
N.B. : Par ces décisions, le Conseil d’État a tranché une question qui avait donné lieu à des réponses différentes selon les cours administratives d’appel.
En effet, si les cours administratives d’appel de Nantes (arrêts n° 14NT02308 et n° 14NT02343 du 12 mars 2015), de Douai (arrêt n° 14DA01400 du 14 avril 2015) et de Nancy (arrêt n° 14NC01598 du 30 avril 2015) avaient considéré que les dispositions du II de l’article D. 719-6 du code de l’éducation ne méconnaissaient pas l’article L. 712-5 du même code, la cour administrative d’appel de Versailles avait, en revanche, retenu une position inverse par un arrêt n° 14VE00712 du 11 juillet 2014 que le Conseil d’État, par sa décision n° 384473 du 10 février 2016, a annulé. 
Questions propres aux différents établissements
ÉTABLISSEMENTS PUBLICS À CARACTÈRE SCIENTIFIQUE, CULTUREL ET PROFESSIONNEL (E.P.C.S.C.P.)
Missions du service public de l’enseignement supérieur – Établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel – Principe de spécialité – Illégalité de la création d’une filiale destinée à exercer des activités de formation continue et de préparation à des examens
C.A.A. Paris, 8 mars 2016, n° 13PA04846
Le tribunal administratif de Paris avait annulé les délibérations du conseil d’administration de l’université Panthéon-Assas – Paris-II et les décisions de son président par lesquelles avait été créée, en application des dispositions de l’article L. 711-1 du code de l’éducation, une filiale de cette université, la société par actions simplifiée « Assas Lextenso Formations », et avait enjoint à l’université de dissoudre cette filiale.
Le recours de l’université contre ce jugement a été rejeté par la cour administrative d’appel de Paris qui a jugé :
« qu’aux termes de l’article L. 123-3 du code de l’éducation, dans sa version en vigueur à la date des décisions attaquées : ″Les missions du service public de l'enseignement supérieur sont : 1° la formation initiale et continue ; 2° la recherche scientifique et technologique, la diffusion et la valorisation de ses résultats ; 3° l'orientation et l'insertion professionnelle ; 4° la diffusion de la culture et l'information scientifique et technique ; 5° la participation à la construction de l'Espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche ; 6° la coopération internationale" » ;
« qu’aux termes de l’article L. 711-1 du même code, dans sa version applicable à la date des décisions attaquées : ″Dans le cadre des missions qui leur sont dévolues par le présent code et afin de faire connaître leurs réalisations, tant sur le plan national qu'international, les établissements à caractère scientifique, culturel et professionnel peuvent (...) prendre des participations, participer à des groupements et créer des filiales dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État (...)" ; qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2000-1264 du 26 décembre 2000 [désormais codifié à l’article R.711-10 du code de l’éducation], dans sa version alors applicable : "En application de l'article L. 711-1 du code de l'éducation, les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel peuvent créer des filiales et prendre des participations dans des sociétés ou groupements de droit privé. Lorsqu'un établissement détient plus de la moitié des actions ou des parts sociales de la personne morale mentionnée à l'alinéa précédent, celle-ci est dénommée filiale de cet établissement" » ;
« qu’aux termes (…) des statuts de l’université Panthéon-Assas – Paris-II : "L'Université a pour vocation la formation initiale et continue ainsi que la recherche en droit, science politique, sciences économiques, sciences de gestion, sciences de l'information et de la communication" ; que (…) l'université (…) regroupe en son sein (…) une unité de formation et de recherche (U.F.R.) intitulée "Institut d'études judiciaires (I.E.J.)" et un service commun intitulé “Centre de formation permanente (C.F.P.)” [qui] (…) ont respectivement pour objet d'organiser (…) l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats (C.R.F.P.A.) et sa préparation, et "d'offrir aux acteurs de la vie économique, sociale et administrative des formations tout au long de la vie" ; (…) que l'objet de la S.A.S. "Assas Lextenso Formations" (…) est : "la formation continue destinée aux professionnels et la préparation intensive d'été aux examens et concours, et ce, dans les disciplines relatives aux sciences humaines, juridiques et politiques. La société peut réaliser toutes les opérations qui sont compatibles avec cet objet, s'y rapportent et contribuent à sa réalisation" » ;
« qu'il résulte des dispositions susmentionnées de l'article L. 711-1 du code de l'éducation applicable, lesquelles ont entendu mettre en œuvre le principe de spécialité qui régit les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, que l'objet des filiales pouvant être créées par les universités vise exclusivement à faire connaître les réalisations afférentes aux missions qui leur sont dévolues par l'article L. 123-3 du code de l’éducation ; que si ces dispositions permettent notamment de valoriser leurs activités de recherche, elles ne les autorisent pas à exercer, dans le cadre d'une filiale, des activités de "formation continue" et de "préparation intensive d'été" à l'examen d'entrée au C.R.F.P.A., qui relèvent par nature des missions statutaires principales que l'université Panthéon-Assas – Paris-II doit exercer, au sein notamment de l'I.E.J. et du C.F.P. ; que, par suite, les délibérations et les décisions attaquées (...), qui se rapportent toutes à un même projet de création d'une telle filiale, méconnaissent le champ d'application des dispositions de l'article L. 711-1 précité du code de l'éducation ».
N.B. : Conformément au principe de spécialité des établissements publics, l’université est tenue d’accomplir les missions du service public de l’enseignement que la loi et ses statuts lui assignent.
À cet égard, une convention permettant l’établissement d’une permanence de masseurs-kinésithérapeutes dans un local de l’université, destinée à assurer l’information et le suivi thérapeutique des enseignants et étudiants d’une unité de formation et de recherche d’éducation physique et sportive, « n’est pas contraire à la mission de service public assumée par l’université, ni au principe de spécialité des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel » (cf. C.E., 12 décembre 1994, n° 98455, aux tables du Recueil Lebon).
Il en est de même d’une convention d’occupation du domaine public universitaire avec une librairie exerçant une activité commerciale « destinée à satisfaire les besoins directs des usagers du service public de l’enseignement supérieur dont elle peut constituer un complément » (cf. C.E., 10 mai 199, n° 142064 et n° 142066, au Recueil Lebon). 
ÉTUDES
Inscription des étudiants
INSCRIPTION L.M.D.
Sélection au cours du second cycle universitaire (master) – Accès en deuxième année de master – Exigence d’un décret fixant la liste limitative des formations concernées
C.E., avis, 10 février 2016, n° 394594 et n° 394595, au Recueil Lebon
Le Conseil d’État a été saisi par le tribunal administratif d’Orléans, sur le fondement de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, d’une demande d’avis portant sur la question de savoir si les dispositions de l’article L. 612-6 du code de l’éducation doivent être comprises comme excluant toute possibilité de sélection au cours du second cycle universitaire, c’est-à-dire entre la première et la seconde année de master.
Le Conseil d’État a tout d’abord rappelé les dispositions de l’article L. 612-1 du code de l’éducation qui prévoient que : « Le déroulement des études supérieures est organisé en cycles (…) » et que : « (…) Les grades de licence, de master et de doctorat sont conférés respectivement dans le cadre du premier, du deuxième et du troisième cycle. (…) »
Il a ensuite indiqué qu’aux termes de l’article L. 612-6 du même code : « L’admission dans les formations du deuxième cycle est ouverte à tous les titulaires des diplômes sanctionnant les études de premier cycle (…). La liste limitative des formations dans lesquelles cette admission peut dépendre des capacités d’accueil des établissements et, éventuellement, être subordonnée au succès à un concours ou à l’examen du dossier du candidat est établie par décret après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (...). »
Le Conseil d’État a alors jugé que : « Il résulte de ces dispositions [législatives] que l’admission à une formation de deuxième cycle au terme de laquelle est délivré le grade de master, en première comme en deuxième année, ne peut dépendre des capacités d’accueil d’un établissement ou être subordonnée au succès à un concours ou à l’examen du dossier des candidats que si cette formation figure sur la liste [mentionnée à l’article L. 612-6]. »
Il en a déduit que les dispositions de l’article 3 de l’arrêté du 25 avril 2002 relatif au diplôme national de master selon lesquelles : « Le diplôme de master sanctionne un niveau correspondant à l’obtention de 120 crédits européens au-delà du grade de licence » devaient être interprétées en ce sens que, « pour une formation de deuxième cycle qui n’est pas inscrite à cette fin sur une liste établie par décret après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, aucune limitation à l’admission des candidats du fait des capacités d’accueil d’un établissement ou par une condition de réussite à un concours ou d’examen du dossier des candidats ne peut être introduite après l’obtention des 60 premiers crédits européens, c’est-à-dire après la première année du deuxième cycle ».
Le Conseil d’État a par conséquent précisé que si « L’article 11 du même arrêté [du 25 avril 2002] dispose, il est vrai, qu’au-delà des 60 premiers crédits européens : "(…) L’admission ultérieure dans un parcours type de formation débouchant sur le master recherche s’effectue dans les conditions prévues à l’article 16 de l’arrêté du 25 avril 2002 [relatif aux études doctorales, abrogé par arrêté du 7 août 2006 relatif au même objet]”, [et que] : "L’admission ultérieure dans un parcours type de formation débouchant sur le master professionnel est prononcée par le chef d’établissement sur proposition du responsable de la formation", ces dispositions ne pouvaient cependant, en tout état de cause, (…) avoir légalement pour objet ou pour effet de permettre de limiter l’admission des candidats, sauf à ce que la formation en cause ait été inscrite à cette fin sur une liste établie par décret (…) ».
