La Lettre d’information juridique n° 235 – mai 2025

Lettre de la direction des affaires juridiques du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche
Éditorial
Les directeurs passent, mais la Lettre d’information juridique (LIJ) demeure. Depuis trente-cinq ans, elle s’est imposée comme la publication de référence en matière de droit de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle s’est élargie, depuis quelques années, aux questions de sport, de jeunesse et de vie associative. Il n’est d’ailleurs pas rare que certaines de ses références soient citées dans les commentaires du code de l’éducation ou de la recherche, signe de sa fiabilité et de son autorité.
Forte de plus de 24 000 abonnés, elle est utile non seulement aux praticiens, quel que soit leur statut et leurs fonctions, mais aussi à toutes les personnes qui, au titre d’un engagement associatif, syndical ou personnel, s’intéressent au monde de l’enseignement et de la recherche. Surtout, elle est un instrument de dialogue avec les services juridiques des rectorats et des établissements publics de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Son succès croissant montre l’importance grandissante du droit dans un secteur de l’action publique qui était réputé moins encadré juridiquement que d’autres. Des réglementations sectorielles s’y appliquent, mais le droit de l’enseignement est surtout une terre d’élection de toutes les grandes notions du droit public, que ce soit en matière de police administrative, de responsabilité, de fonction publique, d’ordre public ou de laïcité. La présente LIJ apporte d’utiles actualisations dans chacun de ces domaines.
La LIJ constitue aussi une fenêtre ouverte sur le travail de la direction des affaires juridiques. Outre les décisions juridictionnelles qui y sont mentionnées, son contenu est pour l’essentiel issu des analyses juridiques conduites par la direction. La LIJ permet de leur donner une publicité et une portée qui vont au-delà de la simple réponse à une consultation ponctuelle de la part d’un rectorat, d’un établissement public ou d’une autre direction d’administration centrale.
Production collective s’il en est, la LIJ a depuis longtemps une existence propre, inscrite dans la longue durée. Ses archives ont d’ailleurs été numérisées et sont accessibles en ligne, sur le site du ministère. Ce nouveau numéro poursuit cette longue tradition, sous la direction éditoriale de plus d’une dizaine de directrices et directeurs des affaires juridiques successifs, et avec la collaboration de tous les agents de la direction, en tant qu’outil de travail partagé au service de politiques publiques qui préparent notre avenir commun.
Éric Buge
Jurisprudence
Principes généraux
Laïcité
CAA Paris, 18 octobre 2024, n° 23PA02755
Ordre public
TA Montreuil, 5 février 2025, Préfet de Seine-Saint-Denis, n° 2404802
TA Montreuil, 5 février 2025, Préfet de Seine-Saint-Denis, n° 2404805
Enseignement supérieur et recherche
Maintien de l’ordre
TA Marseille, 6 février 2025, Syndicat national de l'enseignement supérieur (SNESUP-FSU), nos 2305626, 2305651 et 2305780
Cycle licence (Parcoursup…)
CE, 7 mars 2025, FNESI et FAGE, n° 492912
Établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST)
CAA Versailles, 7 février 2025, n° 23VE02063
Personnels
Titularisation
CE, 12 février 2025, CNRS, n° 494075, aux tables du recueil Lebon
Affectation
CE, 6 février 2025, Ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, n° 496294, aux tables du recueil Lebon
Imputabilité au service
CE, avis, 18 février 2025, n° 495725, aux tables du recueil Lebon
Non-cumul d’activités
CAA Lyon, 22 janvier 2025, n° 23LY01758
Protection fonctionnelle
CE, 29 janvier 2025, Société UGGC et autres, n° 497840 et n° 498835, aux tables du recueil Lebon
CE, 7 février 2025, n° 495551, aux tables du recueil Lebon
Rémunérations, traitement et avantages en nature
TA Rouen, 4 février 2025, n° 2303854
Procédure
CE, 6 mars 2025, n° 491833, aux tables du recueil Lebon
Suspension conservatoire
TA Toulon, 30 décembre 2024, n° 2201505
Admission à la retraite
CE, 14 février 2025, n° 493140, aux tables du recueil Lebon
Abandon de poste
CE, 30 décembre 2024, Université Toulouse-III-Paul-Sabatier, n° 471753, aux tables du recueil Lebon
Concours
CE, 12 février 2025, n° 475205
Établissements d’enseignement privés et instruction en famille
Mise en demeure et fermeture
TA Grenoble, 6 février 2025, Association de l'école démocratique Ma voie, n° 2201563
Procédure contentieuse et questions de droit civil et pénal appliquées au droit de l’enseignement
Compétence des juridictions
CE, 7 mars 2025, Mme X et société CGF, n° 495103, aux tables du recueil Lebon
Principes généraux
Laïcité
- Principes de neutralité et de laïcité – Accès à l’emploi public – Signe d’appartenance religieuse résultant d’une pratique religieuse exercée dans un cadre privé et non recherchée à titre de signe distinctif – Incompatibilité avec le devoir de neutralité des agents publics (non)
CAA Paris, 18 octobre 2024, n° 23PA02755
Par un arrêt classé C+, la cour administrative d’appel de Paris a jugé que la "marque" visible sur le front révélant une appartenance religieuse n’était pas, par nature, incompatible avec le devoir de neutralité des agents publics et le principe de laïcité et ne pouvait justifier, à elle seule, le refus d’accès à un emploi public dès lors qu’elle n’avait pas été recherchée à titre de signe distinctif et qu’elle ne pouvait être regardée comme traduisant une volonté de manifester ses croyances religieuses dans le cadre du service.
En l’espèce, le requérant s’était vu refuser, par le préfet de police, l’agrément nécessaire à l’exercice de la profession de policier adjoint, au motif que la marque visible qu’il présentait sur le front, dite "tabaâ", dermatose pigmentée due à une pratique assidue de sa religion, constituait une manifestation ostensible de son appartenance religieuse qu’il n’était pas en mesure de dissimuler et révélait un possible risque de repli identitaire incompatible avec le devoir de neutralité.
Le tribunal administratif de Paris avait jugé la marque visible incompatible avec le devoir de neutralité des agents publics. La cour administrative d’appel de Paris a annulé le jugement ainsi que la décision du préfet de police refusant d'accorder à l'intéressé l’agrément sollicité.
Après avoir cité l’article R. 434-29 du code de la sécurité intérieure en vertu duquel le policier, tenu à l’obligation de neutralité, s’abstient, dans l’exercice de ses fonctions, de toute expression ou manifestation de ses convictions religieuses, politiques ou philosophiques, la cour a tout d'abord rappelé que : "Si les agents de police bénéficient comme tous les autres agents publics de la liberté de conscience qui interdit toute discrimination dans l’accès aux fonctions comme dans le déroulement de la carrière qui serait fondée sur leur religion, le principe de laïcité fait obstacle à ce qu’ils disposent, dans le cadre du service public, du droit de manifester leurs croyances religieuses", appliquant ainsi aux agents de police la solution dégagée par le Conseil d’État dans l'avis "Mlle X" du 3 mai 2000 (n° 217017, au recueil Lebon) et la règle selon laquelle le principe de laïcité implique que l’accès aux fonctions publiques s’effectue sans distinction de croyance et de religion (CE, 27 juin 2018, n° 419595, SNESUP-FSU, au recueil Lebon, LIJ n° 204, novembre 2018).
Puis, la cour a considéré que : "La circonstance que le préfet s’assure des garanties présentées par le candidat en vue de l’exercice de ses futures fonctions, notamment au regard du principe de laïcité, ne constitue pas, par elle-même, une discrimination à raison de ses convictions religieuses."
Elle a ensuite jugé que si la marque cutanée portée par le requérant constituait un signe d’appartenance religieuse, elle n’était que la conséquence physique d’une pratique religieuse exercée dans un cadre privé et, dès lors qu’elle n’avait pas été recherchée à titre de signe distinctif, elle ne pouvait être regardée en tant que telle "comme traduisant la volonté de l’intéressé de manifester ses croyances religieuses dans le cadre du service public".
En outre, la cour a jugé que la circonstance que l’intéressé présentait une telle marque ne suffisait pas à établir que la candidature de l’intéressé était incompatible avec les principes de laïcité et de neutralité et qu’il ne présentait pas les garanties requises pour l’exercice des fonctions envisagées de policier adjoint.
Le ministre de l'intérieur a formé devant le Conseil d'État un pourvoi contre cet arrêt (instance n° 499886).
Ordre public
- Maire – Pouvoir de police municipale – Atteinte à la dignité de la personne humaine – Manque de personnels du service public de l’éducation
TA Montreuil, 5 février 2025, Préfet de Seine-Saint-Denis, n° 2404802
TA Montreuil, 5 février 2025, Préfet de Seine-Saint-Denis, n° 2404805
Sur le fondement des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) investissant les maires du pouvoir de police municipal de prendre toute mesure pour prévenir une atteinte à l’ordre public, les maires de deux communes du département de Seine-Saint-Denis avaient adopté deux arrêtés enjoignant à l’État de créer des postes d’enseignants et d’autres catégories de personnel dans les établissements scolaires, estimant que ce manque de personnels et les difficultés en résultant constituaient une atteinte au respect de la dignité de la personne humaine, composante de l’ordre public.
En application de l’article L. 2131-6 du CGCT, le préfet de Seine-Saint-Denis avait saisi de deux déférés le tribunal administratif de Montreuil en lui demandant d’annuler les deux arrêtés.
Le tribunal administratif a tout d'abord rappelé qu’il résulte des termes des articles L. 211-1, L. 211-8 et D. 211-9 du code de l’éducation, dont le premier indique que l’éducation est un service public national, que, notamment, le recrutement, la gestion et la rémunération des personnels des établissements des premier et second degrés ainsi que des personnels affectés à l’accompagnement des élèves en situation de handicap sont au nombre des compétences dévolues à l’État par la loi.
Le tribunal administratif a ensuite considéré que les manques de personnels et les difficultés en résultant ne constituent pas une atteinte à la dignité de la personne humaine, composante de l’ordre public.
Surtout, le tribunal administratif a jugé que l’article L. 2212-2 du CGCT ne permet pas à un maire de prononcer une mise en demeure et une injonction sous astreinte à l’encontre de l’État tendant à ce que celui-ci prenne des mesures dans un sens déterminé dans des matières relevant de sa seule compétence.
Par suite, le préfet était fondé à soutenir que ces arrêtés étaient entachés d’incompétence et à demander, pour ce motif, leur annulation.
Enseignement supérieur et recherche
Maintien de l’ordre
- Mesure d’interdiction d’accès aux locaux pour cause de risque établi de désordre – Blocage d’établissement – Libertés de réunion et d’expression des usagers de l’enseignement supérieur
TA Marseille, 6 février 2025, Syndicat national de l'enseignement supérieur (SNESUP-FSU), nos 2305626, 2305651 et 2305780
À la suite d’un mouvement social survenu en contestation de la réforme des retraites, un bâtiment d’une université avait été occupé par des étudiants, empêchant les activités administratives et pédagogiques de se tenir. Par plusieurs décisions, le président de l’université et le directeur d'une unité de formation et de recherche avaient prononcé la fermeture temporaire du site universitaire.
Un syndicat de personnels enseignants avait saisi le tribunal administratif de Marseille de trois requêtes tendant à l’annulation des décisions portant fermeture du site. Le tribunal, par un jugement du 6 février 2025, a rejeté leurs requêtes.
Le juge administratif a rappelé qu’une mesure d’interdiction d’accès aux locaux prise sur le fondement de l’article R. 712-8 du code de l’éducation doit être justifiée par un risque établi de désordre ou de menace de désordre et qu’elle ne peut être prise que si les autorités universitaires ne disposent pas des moyens de maintenir l’ordre.
Il a également rappelé que la liberté du travail, la liberté d’aller et venir, la liberté de réunion et d’expression, la liberté syndicale et le droit à l’instruction ont le caractère de libertés fondamentales, auxquelles les autorités de police ne peuvent apporter de restrictions, afin de concilier leur exercice avec les exigences de l’ordre public, que dans la mesure où elles sont strictement nécessaires et proportionnées à ces exigences.
En l’espèce, il a considéré qu’eu égard aux dégradations commises dans le bâtiment, au désordre et à l’insécurité créés par les empilements de meubles venant en obstruer les issues et au déroulement prochain des examens à venir – qui supposait la remise en l’état des locaux, la vérification des conditions de sécurité et de sûreté indispensables à l’accueil des usagers et des agents ainsi que la préservation des données à caractère personnel sensibles contenues dans le bâtiment –, la situation de blocage au sein du site concerné constituait une situation de désordre au sens des dispositions de l’article R. 712-8 du code de l’éducation.
Le juge a relevé que "compte tenu de l’ampleur des actions menées par les bloqueurs" et de l’échec des tentatives d’y remédier par des mesures de médiation et d’apaisement, l’université "n’était pas en mesure de faire face à ce risque établi de désordre par d’autres moyens que la fermeture temporaire du campus" et en a déduit que la mesure de fermeture administrative du campus n’était pas disproportionnée au regard des risques encourus.
Cycle licence (Parcoursup…)
- Candidats étrangers hors UE, non résidents et non titulaires du baccalauréat – Interdiction et limitation des vœux – Égalité devant le service public – Égal accès à l’instruction
CE, 7 mars 2025, FNESI et FAGE, n° 492912
La Fédération nationale des étudiant·e·s en sciences infirmières (FNESI) et la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) demandaient au Conseil d’État l’annulation du décret du 6 février 2024 relatif à la procédure nationale de préinscription pour l’accès aux formations initiales du premier cycle de l’enseignement supérieur et de l'arrêté du 6 février 2024 modifiant l’arrêté du 28 février 2020 relatif à certaines règles de fonctionnement de la plateforme Parcoursup, pris pour son application.
