A+ A-
  ÉDITORIAL
 

 

Par une décision n° 313588 du 27 juillet 2009 publiée au Recueil Lebon, le Conseil d’État a jugé « que lorsque les faits commis par un agent public donnent lieu à la fois à une action pénale et à des poursuites disciplinaires, l’administration peut se prononcer sur l’action disciplinaire sans attendre l’issue de la procédure pénale ; que si elle décide néanmoins de différer sa décision en matière disciplinaire jusqu’à ce que le juge pénal ait statué, il lui incombe, dans le choix de la sanction qu’elle retient, de tenir compte non seulement de la nature et de la gravité des faits répréhensibles mais aussi de la situation d’ensemble de l’agent en cause, à la date à laquelle la sanction est prononcée, compte tenu, le cas échéant, des éléments recueillis, des expertises ordonnées et des constatations faites par le juge pénal ». Il a alors annulé la décision d’exclusion temporaire pour une durée d’un an prononcée à l’encontre d’une enseignante s’étant rendue coupable du délit d’atteinte sexuelle sur une mineure de quinze ans, sans violence, contrainte, menace ou surprise, en tenant compte principalement du caractère isolé et extérieur au service des faits, des mesures et des engagements acceptés par l’intéressée de nature à éviter toute réitération, de l’absence de peine complémentaire prononcée par le juge pénal (interdiction d’enseigner notamment) ainsi que de sa manière de servir.

 

Faisant application de cette jurisprudence, la cour administrative d’appel de Lyon a annulé, par un arrêt n° 14LY01673 du 17 mai 2016, la sanction de mise à la retraite d’office prise à l’encontre d’un enseignant du second degré déclaré coupable d’agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans par personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions. Pour ce faire, les juges d’appel ont méthodiquement repris les éléments mis en exergue par le Conseil d’État dans sa décision du 27 juillet 2009 précitée, en relevant principalement le caractère isolé des faits, le suivi psychiatrique et psychologique accepté par l’intéressé, le très faible risque de récidive ou encore l’absence de peine complémentaire prononcée par le juge pénal.

 

S’il n’est évidemment pas question de remettre en cause les droits dont tout agent public dispose dans le cadre de la procédure disciplinaire, il a semblé au ministère que la prise en compte de la situation de l’agent mis en cause, à la date de la sanction prise à son encontre, ne pouvait conduire à faire totalement abstraction de la nature et de la gravité des faits qui lui étaient reprochés.

 

Saisi d’un pourvoi formé par le ministre contre cet arrêt, le Conseil d’État a, par une décision n° 401527 du 18 juillet 2018, annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon. Il a, pour justifier l’annulation prononcée, relevé « qu’eu égard à l’exigence d’exemplarité et d’irréprochabilité qui incombe aux enseignants dans leurs relations avec des mineurs, y compris en dehors du service, et compte tenu de l’atteinte portée, du fait de la nature des fautes commises par l’intéressé, à la réputation du service public de l’éducation nationale ainsi qu’au lien de confiance qui doit unir les enfants et leurs parents aux enseignants du service, toutes les sanctions moins sévères susceptibles d’être infligées à l’intéressé en application de l’article 66 de la loi du 11 janvier 1984 (…) étaient, en raison de leur caractère insuffisant, hors de proportion avec les fautes commises par ce dernier ».

 

Cette décision qui sera mentionnée aux tables du Recueil Lebon fait application de la jurisprudence « La Poste » (C.E., 27 février 2015, n° 376598, publiée au Recueil Lebon) qui précise qu’il appartient au Conseil d’État, juge de cassation, de vérifier que la solution retenue par les juges du fond quant au choix de la sanction n’est pas hors de proportion avec les fautes commises. Elle a surtout le grand mérite de rappeler que le service public de l’éducation nationale n’est pas un service public comme les autres et qu’une exigence d’exemplarité pèse encore plus qu’ailleurs sur ceux et celles qui le servent.

Natacha Chicot       
  SOMMAIRE
  jurisprudence   Jurisprudence
 

Enseignement scolaire

QUESTIONS GÉNÉRALES

Relations des établissements scolaires avec les collectivités territoriales (questions communes)

 

fleche Carte des formations professionnelles – Ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale - Coordination entre les autorités académiques et la région

T.A. Châlons-en-Champagne, 15 mars 2018, C.G.T. Éduc’Action de l’Aube, n° 1600884

 

Relations des établissements scolaires avec les parents d’élèves

 

Questions propres aux associations éducatives complémentaires de l’enseignement public

fleche Association éducative complémentaire de l’enseignement public – Intérêt général – Refus d’agrément

T.A. Paris, 28 mars 2018, Association interprofessionnelle des fruits et légumes frais, n° 1610405

 

PREMIER DEGRÉ

Scolarité

fleche École maternelle – Inscription – Enfant étranger – Famille vivant dans un habitat précaire – Places disponibles

T.A. Versailles, 15 mars 2018, n° 1800382

 

Second degrÉ

Scolarité

fleche Inscription – Enseignement d’exploration en classe de seconde – Second choix obtenu – Absence d’intérêt donnant qualité pour agir

C.A.A. Nantes, 13 avril 2018, n° 16NT02011

 

fleche Discipline – Commission académique d’appel – Principe des droits de la défense – Principe du contradictoire – Présence du chef d’établissement lors du délibéré – Privation d’une garantie au sens de la jurisprudence « Danthony » (oui)

T.A. Grenoble, 22 mars 2018, n° 1604287

 

Vie scolaire

fleche Bourse nationale d’études du second degré – Date limite de dépôt des dossiers de demande – Circonstances indépendantes de la volonté du demandeur – Tardiveté (non)

T.A. La Réunion, 18 janvier 2018, n° 1700366

 

Enseignement supérieur et recherche

VIE ÉTUDIANTE

Bourses d’études et autres aides

fleche Protection subsidiaire – Égalité de traitement – Bénéficiaire du droit d’asile – Bourses sur critères sociaux

T.A. Besançon, 19 septembre 2017, n° 1601762

 

Examens et concours

RÉGLEMENTATION

Compétence des établissements

fleche Règlement de l’examen – Conditions d’opposabilité

C.A.A. Paris, 13 mars 2018, n° 17PA00477

 

ORGANISATION

Délibérations du jury

fleche Délibération du jury – Erreur de droit – Diplôme de conseiller en économie sociale et familiale

T.A. Orléans, 23 janvier 2018, n° 1503681

 

Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Recrutement et changement de corps

fleche  Concours interne – Liste complémentaire – Classement ex aequo – Motifs de départage – Expérience des candidats

T.A. Bordeaux, 30 novembre 2017, n° 1700284

 

Positions

 

Obligations des fonctionnaires

fleche Personnel enseignant – Cumul d’activités

T.A. Marseille, 26 mars 2018, n° 1606105

 

Droits et garanties

fleche E.P.L.E. – Droit syndical – Conseil d’administration – Représentants élus du personnel de l’établissement – Conseiller principal d’éducation – Membre de droit

C.E., 13 avril 2018, Fédération des syndicats généraux de l'éducation nationale et de la recherche publique, n° 404783

 

fleche Enseignant – Protection fonctionnelle – Abrogation – Faute personnelle d’une exceptionnelle gravité

T.A. Lyon, 28 février 2018, n° 1608046

 

Rémunérations, traitement et avantages en nature

fleche Personnel enseignant – Professeur agrégé – Traitement – Indemnités – Maxima de service d’enseignement hebdomadaire – Classes préparatoires

C.A.A. Bordeaux, 6 février 2018, n° 16BX01081

 

fleche Personnel enseignant de l’enseignement privé sous contrat – Rémunération pour participation à des jurys d’examen – Non-cumul avec les heures supplémentaires d’enseignement

C.A.A. Marseille, 13 mars 2018, Syndicat national de l’enseignement initial privé (SNEIP) - C.G.T. et M. X, n° 16MA01788

 

Discipline

fleche Professeur de chaire supérieure – Discipline – Condamnation pénale – Suspension – Sanction disciplinaire – Mise à la retraite d’office

C.A.A. Paris, 10 avril 2018, n° 16PA03380 et n° 17PA01541

 

Cessation de fonctions

 

Pensions

fleche Personnels – Prolongation d’activité sur le fondement de l’article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 – Liquidation des droits à pension – Maintien en activité illégalement au-delà de la durée de services liquidables permettant d’obtenir une pension civile de retraite à taux plein – Absence d’acquisition de nouveaux droits à pension du fait d’une promotion d’échelon obtenue au cours de la période de maintien en activité illégale

T.A. Toulouse, 27 février 2018, n° 1604437

 

Questions propres aux agents non titulaires

fleche Absence de personnalité morale d’un GRETA – Établissement support du GRETA – Agent non titulaire en contrat à durée déterminée (C.D.D.) – Promesse de renouvellement – Non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée – Promesse non tenue – Engagement de la responsabilité de l’administration

T.A. Strasbourg, 8 février 2018, n° 1603690

 

fleche Agent contractuel – Licenciement pour inaptitude physique – Obligation de reclassement

T.A. Châlons-en-Champagne, 5 décembre 2017, n° 1602647

 

QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

Personnels enseignants

fleche Indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire – Décret n° 71-685 du 18 août 1971 relatif à la rémunération des cours professés dans les établissements pénitentiaires et instituant une indemnité d'enseignement en milieu pénitentiaire – Régime indemnitaire des directeurs d’école – Avantage financier illégal

T.A. Nancy, 7 novembre 2017, n° 1602851

 

Personnels d’éducation et de surveillance

fleche Décision de retrait de l’agrément pour l’encadrement des activités de natation dans le cadre scolaire – Motivation des actes administratifs – Dispositions de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration

T.A. Grenoble, 27 mars 2018, n° 1602221

 

QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT UNIVERSITAIRE

Enseignants-chercheurs

fleche Recrutement des enseignants-chercheurs – Comité de sélection – Jury d’examen lorsqu’il établit la liste des candidats qu’il souhaite entendre – Règles de composition et de quorum – Irrégularité concernant l’examen d’autres candidatures ne pouvant être utilement invoquée à l’encontre de la délibération écartant une candidature

C.E., 26 janvier 2018, n° 404004

 

 

Établissements d’enseignement privés

PERSONNELS

Maîtres contractuels

fleche Maîtres contractuels des établissements privés sous contrat – Contentieux relatif au paiement d’heures supplémentaires non autorisées par le recteur d’académie – Compétence de la juridiction administrative

Cass. soc., 28 mars 2018, nos 16-16571,16-16577, 16-16578 et 16-16579, au Bulletin

 

fleche Nouvelle-Calédonie – Maîtres délégués des établissements privés sous contrat – Agents relevant d’un statut de fonction publique ou d’un statut de droit public (non) – Compétence de la juridiction judiciaire

T.C., 14 mai 2018, M. X c/ Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et Vice-rectorat de la

Nouvelle-Calédonie, n° C4121

 

fleche Établissements d’enseignement privés sous contrat – Résiliation d’un contrat d’enseignement d’un maître contractuel – Condamnation pénale pour des faits d’agressions sexuelles sur mineurs – Article L. 911-5 du code de l’éducation

T.A. Lille, 29 novembre 2017, n° 1502767

 

Constructions et marchés

EXÉCUTION DES MARCHÉS

fleche Marché public – Cession de créance – Régime particulier de notification des cessions de créance – Absence d’obligation de transmission au comptable public assignataire d’une notification adressée directement à un établissement public

C.E, 9 mars 2018, Société Banque Delubac et Cie, n° 407842, aux tables du Recueil Lebon

 

Procédure contentieuse

COMPÉTENCE DES JURIDICTIONS

 

RECEVABILITÉ DES REQUÊTES

fleche Introduction de l’instance – Point de départ des délais de recours – Décision mise en ligne sur le système d’information et d’aide pour les promotions (SIAP) – Publication permettant l’opposabilité au requérant (oui)

C.A.A. Bordeaux., 20 mars 2018, n° 16BX00203

 

 

POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE

fleche Éviction illégale du service – Évaluation du préjudice – Office du juge

C.E., 28 mars 2018, n° 398851, aux tables du Recueil Lebon

 

Actes

fleche Consultation – Projet de texte réglementaire – Consultation anticipée d’un organisme consultatif avant promulgation de la loi fondant la compétence du pouvoir réglementaire

C.E., 17 novembre 2017, Syndicat national des établissements et résidences privés pour les personnes âgées, n° 400939 , aux tables du Recueil Lebon

 

Technologies de l’information et de la communication (TIC)

FICHIERS (TRAITEMENTS AUTOMATISÉS DE DONNÉES)

 

fleche Traitement de données à caractère personnel – Administrateur de page d’un réseau social – Témoins de connexion (cookies) – Responsabilité conjointe du traitement

