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  ÉDITORIAL
 

 

La loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance a été promulguée au Journal officiel le 28 juillet 2019.


Le 25 juillet 2019, le Conseil constitutionnel avait, par une décision n° 2019-787 DC, confirmé la conformité à la Constitution de la loi, à l’exception de ses articles 33 et 53 jugés contraires aux dispositions de l’article 45 de la Constitution qui conditionne la recevabilité des amendements présentés en première lecture à l’existence d’un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis. Pour mémoire, l’article 33 de la loi complétait l’article L. 312-10 du code de l’éducation afin d’organiser l’information des familles sur l'« intérêt » et les « enjeux » des offres d'apprentissage des langues et cultures régionales. L’article 53 de la loi modifiait, quant à lui, certaines dispositions du code de l’éducation et du code de la santé publique pour préciser le droit de prescription des médecins scolaires et les conditions dans lesquelles les infirmiers de l'éducation nationale peuvent administrer des médicaments aux élèves et étudiants. Ce n’est pas faire offense aux auteurs de ces deux amendements que de dire que leur censure, par le Conseil constitutionnel, ne bouleverse pas l’équilibre de la loi pour une école de la confiance.


Le Conseil constitutionnel était, par ailleurs, appelé à se prononcer sur la constitutionnalité de l’article 17 de la loi. Cet article détermine les conditions dans lesquelles l'État attribue aux communes les ressources rendues nécessaires par l'abaissement à trois ans de l’âge de l’instruction obligatoire. Plus précisément, l’article 17 prévoit que les communes bénéficieront d’un accompagnement financier correspondant à la différence entre les dépenses afférentes aux écoles élémentaires et maternelles, publiques et privées, qui seront exposées par les communes au titre de l’année scolaire 2019-2020 et les dépenses qu’elles ont exposées sur ce même périmètre au titre de l’année scolaire 2018-2019, dans la limite de ce qui est directement imputable à l’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire à trois ans. Le législateur a, en outre, ouvert aux communes la possibilité de solliciter la réévaluation de leur situation pour les années 2020-2021 et 2021-2022.


L’adoption de ces dispositions a suscité de vifs débats tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, certains parlementaires reprochant au dispositif de ne bénéficier qu'aux communes qui ne finançaient pas déjà, de façon volontaire, des écoles maternelles. C’est donc sans surprise que le Conseil constitutionnel fut saisi du grief tiré de ce qu’en limitant l'accompagnement financier de l'État à la compensation des seules charges supplémentaires créées par l'abaissement à trois ans de l'âge de l'instruction obligatoire, l’article 17 instituait une différence de traitement entre les communes, contraire au principe d'égalité devant la loi.


Pour écarter ce grief, le Conseil constitutionnel a tout d’abord relevé que les communes qui avaient créé des écoles maternelles publiques ou donné leur accord aux contrats d’association qui liaient l’État aux écoles maternelles privées situées sur leur territoire contribuaient déjà au financement de ces écoles et n’étaient pas, par suite, placées dans une situation identique à celle des autres communes, qui n'exerçaient pas déjà les mêmes compétences et ne supportaient donc pas les charges correspondantes. Le Conseil constitutionnel a ensuite jugé que la différence de traitement contestée était en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit, qui consiste, en application de la seconde phrase du quatrième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, à accompagner de ressources financières une extension de compétences ayant pour conséquence d'augmenter les dépenses des collectivités territoriales.


Ce faisant, le Conseil constitutionnel a suivi les observations du Gouvernement. La compensation des près de 6 milliards d’euros de dépenses obligatoires déjà consenties par les communes pour assurer le fonctionnement des 29 000 écoles publiques et 5 000 écoles privées disposant de classes maternelles implantées sur le territoire national aurait par ailleurs créé un effet d’aubaine massif dépourvu de toute justification au regard de l’article 72-2 de la Constitution dont le seul objet est de compenser une augmentation des dépenses des collectivités territoriales. Or l’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire n’aura aucune incidence financière pour l’écrasante majorité des communes qui scolarisent déjà les enfants âgés de trois à cinq ans.


La promulgation de la loi pour une école de la confiance ne constitue évidemment qu’une première étape. Dans les tout prochains jours, les premiers décrets d’application seront publiés au Journal officiel. Ils porteront notamment sur les aménagements du temps de présence à l’école maternelle des enfants scolarisés en petite section (6° du I de l’article 14 de la loi), sur le contrôle de l’obligation scolaire pour les enfants soumis à l’instruction obligatoire et inscrits dans des établissements d’accueil collectif dits « jardins d’enfants » (article 18 de la loi), sur le contrôle de l’instruction dispensée dans la famille (article 19 de la loi) ou encore sur les établissements publics locaux d’enseignement international (article 32 de la loi).


La direction des affaires juridiques sera évidemment présente aux côtés des rectorats pour accompagner la mise en œuvre de ces nouvelles dispositions législatives et réglementaires qui seront plus précisément commentées dans le prochain numéro de la LIJ.

Natacha Chicot       
  SOMMAIRE
  jurisprudence   Jurisprudence
 

Enseignement scolaire

QUESTIONS GÉNÉRALE

Organisation de l’enseignement scolaire

fleche Baccalauréat – Handicap – Aménagement des épreuves – Référé-liberté – Carence caractérisée dans la mise en œuvre des obligations qui découlent de l’article L. 112-4 du code de l’éducation (non)

J.R.T.A. Nantes, 14 juin 2019, n° 1906292

 

PREMIER DEGRÉ

Scolarité

 

SECOND DEGRÉ

Scolarité

fleche Second degré – Orientation – Passage en classe supérieure – Commission d’appel – Absence du conseiller d’orientation – Privation d’une garantie (oui)

T.A. Toulouse, 20 mars 2019, n° 1803198

 

Vie scolaire

fleche E.P.L.E. – Autorité parentale – Ordonnateur – Demi-pension – Titre exécutoire

T.A. Grenoble, 18 avril 2019, n° 1605793

 

Enseignement supérieur et recherche

VIE ÉTUDIANTE

Œuvres universitaires

fleche Expulsion locative – Logement CROUS – Question prioritaire de constitutionnalité

C.E., 16 avril 2019, n° 426074, aux tables du Recueil Lebon
C.E., 16 avril 2019, n° 426075

 

Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Recrutement et changement de corps

fleche Recrutement – Enseignants-chercheurs – Professeurs des universités – Obligation pour le Conseil national des universités de publier les critères et modalités d'appréciation des candidatures, tant dans le cadre de la procédure de droit commun que dans le cadre de la procédure particulière prévue au 3° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984 (oui) – Obligation d'établir des critères distincts pour ces deux procédures de recrutement (non)

C.E., 6 mai 2019, n° 408531, aux tables du Recueil Lebon

 

Accident de service et maladie contractée en service

 

Rémunérations, traitement et avantages en nature

fleche Rémunération – Indemnité spécifique d’installation – Ouverture des droits – Congé de longue durée – Effet sur la condition d’accomplissement de quatre années consécutives de services en métropole

C.A.A. Bordeaux, 7 mars 2019, n° 17BX00845

 

Pensions

fleche Fonctionnaires et agents publics – Cessation de fonctions – Admission à la retraite – Principe de non-rétroactivité – Exceptions limitativement énumérées par l’article R. 36 du code des pensions civiles et militaires de retraite (C.P.C.M.R.) – Rétroactivité nécessaire pour tirer les conséquences de la limite d’âge, pour placer l’agent dans une situation régulière ou remédier à une illégalité

C.E., 6 mai 2019, n° 418482, aux tables du Recueil Lebon

 

Questions propres aux agents non titulaires

 

Responsabilité

QUESTIONS GÉNÉRALES

Mise en cause de la responsabilité de l’administration

fleche Responsabilité administrative – Sortie scolaire – Faute dans l’orgnisation du service – Défaut de surveillance – Compétence juridictionnelle

T.A. Montpellier, 16 avril 2019, n° 1705592

 

Procédure contentieuse

fleche Publicité des circulaires ministérielles relatives aux bourses – Site internet du ministère de l’enseignement supérieur – Délai de recours contentieux

C.E., 20 mars 2019, n° 401774, aux tables du Recueil Lebon

 

fleche Requête dirigée contre une décision de nomination d’un maître de conférences – Irrecevabilité (tardiveté) – Point de départ des délais de recours contentieux – Décision mise en ligne sur le site Galaxie – Requête dirigée contre une décision relative à la gestion de carrière du candidat nommé en qualité de maître de conférences – Défaut d’intérêt à agir du candidat non retenu

T.A. Toulouse, 6 février 2019, n° 1702827 et n° 1704428

 

RECEVABILITÉ DES REQUÊTES

fleche Recevabilité de la requête – Liaison du contentieux en cours d’instance

C.E. Section, avis, 27 mars 2019, n° 426472, au Recueil Lebon

 

 

POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE

 

Technologies de l’information et de la communication (TIC)

FICHIERS (TRAITEMENTS AUTOMATISÉS DE DONNÉES)

fleche Traitements de données à caractère personnel – Droit d’opposition – Données ayant cessé d’être conservées dans le traitement – Recours pour excès de pouvoir – Non-lieu

C.E., 18 mars 2019, n° 406313, aux tables du Recueil Lebon

 

Accès aux documents administratifs

COMMUNICATION DE DOCUMENTS ADMINISTRATIFS

fleche Accès aux documents administratifs – Protocole transactionnel – Communication après la fin de l’instance

C.E., 18 mars 2019, Ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, n° 403465, au Recueil Lebon

 



  jurisprudence   Consultations
 

Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Rémunérations, traitement et avantages en nature

 

Propriété intellectuelle



  le point sur   ActualitÉs
 

TEXTES OFFICIELS
Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Positions

fleche Fonctionnaire – Disponibilité – Conditions d’octroi et de renouvellement

Décret n° 2019-234 du 27 mars 2019 modifiant certaines conditions de la disponibilité dans la fonction publique
J.O.R.F. du 28 mars 2019

 

Procédure contentieuse

EXÉCUTION DES JUGEMENTS

fleche Exécution des décisions juridictionnelles – Injonction – Astreinte

Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
J.O.R.F. du 24 mars 2019



  jurisprudence   Jurisprudence
 

Enseignement scolaire

QUESTIONS GÉNÉRALES

Organisation de l’enseignement scolaire

INCLUSION SCOLAIRE

fleche Baccalauréat – Handicap – Aménagement des épreuves – Référé-liberté – Carence caractérisée dans la mise en œuvre des obligations qui découlent de l’article L. 112-4 du code de l’éducation (non)

J.R.T.A. Nantes, 14 juin 2019, n° 1906292


Un candidat au baccalauréat 2019, diagnostiqué dyslexique et dysorthographique, a demandé un aménagement pour les épreuves du baccalauréat, conformément aux dispositions de l’article D. 351-8 du code de l’éducation, et, notamment, l’autorisation d’utiliser le logiciel « Antidote », outil d’écriture avancé, lors de l’épreuve de philosophie.

 

Le recteur de l’académie de Nantes, qui l’avait dispensé de certaines épreuves, lui a accordé des majorations d’un tiers de la durée de préparation des épreuves orales et de la durée de passage des épreuves écrites ainsi que l’utilisation d’un ordinateur avec correcteur orthographique Word. Cinq jours avant les épreuves, le candidat a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative (C.J.A.), d’une demande d’injonction au recteur de l’académie de l’autoriser à utiliser le logiciel « Antidote » lors de l’épreuve de philosophie.

 

Le juge des référés a rappelé que les conditions de déroulement des épreuves d’un examen, à supposer même qu’elles soient entachées d’une rupture d’égalité, ne portent pas en elles-mêmes atteinte à l’exercice d’une liberté fondamentale.

 

Toutefois, il a repris le considérant de principe de l’ordonnance du Conseil d’État du 20 septembre 2018 (n° 423727), rendue dans le cadre d’un référé-liberté, et précisé que, compte tenu du droit reconnu, notamment par l’article L. 112-4 du code de l’éducation, aux élèves et étudiants atteints d’un handicap ou d’un trouble de santé invalidant, à des aménagements des conditions de passation de leurs épreuves d’examen ou de concours, toute carence caractérisée dans la mise en œuvre, par une personne publique, des obligations qui en découlent, eu égard, d’une part, à l’état de santé de l’intéressé et, d’autre part, aux pouvoirs et moyens dont cette personne publique dispose, est susceptible d’être regardée comme portant une atteinte manifestement illégale à une liberté fondamentale.

 

En l’espèce, après avoir relevé que le logiciel « Antidote », qui avait été utilisé par le candidat pour les contrôles de philosophie au cours de l’année scolaire, était de nature à opérer une surcompensation et, par suite, à rompre l’équité due à l’ensemble des candidats alors que la bonne maîtrise de la langue est une compétence évaluée dans les compositions écrites au baccalauréat, le juge des référés a jugé que, dès lors que la représentante du recteur s’était engagée à s’assurer que l’ordinateur autorisé était bien équipé du correcteur orthographique Word, il ne pouvait être retenu une carence caractérisée des services de l’académie de Nantes dans ses obligations à l’égard du requérant et a rejeté, pour ce motif, sa requête.

 

Il convient de noter que cette jurisprudence en matière de référé-liberté ne vaut que si l’état de santé du candidat justifie des aménagements. Ainsi, si l’état de santé, en l’absence d’altération substantielle des fonctions cognitives du candidat, ne justifie pas les aménagements demandés, le référé-liberté est rejeté (cf. T.A. Melun, 31 mai 2019, n° 1904953). carre

 

PREMIER DEGRÉ

Scolarité

ENSEIGNEMENTS

fleche Classes à horaires aménagés – Financement – Compétence obligatoire de la commune (non)

T.A. Rouen, 11 juin 2019, Commune de Rouen, n° 1702237


La commune de Rouen a demandé à la rectrice de l’académie de Rouen de prendre en charge la rémunération des enseignants du conservatoire municipal dispensant des enseignements aux élèves des classes à horaires aménagés musicales (CHAM) et de danse (CHAD).

 

Sa demande ayant été rejetée, la commune a saisi le tribunal administratif de Rouen pour lui demander de condamner l’État à lui verser une somme correspondant au coût des enseignements dispensés dans ces classes à horaires aménagés.

 

Dans le cadre de ce litige indemnitaire, la commune de Rouen a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (Q.P.C.) que le tribunal administratif a transmise au Conseil d’État par une ordonnance en date du 3 décembre 2018. Cette Q.P.C. portait sur la conformité des articles L. 132-1, L. 132-2 et L. 211-8 du code de l’éducation aux articles 34, 72 et 72-2 de la Constitution du 4 octobre 1958 et du treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 en ce que les dispositions susmentionnées du code de l’éducation faisaient peser sur les collectivités territoriales des dépenses pédagogiques à caractère obligatoire relevant de l’État.