Les associations requérantes soutenaient que ce décret, qui permet au ministre chargé de l’enseignement supérieur, d’une part, de limiter le nombre de vœux et de sous-vœux d’inscription susceptibles d’être formulés par les candidats dont les études en France sont soumises à l’obtention d’un visa et qui n’ont pas obtenu et ne préparent pas le baccalauréat français ou un diplôme ou titre admis en équivalence de ce grade, d’autre part, de prévoir que ces mêmes candidats ne peuvent pas formuler de vœux d’inscription dans certaines formations, et son arrêté d’application méconnaissaient l’exigence constitutionnelle d’égalité d’accès à l’enseignement supérieur et le droit à la non-discrimination.
Rejetant leur requête, le Conseil d’État a jugé que : "Ni le principe d’égal accès à l’instruction, que garantit le treizième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère celui de la Constitution du 4 octobre 1958, ni le principe d’égalité, qui ne s’oppose pas à ce que l’autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’elle déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un comme l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la norme qui l’établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier, ne font obstacle à ce que le pouvoir réglementaire limite, compte tenu des caractéristiques des formations et de leurs capacités d’accueil, le nombre de vœux et de sous-vœux d’inscription dans une formation initiale du premier cycle de l’enseignement supérieur en France susceptibles d’être formulés, via le téléservice dénommé Parcoursup, par les candidats dont les études en France sont subordonnées à l’obtention préalable d’un visa et qui n’ont pas obtenu et ne préparent pas le baccalauréat français ou un diplôme ou titre admis en équivalence de ce grade."
Cette décision s’inscrit dans la jurisprudence traditionnelle du Conseil constitutionnel (cf. Cons. const., 13 août 1993, n° 93-325 DC, cons. 2), qui retient, s’agissant du principe d’égal accès à l’instruction, qu’il n’a pas "une portée universelle qui imposerait que le service public de l’enseignement supérieur français soit accessible aux personnes qui ne sont pas ses ressortissants et ne se trouvent pas sur son territoire" (conclusions sur la décision commentée, en ligne sur ArianeWeb), et du Conseil d’État, qui juge, s’agissant du principe d’égalité, que la différence de traitement instaurée entre les candidats dont les études en France sont soumises à l’obtention d’un visa et qui n‘ont pas obtenu et ne préparent pas le baccalauréat français ou un diplôme ou titre admis en équivalence de ce grade et les autres candidats à l’accès au premier cycle de l’enseignement supérieur est fondée sur une différence de situation entre les étudiants concernés (CE, Section, 18 janvier 2013, Association SOS Racisme, n° 328230 et n° 332624, au recueil Lebon) et se trouve en rapport direct avec l’objet de la norme qui l’établit, "eu égard aux objectifs poursuivis par le service public de l’enseignement supérieur, parmi lesquels figure celui de former les individus susceptibles de contribuer à la vie économique, sociale, scientifique et culturelle de la nation et à son développement" (CE, 1er juillet 2020, n° 430121 et autres, Union nationale des étudiants en droit, gestion, AES, sciences économiques, politiques et sociales et autres, au recueil Lebon).
Établissements publics à caractère scientifique et technologique (EPST)
- Répartition de compétences – Compétence de principe du conseil d’administration – Compétence d’attribution du président
CAA Versailles, 7 février 2025, n° 23VE02063
Deux syndicats de personnels du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), établissement public scientifique et technologique (EPST), opposés au programme de cession du site historique de Meudon et au déménagement des personnels qui y étaient accueillis, avaient demandé au tribunal administratif de Cergy Pontoise, notamment, d’annuler la délibération du conseil d’administration de l’établissement en tant qu’elle autorisait le président du CNRS à désaffecter et à déclasser de manière anticipée des parcelles de son domaine public immobilier situées sur le territoire de cette commune.
Le tribunal administratif, par un jugement n° 2302776 et n° 2303658 du 29 juin 2023, avait annulé cette décision en retenant que "le conseil d’administration du CNRS est compétent pour délibérer sur les mesures générales relatives à l’organisation et au fonctionnement du centre, qui comprennent notamment celles relatives à la localisation des différents services et sites de l’établissement, compétence qu’il ne peut déléguer à son président, ainsi que sur les acquisitions, aliénations et échanges d’immeubles. [Qu']en revanche, le constat de la désaffectation et la décision de déclasser ces immeubles, qui constituent des décisions prises pour la seule mise en œuvre des délibérations prises en ces matières, relèvent du pouvoir de direction générale détenu par le président du Centre. [Et,] par suite, [que] le conseil d’administration n’était pas compétent pour prononcer la désaffectation et le déclassement de dépendances du domaine public de l’établissement" et qu’il appartenait au président du CNRS de prendre de telles décisions.
La cour administrative d’appel de Versailles, saisie en appel, a censuré le raisonnement des premiers juges et annulé le jugement.
Après avoir rappelé les dispositions de l’article L. 321-2 du code de la recherche, qui prévoient que : "Les établissements à caractère scientifique et technologique sont administrés par un conseil d’administration (…)", et celles du décret du 24 novembre 1982 portant organisation et fonctionnement du CNRS, notamment de son article 3, alors en vigueur, qui précise que : "Le Centre national de la recherche scientifique est administré par un conseil d’administration présidé par le président du Centre. / Le président du Centre assure la direction générale de l’établissement. (…)", ainsi que de son article 5, qui fixe la liste générale des compétences dévolues au conseil d’administration qu’il peut déléguer au président, parmi lesquelles la compétence pour prendre toutes "les mesures générales relatives à l’organisation et au fonctionnement du centre", la cour en a déduit qu’il résultait de ces dispositions que "le conseil d’administration du CNRS, s’il peut déléguer une partie de ses pouvoirs à son président, dispose d’une compétence de principe pour l’administration de l’établissement".
Faisant application de ces principes en matière immobilière et de domanialité publique, elle a ainsi jugé qu’il appartenait bien au conseil d’administration du CNRS de prendre l’ensemble des décisions contenues dans sa délibération, notamment celle approuvant la désaffectation aux activités de recherche et le déclassement par anticipation de plusieurs parcelles du site de Meudon, alors que, au demeurant, la désaffectation de parcelles du service public peut n’être que constatée sans nécessairement faire l’objet d’une décision.
De manière générale, cette décision rappelle que, en vertu même des dispositions législatives susrappelées applicables aux EPST, leur conseil d’administration dispose d’une compétence générale pour administrer l’établissement et que leur appartient, en conséquence, la compétence de principe pour adopter toute décision ne relevant pas d’une seule compétence précisément attribuée à un autre organe par les statuts. Les dispositions réglementaires susmentionnées, propres au CNRS, déclinent, à l’instar de celles s'appliquant à l’ensemble des EPST, ce principe posé par le législateur en confiant la compétence de principe, au sein de l’établissement, au conseil d’administration qui en est l’organe délibérant, tandis que le président n’est investi que d’un pouvoir d’exécution des décisions prises par l’organe délibérant.
Personnels
Titularisation
- Refus de titularisation en fin de stage – Motifs pouvant justifier ce refus – Insuffisance professionnelle établie par des faits antérieurs à la période de stage
CE, 12 février 2025, CNRS, n° 494075, aux tables du recueil Lebon
Par une décision du 12 février 2025, le Conseil d’État a précisé les motifs pouvant justifier le refus de titularisation d’un fonctionnaire à l’issue de sa période de stage.
Le Conseil d’État a tout d’abord rappelé que le fonctionnaire stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. Si la décision de ne pas le titulariser en fin de stage est prise en considération de sa personne, sur l’appréciation par l’autorité compétente de son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, cette décision ne revêt toutefois pas un caractère disciplinaire, de sorte qu’elle n’est pas au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l’intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier (cf. CE, Section, 3 décembre 2003, n° 236485, au recueil Lebon) et qu’elle n’a pas à être motivée (CE, 11 décembre 2006, n° 284746, aux tables du recueil Lebon).
Un refus de titularisation peut néanmoins être fondé sur des faits caractérisant en tout ou partie des fautes disciplinaires. Auquel cas, l’intéressé doit avoir été préalablement mis à même de faire valoir ses observations (cf. CE, 21 décembre 2021, Établissement public territorial Grand Paris Seine Ouest, n° 451412 ; CE, 9 novembre 2023, SISPA Vivre ensemble, n° 465459 ; également, s’agissant d’un refus de renouvellement de contrat : CE, 19 décembre 2019, Commune du Vésinet, n° 423685, aux tables du recueil Lebon).
Le Conseil d’État a ensuite rappelé que "pour apprécier la légalité d’une décision de refus de titularisation, il incombe donc au juge de vérifier qu’elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu’elle n’est entachée ni d’erreur de droit, ni d’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insuffisance professionnelle de l’intéressé, qu’elle ne revêt pas le caractère d’une sanction disciplinaire et n’est entachée d’aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l’intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations" (cf. CE, 24 février 2020, Commune de Marmande, n° 421291, aux tables du recueil Lebon).
Enfin, et c’est là que réside l’apport de la décision commentée, le Conseil d’État a jugé que : "La seule circonstance que les faits établissant l’insuffisance professionnelle de l’agent à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé soient antérieurs à la période du stage n’est pas de nature à faire obstacle à ce qu’ils justifient une décision de refus de titularisation."
Le Conseil d’État confirme ainsi que des faits antérieurs au début du stage peuvent justifier un refus de titularisation, comme il avait déjà admis que des faits antérieurs à la nomination d’un fonctionnaire portés ultérieurement à la connaissance de l’administration, révélant une incompatibilité avec le maintien de l’intéressé dans la fonction publique, peuvent justifier l’engagement d’une procédure disciplinaire en vue de la révocation de l’intéressé (cf. CE, 3 mai 2023, n° 438248, au recueil Lebon, LIJ n° 227, novembre 2023).
Affectation
- Professeur néotitulaire – Affectation et mutation – Priorités légales – Référé-suspension – Condition d’urgence
CE, 6 février 2025, Ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, n° 496294, aux tables du recueil Lebon
Une professeure de lycée professionnel, admise à la session 2023 du concours du certificat d’aptitude au professorat de lycée professionnel, avait été affectée, à l’issue de son année de stage et sous réserve de sa titularisation, dans l’académie de Versailles alors qu’elle avait formulé le vœu unique d’être affectée dans l’académie de Lille.
La professeure avait demandé la suspension de l’exécution de cette décision d’affectation à la juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui avait fait droit à sa demande, jugeant, d’une part, que la condition d’urgence était remplie et, d’autre part, que les moyens tirés du défaut d’examen particulier de la situation de la requérante et de l’erreur d’appréciation au regard des dispositions des articles L. 512-19, L. 512-20 et L. 512-21 du code général de la fonction publique (CGFP) étaient de nature à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
Le Conseil d’État, saisi d’un pourvoi en cassation formé par la ministre, a annulé l’ordonnance et rejeté la demande de la requérante.
En premier lieu, reprenant sa jurisprudence constante (cf. CE, 14 novembre 1994, n° 83880 ; CE, 27 juillet 2005, Ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, n° 274933 ; et CE, 7 août 2007, La Poste, n° 290393), le Conseil d’État a rappelé la distinction existant entre, d’un côté, les mutations des fonctionnaires et, de l’autre, les affectations des agents nouvellement titularisés dans leurs premières fonctions. Il en a ainsi déduit que les dispositions des articles L. 512-19, L. 512-20 et L. 512-21 du CGFP, qui concernent les seuls changements d’affectation portant mutation, étaient inapplicables aux premières nominations des agents titularisés, la requérante ne pouvant dès lors utilement s’en prévaloir.
En second lieu, le Conseil d’État a jugé qu’il ressortait des pièces du dossier soumis à la juge des référés que, contrairement à ce qu’elle avait jugé, les décisions attaquées avaient été prises "après examen de [la] situation individuelle [de la requérante], en particulier des contraintes familiales et financières qu’impliqu[ait] son affectation dans l’académie de Versailles".
Réglant l’affaire au titre de la procédure de référé, le Conseil d’État a rejeté la demande de la requérante pour défaut d’urgence.
Suivant les conclusions de son rapporteur public, le Conseil d’État a énoncé par un considérant de principe que : "La première affectation d’un agent public titularisé à l’issue de son année de stage n’a pas de conséquences telles sur la situation ou les intérêts de cet agent qu’elle constitue, sauf circonstances très particulières, une situation d’urgence."
Dans ces conclusions (accessibles sur ArianeWeb) il était rappelé en effet que "l’obligation faite aux nouveaux titulaires de solliciter une affectation dans le cadre du mouvement interacadémique les place dans la situation de devoir changer d’académie, y compris d’office, en application du mécanisme d’extension de vœux prévu par les lignes directrices permettant d’affecter un enseignant dans une académie qu’il n’a pas demandée dès lors qu’il n’a pu obtenir satisfaction pour l’un des vœux qu’il a formulés", ce que "les candidats au concours […] savent parfaitement". Le rapporteur public expliquait ainsi que "la satisfaction de la condition d’urgence dans un tel litige doit être appréciée strictement et subordonnée à la justification d’une situation réellement particulière suffisamment étayée car le préjudice porté à la situation du requérant doit être mis en balance avec l’intérêt public qui s’attache à une répartition équilibrée des enseignants titulaires sur tout le territoire national et, parmi eux, des néotitulaires, qui ne peuvent tous se concentrer dans les académies les plus attractives".
Le Conseil d’État a jugé qu’en l’espèce, les désagréments matériels et familiaux dont faisait état la requérante, liés à l’éloignement de son affectation d'avec son domicile, ne caractérisaient pas, à eux seuls, une situation d’urgence en rappelant que la décision attaquée était "motivé[e] par l’intérêt public s’attachant à une procédure d’affectation visant à assurer une répartition équitable et équilibrée des personnels enseignants titulaires sur l’ensemble du territoire national, selon les capacités d’accueil de chaque académie".