C.J.U.E., 5 juin 2018, Unabhängiges Landeszentrum für Datenschutz Schleswig-Holstein c/ Wirtschaftsakademie Schleswig-Holstein GmbH, n° C-210/16

 

Droit communautaire

APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF

fleche Renvoi préjudiciel – Directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur – Notion de « professionnel » en droit communautaire – Contrats conclus avec un étudiant – Étudiant associé à un consommateur – Établissement d’enseignement supérieur dont le financement est assuré, pour l’essentiel, par des fonds publics

C.J.U.E., 17 mai 2018, Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen VZW c/ Susan Romy Jozef Kuijpers, n° C-147/16

 

Autres jurisprudences

fleche Nomination aux fonctions de directeur général d’un établissement public – Procédure de recrutement – Examen des candidatures par un comité de recrutement chargé de donner un avis à l’autorité de nomination – Existence de relations de nature professionnelle entre des membres de ce comité et le candidat retenu – Absence de manquement au principe d’impartialité

C.E., 26 janvier 2018, n° 401796, aux tables du Recueil Lebon

 

 

  jurisprudence   Consultations
 

Enseignement scolaire

SECOND DEGRÉ

Administration et fonctionnement des établissements scolaires

 

Enseignement supérieur et recherche

ADMINISTRATION ET FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Questions propres aux différents établissements

 

Accès aux documents administratifs

COMMUNICATION DE DOCUMENTS ADMINISTRATIFS

 

fleche Communication de documents administratifs – Rapports portant sur la recevabilité des dossiers d’habilitation à diriger des recherches (H.D.R.) – Nécessité d’occulter les nom et prénom des rapporteurs (non)

Note DAJ A3 n° 2018-05 du 3 janvier 2018

 

 

  le point sur   ActualitÉs
 

TEXTES OFFICIELS
Enseignement supérieur et recherche

ÉTUDES

Inscription des étudiants

fleche Inscription prioritaire des meilleurs bacheliers

Décret n° 2018-563 du 29 juin 2018 relatif aux modalités d’accès prioritaire dans les formations initiales de l’enseignement supérieur public des meilleurs bacheliers dans chaque série et spécialité de l’examen et modifiant le code de l’éducation

J.O.R.F. du 1er juillet 2018

 

Questions propres aux études médicales et odontologiques

fleche Textes réglementaires relatifs à l’expérimentation de modalités particulières d’admission dans les études de santé

Décret n° 2018-423 du 30 mai 2018 modifiant le décret n° 2014-189 du 20 février 2014 tendant à l’expérimentation de modalités particulières d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques
Arrêté du 30 mai 2018 modifiant l’arrêté du 20 février 2014 relatif à l’expérimentation de nouvelles modalités d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques
J.O.R.F. du 31 mai 2018

 

 

VIE ÉTUDIANTE

Droits d’inscription

fleche Contribution de vie étudiante et de campus

Décret n° 2018-564 du 30 juin 2018 relatif à la contribution prévue à l’article L. 841-5 du code de l’éducation
J.O.R.F. du 1er juillet 2018

 

Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Instances représentatives

fleche Maîtres des établissements de l’enseignement privé sous contrat – Instances consultatives – Représentation équilibrée des hommes et des femmes

Décret n° 2018-235 du 30 mars 2018 relatif à la représentation des femmes et des hommes au sein des organismes consultatifs des maîtres des établissements d’enseignement privés sous contrat

J.O.R.F. du 1er avril 2018

 

Affectation et mutation

fleche Corps enseignants et corps relevant de statuts spéciaux – Affectation – Critères de priorité

Décret n° 2018-303 du 25 avril 2018 relatif aux priorités d’affectation des membres de certains corps mentionnés à l’article 10 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État

J.O.R.F. du 27 avril 2018

 

Avancement – Reclassement

fleche Fonctionnaires de l’État – Inaptitude à l’exercice des fonctions – Mise en œuvre de la période de reclassement

Décret n° 2018-502 du 20 juin 2018 instituant une période de préparation au reclassement au profit des fonctionnaires de l'État reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions

J.O.R.F. du 22 juin 2018

 

Établissements d’enseignement privés

RELATIONS AVEC L’ÉTAT

 fleche Loi – Décret d’application – Établissements d’enseignement scolaire privés hors contrat – Régime d’ouverture – Contrôle de l’État

Loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat
J.O.R.F. du 14 avril 2018
Décret n° 2018-407 du 29 mai 2018 pris pour l'application de la loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements d'enseignement scolaire privés hors contrat

J.O.R.F. du 30 mai 2018

 

 

  jurisprudence   Jurisprudence
 

Enseignement scolaire

QUESTIONS GÉNÉRALES

Relations des établissements scolaires avec les collectivités territoriales (questions communes)

fleche Prise en charge par les communes des dépenses de fonctionnement des écoles privées sous contrat d'association

C.E., 2 mai 2018, Commune de Plestin-les-Grèves, n° 391876, aux tables du Recueil Lebon

 

Une commune participait depuis 1982 aux dépenses de fonctionnement d’une école privée sous contrat d’association, dont la gestion était assurée par un organisme de gestion de l’enseignement catholique (OGEC).

 

En 2002, l’OGEC avait demandé le versement, au titre des années scolaires 1991-1992 à 2001-2002, d’une indemnité en compensation, d’une part, de l’insuffisance des montants perçus par élève au regard du principe de parité avec l'enseignement public garanti par les dispositions de l'article L. 442-5 du code de l'éducation et, d’autre part, de la fin de la prise en charge financière des élèves de la classe maternelle décidée par délibération du conseil municipal prise en juillet 1993.

 

Le tribunal administratif de Rennes avait, par un jugement rendu en 2009, condamné la commune à rembourser à l’OGEC les dépenses de fonctionnement des classes maternelles et élémentaires qu’il avait engagées au titre des dix années scolaires en cause. La commune avait interjeté appel de cette décision devant la cour administrative d’appel de Nantes. Après avoir rendu un premier arrêt que le Conseil d’État avait annulé en 2014, la cour administrative d’appel de Nantes avait jugé, par un second arrêt rendu en 2015, qu’une partie de la créance due par la commune était atteinte par la prescription quadriennale et en avait donc diminué le montant.

 

Saisi de pourvois en cassation formés à la fois par la commune et l’OGEC, le Conseil d’État a censuré l’arrêt rendu en 2015 par la cour administrative d’appel en ce qu’il était insuffisamment motivé et en ce qu’il avait omis de répondre à un moyen. Il a ensuite réglé l’affaire au fond, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative.