 

Le Conseil d’État a considéré qu’il n’y avait pas lieu de transmettre au Conseil constitutionnel cette Q.P.C., qui ne soulevait pas une question sérieuse au sens de l’article 23-2 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, au motif que la commune de Rouen se bornait à soutenir que l’État aurait estimé que les dispositions combinées des articles L. 132-1, L. 132-2 et L. 211-8 du code de l’éducation « pourraient conférer une base légale à son refus de prendre en charge les coûts d’enseignement du conservatoire de la ville de Rouen pour les classes à horaires aménagés » (C.E., 22 février 2019, Commune de Rouen, n° 426064).

 

Sur le fondement de cette décision, le tribunal a écarté le moyen invoqué par la commune de Rouen tiré de ce que ces dispositions du code de l’éducation faisaient peser sur les collectivités territoriales des dépenses pédagogiques à caractère obligatoire relevant de l’État.

 

Sur le fond, le tribunal a estimé, après avoir rappelé les dispositions des articles L. 312-6 et L. 312-7 du code de l’éducation et celles de l’article 1er de l’arrêté du 31 juillet 2002, que si l’enseignement artistique renforcé dont bénéficient les élèves inscrits en classes à horaires aménagés constitue un enseignement organisé dans le cadre de la scolarité obligatoire des élèves, il est dispensé avec le concours des conservatoires ou de certaines écoles de musique et de danse administrés par les collectivités territoriales. Ces dispositions n’imposent donc pas aux collectivités territoriales d’apporter leur concours à l’organisation des classes à horaires aménagés ni d’assumer les dépenses obligatoires correspondantes. Le tribunal en a conclu que les dispositions de l’arrêté du 31 juillet 2002 n’avaient pas pour effet d’imposer aux collectivités territoriales des dépenses qui incomberaient normalement à l’État et a écarté le moyen, que la commune de Rouen avait invoqué par la voie de l’exception, tiré de la méconnaissance de l’article L. 1611-1 du code général des collectivités territoriales.

 

Le tribunal a enfin considéré que les enseignants du conservatoire intervenant dans le cadre du dispositif des classes à horaires aménagés ne font partie ni du personnel enseignant des écoles élémentaires et des écoles maternelles, ni du personnel exerçant dans les collèges ou les lycées, au sens des dispositions de l’article L. 211-8 du code de l’éducation. Il a en conséquence écarté comme inopérant le moyen invoqué par la commune de Rouen tiré de ce que le refus de l’État de prendre en charge la rémunération des enseignants du conservatoire serait contraire aux dispositions de l’article L. 211-8 du code de l’éducation. carre

 

SECOND DEGRÉ

Scolarité

ORIENTATION DES ÉLÈVES

fleche Second degré – Orientation – Passage en classe supérieure – Commission d’appel – Absence du conseiller d’orientation – Privation d’une garantie (oui)

T.A. Toulouse, 20 mars 2019, n° 1803198


Un élève de troisième, redoublant, a demandé son passage en classe de seconde générale et technologique. À la suite de l’avis défavorable émis par le conseil de classe, le chef d’établissement a décidé de l’orienter en classe de seconde professionnelle. Saisie par les parents de l’élève, la commission départementale d’appel a refusé son passage en classe de seconde générale et technologique au motif que le redoublement de la troisième n’avait pas été profitable et que ses résultats n’étaient pas d’un niveau suffisant pour la classe demandée.

 

Le père de l’élève a saisi le tribunal administratif de Toulouse pour demander l’annulation de la décision de la commission départementale d’appel.

 

Le tribunal administratif a rappelé qu’en raison de sa nature et de sa gravité, la décision qui refuse à un élève l’orientation souhaitée lors du passage dans une classe supérieure ne saurait être prononcée hors la présence du conseiller d’orientation intervenant dans l’établissement scolaire fréquenté par l’élève.

 

En l’espèce, l’absence du psychologue conseiller d’orientation, qui est chargé de présenter le dossier de l’élève lors de la séance de la commission d’appel en vertu des dispositions de l’article 3 de l’arrêté du 14 juin 1990 relatif à la commission d’appel, a été regardée par le tribunal administratif comme ayant eu pour effet de priver l’élève d’une garantie. Par suite, le tribunal a annulé la décision attaquée, comme étant intervenue à l’issue d’une procédure irrégulière.

 

N.B. : Dans une affaire similaire, la cour administrative d’appel de Nantes avait déjà annulé la décision de la commission d’appel pour le même motif (C.A.A. Nantes, 18 octobre 2001, n° 98NT00673).

 

En l’espèce, le tribunal administratif de Toulouse fait application de la jurisprudence Danthony (C.E. Assemblée, 23 décembre 2011, n° 335033, au Recueil Lebon), intervenue postérieurement à l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes. Le tribunal administratif de Toulouse affirme que la présence du conseiller d’orientation lors de la séance de la commission d’appel constitue une garantie pour l’élève, que, par suite, son absence ne peut être « danthonysée » et qu’elle entache donc d'irrégularité la procédure suivie. carre

 

Vie scolaire

DÉPENSES À LA CHARGE DES FAMILLES

fleche E.P.L.E. – Autorité parentale – Ordonnateur – Demi-pension – Titre exécutoire

T.A. Grenoble, 18 avril 2019, n° 1605793


Le père d’une collégienne a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler le titre exécutoire émis à son encontre par l’ordonnateur du collège, correspondant aux frais de demi-pension de sa fille. Il estimait ne pas être redevable de cette somme au motif que la résidence de l’enfant avait été fixée chez son ex-conjointe et qu’il versait, en exécution d’un jugement du juge aux affaires familiales, une pension alimentaire couvrant l'ensemble des frais pour subvenir aux besoins de sa fille.

 

Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande du requérant en s’appuyant sur les dispositions des articles 371-1, 371-2, 372, 372-2 et 373-2 du code civil aux termes desquels chacun des titulaires de l’autorité parentale est tenu solidairement et pour le tout de l’obligation de nourrir, entretenir et élever les enfants communs. Le tribunal administratif de Grenoble a par ailleurs précisé que si cette obligation solidaire se divise entre les parents qui, dans leurs rapports entre eux, doivent en supporter le poids proportionnellement à leurs ressources, elle est unique au regard des enfants, qui en sont les créanciers, comme au regard des tiers qui se substituent aux enfants lors de l’acquittement des obligations dues par les parents, sauf décision judiciaire contraire.

 

En l’espèce, la séparation des parents et l’absence de résidence commune ne faisaient pas obstacle à l’obligation d’entretien incombant aux parents titulaires de l’autorité parentale, laquelle peut effectivement prendre la forme d’une prise en charge directe de certains frais exposés au profit de l’enfant, sauf décision de justice contraire. Le jugement du juge aux affaires familiales fixant la résidence de la collégienne ainsi que la contribution respective des parents aux frais de son entretien et de son éducation est donc sans incidence sur le droit des tiers. Ces derniers peuvent donc s’adresser indifféremment à l’un ou l’autre des parents titulaires de l’autorité parentale pour le recouvrement des créances relevant de l’obligation d’entretien des enfants. Il appartient ensuite au parent qui a réglé les frais de demi-pension et à lui seul d’en demander le remboursement à l’autre parent.

 

En l’espèce, le tribunal a jugé que c’était à bon droit que le collègeavait émis à l’encontre du père de la collégienne, tenu solidairement au paiement des frais de demi-pension, un titre exécutoire, sans préjudice pour ce dernier de réclamer à la mère de sa fille, s'il s'y croyait fondé, le remboursement de la somme versée au comptable public.

 

Cf. également sur ce sujet : LIJ n° 194 de juillet 2016 (Note DAJ A1 n° 16-086 du 25 mars 2016) et LIJ n° 195 de novembre 2016 (commentaires des jugements T.A. Strasbourg, 12 mai 2016, n° 1400126, et T.A. Clermont-Ferrand, 26 mai 2016, n° 1400267). carre

 

Enseignement supérieur et recherche

VIE ÉTUDIANTE

Œuvres universitaires

fleche Expulsion locative – Logement CROUS – Question prioritaire de constitutionnalité

C.E., 16 avril 2019, n° 426074, aux tables du Recueil Lebon

C.E., 16 avril 2019, n° 426075


Le Conseil d’État, par deux décisions du 16 avril 2019, a décidé qu’il n’y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité (Q.P.C.) soulevées par Mme X et Mme Y dans le cadre des pourvois en cassation qu’elles avaient respectivement formés contre deux ordonnances du juge des référés du tribunal administratif de Paris du 22 octobre 2018.

 

Mme X et Mme Y demandaient l’annulation de ces deux ordonnances par lesquelles le juge des référés leur avait, à la demande du centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Paris, enjoint de libérer sans délai les logements qu’elles occupaient sans droit ni titre dans une résidence universitaire parisienne et, à défaut pour elles de déférer à ces injonctions, avait autorisé le CROUS de Paris à faire procéder à leur expulsion, en faisant valoir qu’« aucun délai d’exécution ne p[ouvait] [leur] être accordé sur le fondement des dispositions du code des procédures civiles d’exécution relatives à l’expulsion locative qui ne sont pas applicables aux relations entre les occupants d’un logement dans une résidence universitaire et les CROUS (...) ».

 

Dans le cadre de leur pourvoi en cassation contre ces ordonnances, les requérantes soulevaient deux Q.P.C. : l’une sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 412-1 à L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution (C.P.C.E.) « en tant qu’ils sont interprétés comme n’étant pas applicables aux occupants d’un logement en résidence universitaire », et l’autre sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article L. 412-7 du même code, en tant qu’il exclut les occupants d’un logement en résidence universitaire des garanties prévues par les articles L. 412-3 à L. 412-6 du C.P.C.E.

 

Le Conseil d’État a d’abord posé le principe selon lequel les dispositions des articles L. 411-1 et L. 412-1 à L. 412-7 du C.P.C.E., « qui définissent les modalités selon lesquelles sont prises et exécutées les décisions d'expulsion relevant de la compétence de la juridiction judiciaire, ne trouvent pas à s'appliquer lorsqu'est en cause l'expulsion d'un occupant d'un logement situé dans une résidence pour étudiants gérée par un CROUS, qui relève de la compétence du juge administratif ».

 

Il a ainsi tiré les conséquences de la récente décision du 12 février 2018 (CROUS de Paris, n° C4112, au Recueil Lebon, analysée dans la LIJ n° 202 de mai 2018) par laquelle le Tribunal des conflits avait jugé que « même dans le cas où [une] résidence universitaire ne peut pas être regardée comme une dépendance du domaine public, toute demande d’expulsion du CROUS vise à assurer le fonctionnement normal et la continuité du service public administratif dont il a la charge ». Les demandes d’expulsion présentées par un CROUS relèvent ainsi de la compétence de la juridiction administrative.

 

S’agissant de l’article L. 412-6 du C.P.C.E. relatif à la « trêve hivernale », le Conseil d’État a considéré que ces dispositions n’étaient pas applicables au litige, pas plus que celles de l’article L. 412-7 du C.P.C.E. qui établit que les articles L. 412-3 à L. 412-6 du C.P.C.E. (instituant des modulations du délai d’expulsion par le juge en fonction, notamment, de la situation du locataire et de ses possibilités de relogement) ne sont pas applicables aux occupants de locaux spécialement destinés aux logements d’étudiants. Il résulte en effet de la loi n° 66-473 du 5 juillet 1966 modifiant la loi n° 51-1372 du 1er décembre 1951 et prorogeant diverses dispositions transitoires prises en raison de la crise du logement (dont est issu l’article L. 412-7), et de ses travaux préparatoires, que ces exclusions ne concernent pas les occupants de logements situés dans une résidence pour étudiants gérée par un CROUS.

 

S’agissant des articles L. 412-1 à L. 412-5 du C.P.C.E., le Conseil d’État a ensuite considéré qu’« il incombe au juge administratif, saisi d’un litige relatif à l’expulsion d’un occupant d’un logement situé dans une résidence gérée par un CROUS, de prendre en compte, d’une part, la nécessité d’assurer le fonctionnement normal et la continuité du service public dont cet établissement public a la charge, et, d’autre part, la situation de l’occupant en cause ainsi que les exigences qui s’attachent au respect de sa dignité et de sa vie privée et familiale », garantie notamment par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il en a déduit que le grief tiré de ce que les articles L. 412-1 à L. 412-5 du C.P.C.E. seraient entachés d’une incompétence négative méconnaissant le droit au respect de la vie privée et familiale, le principe du respect de la dignité de la personne humaine, ainsi que l’objectif à valeur constitutionnelle d’accès à un logement décent, au motif de leur inapplicabilité au litige, ne soulève pas une question présentant un caractère sérieux. Il en va de même du grief tiré de ce que, du fait de cette incompétence négative, ces dispositions créeraient, au détriment des usagers du CROUS, une différence de traitement méconnaissant le principe d’égalité.

 

Sur le fond du litige, le Conseil d’État a donc écarté le moyen tiré de ce que le juge des référés aurait commis une erreur de droit en jugeant que les dispositions du C.P.C.E. relatives à l’expulsion locative ne sont pas applicables lorsqu’est en cause l’expulsion d’un occupant d’un logement situé dans une résidence pour étudiants gérée par un CROUS. Si les dispositions du C.P.C.E. sont inapplicables devant le juge administratif, il incombera néanmoins à ce dernier de prendre en considération la situation personnelle des occupants pour moduler, le cas échéant, les délais d’expulsion accordés à l’occupant sans titre.

 

Dans le cas d’espèce, le Conseil d’État a jugé que le juge des référés avait statué conformément à son office, sans méconnaître les dispositions de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en prenant en compte l’ensemble des intérêts en présence tels qu’ils ressortaient des arguments échangés devant lui, en particulier la situation personnelle des intéressées. Les requérantes ne faisaient notamment état d'aucune circonstance particulière liée aux exigences de respect de leur dignité et de leur vie privée et familiale. Les deux pourvois ont donc été rejetés.

 

N.B. : Ces arrêts complètent la décision Ministre de l’intérieur c/ M. et Mme X du 21 avril 2017 (n° 405164, au Recueil Lebon) par laquelle le Conseil d’État avait considéré que l’article L. 412-6 du C.P.C.E. n’est pas applicable, en l’absence de disposition législative expresse en ce sens, à la procédure d’expulsion des personnes se maintenant dans un lieu d’hébergement pour demandeurs d’asile organisée par l’article L. 744-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. carre

 

Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Recrutement et changement de corps

CONCOURS

fleche Recrutement – Enseignants-chercheurs – Professeurs des universités – Obligation pour le Conseil national des universités de publier les critères et modalités d'appréciation des candidatures, tant dans le cadre de la procédure de droit commun que dans le cadre de la procédure particulière prévue au 3° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984 (oui) – Obligation d'établir des critères distincts pour ces deux procédures de recrutement (non)

C.E., 6 mai 2019, n° 408531, aux tables du Recueil Lebon


Un maître de conférences s’était porté candidat à un concours de recrutement de professeur des universités relevant de la 32e section du Conseil national des universités (C.N.U.), ouvert au titre du 3° de l'article 46 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences. Il avait ensuite demandé l’annulation de la délibération par laquelle la 32e section du C.N.U. avait émis un avis défavorable à sa nomination.