N.B. : Cet avis est à rapprocher de la décision n° 10011 du 27 juin 1994, publiée au Recueil Lebon, par laquelle le Conseil d’État avait jugé « qu’en l’absence du décret prévu à l’article 15 (…) de la loi [n° 84-52] du 26 janvier 1984 [sur l’enseignement supérieur, article désormais codifié à l’article L. 612-6], l’admission en maîtrise [c’est-à-dire, à l’époque, l’accès au deuxième cycle] (…) ne pouvait être subordonnée au succès à un concours ou à l’examen du dossier du candidat ». 
Examens et concours
QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTS EXAMENS ET CONCOURS
Baccalauréat
Délivrance du baccalauréat – Délibération du jury – Éléments d’appréciation – Livret scolaire
C.A.A. Paris, 2 février 2016, n° 14PA02684
Une candidate aux épreuves du baccalauréat de la session de juin 2013 avait demandé au tribunal administratif de Melun d’annuler la décision par laquelle le jury du baccalauréat l’avait ajournée à cet examen, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux contre cette décision.
Elle avait notamment fait valoir que la délibération du jury attaquée reposait sur des faits matériellement inexacts dès lors qu’elle avait été émise au vu de son livret scolaire faisant état d’absences, alors même que celles-ci avaient été ultérieurement justifiées, et avait été prise au terme d’une procédure irrégulière dans la mesure où l’administration aurait dû compléter son livret scolaire sur ce point, au vu des justificatifs qu’elle avait ensuite présentés.
Le tribunal administratif de Melun avait rejeté par ordonnance cette demande de la requérante en estimant qu’elle ne comportait que des moyens inopérants. La requérante avait interjeté appel de cette ordonnance.
La cour administrative d’appel de Paris a annulé l’ordonnance du juge de première instance pour irrégularité au motif que les moyens soulevés par la requérante n’étaient pas inopérants : la cour a souligné que les moyens invoqués par la requérante ne mettaient pas en cause les appréciations portées par le jury sur la valeur de ses prestations à l’examen du baccalauréat, qu’il n’appartient en effet pas au juge administratif de contrôler, mais bien l’irrégularité de la procédure au terme de laquelle ces appréciations du jury avaient été émises et les faits matériellement inexacts sur lesquels elles étaient fondées, moyens qui ne sont pas inopérants.
La cour a ensuite cité les articles D. 334-10 et D. 334-20 du code de l’éducation qui prévoient respectivement que : « Les éléments d'appréciation dont dispose le jury sont : (…) 4° Le livret scolaire qui peut être produit par le candidat et qui est constitué dans les conditions déterminées par arrêté du ministre chargé de l'éducation.
Les notes définitives résultent de la délibération du jury. Aucun candidat ayant fourni un livret scolaire ne peut être ajourné sans que le jury ait examiné ce livret. La mention de cet examen est portée au livret scolaire sous la signature du président du jury » et que : « La délivrance du baccalauréat général résulte de la délibération du jury qui est souverain. »
En l’espèce, la cour a d’abord rappelé qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’impose à l’administration de préciser la cause et le caractère régulier ou non des absences reportées dans le livret scolaire, avant de constater que la requérante ne contestait pas avoir été absente aux dates mentionnées dans son livret scolaire.
Elle a ensuite relevé qu’en vertu de l’article D. 334-10, « la production du livret scolaire est à la charge du candidat et, au surplus, n’est pas obligatoire » , d’où elle a conclu que ,« (…) il appartenait à [la candidate], qui a souhaité produire son livret scolaire lors de l’examen, de demander à l’administration, lorsqu’elle a signé son livret (…), de compléter les mentions relatives à ses absences », ce qu’elle n’établissait pas avoir fait.
La cour a en conséquence jugé que « les décisions contestées ne sont pas irrégulières pour avoir été prises au vu d’un livret scolaire lui-même irrégulièrement constitué » et a rejeté la requête de la candidate.
N.B. : Dans une précédente affaire dans laquelle une requérante avait fait valoir que la délibération du jury du baccalauréat l’ajournant à l’examen était entachée d'illégalité au motif qu'elle était intervenue sans que le jury ait préalablement examiné son livret scolaire, alors que son handicap justifiait un examen particulier de son dossier, la cour administrative d’appel de Paris avait déjà retenu que la production du livret scolaire était à la charge du candidat et, au surplus, qu’elle n’était pas obligatoire (C.A.A. Paris, 18 octobre 2011, n° 09PA05693). 
Personnels
QUESTIONS COMMUNES
Positions
DISPONIBILITÉ
Demande de réintégration – Maintien d’office en disponibilité dans l’attente d’une réintégration – Refus des postes proposés – Perte du bénéfice des allocations chômage
C.E., 24 février 2016, n° 380116, aux tables du Recueil Lebon
Mme X, fonctionnaire territoriale, avait sollicité sa réintégration à compter du 1er février 2010 à l’issue de son placement en disponibilité pour convenances personnelles. Maintenue en position de disponibilité d’office dans l’attente de sa réintégration, elle n’avait pas donné suite aux propositions de poste qui lui avaient été adressées par la région Poitou-Charentes entre le 3 et le 8 février.
Le 6 avril 2010, Mme X avait demandé à bénéficier des allocations chômage à compter du 1er février. Le président de la région ayant implicitement rejeté sa demande, Mme X avait sollicité du tribunal administratif l’annulation de cette décision implicite.
Par un jugement rendu le 23 janvier 2013, le tribunal administratif de Poitiers avait annulé la décision en tant que le bénéfice des allocations chômage avait été refusé à Mme X pour la période du 1er au 3 février.
Par un arrêt n° 13BX01652 du 11 mars 2014, la cour administrative d’appel de Bordeaux avait réformé ce jugement en retenant que Mme X devait être regardée comme ayant été privée involontairement d’emploi pendant toute sa période de disponibilité d’office et devait donc, à ce titre, percevoir les allocations chômage qu’elle avait sollicitées.
Saisi d’un pourvoi formé par la région, le Conseil d’État a rappelé « qu’il résulte des dispositions de l’article 72 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale que le fonctionnaire (…) demandant sa réintégration [à la suite d’un placement] en disponibilité pour convenances personnelles pendant une durée n’ayant pas excédé trois années doit se voir proposer une des trois premières vacances d’emploi dans sa collectivité d’origine ».
Le juge de cassation a ensuite indiqué, qu’en application de l’article L. 5421-1 du code du travail, « les travailleurs involontairement privés d’emploi (…), aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement ».
Le Conseil d’État a enfin précisé « qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions qu’un fonctionnaire territorial qui, à l’expiration de la période pendant laquelle il a été placé, sur sa demande, en disponibilité, est maintenu d’office dans cette position ne peut prétendre au bénéfice des allocations d’assurance chômage que si ce maintien résulte de motifs indépendants de sa volonté ; [or,] tel n’est pas le cas du fonctionnaire qui a refusé un emploi répondant aux conditions définies par les dispositions statutaires applicables, qui lui a été proposé par la collectivité en vue de sa réintégration ».
Le juge de cassation a donc estimé que l’arrêt attaqué était entaché d’une erreur de droit et en a prononcé l’annulation.
N.B. : Il résulte d’une jurisprudence constante que le fonctionnaire qui n’a pu, faute de poste vacant, obtenir sa réintégration dans son administration à l’issue d’une disponibilité doit être regardé comme involontairement privé d’emploi, au sens des dispositions du code du travail relatives à l’ouverture du droit à l’allocation d’assurance chômage. À ce titre, il est en droit de percevoir des allocations chômage (cf. C.E., 28 juillet 2004, Office public d’aménagement et de construction Sarthe Habitat, n° 243387, aux tables du Recueil Lebon).
Par la décision commentée, le Conseil d’État apporte une précision nouvelle en jugeant que le fonctionnaire qui refuse les postes proposés par son administration pour permettre sa réintégration ne peut plus être regardé comme involontairement privé d’emploi et perd, par conséquent, le droit à cette indemnisation. 
Congés
CONGÉ DE MALADIE
Affection ou accident imputable au service – Droits à congés de maladie – Articulation des droits entre les différents congés de maladie – Conditions de maintien du traitement
C.E. Section, 18 décembre 2015, n° 374194, au Recueil Lebon
Mme X, agent titulaire de la fonction publique hospitalière, avait dû cesser son activité au mois de mars 2006, en raison d’une dépression faisant suite à l’effondrement (en son absence) d’un plafond suspendu d’une pièce de l’établissement dans lequel elle exerçait habituellement ses fonctions. Son employeur, la maison départementale de l’enfance et de la famille de la Haute-Savoie, l’avait placée dans un premier temps en congé de longue maladie à plein traitement pendant un an à compter du 27 mars 2006, puis en congé de longue durée à plein traitement à compter du 27 mars 2007, et enfin, en congé de longue durée à demi-traitement à compter du 27 mars 2011.
La commission de réforme du département de la Haute-Savoie ayant considéré que son affection était imputable au service, Mme X estimait avoir le droit, en application des dispositions du 2° de l’article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière, au maintien sans limitation de durée de l’intégralité de son traitement, jusqu’à la reprise de son service ou jusqu’à sa mise à la retraite. La maison départementale avait fait, pour sa part, application des dispositions du 4° de l’article 41 de cette loi, relatives au congé de longue durée, qui ne prévoient le maintien du plein traitement que pendant une période de cinq ans, c’est-à-dire en l’espèce jusqu’au 26 mars 2011.
Le tribunal administratif de Grenoble ayant rejeté sa requête en annulation, Mme X avait formé un pourvoi en cassation.