Imputabilité au service
- Fonctionnaires et agents publics – Statuts, droits, obligations et garanties – Garanties et avantages divers – Protection en cas d’accident ou de maladie imputable au service – Rechute
CE, avis, 18 février 2025, n° 495725, aux tables du recueil Lebon
Le tribunal administratif de Grenoble, avant de statuer sur la requête d’un agent contestant le refus de son employeur de reconnaître l’imputabilité au service de ce qu’il estimait être une rechute d’un accident de service dont il avait été victime, a transmis une demande d’avis au Conseil d’État sur le fondement de l’article L. 113-1 du code de justice administrative, portant principalement sur la question suivante : "Les droits des agents publics en matière de rechute sont-ils constitués à la date à laquelle l’accident de service est intervenu ou à la date à laquelle la maladie professionnelle a été diagnostiquée, ou bien ces droits sont-ils constitués à la date à laquelle les nouvelles douleurs susceptibles de caractériser la rechute ont été diagnostiquées ?"
Plus précisément, il s’agissait de déterminer si l’ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, ayant créé le congé pour invalidité temporaire imputable au service (CITIS) ainsi qu’une présomption d’imputabilité pour les accidents de service, s’appliquait à une rechute survenue postérieurement à son entrée en vigueur, mais se rattachant à un accident ou à une maladie antérieurs à cette entrée en vigueur.
Le Conseil d’État a tout d’abord rappelé que le droit des agents publics à bénéficier d’une prise en charge par l’administration à raison d’un accident ou d’une maladie reconnus imputables au service est constitué à la date à laquelle l’accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée, et que ce droit inclut celui de bénéficier à nouveau d’une telle prise en charge en cas de rechute.
Ensuite, il s’est astreint à définir la notion de "rechute", en indiquant qu’il s’agit d’une "modification de l’état de l’agent constatée médicalement postérieurement à la date de consolidation de la blessure ou de guérison apparente, et constituant une conséquence exclusive de l’accident ou de la maladie d’origine".
Il en a déduit que "quand un accident survenu avant l’entrée en vigueur de l’article 10 de l’ordonnance du 19 janvier 2017 ou une maladie diagnostiquée avant cette date est reconnu imputable au service selon les critères prévalant avant cette même date, il convient, si de nouveaux troubles affectent le même agent après cette date, de rechercher si ces troubles proviennent de l’évolution spontanée des séquelles de l’accident ou de la maladie d’origine, en dehors de tout événement extérieur, et constituent ainsi une conséquence exclusive de cet accident ou de cette maladie. Si tel est le cas, ces troubles ouvrent droit, sans autre condition, au bénéfice du congé pour invalidité temporaire imputable au service. Dans toute autre hypothèse, il convient d’apprécier leur imputabilité au service dans les conditions prévues depuis l’entrée en vigueur de l’article 10 de l’ordonnance du 19 janvier 2017."
Enfin, sur les règles de procédure et de forme applicables aux déclarations de rechute, s'agissant desquelles le Conseil d’État était également interrogé, celui-ci a jugé que les déclarations de rechute sont transmises dans les mêmes formes et examinées dans les mêmes conditions de délai que les demandes initiales de CITIS. Ainsi, sauf à ce que l’agent se prévale d’une qualité de victime d’un acte de terrorisme ou justifie d’un cas de force majeure, l’administration territoriale est tenue de rejeter la demande de l’agent de rattachement au service lorsque celle-ci ne lui est pas remise dans le délai d’un mois à compter de sa constatation médicale, ce délai ne commençant toutefois à courir qu’à compter du 1er juin 2019, en application de l’article 15 du décret du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale. Un délai similaire est prévu pour les demandes présentées par des agents publics de l’État, à l’article 47-18 du décret du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l’organisation des conseils médicaux, aux conditions d’aptitude physique pour l’admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires.
Non-cumul d’activités
- Changements non substantiels des conditions d’exercice ou de rémunération de l’activité accessoire – Autorisation de cumul
CAA Lyon, 22 janvier 2025, n° 23LY01758
Un agent public de la fonction publique territoriale, autorisé à exercer à titre accessoire une activité privée lucrative de professeur de judo de 2014 à 2021, avait fait l’objet d’un blâme au motif que les conditions d’exercice de son activité accessoire avaient substantiellement évolué sans qu’il demande une nouvelle autorisation de cumul avec son activité principale. Il avait également été informé d’une procédure tendant au reversement des sommes perçues au titre de son activité accessoire et de l’émission de cinq titres exécutoires à cette fin. Saisi d’une demande d’annulation de ces titres exécutoires, ainsi que de la décision prononçant la sanction de blâme, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand avait rejeté la requête dans un jugement contesté devant la cour administrative d’appel de Lyon.
L’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version applicable au litige et codifié désormais aux articles L. 121-3, L. 123-1 et L. 123-7 du code général de la fonction publique (CGFP), rappelle que les agents publics doivent consacrer l’intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées. Ils peuvent toutefois être autorisés à exercer, à titre accessoire, une activité, lucrative ou non, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
Selon l'article 7 du décret du 2 mai 2007 relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l’État, dans sa version applicable au litige et repris actuellement dans des termes identiques à l'article R. 123-12 du CGFP : "Tout changement substantiel intervenant dans les conditions d’exercice ou de rémunération de l’activité exercée à titre accessoire par un agent est assimilé à l’exercice d’une nouvelle activité. / L’intéressé doit adresser une nouvelle demande d’autorisation à l’autorité compétente (…)."
Dans cet arrêt, la cour administrative d’appel a donné une illustration de ce qui ne relève pas d’un "changement substantiel" de l’activité exercée à titre accessoire à la fonction publique confiée à l’agent.
La cour a jugé, pour annuler le jugement puis le blâme et les titres exécutoires, que "la seule augmentation, à compter de 2016, du volume horaire de l’activité d’enseignement de cet art martial [volume horaire mensuel de 28,33 heures porté à 37,79 heures, soit environ deux heures de plus par semaine] ne constitue pas, eu égard à son caractère limité et contrairement à ce que la commune a estimé, un [tel] changement substantiel dans les conditions d’exercice ou de rémunération" qui aurait nécessité la présentation d’une nouvelle demande d’autorisation de cumul.
Protection fonctionnelle
- Protection fonctionnelle – Agent public poursuivi devant un juge des comptes au titre de la responsabilité financière des gestionnaires publics
CE, 29 janvier 2025, Société UGGC et autres, n° 497840 et n° 498835, aux tables du recueil Lebon
Dans cette affaire, les requérants demandaient au Conseil d’État, d’une part, de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité portant sur le premier alinéa de l’article L. 134-4 du code général de la fonction publique (CGFP), tel qu’interprété par la secrétaire générale du Gouvernement dans sa note n° 360/24/SG du 2 avril 2024 relative au nouveau régime de responsabilité des gestionnaires publics et à la protection fonctionnelle, et, d’autre part, d’annuler pour excès de pouvoir ladite note.
Le Conseil d’État a jugé, tout d'abord, qu’il n’y avait pas lieu de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité, la demande n’étant ni nouvelle ni sérieuse. En effet, les dispositions en cause, telles qu’interprétées par la note de la secrétaire générale du Gouvernement, n’instaurent pas de différence de traitement injustifiée entre agents de droit public et salariés de droit privé en excluant les premiers du bénéfice de la protection fonctionnelle lorsqu’ils sont poursuivis devant la Cour des comptes au titre de la responsabilité financière des gestionnaires publics, dès lors qu'en l’état de la jurisprudence du juge judiciaire, il n’est pas établi que le droit à la protection juridique du salarié impose à l’employeur d’assurer une telle garantie en cas de poursuites pour les infractions prévues aux articles L. 131-9 à L. 131-15 du code des juridictions financières (CJF).
Puis il a jugé que les requérants n'étaient pas fondés à demander l’annulation de la note du 2 avril 2024. En effet, aux termes des articles L. 134-1 à L. 134-5 du code général de la fonction publique, la protection fonctionnelle est accordée aux agents publics poursuivis pénalement pour des faits n’ayant pas le caractère d’une faute personnelle détachable de leurs fonctions. Or, il résulte des articles L. 131-1, L. 131-9 à L. 131-16, L. 131-21 et L. 142-1-12 du CJF que les amendes prononcées par la Cour des comptes ne revêtent pas la nature d’une sanction pénale.
De même, après avoir rappelé les principes applicables en matière de protection fonctionnelle, le Conseil d’État a jugé que "lorsqu’un agent public est mis en cause devant la chambre du contentieux de la Cour des comptes dans le cadre du régime de responsabilité des gestionnaires publics prévu aux articles L. 131-1 et suivants du CJF, s’il est toujours loisible à l’administration de lui apporter un soutien, notamment par un appui juridique, technique ou humain dans la préparation de sa défense, [ce] principe (…) n’impose pas à la collectivité publique de lui accorder une protection".
N.B. : Les poursuites disciplinaires n'entrent pas non plus dans le cadre des frais susceptibles d'être pris en charge au titre d'une protection fonctionnelle accordée. Les dispositions des articles L. 134-1 et suivants du CGFP n'ont "ni pour objet ni pour effet d'ouvrir droit à la prise en charge par l'État des frais qu'un fonctionnaire peut engager pour sa défense dans le cadre d'une procédure disciplinaire diligentée à son encontre par l'autorité hiérarchique dont il relève ou des frais qu'il expose pour contester devant la juridiction administrative une sanction disciplinaire prise à son encontre" (cf. CE, 9 décembre 2009, n° 312483, aux tables du recueil Lebon).
Au surplus, si les circonstances de l'espèce ayant justifié l'octroi de la protection fonctionnelle ont eu pour effet de mettre en évidence l'existence d'une faute disciplinaire commise par l'agent ou tout autre agent de la collectivité publique concernée, l'obligation de protection n'exclut pas l'engagement de poursuites disciplinaires contre lui à raison de faits dénoncés par des tiers (cf. CE, 28 octobre 1970, n° 78190, au recueil Lebon, p. 620).
- Droit à la protection fonctionnelle – Frais d’instance – Frais d’avocat exposés dans le cadre d’un litige devant la juridiction administrative
CE, 7 février 2025, n° 495551, aux tables du recueil Lebon
Un professeur, ayant obtenu le bénéfice de la protection fonctionnelle, avait demandé, sans succès, à obtenir, dans ce cadre, la prise en charge de ses frais d’avocat relatifs, d’une part, à l’engagement d’une procédure pénale et, d’autre part, à des démarches précontentieuses et contentieuses devant les juridictions administratives aux fins d’obtenir l’indemnisation du préjudice subi du fait du harcèlement moral dont il s’estimait victime. Le professeur avait alors formé un référé-provision auprès du tribunal administratif de Melun pour obtenir une somme correspondant aux frais qu’il avait engagés.
Si le juge des référés du tribunal administratif de Melun avait fait partiellement droit à la demande du requérant, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Paris avait annulé l’ordonnance en jugeant que l’article L. 134-12 du code général de la fonction publique (CGFP) et le décret du 26 janvier 2017 relatif aux conditions et aux limites de la prise en charge des frais exposés dans le cadre d’instances civiles ou pénales par l’agent public ou ses ayants droit, pris pour son application, faisaient obstacle à ce que les frais d’avocat exposés par le requérant devant les juridictions administratives puissent être pris en charge par l’État au titre de la protection fonctionnelle.
Le Conseil d’État a été saisi d’un pourvoi en cassation et s’est prononcé sur la question de savoir si les frais d’instance exposés dans le cadre de litiges portés devant le juge administratif pouvaient être pris en charge au titre de la protection fonctionnelle, en ce que les termes de l’article 2 du décret du 26 janvier 2017, aujourd’hui codifié aux articles R. 134-1 et suivants du CGFP, ne font référence qu’aux "frais exposés dans le cadre d’une instance civile ou pénale".
Toutefois, après avoir rappelé la finalité du régime de protection fonctionnelle, à savoir établir "à la charge de l’administration une obligation de protection de ses agents dans l’exercice de leurs fonctions (…) [qui] a pour objet non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l’agent est exposé, mais aussi d’assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu’il a subis", quelle que soit la qualité de l’auteur des attaques qui peut être, dans de nombreux cas, et, en particulier, pour des faits de harcèlement moral dans la sphère professionnelle, un agent public, le Conseil d’État a jugé que "l’instance engagée par un agent devant une juridiction administrative, relative à des faits ouvrant droit au bénéfice de la protection fonctionnelle doit être regardée comme entrant dans les prévisions [des dispositions précitées]".
À noter que, dans ses conclusions (accessibles sur ArianeWeb) sur cette décision, le rapporteur public a précisé que "les éventuelles difficultés en la matière se régleront soit, en amont, à travers la possibilité pour l’administration de refuser l’octroi de la protection fonctionnelle, lorsqu’elle estime que les conditions d’attribution ne sont pas réunies, soit, en aval, dans les actions récursoires qu’elle pourra exercer, en cas de faute personnelle, contre les agents qui seraient à l’origine de l’engagement de sa responsabilité".
Rémunérations, traitement et avantages en nature
- Délivrance des bulletins de paye – Forme papier – Forme électronique – Espace numérique sécurisé des agents publics (ENSAP)
TA Rouen, 4 février 2025, n° 2303854
La requérante, professeure des écoles, avait demandé à la direction des services départementaux de l’éducation nationale de son département la transmission de ses bulletins de paye au format papier, en l’absence de souscription d'un contrat d’accès à internet à son domicile et ne disposant pas, selon ses déclarations, d’adresse de courriel personnelle. L'administration l'avait informée que ces documents étaient disponibles sur la plateforme dénommée "Espace numérique sécurisé des agents publics" (ENSAP) administrée par la direction générale des finances publiques (DGFiP).