 

À cette occasion, le Conseil d’État a été amené à se prononcer sur les conditions dans lesquelles une commune peut mettre un terme à la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes maternelles privées sous contrat d'association.

 

Après avoir cité l’article L. 442-5 du code de l’éducation issu de la loi du 31 décembre 1959 sur les rapports entre l'État et les établissements d'enseignement privés, il a rappelé qu’en vertu de l’article R. 442-44 du code de l’éducation, la commune siège de l’établissement est, dans le cas où elle a donné son accord à la conclusion du contrat d’association, tenue d'assumer la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes maternelles privées sous contrat d'association pour les élèves domiciliés sur son territoire et dans les mêmes conditions que pour les classes maternelles ou enfantines publiques.

 

Le Conseil d’État s’est ensuite prononcé sur la nature des délibérations relatives à la participation financière des communes au fonctionnement des écoles privées sous contrat. Il a jugé que ces délibérations présentent le caractère de décisions individuelles dont l’objet est purement pécuniaire et non de mesures réglementaires relatives à l’organisation du service public de l’enseignement, ce qui permet ainsi de clarifier le régime juridique applicable à ces décisions.

 

Il a en outre précisé que dans le cas où une école privée a conclu avec l'État un contrat d'association pour une durée déterminée avec tacite reconduction, la commune qui ne souhaite pas renouveler son accord de prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes maternelles doit prendre une délibération en ce sens et la notifier à la personne morale responsable de l'école avant la reconduction tacite du contrat.

 

Il a en revanche jugé que lorsque le contrat d'association a été conclu pour une durée indéterminée, une telle délibération peut être prise à tout moment. Sous réserve de sa transmission à l'État au titre du contrôle de légalité, cette délibération devient exécutoire dès qu'elle a été notifiée à son destinataire, et ce, quand bien même des stipulations contraires seraient maintenues dans le contrat d'association. Il a précisé que cette délibération ne pouvait toutefois pas produire d'effet au cours de l'année scolaire au cours de laquelle elle a été notifiée à la personne morale responsable de l’école.

 

En l’espèce, le Conseil d’État a retenu qu’il résultait de l’instruction que la commune avait, à l’occasion d’une réunion de la commission de concertation de l'enseignement privé qui s’était tenue le 22 novembre 1995, exposé très précisément à l’OGEC  le contenu de la délibération de juillet 1993 décidant de mettre un terme à la prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes maternelles et que, par suite, l’OGEC devait être regardé comme ayant reçu notification de cette décision individuelle à cette date du 22 novembre 1995. Il en a déduit que la délibération de juillet 1993 avait, par conséquent, pu légalement produire ses effets à compter de l'année scolaire 1996-1997.

 

Dans ces conditions, l’OGEC ne pouvait prétendre qu’à à la réparation du préjudice né de l'absence de prise en charge des dépenses de fonctionnement des classes maternelles pour l'année 1995-1996 et les années scolaires antérieures. L’OGEC pouvait en outre prétendre pour les années scolaires en cause, en application du principe de parité entre l'enseignement privé sous contrat et l'enseignement public, à l’indemnisation des dépenses de fonctionnement des classes élémentaires qui n’étaient pas prescrites. carre

 

fleche Carte des formations professionnelles – Ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale – Coordination entre les autorités académiques et la région

T.A. Châlons-en-Champagne, 15 mars 2018, C.G.T. Éduc’Action de l’Aube, n° 1600884


Dans le cadre de la préparation de la carte des formations et spécialités professionnelles initiales pour l’année scolaire 2016-2017, un recteur d’académie était revenu sur la proposition d’ouverture dans un lycée d’une spécialité du baccalauréat professionnel « Accompagnement, soins et services à la personne » (ASSP) qui avait été précédemment retenue par la convention annuelle conclue avec la région pour l’année scolaire 2015-2016 et avait décidé l’ouverture dans ce même lycée d’une demi-division supplémentaire du baccalauréat professionnel « Commerce avec connotation Métiers d’art » afin d’augmenter les capacités d’accueil de l’établissement dans cette filière qu’il estimait prioritaire, au regard du nombre d’établissements dispensant la spécialité ASSP, des difficultés d’insertion des élèves titulaires du baccalauréat professionnel dans cette spécialité et des faibles possibilités de poursuite d’études qui leur étaient offertes.

 

Une organisation syndicale a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d’annuler le refus du recteur d’académie d’ouvrir une demi-division supplémentaire du baccalauréat professionnel ASSP dans ce lycée en soutenant que ce refus était illégal au motif qu’il méconnaissait les priorités arrêtées par la région dans la carte des formations professionnelles.

 

Comme l’a rappelé le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, il résulte des articles L. 214-12, L. 214-13 et L. 214-13-1 du code de l’éducation que la planification de la formation professionnelle associe les autorités régionale et académique et se traduit, s’agissant de la carte régionale des formations professionnelle initiales qui doit recueillir l’accord du recteur d’académie, par des conventions annuelles signées par le président de région et le recteur d’académie qui procèdent au classement par ordre de priorité  des ouvertures et fermetures de sections de formation professionnelle initiale et sont mises en œuvre par les autorités régionales et académiques dans le cadre de leurs compétences respectives. Dans le cadre de ses compétences propres, il revient au recteur d’académie, en application des dispositions de l’article D. 333-4 du code de l’éducation, de fixer les spécialités professionnelles de baccalauréat professionnel par établissement, dans le respect des stipulations de la convention annuelle déterminant les priorités en matière de formation professionnelle signée avec la région.

 

Le tribunal administratif a relevé qu’en l’espèce, aucune convention annuelle formalisant leur accord n’avait été signée entre le président de région et le recteur d’académie pour l’année considérée, en raison d’une modification unilatérale du projet de carte des formations par la commission permanente du conseil régional.

 

Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a jugé en conséquence qu’en l’absence d’une telle convention annuelle, la carte des formations professionnelles arrêtée par la région n’était pas applicable et qu’en application de l’article D. 333-4 du code de l’éducation, le recteur d’académie pouvait légalement fixer les spécialités professionnelles par établissement scolaire sans méconnaître les dispositions de l’article L. 214-13-1 du même code. carre

 

Relations des établissements scolaires avec les parents d’élèves

SUIVI DE LA SCOLARITÉ

fleche Autorité parentale – Acte usuel – Radiation – Inscription – Responsabilité de l’administration

C.E., 13 avril 2018, n° 392949, au Recueil Lebon


Un élève scolarisé dans un collège avait été radié par le recteur de l’académie pour être inscrit dans un autre établissement à la rentrée scolaire suivante à la demande de son père alors que les parents étaient séparés et exerçaient conjointement l’autorité parentale sur leur enfant.