Le Conseil d’État a tout d’abord retenu qu’en application des dispositions combinées des articles 41 et 71 de la loi du 9 janvier 1986, de l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite et des articles 30 et 36 du décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, « le fonctionnaire dont les blessures ou la maladie [résultent] d'un accident de service ou d’une maladie contractée ou aggravée en service, ou de l’une des autres causes exceptionnelles prévues à l’article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, et qui se trouve dans l’incapacité permanente de continuer ses fonctions au terme d’un délai de douze mois à compter de sa mise en congé de maladie, sans pouvoir bénéficier d’un congé de longue maladie ou d’un congé de longue durée, doit bénéficier de l’adaptation de son poste de travail ou, si celle-ci n’est pas possible, être mis en mesure de demander son reclassement dans un emploi d’un autre corps ou cadre d’emplois, s’il a été déclaré en mesure d’occuper les fonctions correspondantes ; [et] que, s’il ne demande pas son reclassement ou si celui-ci n’est pas possible, il peut être mis d’office à la retraite par anticipation, (...) l’administration [ayant] l’obligation de lui maintenir l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre le service ou jusqu'à sa mise à la retraite ».
Il a alors jugé que « toutefois, (…) ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui en remplit les conditions soit placé en congé de longue maladie ou en congé de longue durée, le cas échéant à l’initiative de l’administration ; (…) il a alors droit, dans le premier cas, au maintien de son plein traitement pendant trois ans et, dans le second, au maintien de son plein traitement pendant cinq ans et à un demi-traitement pendant trois ans ; (…) en l’absence de reprise du service ou de reclassement dans les conditions mentionnées (…), il peut, s’il est dans l’impossibilité permanente de continuer ses fonctions en raison de la maladie, être mis d’office à la retraite par anticipation, à l’issue du délai de trois ans en cas de congé de longue maladie, ou de huit ans en cas de congé de longue durée ; (…) il conserve alors, en cas de congé de longue maladie, son plein traitement, ou, en cas de congé de longue durée, son demi-traitement jusqu’à l’admission à la retraite ».
Le Conseil d’État a donc rejeté le pourvoi de la requérante, en retenant que, dès lors que sa maladie mentale avait été reconnue imputable au service et qu’elle avait été placée en congé de longue maladie à plein traitement à compter du 27 mars 2006, elle pouvait légalement être placée en congé de longue durée et n’avait droit à une rémunération à plein traitement que pendant une durée limitée à cinq ans, soit jusqu’au 26 mars 2011.
N.B. : Cette jurisprudence de Section du Conseil d’État est transposable aux fonctionnaires de l’État dès lors que l’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l’État est rédigé dans les mêmes termes que l’article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière.
Par cette décision, le Conseil d’État vient clarifier des dispositions législatives peu précises quant à l’articulation des droits à congé de maladie ordinaire, congé de longue maladie et congé de longue durée pour une affection reconnue imputable au service. Il rappelle notamment que, dès lors que les droits attachés à chacun de ces trois congés sont différents parce qu’ils se rapportent à des maladies dont la durée prévisible est très différente, il appartient à l’administration d’accorder au fonctionnaire le congé dont relève l’affection dont il est atteint, le cas échéant de sa propre initiative si le fonctionnaire n’en fait pas la demande.
Il convient néanmoins de rappeler que l’administration doit, en tout état de cause, observer les procédures consultatives prévues par le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires.
Le Conseil d’État rappelle également qu’il appartient à l’administration de prononcer l’admission d’office à la retraite d’un fonctionnaire qui est dans l’incapacité de reprendre ses fonctions après épuisement de ses droits au congé auquel lui ouvre droit son affection et qui ne demande pas son reclassement, ou dont le reclassement est impossible.
Là encore, il convient cependant de rappeler que l’admission à la retraite n’est possible qu’à la condition que le fonctionnaire remplisse les conditions pour bénéficier d’une pension ou que l’instance médicale compétente ait donné un avis favorable à une admission à la retraite pour invalidité.
Il n’en reste pas moins que cette jurisprudence du Conseil d’État n’a pas épuisé ce sujet complexe, notamment au regard du dernier alinéa du 4° de l’article 41 de la loi du 9 janvier 1986, précisé par l’article 19 du décret n° 88-386 du 19 avril 1988 (dernier alinéa de l’article 34 de la loi du 11 janvier 1984, précisé par l’article 30 du décret du 14 mars 1986 pour les fonctionnaires de l’État), qui prévoit la possibilité pour le fonctionnaire qui remplit les conditions pour bénéficier d’un congé de longue durée et qui a épuisé ses droits à congé de longue maladie rémunéré à plein traitement de demander à être maintenu en congé de longue maladie.
Dans ses conclusions sur la décision commentée, le rapporteur public proposait une interprétation de ces dispositions réglementaires, mais la Section du contentieux n’a pas eu à se prononcer sur ce point dans le litige qui lui était soumis. Nul doute que le Conseil d’État aura l’occasion prochainement de préciser sa jurisprudence sur cette question. 
Accident de service et maladie contractée en service
Avis rendus par les commissions de réforme – Obligation de comporter des mentions permettant d'identifier leurs auteurs (art. 4 de la loi DCRA) – Absence
C.E., 16 octobre 2015, n° 369907, aux tables du Recueil Lebon
Un agent administratif principal des impôts avait été victime d’un accident reconnu imputable au service. Après avoir saisi la commission de réforme départementale, son administration avait refusé de prendre en charge des actes médicaux et soins prescrits postérieurement à la date de consolidation de ses blessures. L’intéressé avait contesté cette décision devant le tribunal administratif de Nice qui avait rejeté sa demande, en écartant notamment le moyen tiré de ce que l’avis de la commission de réforme ne mentionnait pas, en violation des dispositions de l’article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le nom et la qualité du représentant du préfet ayant présidé la commission de réforme en son absence.
Le Conseil d’État a rejeté le pourvoi contre ce jugement dont il était saisi : il a rappelé que les obligations prévues par l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 ne s’imposent qu’aux décisions prises par les autorités administratives, avant de juger que les avis que rend la commission de réforme lorsqu’elle est saisie de la question de l’imputabilité au service de soins médicaux ne sont pas des décisions administratives au sens de ces dispositions, dès lors que le pouvoir de décision appartient à l’autorité administrative dont relève l’agent.
N.B. : Par cette décision, le Conseil d’État précise que seuls les actes par lesquels une autorité ou un organisme administratif manifestent l’exercice d’un pouvoir de décision sont soumis à l’obligation prévue par l’article 4 de la loi du 12 avril 2000, désormais codifié à l’article L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration. Un simple avis, comme celui qu’émet la commission de réforme, n’est pas soumis à ces dispositions. 
Droits et garanties
PROTECTION CONTRE LES ATTAQUES
Protection fonctionnelle
Refus de protection fonctionnelle – Faute personnelle commise à l’occasion des fonctions – Poursuites pénales
C.E., 30 décembre 2015, n° 391798, Commune de Roquebrune-sur-Argens, aux tables du Recueil Lebon
C.E., 30 décembre 2015, n° 391800, Commune de Roquebrune-sur-Argens, aux tables du Recueil Lebon
Par deux délibérations des 15 janvier et 19 février 2015, le conseil municipal de la commune de Roquebrune-sur-Argens avait accordé à son maire la protection fonctionnelle prévue à l'article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales au titre, d’une part, de l’appel formé par celui-ci contre le jugement du tribunal correctionnel de Draguignan du 16 juillet 2014 le condamnant pour détournement de biens publics, en application de l’article 432-15 du code pénal et, d’autre part, de l’appel contre le jugement du tribunal correctionnel de Draguignan du 17 novembre 2014 le condamnant pour avoir tenu, lors d'une réunion publique ayant eu lieu le 12 novembre 2013, des propos constitutifs de provocation à la haine ou à la violence en raison de l'origine, l'ethnie, la nation, la race ou la religion.
Par la voie du déféré, le préfet du Var avait demandé au tribunal administratif de Toulon la suspension de ces deux délibérations. Par ordonnances des 7 et 26 mars 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon avait fait droit à ces demandes de suspension, lesquelles avaient été confirmées par le juge des référés de la cour administrative d’appel de Marseille par ordonnances du 2 juillet 2015.
Saisi par la commune de Roquebrune-sur-Argens en tant que juge de cassation, le Conseil d’État a annulé les ordonnances du juge des référés de la cour administrative d’appel de Marseille en date du 2 juillet 2015, avant de régler ces affaires au fond au titre de l’appel en rejetant les requêtes de la commune de Roquebrune-sur-Argens contre les ordonnances du juge des référés du tribunal administratif de Toulon, en retenant « que (…) présentent le caractère d’une faute personnelle détachable des fonctions de maire des faits qui révèlent des préoccupations d’ordre privé, qui procèdent d’un comportement incompatible avec les obligations qui s’imposent dans l’exercice de fonctions publiques ou qui, eu égard à leur nature et aux conditions dans lesquelles ils ont été commis, revêtent une particulière gravité ; qu’en revanche, ni la qualification retenue par le juge pénal ni le caractère intentionnel des faits retenus contre l’intéressé ne suffisent par eux-mêmes à regarder une faute comme étant détachable des fonctions et justifiant dès lors que le bénéfice du droit à la protection fonctionnelle soit refusé au maire qui en fait la demande ».
Dans la première décision, il était reproché au maire d’avoir fait prendre en charge par le budget de sa commune deux véhicules luxueux ainsi que des dépenses en carburant pour son usage personnel et celui d’un membre de sa famille. Le Conseil d’État a considéré que « ces faits (…) révèlent des préoccupations d’ordre privé » et constituent donc une faute personnelle justifiant un refus de protection fonctionnelle.