La requérante demandait au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur sa demande réitérée de transmission de ses bulletins de paye au format papier. Elle soutenait, d’une part, qu’elle était dans l’incapacité d’accéder à internet à son domicile ou à son espace numérique sécurisé sur son lieu de travail et, d’autre part, que le refus de transmission d’une version papier de ses bulletins de paye était discriminatoire.
Depuis 2020, la dématérialisation des bulletins de paye s’est généralisée dans la fonction publique, à la suite du décret du 3 août 2016 relatif à la mise à disposition et à la conservation sur support électronique des bulletins de paye et de solde des agents publics.
En vertu de l’article 2 de ce décret, ces documents "sont mis à disposition des agents concernés sous forme électronique, dans un espace numérique propre, créé et administré par la direction générale des finances publiques et selon des modalités garantissant la sécurité et l’intégrité des données, leur confidentialité et leur accessibilité".
L’article 6 du même décret prévoit que : "Par dérogation aux dispositions des articles 2 et 5, il est fait droit aux demandes tendant à bénéficier d’une remise sur support papier des documents mentionnés à l’article 1er, présentées : / 1° Par les agents qui sont dans l'incapacité d'accéder sur leur lieu de travail à leur espace numérique sécurisé ; / 2° Le temps de ces congés, par les agents bénéficiaires de l'un des congés pris en application des 2°, 3° ou 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, des articles 12, 13, 14 et 16 du décret du 17 janvier 1986 susvisé, de l’article 69 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 susvisé, ou du a) du 1° de l’article L. 4138-2 du code de la défense".
Après avoir écarté les dispositions de l’article L. 3243-2 du code du travail, qui ne concernent que les modalités de remise du bulletin de paye applicables aux salariés de droit privé, le tribunal administratif de Rouen, reprenant une lecture littérale des dispositions du décret du 3 août 2016, a jugé que l’intéressée n'entrait dans aucun des deux cas dérogatoires prévus à l’article 6.
En particulier, se fondant sur la lettre même des dispositions du 1° de l'article 6 du décret du 3 août 2016, le tribunal a considéré que la requérante "ne peut légitimement soutenir qu'elle est dans l'incapacité, sur son lieu de travail, d'accéder à son espace numérique sécurisé dès lors qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle a été explicitement autorisée à se servir du matériel informatique et de l'accès internet disponible sur son lieu de travail pour se connecter [à] son espace personnel de l'ENSAP. En outre, si elle se prévaut de la circonstance qu'elle ne disposerait pas d'adresse personnelle de courriel, il est constant qu'elle bénéficie de deux adresses de messagerie électronique professionnelles lui permettant de sécuriser sa connexion sur le site de l'ENSAP".
Le tribunal administratif a donc rejeté la requête et n’a pas retenu le moyen tiré de la discrimination illégale dans la mesure où la requérante ne démontrait pas qu’un traitement différent aurait été appliqué dans une situation semblable.
Procédure
- Confusion entre autorité investie du pouvoir de sanction et présidence de la CAPN – Incidence sur la transmission de l’avis – Régime des lanceurs d’alerte – Contrôle du juge de cassation
CE, 6 mars 2025, n° 491833, aux tables du recueil Lebon
Par une décision du 6 mars 2025, le Conseil d’État a notamment précisé certains points relatifs à la procédure disciplinaire des agents publics et au statut de lanceur d’alerte.
1. Cette affaire est l’occasion pour le Conseil d’État de préciser les conséquences de l’absence de communication de l’avis rendu par la commission administrative paritaire avant la prise de la sanction par l’autorité disciplinaire.
L'article 8 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 prévoit que la commission administrative paritaire (CAP) siégeant en formation disciplinaire émet une proposition sur les suites à donner à la procédure disciplinaire engagée, à la majorité de ses membres, qu’elle transmet à l’autorité disciplinaire. Dans l’hypothèse où aucune proposition n’obtient une majorité, la CAP est réputée avoir été consultée et en informe l’autorité disciplinaire.
C’est cette dernière hypothèse qui était survenue dans la présente affaire. À la suite de la tenue de la CAP, l’autorité disciplinaire avait prononcé la sanction du déplacement d’office à l’encontre de l’agent, alors que le président du conseil de discipline ne l’avait pas encore informée de cette situation de blocage.
Le Conseil d’État a jugé à cet égard que la circonstance que l’autorité disciplinaire n’avait pas été informée, avant de prendre la sanction, de ce qu’aucune des propositions soumises au conseil de discipline n’avait été adoptée avait eu, par essence, une influence sur le sens de la décision prise par l’autorité disciplinaire. Il a ainsi censuré le raisonnement tenu par la cour administrative d’appel qui avait neutralisé ce vice de procédure par application de la jurisprudence Danthony (cf. CE, 23 décembre 2011, n° 335033, au recueil Lebon, LIJ n° 162, février 2012).
Dans la situation singulière de ce dossier, le Conseil d’État n'a toutefois pas sanctionné l’arrêt de la cour. En usant des pouvoirs qu’il tient de son office, il a procédé à une neutralisation de ce motif comme surabondant (cf. CE, Section, 22 avril 2005, Commune du Barcarès, n° 257877, au recueil Lebon) pour lui substituer le motif, également retenu par les juges d’appel, tiré de ce que la présidente de la CAP siégeant en conseil de discipline, durant laquelle avait été examinée la situation considérée, qui revêtait, par ailleurs, la qualité d’autorité investie du pouvoir disciplinaire, "avait ainsi nécessairement connaissance de la délibération du conseil de discipline avant de prononcer la sanction contestée, conformément [aux] dispositions de l’article 8 du décret du 25 octobre 1984 [précitées]".
2. Par ailleurs, cette décision permet au Conseil d’État d’affirmer le degré de contrôle qu’il exerce sur les agents se prévalant de la qualité de lanceur d’alerte pour faire obstacle au prononcé d’une sanction disciplinaire à leur égard, conformément à l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable à l’espèce, et repris en substance à l'article L. 135-4 du code général de la fonction publique, mais aussi au A du III de l'article 10-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.
Le régime de preuve applicable au lanceur d’alerte créé par la loi précitée s’inspire de celui mis au point par le Conseil d’État en matière de discrimination (cf. CE, Assemblée, 30 octobre 2009, n° 298348, au recueil Lebon) et de harcèlement moral (CE, Section, 11 juillet 2011, n° 321225, au recueil Lebon). Il revient à l’agent de produire des éléments laissant présumer qu’il peut bénéficier de la protection des lanceurs d’alerte. Puis, au vu de ces éléments, l’administration doit alors démontrer que la sanction disciplinaire prise est étrangère aux éléments relatifs à l’alerte. Enfin, il revient au juge de forger sa conviction en recourant au besoin à une mesure d’instruction.
À cet égard, le Conseil d’État, juge de cassation, a adopté un contrôle analogue à celui qu’il exerce en matière de discrimination ou de harcèlement moral (cf. CE, 4 octobre 2023, n° 452910) : les deux premières étapes relèvent de l’appréciation souveraine des juges du fond sous réserve d’une dénaturation, tandis que la dernière relève du contrôle de la qualification juridique des faits.
Suspension conservatoire
- Refus de suspendre de ses fonctions un agent – Contestation par un usager du service public – Absence d’intérêt à agir
TA Toulon, 30 décembre 2024, n° 2201505
Un parent d’élève avait saisi le tribunal administratif de Toulon afin de contester le refus de la directrice académique des services de l'éducation nationale du Var de suspendre à titre conservatoire l’enseignante dont l'inaction aurait mis en danger sa fille.
Après avoir cité l’article L. 531-1 du code général de la fonction publique, le tribunal administratif a rappelé que : "La victime d'un dommage causé par un agent public dans l'exercice de ses fonctions a la possibilité d'engager une action en réparation en recherchant soit la responsabilité de l'administration pour faute de service devant le juge administratif, soit, en cas de faute personnelle détachable de l'exercice des fonctions, la responsabilité de l'agent concerné devant le juge judiciaire. Dans le cas où une action pénale est intentée à l'encontre de ce dernier, elle peut, en outre, se constituer partie civile", en reprenant la position du Conseil d'État (CE, 17 mai 2006, n° 268938, au recueil Lebon).
Puis, le tribunal a considéré qu'"une décision de suspension prise par l’administration, à titre conservatoire, à l’encontre d’un agent a pour seul objet de tirer, en vue du bon fonctionnement du service, les conséquences que le comportement de cet agent emporte sur sa situation vis-à-vis de l’administration".
Par conséquent, le tribunal administratif a accueilli la fin de non-recevoir opposée par l'administration tirée de ce que le parent d'élève en question ne disposait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre la décision de refus.
N.B. : La logique à l'œuvre en matière disciplinaire dans la fonction publique est également celle du bon fonctionnement du service, "qu'il importe de préserver en sanctionnant le comportement inadéquat de l'agent public", comme le précise le rapporteur public dans ses conclusions (accessibles sur ArianeWeb) sur la décision n° 409543 du 2 octobre 2017 du Conseil d'État.
Ainsi, un tiers n'a pas intérêt à agir contre le refus de prononcer une sanction (cf. CE, 29 décembre 1999, n° 185005, au recueil Lebon) ni contre la sanction elle-même (CE, Section, 10 juillet 1995, n° 141654, au recueil Lebon ; et CE, 17 mai 2006, n° 268938, au recueil Lebon). Un tiers ne peut pas non plus obtenir de droit à réparation en raison de l'absence ou de l'insuffisance de la sanction (CE, 2 juillet 2010, n° 322521, aux tables du recueil Lebon).
Admission à la retraite
- Mise à la retraite sur demande pour ancienneté de service – Impossibilité de rejeter une demande au motif qu’une procédure disciplinaire est en cours ou est envisagée
CE, 14 février 2025, n° 493140, aux tables du recueil Lebon
Le requérant, gardien de la paix, avait demandé à être admis à la retraite à compter du 1er mai 2021 en application de l’article 2 de la loi du 8 avril 1957 instituant un régime particulier de retraites en faveur des personnels actifs de police. La préfète de la zone de défense et de sécurité Est avait cependant opposé un refus à sa demande au motif que des enquêtes administratives avaient été diligentées à son encontre et qu’il était susceptible de faire l’objet d’une procédure disciplinaire.
Le Conseil d’État a annulé le jugement du tribunal administratif qui avait rejeté la demande d’annulation de la décision de refus.
Après avoir cité le 1° du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR), les articles 2 et 6 de la loi du 8 avril 1957 et l'article D. 1 du même code, le Conseil d’État a considéré que : "Aucun texte ni aucun principe ne permet à l’administration de rejeter, au motif qu’une procédure disciplinaire serait en cours ou envisagée, la demande d’admission à la retraite d’un fonctionnaire de l'État qui remplit les conditions pour obtenir la liquidation de sa pension civile de retraite." Par suite, en jugeant que l’administration pouvait différer l’admission à la retraite de ce policier qui en remplissait les conditions aux seules fins de lui infliger une sanction disciplinaire, le tribunal administratif a entaché son jugement d’une erreur de droit.
Cette décision réitère, à propos d’une catégorie de personnels, la solution dégagée par des jurisprudences de 1958. Ainsi, lorsqu’un agent en remplit les conditions légales et réglementaires pour partir à la retraite, il est en droit d’être admis à faire valoir ses droits à pension (cf. CE, Assemblée, 9 mai 1958, Sieur F., n° 1433, au recueil Lebon). L’administration dispose alors, pour statuer sur la demande d’admission à la retraite présentée par l’agent, d’un délai raisonnable fixé tout d’abord par la jurisprudence (CE, Assemblée, 31 octobre 1958, Sieur B., n° 7472, au recueil Lebon), puis par l’article D. 1 du CPCMR.
Ainsi que l’a précisé le rapporteur public dans ses conclusions (accessibles sur ArianeWeb) sur cette décision commentée du 14 février 2025, "corollaire du droit du fonctionnaire d’être admis à faire valoir ses droits à pension et de l’obligation de l’administration d’examiner sa demande dans un délai raisonnable, l’administration ne peut pas différer l’admission à la retraite dans le but de prendre une sanction disciplinaire" (cf. également : CE, 15 juillet 1958, Sieur M., n° 36441, au recueil Lebon), ni même différer pour ce même motif l’examen de la demande de mise à la retraite présentée par l’agent.
Abandon de poste
- Procédure – Mise en demeure – Mentions obligatoires – Garantie
CE, 30 décembre 2024, Université Toulouse-III-Paul-Sabatier, n° 471753, aux tables du recueil Lebon
En exécution d’un arrêt rendu par la cour administrative d’appel de Bordeaux en 2015 (22 juin 2015, n° 13BX03179), Mme X, recrutée en qualité de psychologue au sein du service interuniversitaire de médecine préventive de promotion de la santé, avait conclu le 7 février 2017 un contrat à durée indéterminée avec l’université Toulouse-III-Paul-Sabatier.
L'intéressée n’ayant pas pris ses fonctions en dépit de plusieurs courriers la mettant en demeure de rejoindre son poste, le président de l’université avait estimé que le lien avec le service était rompu et avait prononcé son licenciement pour abandon de poste à la date du 24 mars 2017.
Par un jugement du 24 décembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse avait annulé la décision de licenciement dans la mesure où l’absence d’indication dans la mise en demeure du risque encouru de licenciement sans procédure disciplinaire préalable ne constituait pas une simple condition de procédure, mais une condition nécessaire pour que soit caractérisée une situation d’abandon de poste.
La cour administrative d’appel de Toulouse ayant confirmé ce jugement par un arrêt n° 20TL20661 du 30 décembre 2022, l’université s’était pourvue en cassation devant le Conseil d’État, qui a annulé cet arrêt et a rejeté la requête au fond.