 

En l’espèce, le requérant, qui avait été le seul candidat proposé par l’université, soutenait que la procédure suivie devant le C.N.U. était irrégulière, faute, pour ce dernier, d’avoir préalablement publié les critères et modalités d’appréciation des candidatures présentées dans le cadre de ce concours de recrutement réservé aux maîtres de conférences titulaires de l’habilitation à diriger des recherches et justifiant de dix années de service.

 

Le Conseil d’État a rejeté sa requête.

 

Après avoir rappelé les dispositions de l’article 1er du décret n° 92-70 du 16 janvier 1992 relatif au Conseil national des universités, le Conseil d’État a jugé que : « Si, pour l'application de ces dispositions aux recrutements des professeurs d'université, il appartient à chaque section du Conseil national des universités de publier les critères et modalités d'appréciation des candidatures qu'elle entend appliquer, tant dans le cadre de la procédure de droit commun, pour les décisions relatives à l'inscription préalable sur une liste de qualification, que dans le cadre de la procédure particulière prévue au 3° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984, pour les avis qu'elle doit rendre à ce titre, il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucune autre disposition ou d'aucun principe que les sections seraient tenues d'établir et de publier des critères distincts pour ces deux procédures de recrutement ».

 

En l’espèce, la 32e section du C.N.U. avait, antérieurement au concours litigieux, procédé à la publication de ses critères et modalités d'appréciation des candidatures aux postes de professeurs d'université, sous l'intitulé « critères de qualification ». Le Conseil d’État a estimé, au vu des pièces du dossier, que cette publication n’avait pas été de nature à induire en erreur les candidats au concours et devait « être regardée comme ayant régulièrement procédé, malgré l'emploi du mot "qualification" et l'absence de critères propres aux avis rendus au titre de la procédure particulière du 3° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984, à la publicité requise par les dispositions [de l’article 1er du décret du 16 janvier 1992] ».

 

Le Conseil d’État a par ailleurs rappelé les dispositions de l’article 49-3 du décret du 6 juin 1984, selon lesquelles la section compétente du C.N.U. n’est tenue, lorsqu’elle émet un avis défavorable à une candidature, de rédiger un rapport motivé sur cet avis que dans l’hypothèse où une liste de classement comportant plusieurs candidats a été établie et où le candidat qui fait l'objet d'un avis défavorable est mieux classé sur cette liste qu'un candidat pour lequel elle donne un avis favorable (cf. C.E., 11 juin 2003, n° 244281).

 

En l’espèce, le requérant ayant été le seul candidat inscrit sur la liste de classement proposée par l’université, le moyen tiré de ce que l’avis du C.N.U. n’était pas assorti d’un rapport motivé était donc inopérant. carre

 

Accident de service et maladie contractée en service

fleche Maladie professionnelle – Maladie imputable au service – Accident de service – Lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie – Fait personnel de l’agent

C.E., 13 mars 2019, n° 407795, au Recueil Lebon


Une attachée territoriale, chargée depuis le 1er septembre 1988 de la direction d’un établissement d’hébergement de personnes âgées dépendantes (EHPAD), qui avait fait l’objet de deux sanctions d’exclusion temporaire du service de trois jours le 30 juin 2011 et de six mois avec sursis partiel le 3 juin 2013, souffrait d’un syndrome dépressif sévère, médicalement constaté le 15 juillet 2013, qui l’avait empêchée d’exercer ses fonctions jusqu’au 13 mai 2014.

 

La commission de réforme, saisie de la demande de prise en charge au titre de la maladie professionnelle des arrêts de travail de l’intéressée, avait émis, le 7 avril 2014, un avis favorable à la reconnaissance de l’imputabilité au service de sa pathologie dépressive en estimant que celle-ci « était en lien direct avec son travail et qu’il n’existait pas d’état antérieur ou d’éléments de sa vie privée pouvant (…) être à l’origine de cette affection ».

 

Par une décision du 31 juillet 2014, la communauté d’agglomération, responsable de la gestion de l’EHPAD, a refusé de reconnaître l’imputabilité au service de la dépression. Cette décision a été annulée par le tribunal administratif de Nantes par un jugement du 3 février 2016. Sur appel de la communauté d’agglomération, la cour administrative d’appel de Nantes a annulé ce jugement, le 9 décembre 2016, et rejeté la demande de l’intéressée tendant à la reconnaissance de l’imputabilité au service de sa maladie. La requérante s’est alors pourvue en cassation contre cet arrêt.

 

Dans sa décision, le Conseil d’État a estimé, après avoir rappelé les dispositions du 2° de l’article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, qu’une maladie contractée par un fonctionnaire ou son aggravation doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service.

 

Le Conseil d’État a donc considéré que c’est sans erreur de droit que la cour administrative d’appel s’est attachée à vérifier l’existence d’un lien direct de la maladie de la requérante avec l’exercice de ses fonctions et a recherché ensuite si des circonstances particulières pouvaient conduire à regarder cette pathologie comme détachable du service avant d'écarter, en l’espèce, l’imputabilité au service de la maladie en jugeant que l’avis médical rédigé en vue de la réunion de la commission de réforme n’était pas assorti des précisions permettant d’établir que l’état dépressif de l’intéressée était directement lié à la dégradation de son contexte de travail, et que la requérante était elle-même à l’origine de l’épuisement professionnel et des conditions de travail dégradées dont elle se plaignait.

 

En revanche, le Conseil d’État a estimé que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en considérant que l’absence de volonté délibérée de l’employeur de nuire à l’agent interdisait de reconnaître l’imputabilité au service dès lors qu’il appartient au juge d’apprécier si les conditions de travail, indépendamment de toute volonté délibérée de nuire, doivent être regardées comme directement à l’origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée.

 

Le Conseil d’État a donc annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 9 décembre 2016.

 

N.B. : Par cette décision, le Conseil d’État donne une définition plus précise d’une maladie imputable au service et étend sa jurisprudence sur les accidents de service (cf. C.E. Section, 16 juillet 2014, n° 361820, au Recueil Lebon) aux maladies professionnelles en n’écartant l’imputabilité qu’en présence d’une faute personnelle de l’agent ou d’une autre circonstance particulière détachant la maladie du service.

 

Si la différence de régime entre l’accident de service et la maladie professionnelle tient notamment à la présomption d’imputabilité en faveur de l’accident de service, il n’y a, selon le Conseil d’État, une fois que le lien direct est établi avec le service, aucune raison d'apprécier différemment la faute de l’agent selon qu'il s'agit du régime de l’accident de service ou de celui de la maladie professionnelle.

 

Ainsi, comme le relève le rapporteur public dans ses conclusions sur cette décision du 13 mars 2019, la solution consistant à faire masse des données du litige, puis à rechercher la cause prépondérante de la maladie parmi elles (circonstances particulières tenant aux conditions de travail, comportement de l’agent, circonstances extérieures) aurait conduit le juge à faire jouer à la responsabilité de l’agent un « grand rôle », ce qui aurait contrasté avec le régime applicable à l’accident de service et avec celui applicable à la maladie professionnelle en droit de la sécurité sociale. carre

 

Rémunérations, traitement et avantages en nature

PRIMES ET INDEMNITÉS

fleche Rémunération – Indemnité spécifique d’installation – Ouverture des droits – Congé de longue durée – Effet sur la condition d’accomplissement de quatre années consécutives de services en métropole

C.A.A. Bordeaux, 7 mars 2019, n° 17BX00845


Un professeur certifié, en poste dans l’académie de la Guyane avant d’être muté dans l’académie de Toulouse à compter du 1er septembre 2010, avait perçu les deux premières fractions de la prime spécifique d’installation, l'une lors de son affectation en métropole, l'autre au début de la troisième année qui avait suivi celle de son affectation. Il avait ensuite été placé sur sa demande en congé de longue durée du 15 décembre 2012 au 30 novembre 2014.

 

La rectrice de l’académie de Toulouse avait ensuite refusé, par une décision du 11 mars 2015, de verser à cet enseignant la troisième fraction de la prime spécifique d’installation au motif qu’il avait été placé en congé de longue durée et que, bien qu’ayant repris son service à compter du 1er décembre 2014, son placement en congé de longue durée avait eu pour effet d’interrompre, comme le prévoyait la circulaire du 4 octobre 2002 du ministre chargé de la fonction publique et du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, le délai de quatre années consécutives de services nécessaire pour pourvoir prétendre au paiement de la troisième fraction.

 

À la demande du professeur certifié, le tribunal administratif de Pau a, par un jugement du 18 janvier 2017, annulé la décision rectorale du 11 mars 2015.

 

Par un arrêt du 7 mars 2019, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté le recours du ministre de l’éducation nationale dirigé contre ce jugement.

 

La cour administrative d’appel, après avoir rappelé les dispositions des articles 1er, 2 et 6 du décret n° 2001-1225 du 20 décembre 2001 portant création d’une prime spécifique d’installation ainsi que celles du 4° de l’article 34 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’État, a jugé que si le fonctionnaire placé en congé de longue durée demeure en position d’activité, il n’est pas affecté sur un emploi et ne peut donc pas être regardé comme effectuant des services au sens des articles 1er et 2 du décret du 20 décembre 2001. La cour a ainsi considéré que la période pendant laquelle le fonctionnaire bénéficie de ce congé ne peut être prise en compte pour l’appréciation de la durée de services de quatre ans prévue par ces articles. Elle a toutefois estimé que ce placement a pour effet, non pas d’interrompre, mais de suspendre le cours de ce délai, lequel recommence à courir lorsque le fonctionnaire placé en congé de longue durée, après avoir été affecté pour la première fois en métropole à la suite de son affectation dans un département d’outre-mer, reprend son service en métropole à l’issue de ce congé.

 

Dans ces conditions, la cour administrative d’appel a jugé que l’administration avait commis une erreur de droit en estimant que la position de congé de longue durée avait un effet interruptif, et non pas simplement suspensif, du délai de quatre ans de services exigé pour le versement de la troisième fraction de la prime spécifique d’installation.

 

N.B. : La cour administrative d’appel de Bordeaux a ainsi tranché la question de l’effet du congé de longue durée sur la computation du délai de quatre années de services exigé par les dispositions de l’article 1er du décret du 20 décembre 2001 et considéré que ce congé ne faisait que suspendre le cours du délai.

 

Cet arrêt se situe dans la lignée jurisprudentielle fixée par le Conseil d’État dans plusieurs de ses décisions concernant les positions du congé parental et de la mise en disponibilité.

 

Ainsi, le Conseil d’État a jugé que l’octroi d’un congé parental à un fonctionnaire bénéficiant de l’indemnité d’éloignement en application de l’article 2 du décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 portant aménagement du régime de rémunération des fonctionnaires de l’État en service dans les départements d’outre-mer, s’il met fin à l’activité de service de l’intéressé et fait alors obstacle à ce que la période de congé parental soit elle-même prise en compte pour l’appréciation de la durée de services de quatre années consécutives prévue par cette réglementation, a seulement pour effet de suspendre le cours de ce délai, lequel recommence à courir au terme de la période de congé parental (cf. C.E., 29 mars 1996, n° 146897, au Recueil Lebon).

 

De même, la mise en disponibilité d’office pour raison de santé d’un fonctionnaire bénéficiant de cette même indemnité d’éloignement, si elle interrompt l’activité de service de l’intéressé et fait ainsi obstacle à ce que la période de disponibilité soit elle-même prise en compte pour l’appréciation de la durée de quatre ans prévue par l’article 2 du décret du 22 décembre 1953, a seulement pour effet de suspendre le cours de ce délai de quatre ans, lequel délai recommence à courir à compter de la réintégration du fonctionnaire dans un emploi situé dans le même département d’outre-mer que celui où il était affecté avant l’interruption de son activité (C.E., 6 février 2004, n° 249792, aux tables du Recueil Lebon). carre

 

Pensions

PENSION DE RETRAITE

fleche Fonctionnaires et agents publics – Cessation de fonctions – Admission à la retraite – Principe de non-rétroactivité – Exceptions limitativement énumérées par l’article R. 36 du code des pensions civiles et militaires de retraite (C.P.C.M.R.) – Rétroactivité nécessaire pour tirer les conséquences de la limite d’âge, pour placer l’agent dans une situation régulière ou remédier à une illégalité

C.E., 6 mai 2019, n° 418482, aux tables du Recueil Lebon


Une professeure certifiée, placée en congé de maladie du 1er octobre 2010 au 31 août 2014 et reconnue définitivement inapte à l’exercice de toute fonction, avait demandé à l’administration son admission à la retraite pour invalidité avec jouissance immédiate de pension à compter du 10 avril 2014. Sans qu’il soit statué sur sa demande avant le 1er septembre 2014, l’intéressée avait été maintenue en congé de maladie jusqu’au 28 février 2015. Elle avait en outre été promue au 8e échelon de son grade à compter du 26 août 2014.

 

Sur le fondement de l’article L. 29 du code des pensions civiles et militaires de retraite (C.P.C.M.R.), le recteur de l’académie de Versailles l’a admise à la retraite pour invalidité sur sa demande à compter du 1er septembre 2014, par un arrêté du 3 février 2015.

 

Par un arrêté du 16 février 2015, le ministre des finances et des comptes publics lui a concédé une pension de retraite pour invalidité à compter du 1er septembre 2014, sur la base du 7e échelon de son grade. L’intéressée a demandé, le 4 juin 2015, la révision de sa pension pour que soit prise en compte la période du 1er septembre 2014 au 28 février 2015 afin que la liquidation de celle-ci intègre sa promotion au 8e échelon. Sa demande a été rejetée le 31 août 2015. Par un nouvel arrêté du 16 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics lui a concédé une nouvelle pension de retraite, en intégrant le bénéfice de la majoration pour assistance à tierce personne, avec la même date d’effet et sur la même base indiciaire. L’intéressée a demandé, le 23 mai 2016, la révision de ce nouveau titre de pension. Sa demande a été rejetée le 7 juillet 2016.

 

La requérante a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler les arrêtés des 16 février et 16 novembre 2015 en tant qu’ils prenaient effet au 1er septembre 2014 et non au 28 février 2015 et qu’ils ne prenaient pas en compte, pour la liquidation de la pension, son accession au 8e échelon de son grade, ainsi que les décisions rejetant ses demandes de révision des 4 juin 2015 et 23 mai 2016. Le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes par un jugement du 22 décembre 2017, contre lequel elle s’est pourvue en cassation.