Dans la seconde décision, il était reproché au maire d’avoir tenu devant une assemblée des propos virulents en déclarant à propos de départs de feux au sein d’un camp de personnes d’origine rom sur le territoire communal : « Ce qui est presque dommage, c’est qu’on ait appelé trop tôt les secours. » Pour qualifier ces propos de faute personnelle justifiant un refus de protection fonctionnelle, le Conseil d’État a considéré que, « eu égard à leur gravité et à leur nature, [de tels propos sont] incompatible[s] avec les obligations qui s’imposent dans l’exercice de fonctions publiques ».
N.B. : Dans sa rédaction applicable à la date des décisions en litige, l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 prévoyait que : « (…) La collectivité publique est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire ou à l'ancien fonctionnaire dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle (...). »
Pour les agents publics qui ne bénéficient pas de cette disposition, le Conseil d’État a relevé que l'obligation de protection qui incombe à une administration envers l'un de ses agents est un principe général du droit (C.E. Section, 26 avril 1963, Centre hospitalier de Besançon, n° 42783, au Recueil Lebon).
Le Conseil d’État a rappelé les critères permettant de définir la notion de faute personnelle justifiant le rejet d’une demande de protection fonctionnelle. Ainsi, la faute personnelle d’un agent de l’État s’établit eu égard à sa nature et à sa particulière gravité, « aux conditions dans lesquelles elle a été commise, aux objectifs poursuivis par son auteur et aux fonctions exercées par celui-ci ». C’est pourquoi, eu égard au niveau hiérarchique de l’agent et du caractère inexcusable de la faute commise, a été qualifié de faute personnelle le fait pour un chef de service hospitalier de cacher une erreur médicale commise dans son service (C.E., 28 décembre 2001, n° 213931, au Recueil Lebon).
Le Conseil d’État a également indiqué que lorsqu’est caractérisée une faute personnelle justifiant le refus de protection fonctionnelle à son auteur en tant qu’agent public, l’administration peut néanmoins voir sa responsabilité engagée parallèlement à la responsabilité de l’auteur de la faute personnelle, dans la mesure où celle-ci a été « commise à l’occasion de l’exercice des fonctions » et n’est pas dépourvue de lien avec le service (C.E. Assemblée, 12 avril 2002, n° 238689, au Recueil Lebon). 
Rémunérations, traitement et avantages en nature
QUESTIONS PROPRES AUX AGENTS AFFECTÉS DANS LES (OU ORIGINAIRES DES) DOM/ROM/COM
Détachement auprès du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie – Bénéfice de l’indemnité d’éloignement (non)
T.A. Nouvelle-Calédonie, 25 février 2016, n° 1500179
Précédemment affectée dans l’académie de Bordeaux, Mme X, inspectrice de l’éducation nationale, avait été détachée à compter du 1er novembre 2014 auprès du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie par un arrêté ministériel du 29 octobre 2014. L’article 2 de cet arrêté prévoyait que l’intéressée était admise au bénéfice de l’indemnité d’éloignement, en application du décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 relatif à l’attribution de l’indemnité d’éloignement aux magistrats et aux fonctionnaires titulaires et stagiaires de l’État en service à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. Par l’article 2 d’un arrêté ultérieur du 12 novembre 2014, le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche avait cependant rapporté ces dernières dispositions, retirant à Mme X le bénéfice de l’indemnité d’éloignement.
Mme X demandait l’annulation de l’article 2 de ce dernier arrêté.
Le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a d’abord rappelé « qu’il résulte [de la combinaison des] dispositions [de l’article 1er du décret n° 96-1028 du 27 novembre 1996 et de l’article 1er du décret n° 96-1026 du 26 novembre 1996 relatif à la situation des fonctionnaires de l’État et de certains magistrats dans les territoires d’outre-mer de Nouvelle-Calédonie, de Polynésie française et de Wallis-et-Futuna] que l’indemnité d’éloignement instituée par le décret du 27 novembre 1996 ne peut être versée qu’aux agents qui entrent dans le champ d’application du décret du 26 novembre 1996, c’est-à-dire aux fonctionnaires de l’État ou aux magistrats qui sont en position d’activité ou détachés auprès d’une administration ou d’un établissement public de l’État ».
Le tribunal a ensuite relevé que « si Mme X a bien la qualité de fonctionnaire de l’État, en revanche, elle n’a pas été détachée auprès d’une administration ou d’un établissement public de l’État, mais auprès du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ».
Il en a conclu « que, par suite, le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche avait compétence liée pour rapporter la décision qui avait admis cet agent au bénéfice de l’indemnité d’éloignement ». 
Discipline
PROCÉDURE
Personnels enseignants – Discipline – Procédure – Avis émis par le conseil de discipline – Mode de scrutin – Vote à bulletin secret
C.A.A. Bordeaux, 20 octobre 2015, n° 13BX02919
Le requérant, professeur des écoles, avait demandé au tribunal administratif de Saint-Denis l’annulation d’un arrêté rectoral du 16 mars 2012 lui infligeant la sanction disciplinaire du déplacement d’office. Le tribunal administratif avait rejeté sa demande.
Saisie en appel par le requérant, la cour administrative d’appel de Bordeaux a confirmé ce jugement.
Les juges d’appel ont rappelé qu’il résulte des dispositions de l’article 32 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires que le vote a lieu à main levée, sauf si un membre de la commission a demandé qu’il soit procédé au vote à bulletin secret.
Ils ont ensuite relevé que la circonstance que le vote sur la proposition de sanction infligée au requérant, qui avait recueilli 16 voix « pour » et 3 abstentions, ait eu lieu à bulletin secret sans que cela ait été demandé par un membre de la commission n’était pas de nature à priver l’intéressé d’aucune garantie.
N.B. : Le conseil de discipline opte pour le mode de scrutin de son choix. Aucune règle générale de procédure disciplinaire ne lui impose d’émettre son avis au scrutin secret (cf. C.E., 17 avril 1970, Sieur X, n° 76730, au Recueil Lebon). Toutefois, si l’un des membres de la commission en fait la demande, il est procédé au vote à bulletin secret. L’article 32 du décret du 28 mai 1982 n’érige donc pas en garantie un mode de scrutin particulier.
Au demeurant, si un mode de scrutin particulier pouvait être considéré comme jouant objectivement le rôle d’une garantie procédurale, ce serait le vote à bulletin secret, qui permet l’anonymat des votes exprimés. De manière générale, l’enjeu principal d’un vote à bulletin secret est en effet d’assurer que chaque électeur exprime un choix en empêchant toute tentative d’influence.
Le requérant n’a donc pas été privé d’une garantie procédurale au sens de la jurisprudence Danthony (C.E. Assemblée, 23 décembre 2011, n° 335033, au Recueil Lebon).
Par ailleurs, l’irrégularité constituée par le recours au scrutin secret n’a pas pu exercer d’influence sur le sens de la décision émise à la suite de l’avis du conseil de discipline, dans la mesure où l’expression du point de vue de chaque membre du conseil de discipline à travers son vote n’a pas été altérée par ce mode de scrutin (a contrario, cf. la décision Danthony où l’altération d’une expression de point de vue a justement constitué un vice dans le déroulement de la procédure, susceptible d’exercer une influence sur le sens d’une délibération). 
Questions propres aux agents non titulaires
RECRUTEMENT
Agent non titulaire – Transformation du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée en application de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 – Notion de « même autorité publique » – Faisceau d’indices – Succession formelle d’employeurs différents – Affectation de manière continue, dans un domaine déterminé, à l’exécution d’un même service public
C.A.A. Marseille, 2 octobre 2015, n° 14MA04454
Le requérant interjetait appel du jugement par lequel le tribunal administratif avait rejeté sa requête tendant à l’annulation de la décision du président de l’université Montpellier-II ayant rejeté sa demande tendant à la transformation de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en application de l’article 8 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, lequel article subordonne cette transformation de contrat « à une durée de services publics effectifs, accomplis auprès du même département ministériel, de la même autorité publique ou du même établissement public, au moins égale à six années au cours des huit années précédant la publication de la présente loi ».
La cour administrative d’appel a fait droit à son appel en jugeant « qu’il appartient au juge administratif de rechercher, en recourant à la méthode du faisceau d’indices, qui peut être désigné comme l’employeur d’un agent public ; que ces indices peuvent être trouvés dans les conditions d’exécution du contrat concernant l’affectation exclusive et permanente dans un service, les tâches confiées relevant des missions habituelles du service, et dans l’existence ou non d’un lien de subordination vis-à-vis du chef de service concerné ; que lorsque l’agent est affecté de manière continue, dans un domaine déterminé, à l’exécution du même service public de la recherche bénéficiant à la fois à une université et au Centre national de la recherche scientifique, la circonstance qu’il ait été successivement employé, formellement, par plusieurs employeurs et pour le compte de plusieurs organismes publics ne fait pas obstacle à ce qu’il soit regardé comme ayant effectué son service sous une même autorité publique (…) ».
La cour a ensuite retenu « que M. X a été rémunéré par la Ligue nationale contre le cancer entre le 1er avril 2005 et le 31 décembre 2006, puis a été employé successivement, du 1er janvier 2007 au 28 février 2010, par des contrats à durée déterminée successifs conclus avec l’Institut national de la santé et de la recherche médicale [INSERM], du 1er mars 2010 (…) au 31 mars 2011, par des contrats à durée déterminée conclus avec le Centre national de la recherche scientifique [C.N.R.S.] (…), et enfin, du 1er avril 2011 au 31 mars 2013, par un contrat à durée déterminée conclu avec l’université de Montpellier-II (…) ».