Tout d’abord, le Conseil d’État a rappelé le principe selon lequel "une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l’agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste dans un délai approprié qu’il appartient à l’administration de fixer. Une telle mise en demeure doit prendre la forme d’un document écrit, notifié à l’intéressé et l’informant du risque encouru d’une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable" (cf. CE, Section, 11 décembre 1998, nos 147511 et 147512, au recueil Lebon ; CE, 15 juin 2005, n° 259743, aux tables du recueil Lebon).
Puis, articulant sa décision n° 365918 du 26 septembre 2014 (aux tables du recueil Lebon) avec sa décision n° 428957 du 6 mai 2021 (Centre hospitalier sud francilien), le Conseil d’État a précisé que : "Si l’obligation pour l’administration d’impartir à l’agent un délai approprié pour rejoindre son poste et de l’avertir que, faute de le faire, il sera radié des cadres constitue une condition nécessaire pour que soit caractérisée une situation d’abandon de poste, et non une simple condition de procédure, il n’en va pas de même de l’indication qui doit lui être donnée, dans la mise en demeure écrite qui lui est adressée, que l’abandon de poste pourra être constaté sans procédure disciplinaire préalable."
Ainsi, en écartant comme inopérant le moyen soulevé en défense par l’université tiré de ce que l’absence d’information dans la mise en demeure sur le risque encouru d’une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable n’avait pas privé l’intéressée d’une garantie procédurale, la cour avait entaché son arrêt d’erreur de droit.
Réglant l’affaire au fond, le Conseil d’État a relevé que la mise en demeure adressée à l’intéressée ne comportait pas la mention de ce que son licenciement pourrait être mis en œuvre sans bénéfice des garanties de la procédure disciplinaire. Il a ainsi rappelé qu’une telle omission constituait un vice de procédure susceptible d’avoir privé cette dernière d’une garantie, au sens de la jurisprudence Danthony (CE, Assemblée, 23 décembre 2011, n° 335033, au recueil Lebon, LIJ n° 162, février 2012 ; ou, s’agissant plus particulièrement de la procédure de licenciement pour abandon de poste, cf. CE, n° 428957, susmentionnée).
Toutefois, alors même que cette mise en demeure avait été signifiée par acte d’huissier et que l’huissier avait laissé au domicile de l’intéressée un avis de passage faisant état d’un courrier de l’université la mettant en demeure de rejoindre son service, celle-ci s’était abstenue d’aller récupérer cet acte dans les délais et n’avait fait état d’aucune circonstance l’ayant empêché de le faire.
Dans ces conditions, le Conseil d’État a estimé que l’intéressée ne pouvait soutenir que l’absence des mentions obligatoires dans le courrier de mise en demeure qu’elle n’avait pas récupéré avant le prononcé de son licenciement l’aurait privée d’une garantie.
N.B. : Il convient en effet de rappeler qu’en cas de signification par voie d’huissier, la circonstance que le destinataire d’une mise en demeure de rejoindre son poste soit absent ne saurait faire obstacle à ce que celle-ci produise ses effets dès lors que l’avis mentionne la nature de l’acte et le fait qu’une copie doit en être retirée dans le plus bref délai (cf. CE, 15 mars 2023, n° 456789).
Concours
- Procédure de mutation prioritaire des enseignants-chercheurs – Intérêt à agir – Modalités de calcul des suffrages exprimés – Retrait – Contrôle du juge sur la délibération du conseil académique
CE, 12 février 2025, n° 475205
Par une décision du 12 février 2025, le Conseil d’État a précisé plusieurs points du régime juridique de la mutation prioritaire des enseignants-chercheurs régie par l'article 9-3 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984.
Dans le cadre de cette procédure, parfois qualifiée de "coupe-file", qui s’applique notamment aux candidats en situation de handicap ou sollicitant un rapprochement de conjoint, le conseil académique et le conseil d’administration de l’établissement se prononcent successivement sur la candidature. En cas d’avis favorable, le nom du candidat est transmis au ministre chargé de l’enseignement supérieur en vue de sa nomination. À l’inverse, si le conseil académique ne retient pas la candidature ou si le conseil d’administration (CA) émet un avis défavorable, cela met un terme à la procédure dérogatoire de l’article 9-3 et l’intéressé voit alors sa candidature examinée avec celle d’autres candidats dans le cadre de la procédure de droit commun prévue à l'article 9-2 du même décret.
1. Par cette décision, le Conseil d’État a reconnu aux candidats à un poste d’enseignant-chercheur au titre de l’article 9-2 du décret précité un intérêt pour agir contre l’ensemble des actes (tant l’avis du conseil académique, que celui du conseil d’administration, puis l’acte de nomination qui, dans ce cas d’espèce, n’était pas contesté) intervenus dans le cadre de la procédure prévue à l’article 9-3. Ce faisant, il a réaffirmé qu’il s’agissait de la même opération destinée à pourvoir un même emploi d’enseignant-chercheur, en dépit de l’existence de deux procédures de recrutement distinctes.
En outre, comme le suggérait dans ses conclusions (accessibles sur ArianeWeb) le rapporteur public, qui relevait que la délibération du conseil académique était "l’un des maillons d’une "série nécessaire de décisions concourant à une décision finale" et qu’elle avait permis, en étant favorable au candidat, "que la procédure dérogatoire aille à son terme", le Conseil d’État a reconnu le caractère d’acte faisant grief tant à l’avis favorable émis par le conseil d'administration qu’à la délibération par laquelle le conseil académique, ou l’organe en tenant lieu, a transmis un nom au CA.
2. Le Conseil d’État a appliqué à la délibération du conseil académique le même degré de contrôle qu’à l’avis émis par le conseil d’administration. Ainsi, il a exercé un contrôle normal de l’appréciation portée par le conseil académique quant à l’adéquation d’une candidature avec le profil du poste ouvert au recrutement dans le cadre de la procédure de l’article 9-3 du décret précité.
3. Le Conseil d’État a enfin jugé que lorsque, comme en l’espèce, aucune disposition ne vient régir le décompte des voix, "[le conseil d’administration] doit être regardé, chaque fois qu’il y a égalité de voix, comme ne se prononçant pas favorablement sur la proposition qui lui est soumise".
Dans les faits particuliers de l’espèce, en effet, le CA siégeant en formation restreinte s’était réuni une première fois en aboutissant à un partage des voix sur la candidature. L’établissement avait alors considéré que ce conseil n’avait pas rendu d’avis et l’avait réuni une deuxième, puis une troisième fois pour aboutir à une majorité finalement en faveur de l’intéressée. Ainsi, contrairement à ce qu’avait estimé l’établissement, le CA devait être regardé comme ayant rendu un avis défavorable sur la candidature dès sa première réunion.
4. Pour autant, le Conseil d’État a jugé qu’il était toujours loisible à l’organe délibérant de se prononcer à nouveau, sans qu’y fasse obstacle l'article L. 243-3 du code des relations entre le public et l’administration, et a relevé qu’aucun détournement de procédure n’était, en l’espèce, allégué. Partant, le CA pouvait bien remplacer l’avis défavorable rendu lors de sa première, puis deuxième délibération en avis favorable lors de sa dernière délibération.
Établissements d’enseignement privés et instruction en famille
Mise en demeure et fermeture
- Mise en demeure – Fondement et modalités de l’obligation de motivation – Absence de procédure contradictoire préalable obligatoire – Absence de durée minimale de contrôle – Non-conformité de l’enseignement dispensé à l’objet de l’instruction obligatoire
TA Grenoble, 6 février 2025, Association de l'école démocratique Ma voie, n° 2201563
Un établissement d’enseignement privé hors contrat avait fait l’objet d’un contrôle au cours duquel plusieurs manquements à l’obligation de dispenser un enseignement conforme à l’objet de l’instruction obligatoire avaient été constatés.
L’association gestionnaire de l’établissement contestait devant le tribunal administratif de Grenoble la mise en demeure de remédier aux manquements constatés à l’occasion de ce contrôle.
Par un jugement du 6 février 2025, le tribunal administratif a rejeté le recours de l’association.
En premier lieu, le tribunal a relevé qu'"une mise en demeure a pour objet d’inviter son destinataire à se conformer aux obligations légales et réglementaires qui sont les siennes" et qu’elle n’entre donc dans aucune des catégories de décisions devant être motivées en application de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA).
Il a toutefois estimé que "le pouvoir que l'article L. 442-2 du code de l'éducation attribue au recteur d'adresser des mises en demeure aux établissements d'enseignement privés hors contrat implique nécessairement que ce type d'actes, alors même qu'ils n'entrent dans aucune des catégories de décisions administratives qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du [CRPA], mentionne les faits constatés par le recteur ainsi que les obligations dont il estime qu'elles ont été méconnues et auxquelles il invite l'établissement à se conformer à l'avenir", ce qui était le cas en l’espèce.
En deuxième lieu, le tribunal a jugé que la mise en demeure n’avait pas à être précédée de la procédure contradictoire prévue à l’article L. 122-1 du même code, puisque celui-ci renvoie, pour son champ d’application, à l’article L. 211-2, dont ne relevait pas, ainsi qu’il vient d’être dit, la mise en demeure attaquée.
En troisième lieu, le tribunal a également écarté le moyen tiré de ce que la mise en demeure aurait été adoptée "sans examen sérieux de la pédagogie mise en œuvre" en raison de la durée trop brève du contrôle diligenté par l’administration de l’éducation nationale. Il a relevé que l’article R. 131-13 du code de l'éducation n’impose pas de durée minimale du contrôle et qu’en l’espèce, le contrôle effectué par quatre représentants de l’éducation nationale avait duré quatre heures et demie, au cours desquelles les inspecteurs avaient pu assister à la vie de l’établissement, observer les activités des élèves ainsi que leurs interactions avec les adultes, et interroger certains d’entre eux.
En quatrième lieu, le tribunal a retenu que l’association requérante n’était pas fondée à soutenir que la mise en demeure portait atteinte à la liberté d’enseignement, dans la mesure où les dispositions précitées de l’article L. 442-2 permettent précisément au recteur d’indiquer à l’établissement les mesures qu’il juge nécessaires pour que l'enseignement dispensé soit conforme à l'objet de l'instruction obligatoire.
En dernier lieu, le tribunal a rappelé que la mise en demeure se basait sur des manquements observés dans l'enseignement dispensé au sein de l’établissement mettant en cause la capacité de celui-ci à mettre les élèves en mesure d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture prévu à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation, résultant notamment du fait "qu’[il] ne prévoit aucune programmation ni progressivité des apprentissages, que les adultes encadrant n’indiquent pas aux élèves les compétences à acquérir à l’occasion des activités qu’ils choisissent, qu’il n’existe pas d’outils d’évaluation de leurs progrès, qu’aucun temps d’apprentissage obligatoire ne leur est imposé pour leur permettre de travailler les aspects du socle commun qu’ils n’ont pas acquis, que les élèves ne conservent que peu de traces écrites des connaissances qu’ils acquièrent, que leurs erreurs ne sont pas suffisamment corrigées et que certains domaines du socle commun sont négligés".
Constatant qu’aucune des pièces produites n’était de nature à remettre en cause ces constats, certains étant même corroborés par la présentation du projet pédagogique de l’établissement, le tribunal a jugé que la mise en demeure ne reposait pas sur des constats de faits inexacts et que, "compte tenu du nombre et de la gravité des manquements", la décision de mise en demeure n’était entachée d’aucune erreur d’appréciation.
Procédure contentieuse et questions de droit civil et pénal appliquées au droit de l’enseignement
Compétence des juridictions
- Exercice d’une prérogative de puissance publique (absence) – Mission d’intérêt général – Compétence des juridictions de l’ordre judiciaire
CE, 7 mars 2025, Mme X et société CGF, n° 495103, aux tables du recueil Lebon
En matière de prévention des risques d’exposition à l’amiante, la réglementation prévue par le code du travail encadre tant la réalisation des travaux de retrait ou d’encapsulage d’amiante que la formation des travailleurs employés par les entreprises chargées de ces travaux. Les entreprises chargées de ces travaux et les organismes assurant la formation des travailleurs doivent, dans les deux cas, être certifiés, et cette certification est délivrée par des organismes certificateurs accrédités par le Comité français d’accréditation.
Afin de pouvoir exercer la profession de formateur au sein des organismes de formation des travailleurs exposés à l’amiante, il est nécessaire de suivre un stage dispensé conjointement par l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), association loi 1901, et l’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), organisme de droit privé. L’INRS et l’OPPBTP délivrent une attestation de compétence à l’issue du stage en cas de validation de celui-ci.
C’est un refus de délivrance de cette attestation de compétence et le rejet des recours gracieux formés contre cette décision qui étaient contestés en l’espèce. Saisie, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, d’une demande de suspension de ces décisions, la juge des référés du tribunal administratif de Rennes avait rejeté la requête, au motif qu’elle était portée devant une juridiction manifestement incompétente pour en connaître.
Le Conseil d’État a rejeté le pourvoi formé à l’encontre de cette ordonnance, contestée pour erreur de droit.
Après avoir rappelé le cadre juridique de la prévention des risques d’exposition à l’amiante, le Conseil d’État a jugé que : "Si [ces organismes], en tant qu’ils élaborent et délivrent la formation des formateurs en prévention des risques liés à l’amiante (…), assurent, sous le contrôle de l’État, une mission d’intérêt général, la décision par laquelle ils délivrent ou refusent de délivrer l’attestation de compétences correspondante ne traduit l’exercice d’aucune prérogative de puissance publique."
Par suite, en l’absence d’exercice de prérogative de puissance publique, ce litige ne ressortissait pas à la compétence des juridictions de l’ordre administratif.