 

La mère de l’élève avait demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner l’État à l’indemniser pour le préjudice qu’elle estimait avoir subi du fait de ces décisions de radiation et de réinscription prises sans son accord exprès. Le tribunal administratif avait fait droit à sa demande en condamnant l’État à lui verser une indemnité de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral.

 

Saisi d’un pourvoi en cassation formé par la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, le Conseil d’État a annulé le jugement du tribunal administratif et renvoyé l’affaire devant lui.

 

Rappelant que les dispositions de l’article 372-2 du code civil prévoient que : « À l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale relativement à la personne de l’enfant », le Conseil d’État a jugé que lorsqu’elle est amenée à prendre une décision à l’égard d’un enfant à la demande d’un des parents exerçant en commun avec l’autre l’autorité parentale, l’administration doit, pour apprécier si cette demande relève d’un acte usuel de l’autorité parentale, tenir compte de la nature de la demande, ainsi que de l’ensemble des circonstances dont elle a connaissance. Dans le cas où la demande peut être regardée comme relevant d’un acte usuel de l’autorité parentale, l’administration doit être regardée comme régulièrement saisie, alors même qu’elle ne se serait pas assurée que le parent qui formule cette demande dispose de l’accord exprès de l’autre parent.

 

Le Conseil d’État a en outre précisé que si l’administration fait droit à une demande émanant d’un seul parent qui ne peut être qualifié d’acte usuel de l’autorité parentale, l’illégalité qui entache sa décision n’est susceptible d’engager sa responsabilité qu’à raison de la part imputable à sa faute dans la survenance du préjudice.

 

En l’espèce, le Conseil d’État a jugé que le tribunal administratif avait commis une erreur de droit en retenant qu’une demande de changement d’établissement scolaire ne pouvait pas être regardée comme revêtant le caractère d’un acte usuel de l’autorité parentale sans rechercher si, eu égard à l’ensemble des circonstances dont l’administration avait connaissance, elle pouvait s’estimer comme régulièrement saisie de cette demande.

 

N.B. : Par cette décision, le Conseil d’État apporte une importante précision sur la notion d’« acte usuel » au sens de l’article 372-2 du code civil. La conception « collégiale » de l’autorité parentale n’implique pas nécessairement la double signature des parents séparés. Si les actes importants exigent l’accord des deux parents, l’article 372-2 du code civil prévoit une présomption d’accord du parent qui n’est pas l’auteur d’une demande quand celle-ci relève d’un acte usuel concernant son enfant.

 

Le code civil ne définissant pas la notion d’acte usuel, la jurisprudence avait progressivement déterminé les actes pouvant être qualifiés d’usuels et ceux qui n’entraient pas dans cette catégorie. Par exemple, était considéré comme un acte usuel le fait pour un parent de demander l’inscription sur son passeport de son enfant mineur (C.E., 8 février 1999, n° 173126, au Recueil Lebon). En revanche, ne constituait pas un acte usuel un acte médical dépourvu de caractère d’urgence (C.E., 7 mai 2014, n° 359076), ni l’engagement dans l’armée en qualité d’élève officier d’un mineur non émancipé (C.A.A. Bordeaux, 16 juin 2015, n° 13BX01944).

 

Selon une jurisprudence constante, une demande de radiation et d’inscription dans un établissement scolaire similaire était considérée comme un acte usuel, l’accord de l’autre parent étant présumé acquis dès lors qu’aucun élément ne permettait à l’administration de mettre en doute l’accord réputé acquis de l’autre parent (C.A.A. Paris, 2 octobre 2007, n° 05PA04019 ; C.A.A. Lyon, 28 février 2013, n° 12LY01224).

 

Par sa décision du 13 avril 2018, le Conseil d’État juge désormais qu’il appartient à l’administration de porter une appréciation, au cas par cas, sur la nature de l’acte qui lui est demandé au regard des circonstances de l’espèce dont elle a connaissance. carre

 

Questions propres aux associations éducatives complémentaires de l’enseignement public

fleche Association éducative complémentaire de l’enseignement public – Intérêt général – Refus d’agrément

T.A. Paris, 28 mars 2018, Association interprofessionnelle des fruits et légumes frais, n° 1610405


Une association interprofessionnelle, au sens de l’article L. 632-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, spécialisée dans le domaine des fruits et des légumes frais avait demandé au ministre de l’éducation nationale de lui délivrer un agrément au titre des associations éducatives complémentaires de l’enseignement public prévu aux articles D. 551-1 et suivants du code de l’éducation. S’étant vu refuser cet agrément au motif que les éléments d’information produits au soutien de sa demande ne permettaient pas d’établir le caractère d’intérêt général des actions qu’elle se proposait de conduire, l’association a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler cette décision de refus.

 

Le tribunal a d’abord relevé que les statuts de l’association définissaient son objet comme visant à « mettre en place toute action permettant d’optimiser la mise à disposition des fruits et légumes frais auprès des différentes catégories de population » et que la mention « développer l’information et l’éducation, notamment au travers d’actions pédagogiques ou de formation » résultait d’un addendum décidé par une assemblée générale extraordinaire tenue après un premier refus d’agrément.

 

Il a retenu qu’au-delà des actions pédagogiques ou de formation, l’association a principalement pour objet d’assurer la promotion des produits et des métiers de la filière et de ses intérêts collectifs auprès de l’ensemble des catégories de la population, tant sur le marché français et de l’Union européenne que dans les pays tiers, et que, dans ces conditions, les animations proposées par l’association à destination des élèves des écoles et des établissements scolaires, qui visent indirectement et à terme à encourager et promouvoir la consommation des fruits et des légumes frais, ne mettaient pas clairement en évidence la distance nécessaire que ces animations doivent prendre avec les intérêts de la filière, ni leur caractère d’intérêt général strict.

 

Par conséquent, le tribunal a jugé que, même si l’éducation alimentaire à l’école prévue à l’article L. 312-17-3 du code de l’éducation constitue un axe prioritaire de santé publique, il ne ressortait pas des pièces du dossier que les services proposés par l’association présentent suffisamment le caractère d’intérêt général nécessaire à l’obtention de l’agrément prévu par les articles D. 551-1 et suivants du code de l’éducation pour proposer aux élèves des écoles et des établissements scolaires des activités complémentaires de l’enseignement public.