Elle a relevé « d’une part, qu’au cours de la période courant entre le 1er avril 2005 et le 30 mars 2010, M. X a exercé les mêmes fonctions, dans la même équipe de recherche, sous l’autorité du même directeur de recherche, au centre de recherche de biologie macromoléculaire constituant l’unité mixte de recherche n° 5237, sous la double tutelle de l’université Montpellier-II et du C.N.R.S. (…) ; que, d’autre part, à partir du 1er avril 2011, l’intéressé a poursuivi ses recherches dans le même domaine de la recherche relative au cycle cellulaire, à l’institut de génétique humaine formant une unité propre de recherche du C.N.R..S, tout en étant cette fois employé en qualité d’agent contractuel de l’université Montpellier-II ».
La cour en a conclu « [que], nonobstant la circonstance qu’au cours de la période courant entre le 1er avril 2005 et le 2 janvier 2013, il ait formellement été employé par des employeurs différents, (...) M. X a exercé de façon ininterrompue le même emploi de chercheur en biologie macromoléculaire, sous l’autorité conjointe de l’université Montpellier-II et du C.N.R.S., et que le requérant justifiait donc le 13 mars 2012, date de la publication de la loi du 12 mars 2012, de plus de six ans de services publics auprès de la même autorité publique au cours des huit dernières années, au sens de l’article 8 de cette loi, aussi bien que de six ans de contrats à durée déterminée sans interruption de plus de quatre mois, au sens de l’article 6 bis de la loi [n° 84-16] du 11 janvier 1984 ; qu’il pouvait donc prétendre, sur le fondement de chacun de ces deux textes, à ce que son employeur d’alors, l’université Montpellier-II, lui propose la signature d’un contrat à durée indéterminée ».
N.B. : Cet arrêt est à rapprocher du jugement n°s 1208556, 1208668 et 1211336 rendu le 12 mars 2013 par le tribunal administratif de Nantes (cf. LIJ n° 175, mai 2013), mais également de l’avis n° 229811-229810 du 16 mai 2001 (au Recueil Lebon) par lequel le Conseil d’État a considéré que, lorsque le titulaire d’un contrat de travail soutient que son véritable employeur n’est pas l’organisme avec lequel il a signé ce contrat, mais l’État auprès duquel l’organisme l’a affecté : « Il appartient au juge administratif (...) de rechercher, en recourant à la méthode du faisceau d’indices, si l’État peut être désigné comme l’employeur. Ces indices pourront être trouvés dans les conditions d’exécution du contrat : affectation exclusive et permanente dans un service de l’État, tâches confiées relevant des missions habituelles du service (...) [ou] dans l’existence ou non d’un lien de subordination vis-à-vis du chef du service concerné : responsabilité et surveillance de ce chef de service, directives, conditions et horaires de travail imposés par ce dernier (...). »
De même, il appartient au juge administratif de rechercher si les différents employeurs successifs d’un agent contractuel ne relèvent pas d’une même autorité publique. Ainsi, dans un arrêt du 26 novembre 2015 (n° 14PA00842), la cour administrative d’appel de Paris avait jugé qu’un agent employé par les services du Premier ministre pour remplir une mission au sein d’un conseil intéressant l’activité d’un ministère dans lequel il avait été précédemment employé ne pouvait être regardé comme ayant relevé de la même autorité dès lors que le ministère intéressé n’exerçait pas un pouvoir de direction ou de tutelle sur ledit conseil.
Le législateur a repris à son compte cette jurisprudence dans la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires dont l’article 40 vient préciser sur ce point la loi du 12 mars 2012, en modifiant :
– les avant-dernier et dernier alinéas de l’article 8 de cette loi du 12 mars 2012, afin de rendre applicable, pour le décompte de l’ancienneté de services publics effectifs requise pour que soit proposée par l’administration la transformation d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la disposition prévue à l’avant-dernier alinéa du I de l’article 4 de cette même loi, aux termes de laquelle : « Le bénéfice de cette ancienneté est (…) conservé aux agents qui, bien que rémunérés successivement par des départements ministériels, autorités publiques ou personnes morales (…) distincts, continuent de pourvoir le poste de travail pour lequel ils ont été recrutés » ;
– cet avant-dernier alinéa du I de l’article 4 de la loi du 12 mars 2012, pour préciser que les personnes morales employeurs sont celles « mentionnées à l’article 2 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 » : État, régions, départements, communes et leurs établissements publics, y compris hospitaliers. 
LICENCIEMENT – NON-RENOUVELLEMENT D’ENGAGEMENT
Agent contractuel – Refus de renouveler un contrat – Régularisation en cours d’instance – Autorisation du conseil d’administration de l’établissement
T.A. Strasbourg, 12 novembre 2015, n° 1305094
M. X, recruté en tant qu’assistant d’éducation par un collège, s’était vu notifier par la principale de ce collège son intention de ne pas procéder au renouvellement de son contrat à son échéance, décision contre laquelle il avait formé un recours gracieux qui avait été rejeté. Il avait alors saisi le tribunal administratif de Strasbourg d’une requête tendant à l’annulation de cette décision.
La principale du collège avait présenté un premier mémoire en défense, sans disposer au préalable de l’autorisation nécessaire du conseil d’administration du collège. Ce dernier l’avait autorisée a posteriori à ester en justice. Le requérant soutenait que la délibération étant postérieure au mémoire en défense, elle ne pouvait avoir pour effet de le régulariser.
Le tribunal, qui a rejeté la requête de M. X, a ainsi eu l’occasion d’apporter certaines précisions sur le rôle du conseil d’administration.
Il a d’abord rappelé « qu’il appartient à tout moment au conseil d’administration d’un établissement public local d’enseignement de régulariser en cours d’instance, s’il en décide ainsi, un mémoire en défense que le chef d’établissement avait présenté au nom de l’établissement sans y être expressément habilité », en vertu des dispositions de l’article R. 421-20 du code de l’éducation.
Il a en conséquence considéré « que, (…) [en autorisant] le chef d’établissement à ester en justice aussi bien en demande qu’en défense pour l’année scolaire 2014-2015, (…) [le conseil d’administration avait] entendu régulariser le mémoire (…) [présenté fin 2013] en défense (…) dans le cadre [du] litige toujours en instance pendant l’année scolaire 2014-2015 ».
Il a par ailleurs rappelé qu’en vertu du même article R. 421-20 du code de l’éducation, aucune autorisation préalable du conseil d’administration du collège n’est imposée au chef d’établissement pour prendre la décision de refuser le renouvellement d’un contrat à durée déterminée arrivé à son terme.
N.B. : Il est de jurisprudence constante que le défaut de mandat pour représenter un établissement en justice est régularisable à tout moment de l’instance (cf. C.A.A. Versailles, 24 mars 2005, n° 02VE00973) et que cette régularisation n’entache pas la recevabilité des demandes présentées ou des mémoires produits (C.A.A. Paris, 10 février 2015, n° 13PA00487). 
QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT SCOLAIRE
Personnels enseignants
QUESTIONS COMMUNES
Enseignants titulaires sur zone de remplacement – Possibilité de dispenser un enseignement en dehors de leur spécialité – Existence – Condition – Caractère accessoire de l’activité d’enseignement assurée en dehors de la spécialité
T.A. Lille, 16 février 2016, n° 1206688
T.A. Lille, 8 mars 2016, n° 1300438
M. X, professeur certifié de physique et d’électricité appliquée, affecté en qualité de titulaire sur zone de remplacement, demandait l’annulation de deux décisions d’affectation du recteur de l’académie de Lille comportant un complément de service dans un enseignement différent de sa spécialité d’enseignement.
Dans la première affaire, il sollicitait l’annulation de la décision du recteur de l’académie de Lille l’affectant dans un lycée situé dans sa zone de remplacement pour effectuer un service hebdomadaire d’enseignement de 12 heures 30 en sciences physiques et chimie.
Dans la seconde, il demandait l’annulation de la décision du recteur de l’académie de Lille l’affectant dans un lycée situé dans une zone de remplacement limitrophe de sa zone de remplacement d’affectation pour effectuer un service hebdomadaire d’enseignement de 8 heures en mathématiques-sciences physiques.
Dans les deux jugements commentés, le tribunal a d’abord cité les dispositions alors en vigueur du 2° de l’article 3 du décret n° 50-581 du 25 mai 1950 portant règlement d’administration publique pour la fixation des maximums de service hebdomadaire du personnel enseignant des établissements d’enseignement du second degré, aux termes desquelles : « Les professeurs qui n'ont pas leur maximum de service dans l'enseignement de leur spécialité et qui ne peuvent pas le compléter dans un autre établissement d'enseignement public de la même ville peuvent être tenus, si les besoins du service l'exigent, de participer à un enseignement différent. Toutefois, les heures disponibles doivent, autant qu'il est possible, être utilisées de la manière la plus conforme à leurs compétences et à leurs goûts. »
Le tribunal a rappelé « qu’il résulte de ces dispositions que les enseignants du second degré assurent, à titre principal, leurs obligations de service dans l’enseignement de leur spécialité et ne peuvent être amenés à participer à un enseignement différent qu’à titre accessoire, lorsqu’ils ne peuvent assurer leur maximum de service dans leur spécialité ».