Après avoir cité les dispositions des articles L. 29 et R. 36 du C.P.C.M.R., le Conseil d’État a posé le principe selon lequel « en l'absence de disposition législative l'y autorisant, l'administration ne peut, même lorsqu'elle est saisie d'une demande de l'intéressé en ce sens, déroger à [la] règle générale [de non-rétroactivité des décisions administratives] et conférer un effet rétroactif à une décision d'admission à la retraite, à moins qu'il ne soit nécessaire de prendre une mesure rétroactive pour tirer les conséquences de la survenance de la limite d'âge, pour placer l'agent dans une situation régulière ou pour remédier à une illégalité ».

 

La Haute juridiction a ensuite relevé que le tribunal administratif s'était fondé sur la seule circonstance que l'administration n'avait pu statuer de manière définitive avant le 1er septembre 2014 sur la demande d'admission à la retraite de la requérante pour considérer que l'arrêté du 3 février 2015 prononçant la mesure de radiation des cadres pour un motif d’admission à le retraite à compter du 1er septembre 2014 devait être regardé comme présentant le caractère d'une mesure de régularisation de sa situation administrative au regard de ses droits à pension et n'était ainsi pas entaché d'une rétroactivité illégale.

 

Le Conseil d’État a jugé que, ce faisant, les juges de première instance avaient commis une erreur de droit dès lors que l’application rétroactive de cet arrêté du 3 février 2015 n’était pas nécessaire pour placer l’intéressée, en congé de maladie entre le 1er octobre 2010 et le 28 février 2015, dans une situation régulière.

 

Il a en conséquence annulé le jugement du 22 décembre 2017 du tribunal administratif de Paris, devant lequel il a renvoyé l’affaire.

 

N.B. : Cette décision, qui concerne un litige en matière de pension, s’inscrit dans la continuité d’une jurisprudence constante du Conseil d’État selon laquelle, en l’absence de disposition législative le permettant, l’administration ne peut, en aucune manière, prendre une mesure rétroactive de mise à la retraite, et ce même si l’intéressé formule une demande en ce sens (cf. C.E., 20  février 1952, n° 7335, au Recueil Lebon).

 

Ainsi et en application de l’article L. 26 du C.P.C.M.R., la mise en paiement d’une pension ne peut être antérieure à la date de la décision de radiation des cadres du titulaire de la pension. Trois dérogations au principe de non-rétroactivité des titres de pension sont toutefois prévues par l’article R. 36 : soit du fait de l’application de dispositions statutaires obligeant à placer l’agent dans une position administrative régulière, soit du fait de la survenance de la limite d’âge, soit en présence d’une illégalité.

 

Comme le relève la rapporteure publique dans ses conclusions sur cette décision du 6 mai 2019, l’effet rétroactif d’un titre de pension n’est pas une option dont disposerait l’administration, mais une nécessité à laquelle elle répond lorsque la situation du futur pensionné correspond à l’un des trois cas définis par l’article R. 36 (cf. C.E., 3 février 1989, Ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et du budget, n° 78642 : nécessité, sur le fondement de l’article R. 36, de donner un effet rétroactif au titre de pension d’un agent qui, à l’expiration d’une période de congé de longue durée, n’en n’avait pas demandé le renouvellement ; C.E., 13 octobre 2006, n° 265220 : nécessité, sur le fondement de l’article R. 36, de donner un effet rétroactif au titre de pension d’un agent à l’échéance de sa période de disponibilité pour convenances personnelles).

 

En l’espèce, la professeure ne remplissait aucune des conditions prévues par l’article R. 36. Elle n’était ni dans une position irrégulière, ni atteinte par la limite d’âge et aucune situation d'illégalité ne nécessitait de donner un effet rétroactif à la mise en paiement de sa pension de retraite. carre

 

Questions propres aux agents non titulaires

LICENCIEMENT – NON-RENOUVELLEMENT D’ENGAGEMENT

fleche Agent contractuel de droit public – Contrat à durée déterminée – Refus de la modification d’un élément substantiel du contrat de travail – Substitution de motif – Nomination d’un fonctionnaire dans l’emploi occupé – Obligation de reclassement préalable au licenciement

T.A. Amiens, 8 mars 2019, n° 1702532


Un agent recruté par un contrat à durée déterminée de trois ans en qualité de directeur général des services (D.G.S.) d’une université a demandé au tribunal administratif d’Amiens d’annuler la décision par laquelle le président de l’université, après avoir constaté une insuffisance professionnelle de l’intéressé et lui avoir proposé un reclassement en qualité de « chargé de mission développement durable » que celui-ci avait refusé, avait prononcé son licenciement pour refus d’une modification d’un élément substantiel de son contrat sur le fondement du 4° de l’article 45-3 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État.

 

Le tribunal administratif d’Amiens a annulé la décision du président de l’université.

 

Après avoir rappelé les dispositions du 4° de l’article 45-3 du décret du 17 janvier 1986 et celles de son article 45-4, dont il en résulte que le refus de la modification d’un élément substantiel de son contrat de travail n’est susceptible de fonder le licenciement d’un agent contractuel que si cette modification est, à la date de celle-ci, justifiée par une transformation du besoin ou de l’emploi, le tribunal administratif a relevé, en l’espèce, qu’en l’absence de contestation de l’administration, d’une part, la proposition de modification du contrat de l’intéressé, puis son licenciement n’étaient pas motivés par la transformation du besoin ou de l’emploi, d’autre part, le poste de D.G.S. n’avait pas été supprimé au sein de l’université et était toujours occupé depuis le licenciement du requérant.

 

L’université avait demandé au juge que soit substitué au motif initial du licenciement, à savoir le refus d’une modification d'un élément substantiel du contrat, le motif tiré de la volonté de recruter un fonctionnaire titulaire sur les fonctions de D.G.S. en application du 3° de l’article 45-3 du décret du 17 janvier 1986. Ces dispositions prévoient en effet, au nombre des motifs pouvant justifier le licenciement d’un agent contractuel recruté pour occuper un besoin permanent, celui tiré du « recrutement d’un fonctionnaire lorsqu’il s’agit de pourvoir un emploi soumis à la règle énoncée à l’article 3 de la loi [n° 83-634] du 13 juillet 1983 [portant droits et obligations des fonctionnaires] ».

 

Après avoir rappelé les conditions nécessaires à l’accueil d’une demande de substitution de motif, notamment le fait que la substitution demandée « ne prive pas le requérant d’une garantie procédurale liée au motif substitué » (cf. C.E. Section, 6 février 2004, n° 240560, au Recueil Lebon), le tribunal administratif a refusé de procéder à cette substitution de motif, en retenant qu’« une telle substitution de motifs aurait pour effet de priver le requérant des garanties résultant de ces dispositions [du 3° de l’article 45-3 du décret du 17 janvier 1986] dès lors que la décision de licenciement contestée ne précisait pas la possibilité pour [le requérant] de présenter une demande écrite de reclassement, comme le prévoit l’article 45-5 du même décret ».

 

En l’espèce, la proposition de reclassement faite à l’intéressé était antérieure à la décision de licenciement, alors que les dispositions de l’article 45-5 du décret du 17 janvier 1986 prévoient que l’intéressé est invité à présenter une demande de reclassement, qui est regardée comme une garantie par le juge, avant l’intervention de la décision le licenciant (cf. C.A.A. Bordeaux, 28 juin 2018, n° 16BX00584, considérant 6 ; C.A.A. Marseille, 27 décembre 2016, n° 15MA02417 et n° 15MA03838, considérant 5 ; sur le reclassement d’un agent contractuel dont l’emploi est pourvu par le recrutement d’un agent titulaire : Le Point sur « L’obligation de reclassement des agents publics », publié dans la LIJ n° 193 de mai 2016).

 

La substitution de motif ne pouvant être accueillie, le tribunal administratif a, par conséquent, jugé que la décision procédant au licenciement du requérant était entachée d’une erreur de droit. carre

 

Responsabilité

QUESTIONS GÉNÉRALES

Mise en cause de la responsabilité de l’administration

fleche Responsabilité administrative – Sortie scolaire – Faute dans l’organisation du service – Défaut de surveillance – Compétence juridictionnelle

T.A. Montpellier, 16 avril 2019, n° 1705592


À l’occasion d’une sortie scolaire, une jeune élève, alors âgée de cinq ans, était restée endormie à l’arrière du bus qui quittait l’école après avoir ramené les élèves. L’enfant avait été retrouvée environ quarante minutes après le départ du bus de l’école.

 

Sa mère a d’abord saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Montpellier, qui s’est déclaré incompétent pour statuer sur la demande d’expertise médicale qu’elle avait formée. Elle avait ensuite saisi le tribunal administratif de Montpellier d’une requête tendant à la condamnation de l’État à réparer les préjudices que sa fille et elle-même auraient subis résultant d’un défaut dans l’organisation du service public de l’enseignement.

 

Le tribunal administratif a rappelé qu’en application de l’article L. 911-4 du code de l’éducation, qui prévoit que la responsabilité de l’État se substitue à celle des membres de l’enseignement public, le juge civil est compétent dans les cas où le dommagese produit à l’occasion d’une activité scolaire et résulte d’une faute d’un enseignant, quel que soit juridiquement le caractère de cette faute (cf. Cass. civ. 1, 20 décembre 1982, n° 81-11748, au Bulletin). En revanche, le juge administratif est compétent lorsque le préjudice ne trouve pas sa cause dans le fait d’un agent, mais trouve son origine dans un travail public ou provient d’un défaut d’organisation du service public de l’enseignement.

 

En l’espèce, pour écarter l’exception d’incompétence soulevée par le recteur d’académie sur le fondement de l’article L. 911-4 du code de l’éducation, le tribunal a estimé qu’il résultait des écritures de la requérante que son action en responsabilité était fondée sur la faute commise par l’administration dans l’organisation de la sortie scolaire et que, par conséquent, la juridiction administrative était compétente pour en connaître.

 

Le tribunal administratif a toutefois rejeté au fond la requête de l’intéressée au motif que le défaut de surveillance des élèves par l’instituteur et les accompagnants invoqué par la requérante ne pouvait se rattacher à une mauvaise organisation du service public de l’enseignement et caractériser une faute qui aurait été commise par l’administration.

 

N.B. : Ce jugement permet de rappeler que les différents régimes de responsabilité susceptibles d'être mis en œuvre en cas de dommage subi par un élève, s’ils peuvent le cas échéant être cumulés, recouvrent des fautes distinctes (cf. C.E., 3 novembre 1978, Caisse primaire d’assurance maladie de Béziers-Saint-Pons,

n° 04615, au Recueil Lebon).

 

Ainsi, par principe, si la faute à l’origine du dommage est commise par un agent chargé de la surveillance des élèves dans l’exercice de cette mission, elle engage la responsabilité de l’État sur le fondement de l’article L. 911-4 du code de l’éducation. Le juge administratif retrouve sa compétence si le défaut de surveillance à l’origine du dommage résulte d’une mauvaise organisation du service des agents chargés de la surveillance (cf. C.A.A. Lyon, 27 décembre 2018, n° 16LY00529).

 

En l’absence de toute faute, le tribunal administratif a logiquement rejeté les conclusions de la requête. carre

 

Procédure contentieuse

fleche Publicité des circulaires ministérielles relatives aux bourses – Site internet du ministère de l’enseignement supérieur – Délai de recours contentieux

C.E., 20 mars 2019, n° 401774, aux tables du Recueil Lebon


Deux étudiants, représentés par leur mère, ont demandé l’annulation de la circulaire ministérielle n° 2015-101 du 9 juin 2015 relative aux modalités d’attribution des bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux et des aides à la mobilité internationale pour l’année 2015-2016, en tant qu’elle ne prend pas en compte certaines charges dans le calcul du revenu ouvrant droit à une bourse.

 

À titre liminaire, le Conseil d’État a rappelé que cette circulaire était signée par le ministre chargé de l’enseignement supérieur au titre des compétences que lui confère l’article 1er du décret n° 2008-974 du 18 septembre 2008, aujourd’hui codifié à l’article D. 821-1 du code de l’éducation, confirmant ainsi que le ministre est bien compétent pour définir des critères d’attribution des bourses de l’enseignement supérieur (cf. C.E., 15 juillet 2004, n° 245357, au Recueil Lebon ; C.E., 2 février 2005, n° 257984, aux tables du Recueil Lebon).

 

Ensuite, pour apprécier la recevabilité de la requête dont il avait été saisi, le Conseil d’État a jugé que : « En l'absence d'obligation, résultant d'un texte législatif ou réglementaire lui-même publié au Journal officiel de la République française, de publier un acte réglementaire dans un recueil autre que le Journal officiel, la publication dans un tel recueil n'est pas, en principe, de nature à fait courir le délai du recours contentieux. Il n'en va autrement que si le recueil dans lequel le texte est publié peut, eu égard à l'ampleur et aux modalités de sa diffusion, être regardé comme aisément consultable par toutes les personnes susceptibles d'avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester la décision. » (Cf. C.E. Section, 27 juillet 2005, n° 259004,au Recueil Lebon ; C.E., 7 juillet 2010, Conseil national de l’ordre des médecins, n° 329897, aux tables du Recueil Lebon.)

 

En l’espèce, la circulaire avait été mise en ligne dans son intégralité le 9 juillet 2015 sur le site du ministère de l’enseignement supérieur, dans la rubrique requise du Bulletin officiel et selon des modalités « permettant un accès facile et garantissant sa fiabilité et sa date de publication ». Dans ces conditions, le Conseil d’État a estimé qu’eu égard à l'objet et aux bénéficiaires des dispositions de cette circulaire, cette diffusion était de nature à garantir le respect des obligations de publication dues aux personnes ayant un intérêt leur donnant qualité pour la contester (cf. en ce sens, s’agissant de la publication d’une circulaire au Bulletin officiel des douanes, également accessible sur le site internet de la direction générale des douanes et droits indirects : C.E., 26 décembre 2018, Société Massis import-export Europe,

n° 424759, aux tables du Recueil Lebon).

 

Par suite, cette publication régulière ayant eu pour effet de faire courir le délai de recours contentieux de deux mois, le Conseil d’État a jugé que la requête, enregistrée le 25 juillet 2016, soit plus d’un an après la mise en ligne de la circulaire, était tardive et l’a rejetée comme étant irrecevable.