 

N.B. : A contrario, la cour administrative d’appel de Nancy avait jugé que la lutte contre les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle et l’homophobie, même si elle ne vise qu’une partie des personnes vivant sur le territoire national, poursuit un objectif d’intérêt général consacré par la loi justifiant l’octroi à une association ayant cet objet d’un agrément académique lui permettant d’apporter son concours à l’enseignement public (C.A.A. Nancy, 14 février 2008, Association Couleurs gaies, n° 07NC00335). carre

 

PREMIER DEGRÉ

Scolarité

INSCRIPTION DES ÉLÈVES

fleche École maternelle – Inscription – Enfant étranger – Famille vivant dans un habitat précaire – Places disponibles

T.A. Versailles, 15 mars 2018, n° 1800382


Le père d’une famille de réfugiés syriens qui s’était installée de façon précaire dans une maison abandonnée avait demandé au maire de la commune sur le territoire de laquelle se trouvait cette maison d’inscrire son fils de cinq ans dans une des écoles maternelles communales. Le maire lui ayant opposé une décision implicite de refus, le père de l’enfant demandait au tribunal administratif de Versailles d’annuler cette décision.

 

Le tribunal administratif a d’abord rappelé le cadre juridique relatif à l’accueil des enfants à l’école : l’article L. 111-1 du code de l’éducation prévoit que le droit à l’éducation est garanti à tous les enfants ; l’article L. 131-1 prévoit que l’instruction est obligatoire pour les enfants français ou étrangers entre l’âge de six et seize ans ; en vertu du huitième alinéa de l’article L. 131-5 : « Le statut ou le mode d'habitat des familles installées sur le territoire de la commune ne peut être une cause de refus d'inscription d'un enfant soumis à l'obligation scolaire (…) » ; enfin, l’article L. 113-1 prévoit que tout enfant de trois ans doit pouvoir être accueilli en école maternelle ou classe enfantine le plus près possible de son domicile si ses parents en font la demande.

 

Le tribunal a rappelé qu’il résulte de ces dispositions et du principe d’égal accès au service public qu’un maire ne peut légalement refuser l’inscription d’un enfant dans une école maternelle au motif que, ne parlant pas français, il souffrira de difficultés d’adaptation ou que ses parents ne disposent pas d’un habitat stable. Il a toutefois relevé qu’il résulte des travaux préparatoires à la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 d’orientation sur l’éducation dont est issu l’article L. 113-1 que l’inscription d’un enfant de trois ans en école maternelle n’est pas un droit et qu’un maire peut légalement fonder un refus d’inscription en classe maternelle sur le manque de places disponibles.

 

En l’espèce, le tribunal a retenu que la commune était dotée de huit écoles maternelles, que le nombre d’enfants dont l’inscription était demandée était faible et que le maire ne justifiait pas de l’insuffisance de places disponibles qu’il alléguait. Par suite, le tribunal a annulé la décision implicite par laquelle le maire de la commune avait refusé l’inscription de l’enfant et a enjoint au maire de procéder à l’inscription de l’enfant sous quinze jours.

 

N.B. : Sur la question des capacités d’accueil des écoles maternelles, le Conseil d’État a jugé qu’un maire est en droit de refuser une inscription si les capacités d’accueil de l’école sont atteintes (C.E., 2 mars 1992, Commune de Saint-Michel-sur-Ternoise, n° 115343).

 

S’agissant du sens que le législateur a entendu donner à l’article L. 113-1 du code de l’éducation, le tribunal administratif s’est expressément référé, dans son jugement du 15 mars 2018 ici commenté, à l’interprétation que la cour administrative d’appel de Versailles a donnée des travaux préparatoires à la loi du 10 juillet 1989 (4 juin 2010, Ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, n° 09VE01323) en précisant que « le législateur a seulement entendu assigner aux collectivités publiques l'objectif d'accueillir à l'école maternelle les enfants qui ont atteint l'âge de trois ans, mais n'a pas institué un droit à leur admission dans un établissement scolaire avant l'âge de six ans ». carre

 

SECOND DEGRÉ

Scolarité

INSCRIPTION DES ÉLÈVES

fleche Inscription – Enseignement d’exploration en classe de seconde – Second choix obtenu – Absence d’intérêt donnant qualité pour agir

C.A.A. Nantes, 13 avril 2018, n° 16NT02011


Dans le cadre de la procédure d’inscription en classe de seconde de lycée, une élève avait formulé deux vœux comme second enseignement d’exploration et elle avait obtenu son second choix.

 

Les parents de l’élève avaient demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler la décision de l’inspecteur d’académie, directeur académique des services de l’éducation nationale, affectant leur fille en classe de seconde générale dans son lycée de secteur, mais ne faisant pas droit à son premier vœu de second enseignement d’exploration. Le tribunal administratif avait annulé cette décision de l’inspecteur d’académie.

 

Statuant sur l’appel du ministre de l’éducation nationale, la cour administrative d’appel a jugé que les requérants ne justifiaient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour demander l’annulation de la décision d’affectation de leur fille dès lors que cette décision avait fait droit à leur demande, quand bien même celle-ci ne satisfaisait pas leur premier choix.

 

La cour a également précisé que ce moyen était d’ordre public et qu’il aurait dû être relevé d’office par les premiers juges.

 

N.B. : Il résulte d’une jurisprudence constante du Conseil d’État qu’une personne ne justifie pas d’un intérêt lui donnant qualité pour contester une décision qui lui donne satisfaction nonobstant la circonstance que la demande à laquelle il a été fait droit n’a été présentée qu’à titre subsidiaire (C.E., 11 octobre 1995, n° 149554, aux tables du Recueil Lebon ; C.E., 18 octobre 2002, n° 231771, aux tables du Recueil Lebon). carre

 

DISCIPLINE DES ÉLÈVES

fleche Discipline – Commission académique d’appel – Principe des droits de la défense – Principe du contradictoire – Présence du chef d’établissement lors du délibéré – Privation d’une garantie au sens de la jurisprudence « Danthony » (oui)

T.A. Grenoble, 22 mars 2018, n° 1604287


Les parents d’une collégienne demandaient au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la décision du recteur d’académie prononçant la sanction d’exclusion définitive de l’établissement de leur fille, prise dans le cadre du recours administratif préalable obligatoire prévu par l’article R. 511-49 du code de l’éducation après avis de la commission académique d’appel dont les délibérations s’étaient déroulées en présence du chef d’établissement.