Comme le relève le rapporteur public dans ses conclusions (accessibles sur ArianeWeb), le Conseil d’État confirme ici ce qui se déduisait en creux de sa précédente jurisprudence (cf. CE, 3 avril 2024, n° 468768 et n° 472137, aux tables du recueil Lebon, LIJ n° 231, juillet 2024) : la circonstance qu’un titre ou diplôme conditionne le droit d’exercer une activité ou une profession ne suffit pas pour que la décision d’un organisme de formation de droit privé, validant ou refusant de délivrer ce titre ou ce diplôme, constitue une prérogative de puissance publique.
Consultations
Enseignement supérieur et recherche
Conseils : composition et fonctionnement
Personnels
Maladie imputable au service
Retenues pour absence de service fait
Procédure
Suspension conservatoire
Enseignement supérieur et recherche
Conseils : composition et fonctionnement
- Délibération du conseil administration – Partage égal des voix – Voix prépondérante du président
Note DAJ B1 n° 2025-002160 du 28 janvier 2025
L’avis de la direction des affaires juridiques a été sollicité au sujet des conditions et modalités selon lesquelles le président du conseil d’administration (CA) d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP) use du mécanisme de la voix prépondérante dont il dispose en cas de partage égal des voix pour l’adoption des délibérations par le CA, en vertu soit des dispositions législatives et réglementaires (notamment le dernier alinéa des articles L. 712-3 et R. 719-68 du code de l’éducation), soit des statuts mêmes de l’établissement.
Il a été indiqué que la mise en œuvre du mécanisme de la voix prépondérante dépend des conditions de majorité requises pour que la délibération soit adoptée.
À titre liminaire, deux précisions ont été apportées :
– La voix prépondérante ne doit pas être regardée comme attribuant une voix supplémentaire au président. Elle conduit uniquement, au regard des conditions fixées par le texte qui l’institue – alors qu’il n’y a pas de voix prépondérante sans texte –, à ce que la voix exprimée par le président l’emporte en cas de partage des voix.
– Lorsque l’adoption d’une délibération par un organisme collégial implique un vote majoritaire, cette majorité peut s’exprimer sous la forme d’une fraction : sauf précision contraire du texte, le vote et la délibération sont favorables, lorsque cette fraction est supérieure à 1/2.
Pour obtenir cette fraction, il convient de placer en position de numérateur le nombre de votes en faveur de la délibération soumise à examen, tandis que le dénominateur varie en fonction des règles de majorité qui s’appliquent au scrutin. Il y a trois principales hypothèses : la règle de majorité peut s’exprimer au regard du nombre de membres de l’instance, du nombre de présents ou représentés, ou encore du nombre de suffrages exprimés.
Il est à noter dans ce cadre que lorsque la règle de majorité est définie en fonction du nombre de membres, l’abstention a un effet similaire au vote négatif, car elle est prise en compte (au titre du nombre de membres) dans le dénominateur de la fraction sans qu'augmente son numérateur. Au contraire, lorsque la règle de majorité est définie en fonction du nombre de suffrages exprimés, l’abstention n’est prise en compte ni dans le numérateur ni dans le dénominateur puisque, par définition, elle n’est pas un suffrage exprimé.
Eu égard à ce rappel, il y a donc lieu de distinguer les règles de majorité applicables pour l’adoption des délibérations de l’organisme considéré – majorité des membres de l’instance, majorité des membres présents ou représentés, ou majorité des suffrages exprimés – dans les conditions de mise en œuvre du mécanisme de la voix prépondérante.
1. Voix prépondérante et majorité des membres de l’instance
Lorsque l’adoption des délibérations par les membres de l’organisme considéré intervient à la majorité des membres de cette instance, il faut distinguer selon que l’effectif est impair ou pair.
En effet, il résulte d’un avis du Conseil d’État que : "Afin de permettre la prise de décision dans un gouvernement composé d’un nombre pair de membres, cette majorité peut être regardée comme atteinte, en cas de partage égal des voix, par l’usage de la voix prépondérante du président. Tel n’est, en revanche, pas le cas dans un gouvernement composé d’un nombre impair de membres. Dans cette hypothèse, aucune décision ne peut être adoptée si elle n’a pas recueilli (…) les voix de la majorité des membres composant le gouvernement, la voix prépondérante du président ne pouvant faire regarder cette majorité comme atteinte en cas de partage égal des voix résultant de l’abstention ou de l’absence d’un ou plusieurs membres." (CE, avis, 6 décembre 2013, n° 372037, aux tables du recueil Lebon.)
1.1. Ainsi, en cas d’imparité des membres de l’organisme, le mécanisme de la voix prépondérante ne trouve jamais à s’appliquer.
En effet, pour être acquis à la majorité des membres de l’instance, le vote doit nécessairement réunir, dans le cas d’un effectif impair, le nombre entier de voix immédiatement supérieur à la moitié de cet effectif (par exemple, quatre voix dans un effectif de sept membres). Il ne peut donc y avoir de parité conduisant à appliquer la règle de la voix prépondérante.
Cela est vrai même en cas d’abstention puisque, ainsi qu’il a été dit, la majorité à atteindre est calculée en fonction du nombre de membres, ce qui, pour l’adoption de la délibération, tend à assimiler les abstentions aux votes défavorables.
1.2. Dans le cas d’un nombre pair de membres de l’organisme, le partage égal des voix peut être constaté lorsque la moitié des membres a voté en faveur de la délibération mise aux voix. Le mécanisme de la voix prépondérante est alors mis en œuvre.
2. Voix prépondérante et majorité des membres présents ou représentés
Compte tenu de la rédaction de l’avis du Conseil d’État, tel qu’il a été rappelé ci-dessus, un raisonnement analogue au point 1 doit être tenu lorsque la règle de majorité s’exprime au regard du nombre de membres présents ou représentés de cet organisme (cf. CE, 25 novembre 2022, n° 449001, cons. 6 : "(…) la décision est acquise à la majorité des membres présents, c’est-à-dire si les "oui" (votes favorables) représentent plus de la moitié des membres présents"). La voix prépondérante ne peut, ainsi, trouver à s’appliquer qu’en cas de nombre pair de membres présents ou représentés – jamais, donc, lorsque cet effectif est impair.
La jurisprudence du Conseil d’État illustre bien ces deux situations.
2.1. S’agissant d’un organisme dont l’effectif est impair, le Conseil d’État juge ainsi que "lors de sa séance du 25 mai 2007, le conseil d’administration siégeant en formation restreinte aux professeurs des universités, composé de neuf membres présents et deux représentés [soit 11], a émis cinq votes favorables, trois votes défavorables et trois abstentions sur la liste de classement établie par la commission des spécialistes ; (…) cette liste n’ayant pas obtenu la majorité des membres présents et représentés, requise par l’article 32 des statuts de l’université, le requérant n’est pas fondé à soutenir que le rejet de cette proposition aurait procédé d’une inexacte application des dispositions de cet article" (CE, 19 mars 2008, n° 307244). Le rapport entre les voix "pour" (5) et le nombre de membres présents et représentés (11) est bien inférieur à 1/2.
2.2. À l’inverse, dans un organisme dont l’effectif est pair, le Conseil d’État juge, en matière de recrutement des enseignants-chercheurs, qu’il résulte des dispositions applicables – lesquelles prévoient que "le comité de sélection se prononce à la majorité des voix des membres présents" et que le président dispose d’une voix prépondérante – que, "chaque fois que le comité de sélection, qui a la qualité de jury de concours, statue sur une candidature individuelle, soit pour décider ou non de procéder à l’audition du candidat, soit pour statuer sur sa candidature à l’issue de son audition, une éventuelle abstention doit être regardée comme traduisant un vote défavorable". Or, "lors du vote au cours duquel le comité de sélection s’est prononcé sur son souhait d’entendre ou non M. X, quatre membres sur huit ont voté en faveur de l’audition, un membre s’est abstenu et trois membres, dont le président du comité, ont voté contre l’audition ; (…) il résulte de ce qui a été dit au [considérant] 1 qu’en refusant, à l’issue de ce vote, d’auditionner le requérant, le comité de sélection de l’université de Lorraine a fait une exacte application des dispositions de l’article 9-2 du décret du 6 juin 1984" (CE, 27 septembre 2017, n° 404475, aux tables du recueil Lebon). Dans ce cas de figure, le partage égal des voix a été constaté, puisque le rapport entre le nombre de voix "pour" (4) et le nombre de membres présents et représentés (8) était égal à 1/2. La voix prépondérante du président du comité, qui a voté contre l’audition, a emporté la majorité du comité en défaveur de cette audition.
3. Voix prépondérante et majorité des suffrages exprimés
Lorsque l’adoption des délibérations par les membres de l’organisme considéré intervient à la majorité des suffrages exprimés – ce qui, dans le silence des textes, est le cas des délibérations des organismes collégiaux et, singulièrement, celles du CA (cf. CE, 2 juillet 1982, n° 35184, aux tables du recueil Lebon ; CE, 21 mai 1997, n° 181334) –, le mécanisme de la voix prépondérante s’applique en cas de partage égal des voix. Dans cette configuration de vote majoritaire, le partage égal des voix peut intervenir quel que soit le nombre des membres de l’organisme considéré, puisque seul compte le nombre de suffrages exprimés.
Tel est bien le sens de la jurisprudence du Conseil d’État, qui considère que "lorsque le conseil d’administration de l’université se prononce […], les votes sont acquis à la majorité des suffrages exprimés, sans que les abstentions ni les votes blancs ne soient pris en compte" (cf. CE, 9 novembre 1994, n° 109086 ; CE, n° 181334, susmentionnée), rappelant l’application d’une règle générale, énoncée par le cours du président Odent, selon laquelle "les résultats des votes sont acquis à la majorité des suffrages exprimés et, pour le calcul de cette majorité, on ne tient compte ni des abstentions ni des bulletins blancs ou nuls".
À titre d’exemple, le Conseil d’État juge "qu’en l’absence de dispositions contraires, lorsque le conseil d’administration d’une université se prononce sur une proposition de nomination d’un professeur, les votes sont acquis à la majorité des suffrages exprimés, sans que les abstentions ni les votes blancs soient pris en compte ; qu’ainsi, la proposition émise le 20 mai 1994 par le conseil d’administration de l’université de Paris-IV en faveur de la mutation de Mme Y, qui a recueilli six votes favorables, quatre votes défavorables et trois votes blancs, a été adoptée à la majorité des suffrages exprimés" (cf. CE, 4 novembre 1996, n° 162117, aux tables du recueil Lebon). Le rapport entre les votes favorables (6) et le nombre de suffrages exprimés (10), dont ne font pas partie les votes blancs, est bien supérieur à 1/2.
En définitive, lorsqu’une délibération doit être adoptée à la majorité des suffrages exprimés, la règle de la voix prépondérante du président trouve à s’appliquer lorsque le nombre de votes favorables et le nombre de votes défavorables sont égaux.
En l’état des dispositions des articles L. 712-3 et R. 719-68 du code de l’éducation, qui ne prévoient pas de règle de majorité, et, sous réserve que les règles statutaires de l’EPSCP n’en prévoient pas davantage, les délibérations sont adoptées à la majorité des suffrages exprimés, et c’est dans ce cadre que s’applique la règle de la voix prépondérante du président.
Personnels
Maladie imputable au service
- Remboursement de frais exposés par un agent en lien avec une maladie professionnelle – Activité physique
Note DAJ A4 n° 2025-001133 du 6 février 2025
La direction des affaires juridiques a été saisie afin de savoir si un agent pouvait demander le remboursement de frais déboursés pour l’exercice d’une activité physique dans le cadre d’une maladie reconnue comme imputable au service.
Il résulte de l’article L. 822-24 du code général de la fonction publique (CGFP) et d’une jurisprudence constante que le fonctionnaire qui bénéficie d’une reconnaissance d’imputabilité au service d'un accident ou d’une maladie professionnelle a droit au remboursement réel des frais directement entraînés par sa maladie ou son accident à condition de justifier tant du montant des frais exposés que de leur caractère d’utilité directe pour parer aux conséquences de l’accident ou de la maladie (cf. CE, 19 octobre 1966, n° 66222 au recueil Lebon ; CE, 16 février 2011, n° 331746, aux tables du recueil Lebon), et ce, indépendamment du montant du remboursement ou de la prise en charge aux tarifs conventionnés de la sécurité sociale.
Il appartient donc à l’administration d’apprécier, au cas par cas et au regard des éléments transmis par l’agent, le bien-fondé de sa demande de remboursement.
La lettre de l’article L. 822-24 du CGFP distingue le remboursement des frais médicaux de celui des frais "directement entraînés par la maladie ou l’accident", ce qui suppose donc que lesdits frais ne soient pas nécessairement d’ordre médical. En outre, ces dispositions ne limitent pas le remboursement des frais directement entraînés par la maladie aux seuls frais prescrits par un praticien (cf. CAA Nantes, 20 avril 2021, n° 20NT00747).
Cependant, la DAJ a recommandé, au cas particulier, le rejet de la demande de remboursement de séances de "MunzFloor" – méthode présentée comme une activité physique de nature à soulager et faire disparaître les douleurs en renforçant les muscles profonds et en relâchant les muscles superficiels – pratiquées par l’agent dès lors que ni le lien direct entre cette pratique et sa pathologie ni son utilité n’étaient démontrés en l’espèce.
Retenues pour absence de service fait
- Enseignants – Participation à des réunions pédagogiques de concertation
Note DAJ A2 n° 2025-001630 du 18 février 2025
La direction des affaires juridiques a été saisie de la question de savoir si un professeur de l’enseignement public du second degré pouvait légalement refuser de justifier son absence à une réunion de concertation pédagogique organisée par son chef d’établissement dans le cadre de la prise en charge des besoins particuliers des élèves des établissements relevant du réseau de l’éducation prioritaire.
D’une part, il résulte des dispositions du 1° de l’article R. 421-10 du code de l’éducation que le chef d’établissement est compétent pour fixer les obligations de service des personnels de l’établissement, dans le respect de leurs droits et obligations statutaires.