Il a ensuite retenu « que le décret [n° 99-823] du 17 septembre 1999 relatif à l’exercice des fonctions de remplacement dans les établissements d’enseignement du second degré prévoit que les personnels enseignants qu’il vise “peuvent être chargés, dans le cadre de l’académie et conformément à leur qualification, d’assurer le remplacement de professeurs momentanément absents ou d’occuper un poste provisoirement vacant” au sein de la zone de remplacement dans laquelle ils sont affectés, éventuellement de la zone limitrophe ; que si le pouvoir réglementaire a soumis ces personnels à un régime particulier, en permettant notamment qu’ils remplissent, entre deux remplacements, leurs obligations de service par des activités autres que des activités d’enseignement proprement dites, il n’a pas entendu les soustraire à l’obligation statutaire selon laquelle l’activité d’enseignement doit s’effectuer à titre principal dans la spécialité de l’enseignant, la participation à un autre enseignement ne pouvant être qu’accessoire ; que, toutefois, les contraintes particulières liées à l’activité de remplacement, notamment le caractère fréquemment discontinu des affectations du fait du caractère provisoire des vacances de poste ou momentané des absences des enseignants titulaires qu’ils sont appelés à remplacer, autorisent le recteur à confier à ces enseignants, même lorsqu’ils n’effectuent aucun enseignement dans leur spécialité, faute de poste vacant ou de titulaire absent, un enseignement en dehors de leur spécialité, conformément à leurs qualifications, dès lors que celui-ci demeure accessoire ».
Dans la première affaire, le tribunal a jugé qu’il résultait de ces dispositions qu’en lui confiant un enseignement dans une discipline qui n’était pas la sienne, non pas à titre accessoire mais pour 12 heures 30 par semaine sur un total de 18 heures de service d’enseignement hebdomadaires dues, soit plus de la moitié des obligations de service d'enseignement auxquelles était astreint M. X en sa qualité de professeur certifié, le recteur de l’académie de Lille avait méconnu les dispositions précitées du 2° de l’article 3 du décret du 25 mai 1950.
Il a, en conséquence, annulé la décision attaquée.
Dans la seconde affaire, le juge a, en revanche, estimé qu’eu égard au caractère accessoire que revêtait le service hebdomadaire de remplacement en sciences physiques de 8 heures confié au requérant, dont les obligations de service d’enseignement hebdomadaires s’élevaient à 18 heures, ce remplacement n’était pas contraire aux dispositions du décret n° 50-581 du 25 mai 1950, alors même qu’il n’avait pas été confié préalablement ou concomitamment à l’intéressé un service d’enseignement à titre principal dans sa spécialité.
Il a enfin considéré que la circonstance que l’intéressé bénéficiait d’une décharge de service pour activité syndicale de 4 heures 30 était sans incidence sur le caractère accessoire de l’enseignement en cause, qui s’apprécie au regard de l’obligation statutaire de service.
Il a, en conséquence, jugé que M. X n’était pas fondé à soutenir que la décision attaquée avait été prise en méconnaissance des dispositions du 2° de l’article 3 du décret du 25 mai 1950.
N.B. : Ces décisions s’inscrivent dans la continuité de la jurisprudence du Conseil d’État sur la notion de « caractère accessoire » de l’activité d’enseignement exercée en dehors de sa spécialité par le professeur titulaire sur zone de remplacement (T.Z.R.), dont elles reprennent les considérants de principe.
Une durée hebdomadaire inférieure à la moitié des obligations statutaires de service d’enseignement du professeur est jugée comme demeurant « à caractère accessoire ». La durée de l’enseignement assurée hors de la spécialité du professeur s’appréciant au regard de l’obligation statutaire de service d’enseignement, la circonstance que l’intéressé n’effectue aucun enseignement dans sa spécialité ou bénéficie d’une décharge de service pour activité syndicale, comme en l’espèce, est donc sans incidence sur le caractère accessoire de l’enseignement en cause (cf. C.E., 12 mars 2014, n° 362752, aux tables du Recueil Lebon, LIJ n° 183, mai 2014).
Il convient de signaler que les dispositions du II de l’article 4 du décret n° 2014-940 du 20 août 2014, qui prévoient depuis le 1er septembre 2015 la possibilité de confier aux enseignants du second degré un enseignement en dehors de leur spécialité, conservent une rédaction proche de celle des dispositions du 2° de l’article 3 du 25 mai 1950, abrogées à compter de la même date. La jurisprudence ne devrait donc pas évoluer sur ce point. 
QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT UNIVERSITAIRE
Enseignants-chercheurs
QUESTIONS COMMUNES
Enseignants-chercheurs – Recrutement – Mutation pour rapprochement de conjoints – Avis du conseil académique – Exigence de motivation
C.E., 9 mars 2016, n° 391508, aux tables du Recueil Lebon
Un professeur des universités demandait l’annulation de la délibération du conseil académique d’une université ayant refusé de transmettre au conseil d’administration sa candidature à deux postes ouverts dans cette université, présentée par la voie de mutation pour rapprochement de conjoints.
Le Conseil d’État a tout d’abord rappelé les dispositions de l’article 9-3 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences, qui prévoient que : « Par dérogation à l'article 9-2, le conseil académique ou l'organe compétent pour exercer les attributions mentionnées au IV de l'article L. 712-6-1 [du code de l’éducation], en formation restreinte, examine les candidatures à la mutation et au détachement des personnes qui remplissent les conditions prévues aux articles 60 et 62 de la loi [n° 84-16] du 11 janvier 1984 [portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État], sans examen par le comité de sélection. Si le conseil académique retient une candidature, il transmet le nom du candidat sélectionné au conseil d'administration. Lorsque l'examen de la candidature ainsi transmise conduit le conseil d'administration à émettre un avis favorable sur cette candidature, le nom du candidat retenu est communiqué au ministre chargé de l'enseignement supérieur. L'avis défavorable du conseil d'administration est motivé. Lorsque la procédure prévue au premier alinéa n'a pas permis de communiquer un nom au ministre chargé de l'enseignement supérieur, les candidatures qui n'ont pas été retenues par le conseil académique ou qui ont fait l'objet d'un avis défavorable du conseil d'administration sont examinées avec les autres candidatures par le comité de sélection selon la procédure prévue à l'article 9-2. »
Le Conseil d’État a ensuite constaté que « les avis défavorables du conseil académique sur les candidatures de [l’enseignant-chercheur], qui sont des décisions susceptibles d’être déférées devant le juge de l’excès de pouvoir, se bornent à indiquer que le conseil académique siégeant en formation restreinte n’a pas retenu sa candidature et que son dossier a été transmis au comité de sélection ».
Il a alors jugé que le requérant était fondé à soutenir que ces délibérations étaient insuffisamment motivées et à en demander, pour ce motif, l’annulation.
Enfin, le Conseil d’État a jugé que l’exécution de sa décision impliquait de « reprendre [la procédure de recrutement sur chacun des postes] en procédant à l’examen par le conseil académique des candidatures présentées par [le requérant] au titre de l’article 9-3 du décret du 6 juin 1984, sous réserve que ces postes n’aient pas été pourvus par l’effet de décisions devenues définitives ».
N.B. : Par cette décision, le Conseil d’État est amené pour la première fois à connaître de la procédure dérogatoire prévue par l’article 9-3 du décret du 6 juin 1984, créé par l’article 10 du décret n° 2014-997 du 2 septembre 2014, pour permettre notamment de prendre en compte les mutations prioritaires pour rapprochement de conjoints (cf. article 60 de la loi du 11 janvier 1984).
Cette procédure, qui fait intervenir directement le conseil académique sans intervention préalable du comité de sélection, puis, si le conseil académique retient une candidature, le conseil d’administration et, enfin, si cette candidature est elle-même acceptée par le conseil d’administration, le ministre, est décrite à l’annexe 3 de la circulaire n° 2015-0013 du 4 mai 2015, publiée au Bulletin officiel de l’enseignement supérieur et de la recherche n° 20 du 14 mai 2015.
Le comité de sélection est amené à intervenir, ainsi que le prévoit l’article 9-3, dans le cas où la procédure prévue par cet article ne permet pas de communiquer un nom au ministre. Dans ce cas, la procédure « classique » prend le relais, indépendamment des avis qui auront été émis dans le cadre de la procédure dérogatoire.
À cet égard, dans un avis n° 20151568 du 4 juin 2015, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) a précisé que « l’acte par lequel le conseil académique décide, dans le cadre de l’examen prioritaire de certaines candidatures organisé par l’article 9-3 du décret, de ne pas retenir une candidature met fin, pour le candidat concerné, à toute possibilité d’être recruté dans le cadre de cet examen prioritaire (…). Le recrutement éventuel du même candidat à l’issue de la procédure ordinaire d’examen des candidatures par les instances universitaires locales, qui n’a lieu d’être organisée que dans le cas d’une procédure d’examen prioritaire restée infructueuse, ne saurait reposer sur le premier avis négatif du conseil académique, mais seulement sur de nouveaux avis, favorables, du comité de sélection, du conseil académique et du conseil d’administration ».
En jugeant par sa décision du 9 mars 2016 que l’avis défavorable rendu par le conseil académique doit être motivé, le Conseil d’État dissipe toute ambiguïté au regard des termes de l’article 9-3 qui, s’ils prévoient que l’avis défavorable du conseil d’administration doit être motivé, sont toutefois muets au sujet de l’avis du conseil académique.
La circulaire du 4 mai 2015 précise que l’avis défavorable du conseil académique sur une candidature doit être motivé « par des considérations liées à l’adéquation de celle-ci au profil du poste » et que « cette motivation doit être détaillée » (cf. C.E., 14 novembre 2013, n° 363969). 