 

N.B. : Le Conseil d’État a également jugé, s’agissant de la formalité de publicité qui conditionne l’entrée en vigueur d’un acte règlementaire, que « (….) sa publication, en complément de l’affichage (…), dans son intégralité sous forme électronique sur le site internet [d’une personne publique], dans des conditions garantissant sa fiabilité et sa date de publication / (…) [est de nature] à faire courir le délai de recours contentieux contre cet acte » (C.E. Section, 3 décembre 2018, Ligue des droits de l'homme, n° 409667, au Recueil Lebon). carre

 

fleche Requête dirigée contre une décision de nomination d’un maître de conférences – Irrecevabilité (tardiveté) – Point de départ des délais de recours contentieux – Décision mise en ligne sur le site Galaxie – Requête dirigée contre une décision relative à la gestion de carrière du candidat nommé en qualité de maître de conférences – Défaut d’intérêt à agir du candidat non retenu

T.A. Toulouse, 6 février 2019, n° 1702827 et n° 1704428


Par deux requêtes distinctes, une attachée temporaire d’enseignement et de recherche (ATER), candidate à un poste de maître de conférences ouvert par une université et classée en seconde position par le comité de sélection, avait demandé l’annulation de l’arrêté nommant la personne qui avait été classée première au titre de la procédure de recrutement, ainsi que de l’arrêté portant classement de cette dernière au quatrième échelon de la classe normale du corps des maîtres de conférences dans lequel celle-ci avait été nommée.

 

Le tribunal administratif de Toulouse a rejeté les deux requêtes comme étant irrecevables.

 

1. S’agissant de la requête dirigée contre la décision de nomination, après avoir rappelé les dispositions du premier alinéa de l’article R. 421-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif a rappelé que : « La publication d’une décision administrative dans un recueil autre que le Journal officiel fait courir le délai du recours contentieux à l’égard de tous les tiers si l’obligation de publier cette décision dans ce recueil résulte d’un texte législatif ou règlementaire lui-même publié au Journal officiel de la République française. En l’absence d’une telle obligation, cet effet n’est attaché à la publication que si le recueil peut, eu égard à l’ampleur et aux modalités de sa diffusion, être regardé comme aisément consultable par toutes les personnes susceptibles d’avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester la décision. » (Cf. C.E. Section, 27 juillet 2005, n° 259004, au Recueil Lebon.)

 

En l’espèce, le tribunal administratif a relevé que l’obligation de publication de la liste des candidats recrutés dans le corps des maîtres de conférences sur le domaine applicatif du portail Galaxie, accessible depuis le site du ministère de l’enseignement supérieur, était prévue par les dispositions de l’article 19 de l’arrêté du 13 février 2015 relatif aux modalités générales des opérations de mutation, de détachement et de recrutement par concours des maîtres de conférences, publié au Journal officiel de la République française du 11 mars 2015.

 

Le tribunal administratif a ensuite jugé que la requérante avait, par rapport à la décision de nomination litigieuse, la qualité de tiers « à l’égard duquel la publication de l’arrêté précité sur le site Galaxie a[vait] constitué la mesure de publicité appropriée qui a[vait] fait courir le délai de recours à son égard ».

 

Ce jugement établit donc que la publication sur le site Galaxie des arrêtés de nomination dans le corps des maîtres de conférences suffit bien à faire courir le délai de recours contentieux contre ces actes à l’égard des tiers.

 

2. S’agissant de la requête dirigée contre l’arrêté portant classement de la candidate nommée dans le corps des maîtres de conférences, le tribunal administratif, après avoir rappelé que la requérante, candidate non retenue, avait intérêt à attaquer l’ensemble des décisions prises dans le cadre de la procédure de recrutement litigieuse, laquelle présente le caractère d’une opération complexe (cf. C.E., 23 mars 1994, n° 104420, au Recueil Lebon), a considéré que « la qualité de candidate de la requérante ne saurait lui conférer un intérêt pour agir à contester l’arrêté en litige », ce dernier n’étant pas relatif au recrutement de la candidate nommée, mais à la gestion de sa carrière. carre

 

RECEVABILITÉ DES REQUÊTES

fleche Recevabilité de la requête – Liaison du contentieux en cours d’instance

C.E. Section, avis, 27 mars 2019, n° 426472, au Recueil Lebon


La Section du contentieux du Conseil d’État, saisi par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne sur le fondement de l’article L. 113-1 du code de justice administrative (C.J.A.), a précisé, dans un avis rendu le 27 mars 2019, les conditions dans lesquelles doit être appréciée la recevabilité d’une requête tendant au versement d’une somme d’argent, à la suite des modifications apportées aux dispositions de l’article R. 421-1 du C.J.A. par l’article 10 du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant modification du C.J.A., dit décret « JADE », qui s’appliquent aux requêtes présentées depuis le 1er janvier 2017.

 

Le Conseil d’État a indiqué qu’il résulte de ces dispositions de l’article R. 421-1 du C.J.A. qu’en l’absence d’une décision de l’administration rejetant une demande formée devant elle par le requérant ou pour son compte, une requête tendant au versement d’une somme d’argent est irrecevable et peut être rejetée pour ce motif même si, dans son mémoire en défense, l’administration n’a pas soutenu que cette requête était irrecevable, mais que les conclusions du requérant n’étaient pas fondées.

 

En revanche, les termes du second alinéa de l’article R. 421-1 du C.J.A. n’impliquent pas que la condition de recevabilité de la requête tenant à l’existence d’une décision de l’administration s’apprécie à la date de son introduction. Cette condition doit être regardée comme remplie si, à la date à laquelle le juge statue, l’administration a pris une décision, expresse ou implicite, sur une demande formée devant elle. Par suite, l’intervention d’une telle décision en cours d’instance régularise la requête, sans qu’il soit nécessaire que le requérant confirme ses conclusions et alors même que l’administration aurait auparavant opposé une fin de non-recevoir fondée sur l’absence de décision.

 

N.B. : Par cette décision, le Conseil d’État précise la portée des dispositions de l’article R. 421-1 du C.J.A. telles que modifiées par l’article 10 du décret du 2 novembre 2016, qui pouvaient être lues comme excluant toute liaison du contentieux en cours d’instance en matière indemnitaire et pécuniaire. Une telle lecture de l’article R. 421-1 du C.J.A., qui aurait conduit à la remise au cause de la jurisprudence selon laquelle l’existence d’une décision préalable pour lier le contentieux ne s’apprécie pas à la date de l’introduction d’instance, mais à la date du jugement (cf. C.E., 11 avril 2008, Établissement français du sang, n° 281374, au Recueil Lebon), est donc exclue par le Conseil d’État.

 

Se trouve subsidiairement abandonnée, et elle seule, la jurisprudence selon laquelle les conclusions de l’administration tendant, à titre principal, au rejet d’une requête tendant au versement d’une somme d’argent suffisaient pour être regardées comme constituant une décision susceptible de lier le contentieux (C.E. Assemblée, 23 avril 1965, n° 60721, au Recueil Lebon). carre

 

fleche Recevabilité – Acte à caractère de décision – Décision administrative susceptible de recours pour excès de pouvoir – Recommandation émise par le Défenseur des droits en application des articles 24 et 25 de la loi organique du 29 mars 2011 (non) – Refus du Défenseur des droits de faire usage des pouvoirs qu’il tient de ces dispositions (non)

C.E., 22 mai 2019, n° 414410, aux tables du Recueil Lebon


Une ancienne agente contractuelle, recrutée en septembre 2011 au sein de la direction départementale de la cohésion sociale des Côtes-d’Armor, a saisi le Défenseur des droits pour des faits de harcèlement moral et de discrimination qu’elle estimait avoir subis de la part du directeur départemental, son supérieur hiérarchique.

 

Le Défenseur des droits a, le 13 décembre 2016, envoyé au ministre en charge des affaires sociales et de la santé une recommandation dans laquelle il préconisait de verser à l’intéressée une prime indûment retenue par son supérieur hiérarchique, de supprimer les mentions discriminatoires portées sur ses évaluations, de mettre en place une enquête interne, afin de déterminer s’il y avait lieu d’engager une procédure disciplinaire à l’encontre de son supérieur hiérarchique, et de mettre en place des mesures pour garantir que l’agent qui dénonce des faits de discrimination auprès de la cellule d’écoute et d’alerte des ministères sociaux ne subisse pas de représailles.

 

Le tribunal administratif de Rennes a été saisi par le directeur départemental de la cohésion sociale des Côtes- d’Armor de conclusions tendant à l’annulation de la recommandation du Défenseur des droits, que le tribunal puis la cour administrative d’appel de Nantes ont successivement rejetées par ordonnances comme manifestement irrecevables. Le directeur départemental s’est alors pourvu en cassation contre l’ordonnance de la cour.

 

Le Conseil d’État, après avoir rappelé les dispositions des articles 24, 25 et 36 de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits, a précisé que lorsqu’il émet des recommandations, sans faire usage de la faculté dont il dispose de les rendre publiques, le Défenseur des droits n’énonce pas des règles qui s’imposeraient aux personnes privées ou aux autorités publiques, mais recommande aux personnes concernées les mesures qui lui semblent de nature à remédier à tout fait ou à toute pratique qu’il estime être discriminatoire, ou à en prévenir le renouvellement. Ces recommandations, alors même qu’elles auraient une portée générale, ne constituent pas des décisions administratives susceptibles de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Il en va de même du refus du Défenseur des droits de faire usage du pouvoir d’émettre de telles recommandations.

 

En l’espèce, le Conseil d’État a relevé que la recommandation en litige était émise sur le fondement des dispositions précitées de la loi organique du 29 mars 2011 et invitait l’administration à prendre des mesures susceptibles de remédier à ce qu’il avait estimé être des pratiques discriminatoires.

 

Il en a conclu qu’en estimant que cette recommandation ne constituait pas une décision administrative qui s’imposait aux personnes concernées, susceptible comme telle de faire l’objet d’un recours en excès de pouvoir, la cour administrative d’appel n’avait pas commis d’erreur de droit ni inexactement qualifié l’acte dont elle avait été saisie.

 

N.B. : Le Conseil d’État a fait application de sa décision « Société Éditions Tissot” », rendue par la section du contentieux le 13 juillet 2007 (n° 294195, au Recueil Lebon), relative aux recommandations de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité à laquelle le Défenseur des droits a succédé et qui exerce les mêmes pouvoirs dans les mêmes conditions.

 

Ainsi, « les recommandations qui (…) ne sont assorties d’aucune menace de publicité, menace qui ne peut accompagner qu’une injonction, ne sont (…) pas susceptibles de recours » (conclusions du rapporteur public sur la décision du 22 mai 2019).

 

Cette solution est conforme à l’intention du législateur organique qui indiquait, dans l’étude d’impact du projet de loi relative au Défenseur des droits, qu’« eu égard aux caractéristiques de l’intervention du Défenseur des droits, ni ses recommandations, ou même ses injonctions, ni le rejet des réclamations qui lui ont été adressées ne seront susceptibles de recours » (cf. 5.2.2.a) Contentieux à l'égard des décisions ou recommandations du Défenseur des droits). carre

 

POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE

fleche Principe de sécurité juridique – Obligation d’exercer un recours juridictionnel dans un délai raisonnable – Application aux décisions implicites de rejet lorsqu’il est établi que le demandeur a eu connaissance de la décision – Preuve d’une telle connaissance

C.E., 18 mars 2019, n° 417270, au Recueil Lebon


Le requérant a demandé, le 27 janvier 2004, au préfet de Seine-Saint-Denis l’échange de son permis de conduire camerounais contre un permis de conduire français. Le préfet de Seine-Saint-Denis, ne s’estimant pas compétent pour statuer sur cette demande alors que l’intéressé avait entretemps fixé son domicile dans le Val-de-Marne, l’a transmise au préfet du Val-de-Marne qui n’a pas répondu à la demande. Face au silence gardé par l’administration, le requérant a formé, le 14 août 2014, auprès du préfet du Val-de-Marne une nouvelle demande d’échange de son permis de conduire, restée également sans réponse.

 

Le requérant a demandé au tribunal administratif de Montreuil d’annuler les décisions implicites du préfet du Val-de-Marne rejetant ses demandes formées en 2004 et 2014.

 

Par un jugement du 9 novembre 2017, contre lequel le requérant s’est pourvu en cassation, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande d’annulation.

 

Le Conseil d’État, par sa décision du 18 mars 2019, a annulé ce jugement en tant qu’il avait rejeté les conclusions présentées par le requérant relatives à la décision implicite rejetant sa demande d’échange de son permis de conduire formée le 27 janvier 2004, motif pris que le jugement était entaché d’irrégularité et, au surplus, d’erreur de droit, et il a renvoyé l’affaire devant ce tribunal.

 

Le Conseil d’État a rappelé les dispositions de l’article 21 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, celles de l’article R. 421-2 du code de justice administrative, de l’article 19 de la même loi du 12 avril 2000 et de l’article 1er du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001, d’où il résultait qu’en l’absence d’un accusé de réception comportant les mentions prévues par ces dispositions, les délais de recours contentieux contre une décision implicite de rejet n’étaient pas opposables à son destinataire.

 

Il a ensuite cité le considérant de principe de la décision dite « Czabaj » (C.E. Assemblée, 13 juillet 2016, n° 387763, au Recueil Lebon) aux termes duquel : « Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d’une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l’obligation d’informer l’intéressé sur les voies et délais de recours, ou l’absence de preuve qu’une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l’exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance. »

 

Au point 4 de sa décision, le Conseil d’État a précisé que les règles énoncées dans sa jurisprudence Czabaj, relatives au délai raisonnable au-delà duquel le destinataire d’un décision ne peut exercer de recours juridictionnel, qui ne peut en règle générale excéder un an sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, sont applicables à la contestation d’une décision implicite de rejet née du silence gardé par l’administration sur une demande présentée devant elle lorsqu’il est établi que le demandeur a eu connaissance de la décision. À ce titre, le Conseil d’État précise que : « La preuve d’une telle connaissance ne saurait résulter du seul écoulement du temps depuis la présentation de la demande. Elle peut en revanche résulter de ce qu’il est établi, soit que l’intéressé a été clairement informé des conditions de naissance d’une décision implicite lors de la présentation de sa demande, soit que la décision a, par la suite, été expressément mentionnée au cours de ses échanges avec l’administration, notamment à l’occasion d’un recours gracieux dirigé contre cette décision. Le demandeur, s’il n’a pas été informé des voies et délais de recours dans les conditions prévues par les textes (…), dispose alors, pour saisir le juge, d’un délai raisonnable qui court, dans la première hypothèse, de la date de naissance de la décision implicite et, dans la seconde, de la date d’événement établissant qu’il a eu connaissance de la décision. »

 

Au cas d’espèce, le Conseil d’État a relevé que pour rejeter comme tardives les conclusions du requérant tendant à l’annulation de la décision implicite de rejet née du silence observé par l’administration sur sa demande formée le 27 janvier 2004, le tribunal avait retenu que le principe de sécurité juridique faisait obstacle à ce que cette décision implicite puisse être contestée devant le juge administratif au-delà d’un délai d’un an à compter de sa naissance, intervenue deux mois après le dépôt de la demande auprès de l’administration.