D’autre part, l’article L. 912-1 du code de l’éducation définit les missions des enseignants, qui sont "responsables de l’ensemble des activités scolaires des élèves". L’article 2 du décret du 20 août 2014 relatif aux obligations de service et aux missions des personnels enseignants exerçant dans un établissement public d’enseignement du second degré dispose que : "(…) les enseignants […] sont tenus d’assurer, sur l’ensemble de l’année scolaire : / (…) / II. Les missions liées au service d’enseignement qui comprennent (…) le travail au sein d’équipes pédagogiques constituées d’enseignants ayant en charge les mêmes classes ou groupes d’élèves ou exerçant dans le même champ disciplinaire. (…)."
Ainsi, comme il est énoncé au II. de la circulaire n° 2015-057 du 29 avril 2015 : "Dans le cadre général défini par l’article L. 912-1 du code de l’éducation, le décret [précité] reconnaît l’ensemble des missions liées au service d’enseignement dont elles sont le prolongement. (…). / Entrent notamment dans ce cadre : / – la participation aux réunions d’équipes pédagogiques (…)."
Il en résulte que les obligations de service des personnels enseignants ne se limitent pas aux heures d’enseignement devant leurs classes, mais recouvrent l’ensemble des missions liées au service d’enseignement, dont la participation aux réunions d’équipes pédagogiques organisées par le chef d’établissement. Les professeurs sont donc tenus de participer à de telles réunions, comme l’a déjà jugé le tribunal administratif de Montreuil, s’agissant précisément des réunions pédagogiques organisées par le chef d’établissement sur le thème de la prise en charge des besoins particuliers des élèves des établissements relevant du réseau de l’éducation prioritaire (TA Montreuil, 9 avril 2021, n° 1908018, LIJ n° 216, juillet 2021).
Ainsi, l’absence de participation d’un professeur à des réunions pédagogiques organisées par le chef d’établissement justifie que des retenues soient opérées sur son traitement (cf. TA Montreuil n° 1908018, précité ; pour un professeur n’exerçant pas spécifiquement dans un établissement relevant de l’éducation prioritaire, n’ayant pas participé à des réunions pédagogiques de prérentrée scolaire : TA Lille, 3 mai 2016, n° 1304065 et n° 1304066, LIJ n° 194, juillet 2016 ; pour un professeur s’étant abstenu d’assister à une séance de formation à laquelle il était convoqué : CE, Section, 15 octobre 1982, n° 17816, au recueil Lebon).
Procédure
- Autorité disciplinaire compétente en cas de changement d’employeur
Note DAJ A4 n° 2025-000432 du 14 janvier 2025
Une académie a appelé l’attention de la direction des affaires juridiques sur la situation d’un accompagnant d’élèves en situation de handicap (AESH) recruté par une direction des services départementaux de l’éducation nationale, suspecté d’avoir fourni de faux documents à l’appui d’une demande de prestation d’action sociale à une époque où il était recruté par un établissement public local d’enseignement (EPLE) mutualisateur.
L’académie s’interrogeait sur l’autorité compétente pour engager une procédure disciplinaire à l’encontre de cet AESH et sur la nécessité de déposer plainte afin de disposer d’une décision de justice reconnaissant sa culpabilité.
Les éléments suivants lui ont été apportés :
1. Sur l’autorité compétente pour exercer l’action disciplinaire et les faits susceptibles de fonder une sanction disciplinaire
Aux termes de l’antépénultième alinéa de l’article L. 917-1 du code de l’éducation : "Les accompagnants des élèves en situation de handicap sont régis par les dispositions réglementaires générales applicables aux agents contractuels de l’État prises pour l’application de l’article 7 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, sous réserve de dérogations prévues par le décret mentionné au dernier alinéa du présent article."
1.1. Le premier alinéa de l’article 44 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État précise que : "Le pouvoir disciplinaire appartient à l’autorité ayant le pouvoir de procéder au recrutement."
Cette règle est similaire à celle prévue pour les fonctionnaires par l’article L. 532-1 du code général de la fonction publique, qui confie le pouvoir disciplinaire à l’autorité investie du pouvoir de nomination.
Il doit nécessairement être déduit de ces dispositions que seule l’autorité qui emploie actuellement l’agent est susceptible d’engager des poursuites disciplinaires et, le cas échéant, de prononcer une sanction disciplinaire à son encontre, alors même que les fautes disciplinaires fondant ces poursuites auraient été commises à une date à laquelle cet agent relevait d’un autre employeur.
En effet, ce dernier ne dispose plus, par définition, d’aucun pouvoir à l’égard de l’agent (s’agissant d’un fonctionnaire admis à la retraite, cf. CE, avis, 5 août 1986, n° 340520).
De la même manière que l’employeur d’un agent public ne saurait être lié par les sanctions disciplinaires qui auraient été infligées à cet agent par son ancien employeur (s’agissant d’un agent ayant été exclu de ses fonctions par une collectivité territoriale et ayant changé d’employeur avant le terme de sa période d’exclusion, cf. CE, 1er mars 2013, n° 361819), l’ancien employeur, une fois que l’agent a quitté ses fonctions, ne saurait prononcer à son encontre une quelconque sanction disciplinaire.
Aussi, seul le recteur d’académie (en vertu de l’article 6 du décret n° 2014-724 du 27 juin 2014, le contrat à durée indéterminée de l’AESH auquel l’académie faisait référence avait nécessairement été conclu par le recteur) dispose aujourd’hui du pouvoir disciplinaire à l’égard de l’intéressé.
1.2. Toutefois, la question que l’académie posait amenait à s’interroger sur la possibilité, pour le recteur, de sanctionner des faits commis dans le cadre des précédentes fonctions exercées par l’AESH en qualité d’agent de l’EPLE mutualisateur.
1.2.1. Le premier alinéa de l’article 43-1 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, qui reprend l’article L. 530-1 du code général de la fonction publique, rappelle que : "Tout manquement au respect des obligations auxquelles sont assujettis les agents publics, commis par un agent contractuel dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, est constitutif d’une faute l’exposant à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par le code pénal."
Il peut être considéré que lorsqu’elles font référence aux "manquement[s] au respect des obligations auxquelles sont assujettis les agents publics, commis par un agent contractuel dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions", ces dispositions visent tous les agissements fautifs commis par l’intéressé en qualité d’agent public.
Il serait ainsi loisible à l’autorité qui emploie l’agent au moment où les faits sont révélés d’engager une procédure disciplinaire à raison de faits commis dans le cadre de précédentes fonctions publiques.
En ce sens, dans ses conclusions (accessibles sur ArianeWeb) sur la décision n° 438248 du 3 mai 2023 relative à la possibilité pour une administration de révoquer un agent pour des faits commis avant son entrée dans la fonction publique, le rapporteur public indiquait : "(…) nous éprouvons une réelle difficulté à regarder les faits commis par une personne avant son entrée dans la fonction publique comme pouvant révéler, en eux-mêmes, une faute professionnelle ou une faute assimilable à une faute professionnelle et, partant, justifier l’engagement de poursuites disciplinaires. On peine, dans une telle configuration, à identifier un manquement à une obligation professionnelle commis dans ou à l’occasion de l’exercice des fonctions (…). Ces faits ne peuvent pas davantage être regardés comme commis "en dehors du service" au sens de votre jurisprudence puisqu’ils ont été, par construction, commis à une époque où l’intéressé n’avait pas encore de lien avec la fonction publique".
C’est donc bien la qualité d’agent public qui rend applicable le régime disciplinaire afférent, non le lien hiérarchique entre l’agent et son employeur actuel.
1.2.2. En outre, s’agissant plus spécifiquement des AESH, il existe indéniablement une continuité dans l’exercice de leurs fonctions puisque ceux-ci sont d’abord recrutés en contrat à durée déterminée par les EPLE, après accord du directeur académique des services de l’éducation nationale (premier alinéa de l’article L. 917-1 du code de l’éducation), puis, lorsqu’ils sont CDIsés, leur contrat à durée indéterminée est conclu par le recteur d’académie (article 6 du décret du 27 juin 2014).
D’ailleurs, la faute reprochée en l’espèce à l’AESH en question, si elle avait été commise à une période où celui-ci était employé par un EPLE, concernait les relations entre cet agent et le rectorat, puisque l’intéressé avait fourni de faux documents à l’appui d’une demande de prestation d’action sociale adressée au rectorat.
Cela rend d’autant plus légitime l’engagement d’une procédure disciplinaire par le recteur à raison de ces faits.
Il semblerait donc, bien qu’aucune jurisprudence topique allant en ce sens n’ait été recensée, que les faits commis par l’AESH en cause dans le cadre de ses anciennes fonctions d’AESH au sein d’un EPLE peuvent, en l’espèce, donner lieu à l’engagement d’une procédure disciplinaire par le recteur.
2. Sur l’opportunité d’un signalement aux autorités judiciaires et la nécessité de reporter l’action disciplinaire
Les procédures pénale et disciplinaire sont indépendantes l’une de l’autre. Dès lors, l’autorité disciplinaire n’est, par principe, aucunement empêchée d’agir du fait de l’existence de poursuites pénales et n’a donc pas nécessairement à attendre l’issue de ces poursuites.
Ainsi, la saisine du procureur n’empêche pas l’administration d’initier une procédure disciplinaire (cf. CE, 4 octobre 1989, n° 74142, aux tables du recueil Lebon ; CE, 26 octobre 2005, n° 278224, aux tables du recueil Lebon).
Par conséquent, si l’académie estime détenir suffisamment d’éléments pour établir la matérialité des faits, rien ne s’oppose à ce qu’elle engage une procédure disciplinaire à l’encontre de l’intéressé (cf. CE, 27 juillet 2009, Ministre de l'éducation nationale, n° 313588, au recueil Lebon).
Si, à l’inverse, l’académie ne dispose pas de suffisamment d’éléments pour établir la matérialité des faits, il pourrait être en effet plus opportun soit d’attendre la décision du juge pénal, si une procédure judiciaire est déjà initiée, soit de saisir le procureur de la République sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale, les faits litigieux semblant constituer un délit en application de l’article 441-2 du code pénal.
Suspension conservatoire
- Interdiction d’accès aux locaux – Exercice d’un mandat syndical
Note DAJ A2 n° 2025-001268 du 11 février 2025
La direction des affaires juridique a été interrogée sur l’articulation entre une décision de suspension de fonctions d’un agent public emportant interdiction d’accéder aux locaux et l’exercice d’un mandat syndical.
L’agent, affecté au sein d’une université, avait fait l’objet d’une mesure de suspension de fonctions emportant interdiction d’accéder aux locaux de l’université, prise sur le fondement de l’article L. 951-4 du code de l'éducation, et détenait par ailleurs un mandat syndical (représentant syndical siégeant au conseil d’administration de l’université) impliquant, pour la poursuite de ses activités syndicales, d’accéder auxdits locaux.
L’article 22 du décret du 20 novembre 2020 relatif aux comités sociaux d’administration dans les administrations et les établissements publics de l’État, désormais codifié à l'article R. 252-25 du code général de la fonction publique (CGFP), prévoit qu’il n’est mis fin au mandat d’un représentant du personnel que lorsqu’il démissionne de son mandat ou qu’il ne remplit plus les conditions fixées pour être électeur ou qu’il est placé dans une des situations lui faisant perdre sa qualité de représentant.
En particulier, en application du 3° de cet article R. 252-25 du CGFP, renvoyant à l’article R. 211-40 du même code, le prononcé de l’une des sanctions disciplinaires du troisième groupe mentionnées à son article L. 533-1 est au nombre des situations faisant perdre la qualité de représentant du personnel.
En revanche, ce texte ne prévoit pas que l’intervention d’une décision de suspension de fonctions à titre conservatoire est au nombre des cas de cessation ou de suspension d’un mandat syndical.
Dans ce cadre, la jurisprudence du Conseil d’État est venue préciser que la mesure de suspension d’un membre du personnel de l’enseignement supérieur prise sur le fondement de l’article L. 951-4 du code de l’éducation "a pour effet de suspendre l’exercice par l’intéressé de ses fonctions au sein de l’établissement, en particulier ses activités d’enseignement et de recherche. Elle emporte nécessairement la suspension du droit, attaché à l’exercice des fonctions, d’accéder aux locaux de l’établissement. En revanche, elle est en principe sans effet sur l’exercice d’un mandat électif attaché à la qualité de membre du personnel de l’enseignement supérieur" (CE, 28 mai 2024, n° 474617, aux tables du recueil Lebon, LIJ n° 232, novembre 2024).
En effet, selon les conclusions (accessibles sur ArianeWeb) du rapporteur public sur cette décision : "(…) l’article 22 du décret (…) du 20 novembre 2020 [précité] ne prévoit qu’il est mis fin au mandat d’un représentant du personnel que lorsqu’il démissionne de son mandat ou qu’il ne remplit plus les conditions fixées pour être électeur ou qu’il est placé dans une des situations lui faisant perdre sa qualité de représentant (agents en congé de longue maladie, agents ayant été frappés d’une rétrogradation ou d’une exclusion temporaire de fonctions de seize jours à deux ans, agents privés de leurs droits civiques). / Faute, pour ce décret, d’avoir prévu la suspension temporaire du mandat durant la suspension conservatoire de fonctions, nous ne voyons pas comment vous pourriez admettre que la première découle de la seconde. (…). / (…) si Mme X a perdu, du fait de sa suspension, son titre à accéder de plein droit aux locaux de l’université, rien ne fait obstacle à ce que le président de l’université l’autorise à y pénétrer ponctuellement pour l’exercice de son mandat, ou encore pour prendre connaissance de son dossier dans le cadre de la procédure disciplinaire engagée à son encontre (sur ce dernier point, voir : 2/6 SSR, 3 juillet 1981, (…), n° 8223)."