Responsabilité
QUESTIONS GÉNÉRALES
Mise en cause de la responsabilité de l’administration
Responsabilité de l’administration – Réparation du dommage – Recours contre les tiers
C.E. Assemblée, 9 novembre 2015, Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) et association Centre lyrique d'Auvergne, n° 359548, au Recueil Lebon
C.E. Assemblée, 9 novembre 2015, S.A.S. Constructions mécaniques de Normandie, n° 342468, au Recueil Lebon
Par ses deux décisions n° 359548 (MAIF et association Centre lyrique d'Auvergne) et n° 342468 (S.A.S. Constructions mécaniques de Normandie), le Conseil d’État a précisé les conditions dans lesquelles un employeur condamné à raison d’accidents ou de maladies professionnelles de ses salariés pouvait se retourner ou non contre l’État du fait de l’insuffisance des règles de sécurité et de protection de la santé dans les entreprises.
Dans la première affaire (n° 359548), un électricien employé par une association avait été victime d’un accident du travail dans une salle mise à la disposition de cette association par une commune. Le tribunal des affaires de sécurité sociale du Puy-de-Dôme avait jugé que l’accident du travail de cet électricien résultait d’une faute inexcusable de son employeur au sens de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, et avait condamné ce dernier à l’indemniser.
L’association et son assureur avaient alors demandé au tribunal administratif, puis à la cour administrative d’appel que la commune soit condamnée à prendre à sa charge cette indemnisation. Leur demande, puis leur appel ayant été rejetés, ils avaient formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’État.
Le Conseil d’État a admis pour la première fois que même lorsqu’il commettait un manquement à ses obligations de sécurité et de protection de la santé de ses employés, qualifié de faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, l’employeur pouvait se retourner contre l’administration si celle-ci avait également commis une faute à l’origine du dommage. Cette solution s’inscrit dans la ligne de la jurisprudence de la Cour de cassation, qui a élargi la notion de faute inexcusable de l’employeur, mais qui juge que celui-ci peut, même dans le cas où il a commis une faute inexcusable, se retourner contre un tiers qui aurait contribué à la réalisation du dommage.
Le Conseil d’État a indiqué, en revanche, que dans l’hypothèse où l’employeur aurait délibérément commis une faute d’une particulière gravité, il ne pourrait utilement demander que la charge de la réparation soit partagée par l’administration, même en faisant valoir que celle-ci avait également commis une faute.
Dans la deuxième affaire (n°342468), étaient en cause des salariés d’une entreprise du secteur de la construction navale, victimes de maladies professionnelles liées à leur exposition aux poussières d’amiante. Ces salariés avaient été admis au bénéfice de l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, et l’entreprise avait été condamnée à rembourser à l’assurance maladie des sommes que cette dernière avait versées à certains de ses salariés atteints d’une maladie professionnelle liée à l’amiante.
L’entreprise avait alors invoqué la carence des pouvoirs publics dans l’exercice de leur mission de prévention des risques professionnels jusqu’en 1996, date à partir de laquelle la fabrication et la vente de l’amiante avaient été interdites, et avait demandé à l’État de l’indemniser des préjudices qu’elle estimait avoir subis et de prendre à sa charge les condamnations prononcées à son encontre. Elle avait porté l’affaire devant le tribunal administratif, puis devant la cour administrative d’appel qui avaient successivement rejeté sa demande et son appel. Elle s’était alors pourvue en cassation devant le Conseil d’État.
Après avoir annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel, lui aussi entaché d’une erreur de raisonnement au regard du cadre juridique précédemment exposé, le Conseil d’État a réglé définitivement l’affaire, ce qui permet d’illustrer le raisonnement qu’il tient dans le cadre de cette jurisprudence.
Il a d’abord rappelé les responsabilités respectives de l’État et de l’employeur, considérant que :
« (…) en application de la législation du travail, désormais codifiée à l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur a l’obligation générale d’assurer la sécurité et la protection de la santé des travailleurs placés sous son autorité (…) » ;
« [les] autorités publiques chargées de la prévention des risques professionnels [doivent] se tenir informées des dangers que peuvent courir les travailleurs dans le cadre de leur activité professionnelle, compte tenu notamment des produits et substances qu’ils manipulent ou avec lesquels ils sont en contact, et d'arrêter, en l’état des connaissances scientifiques et des informations disponibles, au besoin à l’aide d’études ou d’enquêtes complémentaires, les mesures les plus appropriées pour limiter et, si possible, éliminer ces dangers ».
Le Conseil d’État a ensuite distingué deux périodes pour répartir la réparation du dommage entre la société employeur et l’État :
– Concernant la période précédant l’entrée en vigueur du décret n° 77-949 du 17 août 1977 relatif aux mesures d’hygiène particulières applicables dans les établissements où le personnel est exposé à l’action des poussières d’amiante, le Conseil d’État a jugé, d’une part, que « la société requérante est fondée à soutenir qu’en s’abstenant de prendre (…) des mesures propres à éviter ou, du moins, limiter les dangers liés à une exposition à l’amiante, l’État a commis une faute de nature à engager sa responsabilité », mais que, d’autre part, « la société requérante a [également] commis une faute en s’abstenant de prendre des mesures de nature à protéger ses salariés » et que « cette faute n’a pas le caractère d’une faute d’une particulière gravité délibérément commise, qui ferait obstacle à ce que cette société puisse se prévaloir de la faute de l’administration ». Il a donc procédé à un partage de responsabilité à hauteur de deux tiers pour la société et un tiers pour l’État ;
– Concernant la période postérieure à 1977, le Conseil d’État a relevé que les évolutions réglementaires avaient été de nature à réduire les risques de maladies professionnelle, alors que la société n’avait pas respecté la réglementation applicable et que certains de ses salariés, amenés notamment à intervenir pour des réparations sur des bateaux garnis d’amiante, « [avaient] continué d’être exposés aux poussières d’amiante sans protection appropriée ».
Il a estimé, dans ces conditions, que « la société requérante n’établi[ssait] pas (…) que les maladies professionnelles que ses salariés ont développées du fait d’une exposition à l’amiante postérieure à 1977 trouveraient directement leur cause dans une carence fautive de l’État à prévenir les risques liés à l’usage de l’amiante à cette époque, pour les activités de la nature de celles qu’elle exerçait » et il a refusé le partage de responsabilité avec l’État qu’elle demandait.
En raison du partage de responsabilité entre l’État et la société pour la période antérieure à 1977, le Conseil d’État a condamné l’État à verser à la société une somme de 350 000 euros. 
Procédure contentieuse
RECEVABILITÉ DES REQUÊTES
Actes susceptibles de recours – Mesure d’ordre intérieur – Retrait de responsabilités
C.E., 7 octobre 2015, n° 377036, aux tables du Recueil Lebon
Un professeur des universités-praticien hospitalier s’était vu retirer ses responsabilités d’animation et de coordination d’une sous-section d’odontologie pédiatrique d’une faculté de chirurgie dentaire et ses responsabilités de référent de l’unité d’activité médicale clinique d’odontologie pédiatrique. L’intéressé s’était pourvu en cassation contre deux jugements par lesquels le tribunal administratif, après avoir considéré que les décisions en cause revêtaient le caractère de mesures d’ordre intérieur insusceptibles de recours, avait rejeté ses demandes d’annulation des décisions lui ayant retiré ses responsabilités.
Le Conseil d’État a tout d’abord rappelé « que les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours ; qu'il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent perte de responsabilités ou de rémunération ; que le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination, est irrecevable ».
Il a alors considéré qu’en se fondant « sur les seules circonstances que [les] décisions [attaquées] n'avaient pas modifié la rémunération de [l’intéressé], n'avaient pas porté atteinte à son statut de professeur des universités-praticien hospitalier et n'avaient porté aucune atteinte à ses perspectives de carrière ou à une garantie attachée au déroulement de sa carrière » pour retenir que les décisions de retrait de responsabilités revêtaient le caractère de mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours, et « qu'en ne prenant pas en compte, pour apprécier le caractère d'acte faisant grief des décisions attaquées, la perte de responsabilité dont la requérante faisait état devant lui », le tribunal administratif « a entaché ses jugements d'erreurs de droit ».
Le Conseil d’État a alors jugé « que, [en l’espèce,] ces décisions comportaient l'une et l'autre une diminution sensible des attributions et des responsabilités exercées par [l’intéressé], respectivement, au sein de la faculté de chirurgie dentaire de l'université X et au sein du centre hospitalier régional universitaire Y ; [et] que, par suite, en jugeant qu'elles avaient le caractère de simples mesures d'ordre intérieur ne faisant pas grief, le tribunal administratif a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ».
Le Conseil d’État a annulé les jugements du tribunal administratif.
N.B. : Cette décision s’inscrit dans le cadre d’une jurisprudence bien établie en matière de mesure d’ordre intérieur.
Sont qualifiées de « mesures d’ordre intérieur » au regard de leurs effets sur la situation de l’agent et, par conséquent, insusceptibles de recours contentieux, les mesures qui n'affectent ni les droits et prérogatives statutaires de l'agent (cf. C.E., 12 avril 1995, n° 136914 ; C.E., 8 mars 1993, n° 112742, aux tables du Recueil Lebon), ni sa situation juridique et pécuniaire (C.E., 1er octobre 1975, n° 97752, aux tables du Recueil Lebon), ni ses perspectives de carrière ou encore ses responsabilités (C.E., 13 février 1974, n° 89271, au Recueil Lebon ; C.E., 8 mars 1993, déjà cité ; C.E., 4 décembre 2013, n° 359753, aux tables du Recueil Lebon).
À titre d’exemple, s’agissant de la perte ou diminution de responsabilités, le Conseil d’État avait jugé que « la décision du conseil scientifique de l’université X (…), qui a réduit de moitié les crédits de recherche accordés au requérant, et la décision du conseil de l’université (…), laquelle, en transférant à l’unité d’enseignement et de recherche de mathématiques la responsabilité administrative de tous les enseignements de mathématiques, a enlevé au requérant la gestion des crédits de fonctionnement qui lui étaient précédemment attribués, ne peuvent (…) être regardées comme constituant des mesures d’ordre intérieur non susceptibles de faire l’objet d’un recours contentieux » (C.E. Section, 26 avril 1978, n° 04792, au Recueil Lebon).