 

Le Conseil d’État a jugé qu’en rejetant les conclusions du requérant comme irrecevables au motif qu’elles n’avaient pas été présentées dans un délai raisonnable, sans rechercher si le requérant avait eu connaissance de l’existence d’une décision implicite de rejet, et en faisant courir ce délai de la date à laquelle la décision était née, alors qu’il était constant que l’administration n’avait pas informé l’intéressé lors de la présentation de sa demande des conditions de naissance d’une décision implicite, le tribunal administratif avait méconnu les règles énoncées au point 4 de sa décision relatives aux modalités d’application de la jurisprudence Czabaj aux décisions implicites prises sur demande, et entaché ainsi son jugement d’une erreur de droit.

 

N.B. : Le Conseil d’État a étendu l’application de la règle du délai raisonnable issue de sa jurisprudence Czabaj aux recours contentieux dirigés contre les décisions implicites de rejet.

 

La solution adoptée s’inscrit dans la continuité de sa jurisprudence récente, le Conseil d’État ayant, en vertu du principe de sécurité juridique, déjà étendu l’application de la règle du délai raisonnable aux recours administratifs préalables obligatoires (cf. C.E. Section, 31 mars 2017, Ministre des finances et des comptes publics, n° 389842, au Recueil Lebon), au contentieux fiscal de l’assiette et du recouvrement (ibid. : C.E. Section, n° 389842), au contentieux des titres exécutoires (C.E.,

9 mars 2018, Communauté d'agglomération du pays ajaccien, n° 401386, aux tables du Recueil Lebon), au contentieux des décisions expresses dont l’objet est purement pécuniaire (C.E., 9 mars 2018, Communauté de communes du pays roussillonnais, n° 405355, aux tables du Recueil Lebon), aux recours des tiers dirigés contre des autorisations d’urbanisme (C.E., 9 novembre 2018, n° 409872, aux tables du Recueil Lebon), ou encore, très récemment, à la recevabilité de l’exception d’illégalité d’un acte individuel (C..E, 27 février 2019, n° 418950, au Recueil Lebon, dont la LIJ n° 206 de mai 2019 a rendu compte).

 

En revanche, le Conseil d’État a estimé que la règle du délai raisonnable ne trouvait pas à s’appliquer aux recours tendant à la mise en jeu de la responsabilité d’une personne publique qui, s’ils doivent être précédés d’une réclamation auprès de l’administration, ne tendent pas à l’annulation ou à la réformation de la décision rejetant tout ou partie de cette réclamation, mais à la condamnation de la personne publique à réparer les préjudices qui lui sont imputés. La prise en compte de la sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause indéfiniment des situations consolidées par l’effet du temps, est alors assurée par les règles de la prescription (cf. C.E., 17 juin 2019, Centre hospitalier de Vichy, n° 413097, au Recueil Lebon). carre

 

Technologies de l’information et de la communication (TIC)

FICHIERS (TRAITEMENTS AUTOMATISÉS DE DONNÉES)

fleche Traitements de données à caractère personnel – Droit d’opposition – Données ayant cessé d’être conservées dans le traitement – Recours pour excès de pouvoir – Non-lieu

C.E., 18 mars 2019, n° 406313, aux tables du Recueil Lebon


Cette décision du Conseil d’État a été rendue après un deuxième pourvoi en cassation sur l’affaire en cause (pour le premier, cf. C.E., 27 juin 2016, n° 392145, aux tables du Recueil Lebon, LIJ n° 194, juillet 2016). En application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d’État a statué définitivement sur cette affaire.

 

À l’origine, un parent d’élève a demandé au directeur des services départementaux de l’éducation nationale (D.S.D.E.N.) de l’académie de Paris de faire droit à son opposition à l’enregistrement et à la conservation de données à caractère personnel relatives à ses enfants dans les traitements « base élèves premier degré » (B.E.1D.) et « base nationale des identifiants élèves » (BNIE). Le D.S.D.E.N. ayant refusé de faire droit à sa demande, le parent d’élève a saisi les juridictions administratives.

 

Confirmant l’arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Paris, le Conseil d’État a jugé qu’il y a non-lieu à statuer sur des conclusions en annulation d’une décision refusant de faire droit à une demande d’opposition à l’enregistrement et à la conservation de données dans un traitement lorsqu’il est établi que ces données ont été effacées.

 

Il a par ailleurs précisé que le fait que les données en cause ont pu être transférées vers d'autres traitements était sans incidence sur le prononcé du non-lieu à statuer, dans la mesure où le requérant a la possibilité d’exercer son droit d’opposition à l’encontre des traitements en question.

 

N.B. : Par cette décision, le Conseil d’État s’est par ailleurs prononcé une nouvelle fois sur la notion de « motifs légitimes d’opposition » au sens de l’article 38 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dans sa rédaction applicable au litige (cf. décision n° 384869 du 18 novembre 2015 commentée dans la LIJ n° 191 de janvier 2016). Confirmant sa jurisprudence, il a estimé que l’exercice du droit d’opposition « pour motifs légitimes » est subordonné à l'existence de raisons légitimes tenant de manière prépondérante à la situation particulière du requérant.

 

Il convient toutefois de souligner que la notion de « motifs légitimes d’opposition » mentionnée à l’article 38 de la loi du 6 janvier 1978 dans sa rédaction applicable au litige n’existe plus. Elle a été remplacée par la notion de « raisons tenant à la situation particulière » de la personne concernée mentionnée à l’article 21 du règlement général sur la protection des données (R.G.P.D. : chapitre 3, section 4) du 27 avril 2016, entré en vigueur le 25 mai 2018.

 

Il appartient désormais au responsable du traitement, lorsque la personne concernée invoque des « raisons tenant à sa situation particulière », de démontrer qu’il existe des motifs légitimes et impérieux justifiant le traitement qui prévalent sur les intérêts et les droits et libertés des personnes concernées. carre

 

Accès aux documents administratifs

COMMUNICATION DE DOCUMENTS ADMINISTRATIFS

fleche Accès aux documents administratifs – Protocole transactionnel – Communication après la fin de l’instance

C.E., 18 mars 2019, Ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, n° 403465, au Recueil Lebon


M. X a demandé au ministre chargé de l’économie la communication de l’accord conclu entre les sociétés concessionnaires d’autoroutes et le Gouvernement, qui avait, notamment, pour objet d’éteindre le litige né de l’arrêté du 27 janvier 2015 décidant du gel des tarifs des péages autoroutiers à compter du 1er février 2015.

 

En l’absence de réponse à sa demande, il a saisi la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) qui a rendu un avis favorable à la communication de ce document, puis, après un nouveau refus implicite de communication opposé par le ministre, a saisi le tribunal administratif de Paris qui a fait droit à sa demande.

 

Statuant sur le pourvoi en cassation formé par le ministre, le Conseil d’État s’est prononcé sur la nature des documents demandés et a estimé que les protocoles transactionnels conclus par l’administration afin de prévenir ou d’éteindre un litige relevant de la juridiction administrative ne présentent pas le caractère d’un document judiciaire ou juridictionnel, comme le soutenait l’administration dans son mémoire en défense, mais celui d’un contrat administratif présentant le caractère d’un document administratif communicable dans les conditions définies par le livre III du code des relations entre le public et les administrations (C.R.P.A.).

 

Le Conseil d’État a toutefois précisé que la communication d’un accord transactionnel visant à éteindre un litige porté devant une juridiction administrative est de nature à porter atteinte au déroulement de la procédure juridictionnelle engagée au sens du f du 2° de l’article L.311-5 du C.R.P.A.

 

Il a donc jugé que la communication d’un tel document ne peut intervenir qu’après la fin de l’instance et sous réserve du respect des secrets protégés par la loi, tels que le secret en matière commerciale et industrielle. carre

 

fleche Parcoursup – Droit d’accès aux procédés algorithmiques utilisés dans les outils d’aide à la décision – Article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration – Champ d’application (exclusion) – Régime spécial organisé par l’article L. 612-3 du code de l’éducation

C.E., 12 juin 2019, Université des Antilles, n° 427916, aux tables du Recueil Lebon


L’Union nationale des étudiants de France (UNEF) a demandé, en juin 2018, à l’université des Antilles de lui communiquer les procédés algorithmiques utilisés dans le cadre du traitement des candidatures d’entrée en licence via la plate-forme « Parcoursup » ainsi que les codes sources correspondants. L’université des Antilles ayant implicitement rejeté sa demande, l’UNEF a saisi le tribunal administratif de la Guadeloupe d’une demande tendant à l’annulation de cette décision.

 

Par un jugement du 4 février 2019, le tribunal administratif de la Guadeloupe a fait droit à la demande de l’UNEF et enjoint à l’université des Antilles de lui communiquer les documents demandés, au motif que les dispositions du dernier alinéa du I de l’article L. 612-3 du code de l’éducation, applicables aux candidats, n’ont pas écarté les dispositions de l’article L. 311-1 du code des relations entre le public et l’administration (C.R.P.A.) lorsque la demande n’est pas  présentée par la personne ayant fait l’objet d’une décision prise à l’aide d’un traitement algorithmique et que la demande ne tend pas à la mise en ligne de ces traitements.

 

L’université des Antilles s’est pourvue en cassation contre ce jugement devant le Conseil d’État.

 

Le Conseil d’État, après avoir rappelé les dispositions des articles L. 311-1, L. 311-3-1 et L. 312-1-3 du C.R.P.A., a précisé que si ces dispositions sont, en principe, applicables aux traitements algorithmiques utilisés, le cas échéant, par les établissements d’enseignement supérieur pour fonder des décisions individuelles dans le cadre de la procédure nationale de préinscription, et instaurent un droit d’accès aux documents relatifs aux algorithmes utilisés par ces établissements et à leurs codes sources, le législateur a entendu régir par des dispositions particulières le droit d’accès à ces documents.

 

Ainsi, les dispositions du dernier alinéa du I de l’article L. 612-3 du code de l’éducation doivent être regardées comme ayant entendu déroger, notamment, aux dispositions de l’article L. 311-1 du C.R.P.A. en réservant le droit d’accès à ces documents aux seuls candidats, pour les seules informations relatives aux critères et modalités d’examen de leur candidature.

 

Après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe pour erreur de droit, le Conseil d’État, réglant l’affaire au fond, a conclu que l’université des Antilles pouvait légalement, sans qu’y fassent obstacle les dispositions de l’article L. 311-1 du C.R.P.A., et dès lors que seuls les candidats sont susceptibles de se voir communiquer les informations relatives aux critères et modalités d’examen de leur candidature ainsi que les motifs pédagogiques qui justifient la décision prise, refuser de communiquer au syndicat étudiant UNEF les informations relatives à la procédure informatique de sélection qu’il demandait.

 

N.B. : Il est à noter que le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur la portée du secret des délibérations du jury dans cette décision.

 

Le Conseil d’État avait déjà considéré que des documents internes confectionnés et utilisés par un jury d’examen n’étaient pas, par leur nature et leur objet, au nombre des documents communicables sur le fondement des dispositions de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, dans sa version alors en vigueur (cf. C.E., 21 décembre 2007, n° 294676, aux tables du Recueil Lebon).

 

De même, il avait jugé plus récemment qu’en prévoyant par la loi du 17 juillet 1978, dans sa version alors en vigueur, la communication des documents administratifs, le législateur n’avait entendu ni porter atteinte au principe du secret des délibérations, ni permettre la communication tant des documents des délibérations elles-mêmes que de ceux élaborés préalablement par les jurys en vue de leurs délibérés (cf. C.E., 17 février 2016, Centre national de la fonction publique territoriale,

n° 371453, au Recueil Lebon). carre



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Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Rémunérations, traitement et avantages en nature

fleche Régime des concessions de logement dans les E.P.L.E. – Calcul du barème pour déterminer le nombre de personnels logés par nécessité absolue de service – Personnels de l’État et territoriaux

Note DAJ A1 n° 2018-154 du 6 mai 2019

 

La direction des affaires juridique a été interrogée sur le régime des concessions de logement dans les établissements publics locaux d’enseignement (E.P.L.E.) et le classement pondéré de ces établissements défini à l’article R. 216-6 du code de l’éducation pour déterminer le nombre de personnels relevant du ministère de l’éducation nationale logés par nécessité absolue de service dans ces établissements ainsi que les personnels territoriaux.

 

Il était également demandé de préciser si les élèves scolarisés en sections d’enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) et en unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) doivent être comptés pour un ou deux points dans le calcul du barème permettant le classement pondéré des établissements défini à l’article R. 216-6 du code de l’éducation pour déterminer le nombre de personnels de direction, d’administration, de gestion et d’éducation logés dans l’établissement par nécessité absolue de service.

 

1. Le régime des concessions de logement accordées aux personnels de l’État et aux personnels territoriaux exerçant dans les E.P.L.E.

 

1.1. Les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques (G.C.3P.), dans leur rédaction issue du décret n° 2012-752 du 9 mai 2012 portant réforme du régime des concessions de logement, sont applicables aux concessions de logement accordées aux personnels de l’État exerçant dans les E.P.L.E.

 

L’article R. 2124-78 du C.G.3P., créé dans le C.G.3P. par le décret n° 2011-1612 du 22 novembre 2011 relatif aux première, deuxième, troisième et quatrième parties réglementaires du code général de la propriété des personnes publiques prévoit que : « Les conditions d'attribution de concessions de logement par les régions, les départements et, le cas échéant, les communes et les groupements de communes aux personnels de l'État employés dans les établissements publics locaux d'enseignement sont fixées par les dispositions des articles R. 216-4 à R. 216-19 du code de l'éducation. »

 

Cet article R. 2124-78 a ainsi conservé la spécificité du régime des concessions de logement attribuées aux personnels de l’État dans les E.P.L.E. qui prévaut depuis les lois de décentralisation des 7 janvier et 22 juillet 1983, laquelle spécificité réside, d’une part, en ce que bien qu’appartenant au domaine des régions et des départements, les logements des E.P.L.E. concédés aux agents de l’État se voient appliquer le régime des concessions de logement appartenant au domaine de l’État (désormais fixé par les articles R. 2124-64 et suivants du C.G.3P.) et, d’autre part, en des dispositions particulières applicables à ces personnels de l’État dans les E.P.L.E. que prévoient les articles R. 216-4 à R. 216-9 du code de l’éducation.