 

Le tribunal administratif a jugé que la présence du chef d’établissement lors  du délibéré de la commission académique d’appel en l’absence du conseil de l’élève portait atteinte au respect du principe des droits de la défense et au principe du contradictoire. Il en a conclu que l’avis de la commission académique d’appel était entaché d’un vice de procédure et a estimé que cette irrégularité avait été susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision finalement prise par le recteur d’académie et avait en outre privé les requérants d’une garantie. Il a par conséquent annulé la décision rectorale de sanction attaquée.

 

N.B. : Il résulte de la jurisprudence « Danthony » du 23 décembre 2011 (C.E. Assemblée, n° 335033, au Recueil Lebon) qu’un vice dans le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, doit être de nature à priver effectivement les requérants d’une garantie ou être susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision finalement prise pour constituer une irrégularité de nature à entraîner l’annulation de cette décision.

 

Dans le présent litige, le tribunal juge logiquement que, en l’espèce, la présence du chef d’établissement lors des délibérations de la commission académique après la clôture des débats et alors que le conseil des requérants avait été invité à quitter la salle a porté atteinte au principe des droits de la défense et au principe du contradictoire et a effectivement privé les requérants d’une garantie au sens de cette jurisprudence. carre

 

Vie scolaire

BOURSES D’ÉTUDES ET AUTRES AIDES

fleche Bourse nationale d’études du second degré – Date limite de dépôt des dossiers de demande – Circonstances indépendantes de la volonté du demandeur – Tardiveté (non)

T.A. La Réunion, 18 janvier 2018, n° 1700366


Un parent d’élève avait complété son dossier de demande de bourse nationale d’études du second degré après la date limite de dépôt des dossiers de demande de bourse fixée par la circulaire ministérielle annuelle,  prise sur le fondement de l’article D. 531-24 du code de l’éducation. Toutefois, il s’était manifesté à plusieurs reprises auprès de l’établissement scolaire durant le délai fixé pour le dépôt des dossiers afin de signaler l’indisponibilité du document justificatif nécessaire en provenance de la caisse d’allocations familiales (CAF). Il avait également demandé expressément la prise en compte de son dossier en attendant qu’il puisse être complété. Le recteur de l’académie avait rejeté sa demande de bourse pour irrecevabilité.

 

L’intéressé a demandé au tribunal administratif de La Réunion d’annuler cette décision du recteur.

 

Le tribunal administratif a fait droit à sa demande en retenant que, compte tenu des éléments d’explication circonstanciés présentés par l’intéressé, non contestés par le recteur d’académie et étayés par une attestation de la CAF, le non-respect de la date limite de dépôt du dossier résultait de circonstances indépendantes de la volonté du demandeur. Le tribunal a, en conséquence, estimé que le motif de la tardiveté du dépôt de son dossier  ne pouvait être opposé à ce parent d’élève pour lui refuser l’attribution d’une bourse d’études. carre

 

Enseignement supérieur et recherche

VIE ÉTUDIANTE

Bourses d’études et autres aides

fleche Protection subsidiaire – Égalité de traitement – Bénéficiaire du droit d’asile – Bourses sur critères sociaux

T.A. Besançon, 19 septembre 2017, n° 1601762


Mme X, de nationalité syrienne bénéficiaire de la protection subsidiaire, étudiante en licence à l’U.F.R. Sciences et techniques à l’université de Besançon,,  avait obtenu au titre de l’année universitaire 2015-2016 une bourse d’enseignement supérieur sur critères sociaux. À la suite d’un réexamen de son dossier en fin d’année universitaire, le CROUS de Besançon l’a informée qu’elle ne remplissait pas les conditions nécessaires pour bénéficier de cette bourse et que les mensualités déjà perçues feraient l’objet d’un ordre de reversement. Par la suite, le recteur de l’académie de Besançon a décidé le retrait de sa bourse d’enseignement supérieur sur critères sociaux.

 

Mme X a demandé au tribunal administratif de Besançon d’annuler pour excès de pouvoir cette décision.

 

Le tribunal a fait droit à la demande de la requérante en jugeant qu’elle était fondée à exciper de l’illégalité de la circulaire n° 2015-101 du 9 juin 2015 relative aux modalités d’attribution des bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux et des aides à la mobilité internationale pour l’année 2015-2016, prise en application du décret n° 2008-974 du 18 septembre 2008, et sur laquelle se fondait la décision en litige. Le tribunal  a en effet retenu que la différence de traitement entre les étudiants admis au bénéfice de l’asile et ceux bénéficiant de la protection subsidiaire résultant de la circulaire du 9 juin 2015 méconnaissait le principe d’égalité.


Le tribunal a jugé que « si le pouvoir réglementaire pouvait, dans les limites de l’habilitation donnée par le législateur et sous réserve du respect des principes à valeur constitutionnelle ainsi que des engagements internationaux de la France, fixer, s’agissant des ressortissants étrangers, des conditions leur ouvrant un droit au bénéfice des bourses sur critères sociaux selon le régime du séjour en France, il ne pouvait légalement le faire que pour autant que les personnes admises au bénéfice de l’asile ou de la protection subsidiaire se trouvent dans une situation différente au regard de la protection accordée ou pour des motifs d’intérêt général en rapport avec cette même condition (…) ».

 

En l’espèce, le tribunal a relevé que « la différence de traitement qui résulte de la circulaire attaquée ne se justifie ni par un motif d’intérêt général, ni par une différence de situation au regard de la protection des réfugiés et de celle des bénéficiaires de la protection subsidiaire (…) ». Il a par conséquent jugé que la circulaire était sur ce point entachée d’illégalité.

 

N.B. : La circulaire relative aux modalités d’attribution des bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux, des aides au mérite et des aides à la mobilité internationale pour l’année 2018-2019 a tiré les conséquences de ce jugement du tribunal administratif de Besançon en alignant le régime d’accès aux bourses d’enseignement supérieur sur critères sociaux des bénéficiaires de la protection subsidiaire sur celui des réfugiés. carre

 

Examens et concours

RÉGLEMENTATION

Compétence des établissements

fleche Règlement de l’examen – Conditions d’opposabilité

C.A.A. Paris, 13 mars 2018, n° 17PA00477


Mme X, étudiante à l’université Paris-Descartes,  a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler la délibération du jury telle que révélée par son relevé de notes la déclarant ajournée à l’examen de licence professionnelle de sciences humaines et sociales. Sa demande ayant été rejetée par le tribunal, l’intéressée a formé un recours en appel devant la cour administrative d’appel de Paris. La cour  a fait droit à sa demande et a ordonné à l’université de lui délivrer le diplôme en litige.