Toutefois, si les décisions qualifiées de mesures d’ordre intérieur sont insusceptibles de recours contentieux, en revanche, dès lors qu’elles traduisent une discrimination, ces décisions sont susceptibles de recours quels que soient leurs effets (cf. C.E., 15 avril 2015, n° 373893, au Recueil Lebon ; C.E. Section, 25 septembre 2015, n° 372624, au Recueil Lebon). 
Introduction de l’instance – Délais – Point de départ des délais – Connaissance acquise – Recours devant une juridiction incompétente – Non
C.E., 25 mars 2016, n° 387755, aux tables du Recueil Lebon
La mission locale régionale de Guyane, un groupement d’intérêt public (GIP), avait prononcé plusieurs sanctions disciplinaires à l’encontre de l’un de ses agents, soumis à un régime de droit public, puis avait prononcé son licenciement pour « faute grave ».
L’agent avait d’abord saisi le conseil de prud’hommes qui, par un jugement du 1er décembre 2010, s’était déclaré à juste titre incompétent pour connaître de la mesure de licenciement contestée devant lui (avant que le législateur intervienne pour laisser au GIP le choix du régime de droit applicable au personnel non statutaire : cf. article 109 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit ; le Tribunal des conflits s’était prononcé sur le régime de droit applicable aux agents non statutaires des GIP : cf. T.C., 14 février 2000, GIP Habitat et interventions sociales pour les mal-logés et les sans-abris,
n° 03170, au Recueil Lebon).
L’intéressé avait alors saisi le tribunal administratif de Cayenne en sollicitant l’annulation pour excès de pouvoir de l’ensemble des sanctions disciplinaires prises à son encontre.
Par un jugement du 22 novembre 2012, le tribunal avait prononcé l’annulation de deux des sanctions prononcées, rejeté la demande au fond s’agissant de la troisième, et rejeté comme tardives les conclusions dirigées contre la décision prononçant le licenciement de l’intéressé. Le tribunal avait en effet estimé qu’en contestant son licenciement devant le conseil de prud’hommes, le requérant avait manifesté qu’il avait connaissance de cette décision, de sorte que les voies et délais de recours pouvaient lui être opposés au plus tard à la date à laquelle la juridiction saisie s’était déclarée incompétente.
L’agent avait ensuite saisi la cour administrative d’appel de Bordeaux et demandé l’annulation du jugement du 22 novembre 2012 en tant qu’il n’avait pas fait droit à l’intégralité de ses demandes et, notamment, en tant qu’il avait rejeté ses conclusions dirigées contre la décision de licenciement.
Par un arrêt n° 13BX00657 du 8 décembre 2014, la cour avait censuré le raisonnement tenu par les premiers juges pour rejeter, comme tardives, les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision prononçant son licenciement.
Après avoir relevé que cette décision de licenciement ne comportait pas l’indication des délais et voies de recours, elle avait jugé que ni la circonstance que l’intéressé avait effectué un recours devant le conseil de prud’hommes contre cette décision, ni celle que cette juridiction avait rendu un jugement d’incompétence au profit de la juridiction administrative ne permettaient de le regarder comme ayant eu connaissance de ces voies et délais de recours.
La cour avait donc annulé le jugement pour irrégularité, et avait ensuite évoqué l’affaire et annulé la décision prononçant le licenciement de l’intéressé au motif que la matérialité des faits qui lui étaient reprochés n’était pas établie.
Saisi en cassation par la mission locale régionale, le Conseil d’État a confirmé le raisonnement tenu par les juges d’appel et rejeté le pourvoi.
Après avoir cité l’article R. 421-5 du code de justice administrative qui prévoit que : « Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision », il a jugé que « si l'auteur d'un recours juridictionnel tendant à l'annulation d'une décision administrative doit être réputé avoir eu connaissance de la décision qu'il attaque au plus tard à la date à laquelle il a formé son recours, ni le recours devant une juridiction incompétente, ni la notification d'une décision de rejet par une telle juridiction ne sont de nature à faire courir les délais de recours devant le juge administratif à l'encontre de la décision litigieuse ».
N.B. : Depuis la décision de Section Mme Mauline du 13 mars 1998 (n° 120079, au Recueil Lebon), la portée de la théorie de la connaissance acquise, dont il résulte que l’exercice d’un recours administratif ou contentieux manifeste la connaissance qu’a son auteur de la décision attaquée, de sorte que les délais de recours lui sont, en principe, opposables, a été fortement amoindrie, car son opposabilité cède devant les dispositions précitées de l’article R. 421-5 du code de justice administrative.
Elle n’est ainsi pas opposable au destinataire de la décision lorsque les voies et délais de recours n’ont pas été portés à sa connaissance dans la notification qui lui a été adressée et ce, quand bien même il a formé un recours administratif, gracieux ou hiérarchique, contre cette décision.
De même, le délai du recours en annulation n’est pas opposable dans ce cas, même si l’intéressé a formé un recours de plein contentieux indemnitaire fondé sur l’illégalité de la décision (cf. C.E., 5 décembre 1994, Chambre régionale et d’industrie du Languedoc-Roussillon, n° 150332, aux tables du Recueil Lebon) ou encore s’il a fait état de l’existence de cette décision à l’occasion d’une demande en référé tendant à la désignation d’un expert (C.E., 8 juillet 2002, Hôpital local de Valence d’Agen, n° 229843, au Recueil Lebon).
Le Conseil d’État avait néanmoins jugé par une décision récente que l'auteur d'un recours juridictionnel tendant à l'annulation d'une décision administrative devait être réputé avoir eu connaissance de la décision qu'il attaquait au plus tard à la date à laquelle il avait formé son recours, de sorte que si un premier recours contre une décision notifiée sans mention des voies et délais de recours avait été rejeté, son auteur ne pouvait introduire un second recours contre la même décision que dans un délai de deux mois à compter de la date d'enregistrement du premier recours au greffe de la juridiction saisie (C.E., 11 décembre 2013, n° 365361, au Recueil Lebon).
Par la décision commentée, le Conseil d’État a eu l’occasion de préciser que cette dernière solution ne peut recevoir application que dans l’hypothèse où le recours en annulation était porté devant une juridiction de l’ordre administratif. 
Accès aux documents administratifs
COMMUNICATION DE DOCUMENTS ADMINISTRATIFS
Accès aux documents administratifs – Concours de la fonction publique – Documents préparatoires – Indications de correction
C.E., 17 février 2016, Centre national de la fonction publique territoriale, n° 371453, au Recueil Lebon
Un candidat à un concours d’administrateur territorial avait demandé la communication au Centre national de la fonction publique territoriale (C.N.F.P.T.) des « indications de correction » des sujets des épreuves d’admissibilité des sessions 2009 et 2010 du concours.
Le C.N.F.P.T. ayant refusé de lui communiquer les documents sollicités, l’intéressé avait alors saisi la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) qui s’était prononcée, par avis du 12 janvier 2012, en faveur de la communication de ces documents.
Malgré cette décision, le C.N.F.P.T. avait de nouveau refusé de communiquer les documents, en invoquant le fait que les éléments de correction demandés ne revêtaient pas le caractère de documents administratifs communicables, au motif de leur caractère indétachable des éléments préparatoires à la décision finale rendue par le jury.
L’intéressé avait alors saisi le tribunal administratif de Paris qui avait fait droit à sa demande en enjoignant au C.N.F.P.T. de communiquer les documents demandés dans le délai d’un mois à compter de la notification du jugement.
Le C.N.F.P.T. s’était pourvu en cassation devant le Conseil d’État en demandant l’annulation de ce jugement.
Le Conseil d’État a rejeté le pourvoi du C.N.F.P.T.
Après avoir rappelé la notion de « document administratif », définie par les dispositions des articles 1 et 2 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, ainsi que les modalités de communication de ces documents prévues par son article 6, le Conseil d’État a relevé que « les éléments de correction des sujets des épreuves d’admissibilité du concours interne d’administrateur territorial, [documents d’ordre général et] de valeur purement indicative, [qui n’avaient pas été élaborés par le jury,] (...) [n’avaient ni] pour objet ni pour effet de déterminer les critères de l’appréciation par le jury de la performance individuelle des candidats [; ils constituaient de simples] documents administratifs élaborés par le C.N.F.P.T. dans le cadre de sa mission de service public de définition des programmes et de préparation aux concours d’accès et examens professionnels de la fonction publique territoriale ».
Ces éléments de correction d’ordre général, qui n’avaient pas été élaborés par le jury en vue de ses délibérations relatives à l’évaluation personnelle de tel ou tel candidat, s’ils revêtaient effectivement le caractère de documents préparatoires avant la proclamation des résultats du concours, étaient donc bien devenus « communicables de plein droit » après celle-ci, sans que cette communication porte atteinte de quelque façon que ce soit au secret des délibérations du jury.
N.B. : Cette décision ne remet pas en cause le principe de la restriction au droit d’accès fondée sur le secret des délibérations du jury.
Si le législateur a prévu et organisé la communication des documents administratifs liés à un concours, il n’a pas entendu porter atteinte au principe d’indépendance des jurys (cf. avis CADA : 10 janvier 2008, Recteur de l’académie de Bordeaux, n° 20080186 ; 27 septembre 2007, Directeur de l’institut de plasturgie d’Alençon, n° 20073814 ; 27 juillet 2000, Ministre de l’éducation nationale, n° 20002923). 
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