 

L’article R. 216-4 du code de l’éducation prévoit en effet que : « Dans les établissements publics locaux d’enseignement relevant de leur compétence (…), la région, le département ou, le cas échéant, la commune ou le groupement de communes attribue les concessions de logement aux personnels de l’État exerçant certaines fonctions, dans les conditions fixées par la présente section. / Les concessions de logement sont attribuées par nécessité absolue ou utilité de service, dans les conditions fixées aux articles R. 92 à R. 103 du code du domaine de l’État et par la présente section. »

 

Si l’article 3 du décret du 22 novembre 2011 a abrogé la majorité des dispositions réglementaires du code du domaine de l’État, l’article 2 de ce même décret a cependant expressément prévu que les références à ces dispositions abrogées figurant dans les textes réglementaires sont remplacées par les références aux dispositions correspondantes du C.G.3P.

 

Ainsi, en vertu du tableau de correspondance entre l’ancien code du domaine de l’État et le C.G.3P., les articles R. 92 à R. 103 du code du domaine de l’État ont été remplacés dans toutes les références faites à ces dispositions, y compris celles figurant dans le code de l’éducation, par les articles R. 2124-64 à R. 2124-74 du C.G.3P.

 

Par conséquent, depuis l’entrée en vigueur du décret du 22 novembre 2011, les renvois aux articles R. 92 à R. 103 du code du domaine de l’État qu’opèrent les articles R. 216-4 et suivants du code de l’éducation se lisent comme des renvois aux articles R. 2124-64 à R. 2124-74 du C.G.3P., lesquels, dans leur rédaction issue du décret du 22 novembre 2011, reprenaient d’ailleurs le contenu de ces anciens articles désormais abrogés du code du domaine de l’État.

 

Ainsi, dès lors que les articles R. 2124-64 à R. 2124-74 du C.G.3P. sont applicables aux concessions de logement attribuées aux personnels de l’État dans les E.P.L.E. depuis le 25 novembre 2011, date d’entrée en vigueur du décret du 22 novembre 2011, la modification de ces mêmes articles par le décret n° 2012-752 du

9 mai 2012 portant réforme du régime des concessions de logement leur est également applicable, sous réserve des dispositions particulières prévues par les articles R. 216-4 à R. 216-19 du code de l’éducation.

 

Il en résulte qu’au régime de concessions de logement attribuées aux agents de l’État dans les E.P.L.E. soit par nécessité de service (NAS), soit par utilité de service que prévoyaient les articles R. 2124-64 et suivants du C.G.3P. dans leur rédaction issue du décret du 22 novembre 2011 s’est substitué le régime prévoyant soit une concession de logement attribuée par NAS, soit une convention d’occupation à titre précaire avec astreinte, organisées par les articles R. 2124-64 et suivants du C.G.3P. dans leur rédaction issue du décret du 9 mai 2012.

 

En ce qui concerne les charges locatives afférentes aux concessions de logement attribuées aux personnels de l’État exerçant dans les E.P.L.E., dès lors qu’en vertu des dispositions précitées du second alinéa de l’article R. 216-4, le régime des concessions de logement accordées aux personnels de l’État dans les E.P.L.E. est défini à la fois par les articles R. 2124-64 à R. 2124-77 du C.G.3P. et par les articles R. 216-4 à R. 216-19 du code de l’éducation, toutes les dispositions de ces articles du code de l’éducation qui demeurent compatibles avec les dispositions des articles R. 2124-64 à R. 2124-77 du C.G.3P. dans leur rédaction issue du décret du 9 mai 2012 demeurent en vigueur.

 

Plus précisément, dans le cas des charges locatives afférentes aux concessions de logement attribuées par NAS, l’article R. 216-11 du code de l’éducation prévoit que : « Seules les concessions de logement accordées par nécessité absolue de service comportent la gratuité du logement nu. / Les charges locatives sont remboursées à l'établissement, sous réserve des prestations accessoires accordées gratuitement aux personnels concessionnaires dans les conditions fixées à l'article R. 216-12. / Les concessions par utilité de service ne comportent aucune prestation gratuite. »

 

L’article R. 216-12 du même code précise en outre que : « La collectivité de rattachement fixe chaque année le taux d'actualisation de la valeur des prestations accessoires mentionnées à l'article R. 216-11 pour chacune des catégories d'agents mentionnées à l'article R. 216-5 (…). »

 

Ces deux articles du code de l’éducation, tout en fixant le principe d’un reversement des charges locatives par les agents logés par nécessité absolue de service à la collectivité propriétaire, prévoient cependant la possibilité d’accorder des prestations accessoires gratuitement à ces personnels, en l’espèce les consommations de fluides (eau, gaz, électricité, chauffage : cf. également l’ancien article R. 98 du code du domaine de l’État), dont le taux d’actualisation est fixé chaque année par la collectivité propriétaire sans pouvoir être inférieur à l’actualisation de la dotation générale de décentralisation (D.G.D.). Il convient en effet de souligner que les charges qui ont résulté pour les collectivités territoriales de la mise en place de ce dispositif lors de l’acte I de la décentralisation ont donné lieu à compensation dans le cadre des D.G.D.

 

1.2. Le régime des concessions de logement accordées aux personnels territoriaux exerçant leurs fonctions dans les E.P.L.E.

 

Les concessions de logement accordées aux personnels territoriaux exerçant dans les E.P.L.E. sont attribuées dans les conditions fixées par l’article L. 2124-32 du C.G.3P., lequel prévoit que : « Les conditions d'attribution d'un logement de fonction par les collectivités territoriales, leurs groupements et leurs établissements publics sont régis par les dispositions de l'article 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990»

 

L’article 21 de la loi du 28 novembre 1990 indique notamment, en son troisième alinéa, que : « La délibération précise les avantages accessoires liés à l'usage du logement. »

 

Pour l’exercice de cette compétence, les collectivités territoriales doivent se conformer au principe de parité avec les agents de la fonction publique d’État que pose le premier alinéa de l’article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, aux termes duquel : « Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'État (…). »

 

Le Conseil d’État a précisé à cet égard que les collectivités territoriales ne peuvent attribuer à leurs agents des prestations venant en supplément de leur rémunération qui excéderaient celles auxquelles peuvent prétendre les agents de l’État occupant des emplois équivalents (cf. C.E. Assemblée, 2 décembre 1994, Préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, préfet du Nord, n° 147962).

 

C’est en application de ce principe de parité que les agents des collectivités territoriales se voient appliquer la réforme organisée par le décret du 9 mai 2012 lorsqu’ils exercent des fonctions équivalentes à celles des agents de l’État qui entrent dans le champ d’application de ce décret.

 

C’est également en application de ce même principe de parité que les personnels des collectivités territoriales exerçant dans les E.P.L.E. peuvent bénéficier, comme les agents de l’État exerçant dans les mêmes établissements, de la gratuité du logement qui leur est consenti par NAS et des prestations accessoires accordées gratuitement à ces personnels, puisque comme il a été rappelé au point I.1, les agents de l’État exerçant dans les E.P.L.E. et bénéficiant d’une concession de logement par NAS ne sont pas soumis à l’intégralité des dispositions de l’article R. 2124-71 du C.G.3P. concernant les charges locatives dès lors que des prestations accessoires leur sont accordées gratuitement en vertu de l’article R. 216-11 du code de l’éducation (cf. réponse du ministre de l’intérieur à la question écrite n° 56127 de Mme Jacqueline Fraysse, publiée au J.O.A.N. du 19 août 2014).

2. Les modalités de prise en compte des élèves scolarisés en SEGPA et en ULIS dans le classement pondéré des établissements pour déterminer le nombre des personnels de direction, d'administration, de gestion et d'éducation logés par nécessité absolue de service

 

L’article R. 216-6 du code de l’éducation fixe, selon un classement pondéré des établissements déterminé en fonction du nombre d’élèves scolarisés, de l’existence d’un service de demi-pension ou d’internat, de l’existence de certaines classes, le nombre des personnels mentionnés au 1° de l’article R. 216-5 du code de l’éducation (les personnels de direction, d'administration, de gestion et d'éducation) logés par NAS.

 

Il résulte de ces dispositions qu’à chaque établissement est affecté un certain nombre de points en fonction du nombre d’élèves accueillis. Tout élève est compté pour un point dans l’effectif global. Ces points sont majorés pour tenir compte de la qualité de demi-pensionnaire ou d’interne, respectivement, de un ou trois points. Certaines formations accueillant les élèves dans les E.P.L.E. conduisent également à une majoration d’un point par élève accueilli : c’est le cas des classes préparatoires aux grandes écoles, des sections industrielles des lycées, de l’enseignement agricole et de l’enseignement pour les enfants et les adolescents handicapés. Cette dernière catégorie renvoie au titre V du livre III, intitulé « L’organisation des enseignements scolaires », de la deuxième partie du code de l’éducation relative aux « enseignements scolaires » (articles L. 351-1 et suivants et D. 351-1 et suivants du code de l’éducation).

 

2.1. La question de savoir si les élèves scolarisés dans les SEGPA, qui relèvent de l’enseignement général et professionnel adapté, doivent être comptabilisés pour un point ou deux points n’a, jusqu’à ce jour, pas été tranchée par la jurisprudence et peut en effet faire l’objet d’interprétations divergentes.

 

C’est en raison des difficultés scolaires graves et durables qu’ils éprouvent que les élèves sont scolarisés en SEGPA, sections dans lesquelles leur sont dispensés des enseignements adaptés en application de l’article L. 332-4 et de l’article D. 332-7 du code de l’éducation.

 

Ces enseignements, qui sont régis par le titre III, intitulé « Les enseignements du second degré », du livre III de la deuxième partie du code de l’éducation, sont destinés aux élèves qui ne maîtrisent pas toutes les connaissances et compétences définies dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, attendues à la fin du cycle des apprentissages fondamentaux, et qui présentent des lacunes importantes qui risquent d’obérer l’acquisition des connaissances et compétences au cours du cycle de consolidation (cf. circulaire n° 2015-176 du 28 octobre 2015 relative aux sections d'enseignement général et professionnel adapté, point 1.1 : « Le public concerné »).

 

Les SEGPA ont donc pour objet de permettre aux élèves d’acquérir les compétences du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et d’accéder à une formation professionnelle diplômante à l’issue de la classe de troisième : il ne s’agit pas d’enseignements pour les enfants et les adolescents handicapés au sens de l’article R. 216-6 précité du code de l’éducation.

 

Cependant, il résulte de l’article D. 351-7 et du dernier alinéa de l’article D. 332-7 du code de l’éducation que des élèves en situation de handicap peuvent, en application de l’article L. 351-1 du même code, faire l’objet, à titre individuel, d’une décision d’orientation en SEGPA par la commission mentionnée à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles, autrement dit par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapés (C.D.A.P.H.), lorsque ce mode de scolarisation répond à leurs besoins.

 

Incontestablement, ces élèves qui présentent un handicap compatible avec une affectation en SEGPA, et qui y ont été scolarisés sur décision de la C.D.A.P.H., doivent être comptés pour deux points au titre du neuvième alinéa de l’article R. 216-6 du code de l’éducation. En revanche, une telle majoration de barème ne peut concerner que les élèves en situation de handicap.

 

2.2. Le dispositif des ULIS a, quant à lui, pour objet d’assurer la scolarisation des élèves présentant un handicap ou un trouble de santé invalidant (troubles des fonctions cognitives, troubles multi-associés, troubles spécifiques du langage et des apprentissages, troubles envahissants de la personnalité, troubles des fonctions motrices, troubles de la fonction auditive ou visuelle) au vu de leur projet personnalisé de scolarisation, et de leur permettre de poursuivre des apprentissages adaptés à leurs potentialités et à leurs besoins d’acquérir des compétences scolaires et sociales, même lorsque les acquis sont très réduits. Il s’agit d’un dispositif collectif de scolarisation. C’est la C.D.A.P.H. qui oriente les élèves vers un tel dispositif collectif de scolarisation (cf. article D. 351-7 du code de l’éducation) en application des dispositions du premier alinéa de l’article L. 351-1 du code de l’éducation.

 

Par conséquent, en application du neuvième alinéa de l’article R. 216-6 du code de l’éducation, les élèves présentant un handicap et scolarisés en ULIS doivent être comptés pour deux points dans le barème prévu par cet article. carre

 

Propriété intellectuelle

fleche Modalités de diffusion des thèses de doctorat – Confidentialité des thèses de doctorat

Note DAJ B1 n° 2019-002 du 11 janvier 2019


L’Agence bibliographique de l’enseignement supérieur (ABES) a interrogé la direction des affaires juridiques au sujet de la durée de confidentialité des thèses de doctorat.

 

1. Une thèse de doctorat présente en principe une double nature d’œuvre de l’esprit et de document administratif, nécessitant l’autorisation de son auteur pour sa divulgation et sa communication.

 

Le troisième alinéa de l’article L. 612-7 du code de l’éducation prévoit notamment que : « Le diplôme de doctorat est délivré après la soutenance d’une thèse (…). »

 

Selon l’article L. 112-2 du code de la propriété intellectuelle (C.P.I.) : « Sont considérés notamment comme œuvres de l'esprit au sens du présent code : / 1° Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques ; / (…). »

 

Sur le fondement de ces dispositions, il a déjà été jugé qu’« une thèse de doctorat est susceptible, indépendamment des mérites et des qualités de son auteur, de conférer à ce dernier un droit de propriété intellectuelle », avec la réserve  toutefois que « la protection des droits d'auteur instituée par les dispositions [des articles
L. 111-1
, L. 112-1 et L. 112-2] du code de la propriété intellectuelle ne porte que sur ses éléments qui présentent une originalité » (C.A.A. Lyon, 30 décembre 2003,
n° 98LY00338
).

 

Parce qu’elle constitue une œuvre de l’esprit, la thèse de doctorat confère à son auteur des droits moraux protégés par l’article L. 121-2 du C.P.I., qui prévoit notamment que : « L’auteur a seul le droit de divulguer son œuvre (…). »

 

Ainsi, la thèse ne peut faire l’objet d’une diffusion, notamment par la consultation en bibliothèque universitaire, sans une autorisation de son auteur (cf. T.A. Toulouse, 4 novembre 2008, n° 0400129). De même : « Le dépôt d’une thèse en bibliothèque (…) permet uniquement sa consultation ; il ne peut se confondre avec le droit de divulgation qui donne à l’auteur seul le droit de diffuser ou non, sous quelque forme que ce soit, son ouvrage au public (…). » (C.A. Douai, 3 juillet 2012, n° 11/03647 ; cf. également, s’agissant du dépôt d’une œuvre aux Archives nationales, Cass. civ. 1, 15 janvier 1969, au Bulletin).