Dès lors, en l’espèce, l’exercice du mandat syndical de l’agent n’est pas suspendu par la mesure de suspension de fonctions prononcée à titre conservatoire à son encontre. Le président de l’université ne peut donc le priver d’un accès aux locaux lorsque cet accès est nécessaire à la poursuite par l’intéressé de ses activités syndicales.
Droit local – Collectivités à statut particulier
Outre-mer
- Partenariat de mécénat – Délivrance de reçus fiscaux par les EPENC
Note DAJ A1 n° 2025-001069 du 4 février 2025
La direction des affaires juridiques a été interrogée sur l’éligibilité des établissements publics d’enseignement de la Nouvelle-Calédonie (EPENC) au dispositif de mécénat mentionné à l’article 238 bis du code général des impôts (CGI), permettant aux entreprises assujetties à l’impôt sur le revenu ou à l’impôt sur les sociétés de bénéficier d’une réduction d’impôt en raison des dons consentis à certains organismes ou certaines œuvres.
La doctrine fiscale (cf. BOI-BIC-RICI-20-30-10-10, II.A., § 50 et suiv.) a posé quatre conditions. D’abord, les dons doivent être consentis à une œuvre ou à un organisme pourvu de la personnalité morale. Ensuite, l’œuvre ou l’organisme doit être d’intérêt général. Cette condition est remplie si l’activité n’est pas lucrative, si la gestion est désintéressée et si l’organisme ne fonctionne pas au profit d’un cercle restreint de personnes. Troisièmement, l’organisme bénéficiaire des dons doit présenter l’un des caractères prévus par la loi. Enfin, le siège et l’exercice de l’activité doivent être situés au sein de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen.
L’application des trois premières conditions aux EPENC ne posait aucune difficulté :
– aux termes de l’article 1er de la délibération n° 77 du 28 septembre 2015 portant statut des établissements publics d’enseignement de la Nouvelle-Calédonie, ces établissements sont pourvus de la personnalité morale ;
– les EPENC remplissent une activité d’intérêt général ; en effet, leur activité n’est pas lucrative, leur gestion est désintéressée et ils ne fonctionnent pas au profit d’un cercle restreint de personnes, tel que cela ressort de la délibération précitée ;
– les EPENC présentent un caractère éducatif, tel que prévu par les dispositions du a) du 1 de l’article 238 bis du CGI.
Sur ces trois points, la situation des EPENC ne diffère d’ailleurs pas de celle des établissements publics locaux d’enseignement (EPLE), qui satisfont aux conditions prévues par les dispositions du a) du 1 de l’article 238 bis du CGI (cf. LIJ n° 214, mars 2021 : note DAJ A1 n° 2020-0158 du 12 octobre 2020).
S’agissant de la dernière condition, si les pays et territoires d’outre-mer ne font pas partie de l’espace européen, il est par exception admis par l’administration fiscale (cf. BOI-BIC-RICI-20-30-10-10, II.A., § 220) que les organismes situés dans les collectivités d’outre-mer, dont la Nouvelle-Calédonie, sont assimilés, pour l’application de l’article 238 bis du CGI, à des organismes français dès lors qu’ils respectent les conditions précitées, au titre des dons effectués par les contribuables domiciliés fiscalement en France.
Ainsi, les EPENC peuvent délivrer des reçus fiscaux sur le fondement des dispositions du a) du 1 de l’article 238 bis du CGI.
Sports
Pouvoir disciplinaire général
- Discipline – Droit de se taire – Usagers du service public
Note DAJ A4 n° 2025-000516 du 16 janvier 2025
1. Le "droit de se taire" a été étendu au-delà de la matière pénale
Aux termes de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (DDHC) : "Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi."
Le Conseil constitutionnel, qui juge de manière constante qu’il résulte de l’article 9 de la DDHC le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire et celui d’en être informé (cf. Cons. const., 4 novembre 2016, n° 2016-594 QPC ; Cons. const., 9 avril 2021, n° 2021-895/901/902/903 QPC), a récemment étendu ce principe aux professionnels faisant l’objet de poursuites disciplinaires. En effet, le Conseil constitutionnel a jugé expressément que le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser dont découle le droit de se taire s’applique "non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition" (Cons. const., 8 décembre 2023, n° 2023-1074 QPC).
Dans le prolongement de cette décision, le Conseil constitutionnel a appliqué sa position aux sanctions disciplinaires prononcées à l’égard des magistrats de l’ordre judiciaire (Cons. const., 26 juin 2024, n° 2024-1097 QPC) et des fonctionnaires (Cons. const., 4 octobre 2024, n° 2024-1105 QPC), jugeant notamment, dans cette seconde décision, qu’"en ne prévoyant pas que le fonctionnaire à l’encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée doit être informé de son droit de se taire", les dispositions de l’article L. 532-4 du code général de la fonction publique (CGFP), qui prévoient les modalités de mise en œuvre de la procédure disciplinaire, sont contraires à la Constitution.
Le Conseil d’État a repris dans des décisions de Section rendues le 19 décembre 2024 (notamment : n° 490952 et n° 490157, toutes deux au recueil Lebon) la position du Conseil constitutionnel selon laquelle le droit de se taire constitue une exigence de nature constitutionnelle, qui s’applique "non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives, mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition".
Il a, par ailleurs, précisé la portée et l’étendue de ce droit, en particulier quant à la délimitation du champ de l’obligation de notification qui en découle et aux conséquences attachées à sa méconnaissance.
2. Le "droit de se taire" doit être regardé comme applicable aux sportifs et stagiaires des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) faisant l’objet de poursuites disciplinaires
La circonstance qu’une personne fait l’objet de poursuites disciplinaires en qualité d’usager du service public, et non en qualité d’agent public, ne paraît pas faire obstacle à ce que les principes découlant de l’article 9 de la DDHC soient applicables à la procédure disciplinaire dont elle fait l’objet, le Conseil constitutionnel, tout comme le Conseil d’État, ayant précisé que ces exigences s’appliquent à toute sanction ayant le caractère d’une punition, ce qui est le cas, à l’évidence, des sanctions prononcées par les CREPS à l’encontre des sportifs et stagiaires.
En ce sens, dans ses conclusions (accessibles sur ArianeWeb) sur la décision de Section susmentionnée n° 490952 du Conseil d’État, rendue le 19 décembre 2024, concernant un vétérinaire poursuivi devant une juridiction disciplinaire de l’ordre administratif, le rapporteur public a détaillé que sont visées selon lui "les sanctions qui peuvent être infligées aux agents publics par l’administration dont ils relèvent, aux membres de professions soumises à un statut réglementaire par les ordres ou les organes qui leur sont propres, ou à certains usagers du service public soumis aux règles de l’établissement qui les prend en charge, tels les élèves et les étudiants ou encore les détenus".
D’ailleurs, il est à noter que certains tribunaux ont déjà eu l’occasion de juger que ces catégories d’usagers devaient être informés du droit qu’ils ont de se taire découlant de l’article 9 de la DDHC (cf. TA La Réunion, 10 octobre 2024, n° 2401253 ; TA Bordeaux, 31 octobre 2024, n° 2403359).
L’obligation de notifier le droit de se taire doit donc être regardée comme applicable aux procédures disciplinaires engagées par les CREPS contre les sportifs et stagiaires.
3. Les modalités de mise en œuvre de la garantie tenant à l’information de la personne faisant l’objet de poursuites disciplinaires qu’elle a le droit de se taire
Comme indiqué précédemment, dans ses décisions du 19 décembre 2024, le Conseil d’État est venu préciser la portée de l’obligation de notification et les conséquences de sa méconnaissance.
D’une part, concrètement, l’obligation du droit de se taire ne s’applique qu’à compter de l’engagement de la procédure disciplinaire, à moins que l’autorité administrative puisse être regardée comme ayant commis un détournement de procédure, par exemple en diligentant une procédure disciplinaire sous couvert soit d’une enquête administrative, soit d’échanges ordinaires avec les agents dans le cadre de l’exercice du pouvoir hiérarchique.
D’autre part, s’agissant des modalités d’application du droit de se taire à la discipline des usagers du service public, il implique, selon le Conseil d’État, que la personne "faisant l’objet d’une procédure disciplinaire ne puisse être entendu[e] sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’[elle] soit préalablement informé[e] du droit qu’[elle] a de se taire" et, qu’à ce titre, "[elle] doi[ve] être avisé[e], avant d’être entendu[e] pour la première fois, qu'[elle] dispose de ce droit pour l’ensemble de la procédure disciplinaire".
Il convient ici de relever que la notification du droit de se taire ne semble donc ne s’appliquer qu’aux procédures au cours desquelles l’intéressé est "entendu", de telle sorte qu’il peut en être déduit qu’elle ne s’applique pas aux procédures écrites.
Enfin, sur le plan des incidences contentieuses, le Conseil d’État apporte d’importantes précisions qui permettent de "sauver" certaines décisions prises par l’administration en méconnaissance des principes exposés ci-dessus, y compris s’agissant d’usagers et d’administrés.
Dans le cas où l’agent, l’usager ou l’administré n’a pas été informé du droit qu’il avait de se taire alors que cette information était requise, cette irrégularité n’est susceptible d’entraîner l’annulation de la sanction prononcée que lorsque, eu égard, d’une part, à la teneur de ses déclarations et, d’autre part, aux autres éléments fondant la sanction, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l’intéressé n’avait pas été informé de ce droit.
S’agissant de cette dernière précision, il peut notamment en être déduit que dans l’hypothèse où les pièces du dossier suffisaient, en elles-mêmes, à justifier l’édiction d’une sanction disciplinaire identique à celle dont la personne concernée a fait l’objet, la circonstance qu’elle n’ait pas été informée de son droit de se taire (et qu’elle ait alors reconnu les faits litigieux) ne permet pas de regarder cette décision comme étant entachée d’illégalité.
Ainsi, l’omission d’informer l’intéressé du droit qu’il a de se taire n’aura pas systématiquement pour conséquence, en cas de contentieux, l’annulation de la sanction disciplinaire prononcée à son encontre.
Actualités
Personnels
Congé de maladie ordinaire
- Rémunération
Loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025
JORF du 15 février 2025
Décret n° 2025-197 du 27 février 2025 relatif aux règles de rémunération de certains agents publics placés en congé de maladie ordinaire ou en congé de maladie
Décret n° 2025-198 du 27 février 2025 relatif à la rémunération maintenue en congé de maladie pour certains agents publics
JORF du 28 février 2025
L’article 189 de la loi du 14 février 2025 de finances pour 2025 a modifié l'article L. 822-3 du code général de la fonction publique qui prévoit désormais que le fonctionnaire en congé de maladie dit "ordinaire", dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs, perçoit pendant trois mois, non plus l’intégralité de son traitement, mais 90 %.
Les deux décrets ont pour objet principal d’établir également à 90 % le taux de remplacement du traitement pour les périodes de congé de maladie ordinaire pour lesquelles le traitement était maintenu intégralement, en procédant à la modification de textes réglementaires propres à nombre de catégories d’agents des trois fonctions publiques, dont l'article 12 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l’État.
Le premier décret reporte également la date d’entrée en vigueur de la subrogation en matière de maladie, maternité, paternité, adoption, accidents du travail et maladies professionnelles pour les agents contractuels de l’État au 1er janvier 2027, afin d’en optimiser la mise en œuvre dans les différents systèmes d’information.
Le second décret rend également applicables, au bénéfice de ceux des agents contractuels enseignants relevant du ministère chargé de l’éducation qui sont régis par le décret du 3 avril 1962 fixant les dispositions applicables aux maîtres auxiliaires, les dispositions en matière de congés pour raisons de santé fixées aux articles 2 et 12 à 18 du décret du 17 janvier 1986.
Personnels d’éducation et de surveillance
- Accompagnants des élèves en situation de handicap – Intervention sur la pause méridienne
Décret n° 2025-137 du 14 février 2025 relatif à l’intervention des accompagnants des élèves en situation de handicap sur la pause méridienne
JORF du 16 février 2025
La loi du 27 mai 2024 visant la prise en charge par l’État de l’accompagnement humain des élèves en situation de handicap durant le temps de pause méridienne a transféré à l’État la rémunération des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) assurant cet accompagnement pendant la pause méridienne, auparavant prise en charge par les collectivités territoriales.
Complétant l'article 1er du décret du 27 juin 2014 relatif aux conditions de recrutement et d’emploi des AESH, le décret du 14 février 2025 précise que lorsqu’ils exercent pendant le temps de la pause méridienne, les AESH se conforment aux consignes du responsable du service de restauration ou des activités périscolaires ayant pour objet la sécurité des élèves et le bon fonctionnement du service. Ces consignes ne peuvent avoir pour objet de les investir d’une autre mission que celle de l’accompagnement des élèves en situation de handicap désignés par les services de l’État. Lorsque les AESH exercent leurs fonctions sur le temps de la pause méridienne, l’État continue d’assurer toutes les charges et obligations inhérentes à sa qualité d’employeur.
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Ont participé à ce numéro : Jennifer Bême, Cédric Benoit, Louise Benoit, Florence Brown, Lisa-Marie Chalmel, Marie Colin, Chloé De Jonckheere, Clément de Mecquenem, Philippe Dhennin, Jules Dietsch, Inès Flessel, Stéphanie Frain, Calixthe Girod, Julien Hée, Carla-Mary Hennion, Alexandre Jamet, Sémira Khier, Jean Laloux, Barbara Le Guennec, Andréa Leboutet, Alexandra Lecomte, Chloé Lirzin, Alexis Maquart, Sylvain N’Diaye, Justine Niay, Pauline Ozenne, Florian Paggi, Matilde Razan, Roxane Roy, Sébastien Sermonne, Mathis Seureau, Virginie Simon, Marlène Spinhirny, Vincent Tourneur, Juliette Uzabiaga
N° ISSN : 1265-6739