 

La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) considère par ailleurs que « les thèses, dans leur version définitive, qui ont donné lieu à l’attribution d’un diplôme de l’enseignement supérieur, notamment à celui de docteur (…), et dont une copie est détenue par les services de l’université constituent des documents administratifs communicables à toute personne en faisant la demande, dans les conditions prévues par la loi [n° 78-753] du 17 juillet 1978 » portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, désormais codifiée dans le livre III du code des relations entre le public et l’administration (C.R.P.A.) (cf. CADA, conseil, 3 mars 2005, n° 20051020 ; cf. également, CADA, avis, 28 mars 2002, n° 20021245).

 

Une thèse détenue par une université peut donc présenter une double nature juridique d’œuvre de l’esprit et de document administratif communicable, par application des dispositions du C.P.I. et du C.R.P.A.

 

En présence de ce type de documents « mixtes », le Conseil d’État a jugé que : « [Les] dispositions [de l’article L. 311-4 du C.R.P.A., aux termes desquelles : Les documents administratifs sont communiqués ou publiés sous réserve des droits de propriété littéraire et artistique”] impliquent, avant de procéder à la communication [des documents] n’ayant pas déjà fait l’objet d’une divulgation, au sens de l’article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle, de recueillir l’accord de leur auteur. » (Cf. C.E., 8 novembre 2017, Association spirituelle de l'Église de scientologie Celebrity Centre, n° 375704, au Recueil Lebon.)

 

Par conséquent, sauf si la thèse a fait l’objet d’une publication ou d’une autorisation de divulgation expresse par son auteur, elle ne peut faire l’objet d’aucune communication à une personne qui en ferait la demande (au sens du livre III du C.R.P.A.), même si elle a donné lieu à une soutenance et à un dépôt en bibliothèque ou aux Archives nationales.

 

2. Une thèse peut, en outre, revêtir un caractère de confidentialité dont la durée peut varier en fonction de son contenu.

 

L’arrêté ministériel du 25 mai 2016 fixant le cadre national de la formation et les modalités conduisant à la délivrance du diplôme national de doctorat permet de reconnaître à une thèse un caractère confidentiel. Le premier alinéa de son article 19 prévoit ainsi que : « La soutenance est publique, sauf dérogation accordée à titre exceptionnel par le chef d'établissement si le sujet de la thèse présente un caractère de confidentialité avéré. »

 

Le dernier alinéa de l’article 25 de l’arrêté du 25 mai 2016 prévoit quant à lui que : « Sauf si la thèse présente un caractère de confidentialité avéré, sa diffusion est assurée dans l'établissement de soutenance et au sein de l'ensemble de la communauté universitaire. La diffusion en ligne de la thèse au-delà de ce périmètre est subordonnée à l'autorisation de son auteur, sous réserve de l'absence de clause de confidentialité. »

 

En ce qui concerne les thèses présentant un « caractère de confidentialité avéré », il résulte de ces mêmes dispositions de l’article 25 de l’arrêté du 25 mai 2016 que, indépendamment des droits moraux conférés à l’auteur d’une thèse, elles ne peuvent pas faire l’objet d’une communication.

 

En l’absence de dispositions de l’arrêté du 25 mai 2016 définissant explicitement ce caractère de confidentialité avéré, il convient de se reporter aux dispositions du livre III du C.R.P.A., qui définit, d’une part, en son article L. 311-5, les documents administratifs non communicables parce que leur communication porterait atteinte aux intérêts protégés par la loi (tels que le secret de la défense nationale, la sûreté de l’État, la sécurité publique, la sécurité des personnes et tout secret protégé par la loi) et, d’autre part, en son article L. 311-6, les documents administratifs qui ne sont communicables qu’à l’intéressé lui-même parce que leur communication à un tiers porterait atteinte à son droit à la protection de sa vie privée et de ses données personnelles (tels que le secret médical et le secret des affaires).

 

Le premier alinéa de l’article L. 311-8 du C.R.P.A. dispose que : « Les documents administratifs non communicables au sens [de ces articles L. 311-5 et L. 311-6 du C.R.P.A.] deviennent communicables au terme des délais et dans les conditions fixés par les articles L. 213-1 et L. 213-2 du code du patrimoine. Avant l'expiration de ces délais et par dérogation aux dispositions du présent article, la consultation de ces documents peut être autorisée dans les conditions prévues par l'article L. 213-3 du même code. »

 

Les délais de communication des documents couverts par un secret mentionné aux articles L. 311-5 et L. 311-6 du C.R.P.A. sont fixés par le I de l’article L. 213-2 du code du patrimoine : ils varient de vingt-cinq à cent ans à compter de la date du document ou de la date du décès de l’intéressé, en fonction de la nature de l’information contenue dans le document et de son degré de sensibilité.

 

La confidentialité d’une thèse, dont la durée dépend du contenu des informations qu’elle comporte (au regard des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6 du C.R.P.A.), n’empêche toutefois pas une consultation anticipée sur le fondement de la dernière phrase du premier alinéa précité de l’article L. 311-8 du C.R.P.A., qui renvoie aux conditions prévues par l’article L. 213-3 du code du patrimoine.

 

En effet, le I de cet article L. 213-3 du code du patrimoine dispose que : « L'autorisation de consultation de documents d'archives publiques avant l'expiration des délais fixés au I de l'article L. 213-2 peut être accordée aux personnes qui en font la demande dans la mesure où l'intérêt qui s'attache à la consultation de ces documents ne conduit pas à porter une atteinte excessive aux intérêts que la loi a entendu protéger. (…) l’autorisation est accordée par l'administration des archives aux personnes qui en font la demande après accord de l'autorité dont émanent les documents. / (…). »

 

À cet égard, le Conseil d’État a jugé que « le législateur n’a entendu exclure aucune archive publique de la possibilité de consultation anticipée » (C.E., 1er octobre 2015, n° 373019, aux tables du Recueil Lebon).

 

Il en résulte qu’un document administratif ne saurait être non communicable perpétuellement, quel que soit l’intérêt protégé par la loi auquel il porte atteinte, à l’exception du cas des « archives publiques dont la communication est susceptible d’entraîner la diffusion d’informations permettant de concevoir, fabriquer, utiliser ou localiser des armes nucléaires, biologiques, chimiques ou toutes autres armes ayant des effets directs ou indirects de destruction d’un niveau analogue » (cf. II de l’article L. 213-2 du code du patrimoine).

 

Par conséquent, la confidentialité de la thèse de doctorat prévue par l’arrêté du 25 mai 2016 ne saurait être illimitée dans le temps, sauf si cette thèse comporte des informations entrant dans le champ d’application du II de l’article L. 213-2 du code du patrimoine : hors ce cas particulier, le motif de son caractère de confidentialité avéré ne peut faire obstacle à la diffusion ou à la communication d’une thèse de doctorat de façon illimitée dans le temps. carre



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QUESTIONS COMMUNES

Positions

fleche Fonctionnaire – Disponibilité – Conditions d’octroi et de renouvellement

Décret n° 2019-234 du 27 mars 2019 modifiant certaines conditions de la disponibilité dans la fonction publique
J.O.R.F. du 28 mars 2019


Le décret n° 2019-234 du 27 mars 2019 modifiant certaines conditions de la disponibilité dans la fonction publique modifie, notamment dans son chapitre 1er, le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l'État, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions.

 

L’article 2, qui modifie le b) de l’article 44 du décret du 16 septembre 1985, allonge la durée initiale de la disponibilité pour convenances personnelles à cinq ans et, au terme de cette période, permet son renouvellement dans la limite d’une durée maximale de dix ans pour l’ensemble de la carrière, sous réserve d’une obligation de retour dans l’administration d’au moins dix-huit mois de services effectifs continus pour le fonctionnaire souhaitant poursuivre cette disponibilité au-delà d’une première période de cinq ans. Le cumul de la disponibilité pour créer ou reprendre une entreprise avec une disponibilité pour convenances personnelles ne peut excéder une durée maximale de cinq ans lorsqu’il s’agit de la première période de disponibilité.

 

Les articles 3 et 4 simplifient les règles de départ en disponibilité des fonctionnaires soumis à un engagement de servir l’État, et modifient en conséquence les articles 45 (disponibilité pour convenances personnelles afin d'exercer l'une des activités mentionnées au III de l'article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) et 46 du décret du 16 septembre 1985 (disponibilité pour créer ou reprendre une entreprise).

 

Ainsi, l’article 3 supprime le second alinéa de l’article 45 qui prévoyait, d’une part, que si la durée minimale d'engagement à servir l’État n’était pas atteinte à la date de cette mise en disponibilité, celle-ci ne pouvait, au terme de la période de trois ans prévue au b) de l'article 44, être renouvelée qu’une fois, pour une durée d’un an, et, d’autre part, que le fonctionnaire ne pouvait ensuite bénéficier d'une nouvelle disponibilité pour convenances personnelles qu'après avoir accompli les années de services effectifs manquantes. Quant à l’article 4, il supprime le troisième alinéa de l’article 46 qui prévoyait que la durée cumulée des disponibilités accordées au titre de l'article 45 et de l’article 46 ne pouvait, s’agissant des fonctionnaires n’ayant pas accompli la totalité de la durée d’engagement à servir l’État, excéder quatre années.

 

L’article 5 prévoit que le fonctionnaire qui, placé en disponibilité dans les conditions prévues par les articles 44, 45, 46 et au titre des 1° et 2° de l’article 47 du décret du 16 septembre 1985, exerce une activité professionnelle conserve ses droits à l’avancement d’échelon et de grade dans la limite de cinq ans, en ajoutant un article 48-1 et un article 48-2 à ce décret. L’activité professionnelle concernée recouvre toute activité lucrative, salariée ou indépendante, exercée à temps complet ou à temps partiel sous réserve d’une quotité de travail minimale de 600 heures pour une activité salariée et d’une condition de revenu soumis à cotisation sociale dont le montant brut annuel est au moins égal au salaire brut annuel permettant de valider quatre trimestres d’assurance vieillesse pour une activité indépendante. En revanche, pour la création ou la reprise d'entreprise intervenant au titre de la disponibilité prévue à l’article 46, aucune condition de revenu n’est exigée. La conservation des droits à l’avancement d’échelon et de grade est subordonnée à la transmission annuelle, au plus tard le 31 mai de chaque année, par le fonctionnaire des pièces justifiant l’exercice d’une activité professionnelle.

 

L’article 14 du chapitre IV modifie l’article 3 du décret n° 2008-15 du 4 janvier 2008 relatif à la mobilité et au détachement des corps recrutés par la voie de l’École nationale d’administration et dispose que les services accomplis au titre de la mobilité sont assimilés à des services effectifs dans le corps d’origine, en précisant toutefois que ceux qui l’ont été en position de disponibilité auprès d’un organisme de droit privé ne sont pas pris en compte dans le décompte des années dues au titre d’un engagement de servir.

 

Le chapitre VI du décret du 27 mars 2019 précise les dates d’entrée en vigueur de ces dispositions.

 

Les dispositions du b) de l'article 44 du décret du 16 septembre 1985, dans leur rédaction issue du décret du 27 mars 2019, s’appliquent aux demandes de disponibilité présentées à compter de la date d’entrée en vigueur de ce décret.

 

Les dispositions des nouveaux articles 48-1 et 48-2 du décret du 16 septembre 1985 sont applicables aux mises en disponibilité et aux renouvellements de disponibilité prenant effet à compter du 7 septembre 2018.

 

Les dispositions des articles 45 et 46 du décret du 16 septembre 1985, dans leur rédaction issue du décret du 27 mars 2019, sont applicables à tout fonctionnaire titularisé depuis le 1er janvier 2018 dans un corps de la fonction publique de l'État dont les membres sont soumis à un engagement à rester au service de l’État pendant une durée minimale à compter de leur titularisation.

 

Enfin, les périodes de disponibilité accordées avant l’entrée en vigueur du décret du 27 mars 2019 sont exclues du calcul des cinq années de disponibilité au terme desquelles le fonctionnaire est tenu d'accomplir au moins dix-huit mois de services effectifs dans la fonction publique. carre

 

Procédure contentieuse

EXÉCUTION DES JUGEMENTS

fleche Exécution des décisions juridictionnelles – Injonction – Astreinte

Loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice
J.O.R.F. du 24 mars 2019


Le I de l’article 40 de la loi du 23 mars 2019, qui modifie le livre IX du code de justice administrative (C.J.A.), comporte plusieurs dispositions destinées à renforcer le pouvoir d’injonction du juge administratif.

 

En principe, la juridiction doit être saisie de conclusions tendant à ce qu’elle fasse usage du pouvoir d’injonction prévu aux articles L. 911-1 et L. 911-2 du C.J.A. Désormais, les dispositions du I de l’article 40 de la loi du 23 mars 2019, qui complètent sur ce point les articles L. 911-1 et L. 911-2, prévoient que le juge puisse également prescrire d’office soit la mesure d’exécution dans un sens déterminé, soit l’intervention d’une nouvelle décision dans un délai déterminé.

 

La juridiction pourra par ailleurs assortir, dans la même décision, l’injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 du C.J.A. d’une astreinte dont elle fixe la date d’effet sans avoir été saisie de conclusions en ce sens, en application des nouvelles dispositions de l’article L. 911-3 du C.J.A.

 

Enfin, en cas d’inexécution d’un jugement ou d’un arrêt, la demande d’exécution doit être adressée à la juridiction qui a rendu ce jugement ou cet arrêt, laquelle définit, si nécessaire, les mesures d’exécution, fixe un délai d’exécution et prononce une astreinte en application de l’article L. 911-4 du C.J.A. Dorénavant, le requérant n’aura plus à saisir la cour administrative d’appel d’une demande d’exécution d’un jugement frappé d’appel. En outre, en cas d’inexécution d’une décision du Conseil d’État ou d’une décision rendue par une juridiction administrative autre qu’un tribunal administratif ou une cour administrative d’appel, le Conseil d’État pourra, même d’office, lorsque cette décision n’a pas défini les mesures d’exécution, procéder à cette définition, fixer un délai d’exécution et prononcer une astreinte contre les personnes morales en cause en application des deux premiers alinéas de l’article L. 911-5 du C.J.A. carre



 

 

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Ont participé à ce numéro : Andreea Avirvarei, Jennifer Bême, Cédric Benoit, Valérie Blaise, Sonia Blanchet, Julius Coiffait, Diankenba Condé, Annaïk David, Sophie Decker-Nomicisio, Philippe Dhennin, Cédrine Etienne, Stéphanie Frain, Aurélie Garde, Florence Gayet, Sophie Goyer-Jennepin, Jérôme Guérineau, Stéphanie Gutierrez, Guillaume Lefebvre, Francine Leroyer-Gravet, Chloé Lirzin, Alice Minuzzo, Roxane Noverraz, Cécile Parriat, Audrey Pinter, Thomas Rodrigues, Stéphanie Sarkis, Adeline Seret, Virginie Simon


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