 

À la suite de la soutenance orale de son mémoire dans le cadre d’un projet dit « tuteuré », la requérante avait reconnu par courriel adressé au directeur des études et responsable du projet tuteuré avoir plagié certaines parties de son étude. Le directeur des études lui avait répondu qu’il n’y aurait pas de sanction mais qu’il y aurait un impact sur sa note de projet tuteuré. Aucune procédure n’avait été engagée à l’encontre de la requérante. Elle avait obtenu la note de 9/20 pour le projet tuteuré et une moyenne de 12,286 au second semestre. Son relevé de notes et résultats mentionnait que son résultat d'admission était de 11,825/20 et qu'elle était ajournée.


La responsable de la licence avait informé Mme X que si les unités d’enseignement (U.E.) se compensaient entre elles à condition que leur note soit de 7/20 minimum, les U.E. projet « tuteuré » et stage devaient en revanche être validées à 10/20.  Mme X avait par conséquent été ajournée faute d’avoir obtenu une moyenne de 10/20 au projet tuteuré.

 

La cour a relevé que cette règle portée à la connaissance de la requérante par la responsable de la licence sur les conditions de validation du projet « tuteuré » n’étant pas prévue par les « règles de validation » de la licence professionnelle, elle ne pouvait être légalement opposée à la requérante. Elle en a déduit que la délibération du jury décidant l'ajournement de Mme X, parce qu’elle reposait sur une disposition non publiée du règlement des études, était entachée d'une erreur de droit et devait donc être annulée.

 

L'université avait sollicité du juge une substitution de motifs de la décision d'ajournement qui, selon elle, était en réalité fondée sur le « constat d'une faute lourde de l'étudiante » du fait du plagiat. La cour a refusé de procéder à cette substitution de motifs en retenant que si le jury lui-même aurait pu tirer les conséquences de ce constat de plagiat en attribuant à l’étudiante une note éliminatoire, il  n’appartient pas au juge administratif de « substituer son appréciation à celle du jury en modifiant les notes attribuées à l’intéressée ».

 

N.B. : En cas de plagiat, une procédure disciplinaire peut être engagée pour fraude à l’encontre de l’étudiant qui l’a commis selon les modalités prévues aux articles R. 712-9 à R. 712-46 du code de l’éducation (cf. LIJ n° 200, novembre 2017, rubrique « Le point sur », concernant les procédures susceptibles d’être mises en œuvre à l’université face aux actes de plagiat, notamment lorsqu’ils sont commis par des étudiants).

 

L’arrêt du 13 mars 2018 de la cour administrative d’appel de Paris ici commenté confirme qu’il est également possible pour les membres d’un jury, dans certaines conditions, de tirer les conséquences d’un plagiat en termes de notation. La cour administrative d’appel de Marseille avait déjà admis la légalité de la prise en compte de faits de plagiat dans la notation, qui ne constitue pas une sanction disciplinaire déguisée dès lors que le constat du plagiat constitue « un des éléments d'évaluation du travail soumis à l'appréciation souveraine du jury » (C.A.A. Marseille, 16 janvier 2007, n° 03MA01821, LIJ n° 113, mars 2007).

 

Il convient de noter que, dans ces deux litiges portés devant les cours administratives d’appel de Marseille et Paris, les candidats ne contestaient pas la réalité du plagiat et que les actes de plagiat étaient d’importance limitée. carre

 

ORGANISATION

Délibérations du jury

fleche Délibération du jury – Erreur de droit – Diplôme de conseiller en économie sociale et familiale

T.A. Orléans, 23 janvier 2018, n° 1503681


Une candidate s’était présentée aux épreuves du diplôme d’État de conseiller en économie sociale et familiale. Le jury avait refusé d’évaluer l’ensemble des domaines de compétences qu’elle avait présentés au motif que son rapport de stage et sa note d’analyse excédaient le nombre de pages prévu par la réglementation.

 

Saisi d’un recours pour excès de pouvoir formé par l’intéressée contre la délibération du jury, le tribunal administratif d’Orléans a jugé qu’elle était entachée d’une erreur de droit.

 

Le tribunal a d’abord cité les articles 7 et 8 de l’arrêté du 1er septembre 2009 relatif au diplôme d’État de conseiller en économie sociale et familiale (DECESF) dont il ressort que le jury doit se prononcer sur chacun des huit domaines de certification que comporte le diplôme, qu’il peut prendre une décision de validation partielle du diplôme et que le candidat conserve le bénéfice des domaines validés durant une période de cinq ans. Il en a déduit que le jury ne pouvait refuser de se prononcer sur chacun des domaines de certification présentés par le candidat et qu’il ne pouvait refuser de le faire au motif qu’une production écrite concourant à l’obtention de l’un de ces domaines de certification excédait le nombre de pages imparti par la réglementation.

 

Le tribunal a également jugé que, quand bien même le rapport de stage dépassait le nombre de pages fixé par la réglementation, le jury ne pouvait pas, sans commettre d’erreur de droit, refuser de procéder à la soutenance orale du stage de la requérante et à l’évaluation de ce stage, dès lors que l’annexe III concernant le domaine de compétence « dossier de pratique professionnelle » de l’arrêté du 1er septembre 2009 prévoit que tant la soutenance orale que l’appréciation du stage sont examinés par le jury de manière distincte du rapport de stage lui-même.

 

Le tribunal administratif a par conséquent annulé la délibération du jury de l’examen refusant de délivrer le DECESF à la requérante et enjoint au recteur d’académie de réunir à nouveau le jury afin qu’il examine l’ensemble des domaines de compétence présentés par la requérante au titre de la session 2015.

 

N.B. : S’il n'appartient pas au juge administratif de contrôler les appréciations portées sur la valeur d'un candidat par un jury d'examen ou de concours, le juge peut sanctionner l’erreur de droit affectant la délibération d’un jury (cf. C.E., 14 juin 1996, n° 164888). carre

 

Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Recrutement et changement de corps

CONCOURS

fleche Concours interne – Liste complémentaire – Classement ex aequo – Motifs de départage – Expérience des candidats

T.A. Bordeaux, 30 novembre 2017, n° 1700284


Une maître contractuelle de l’enseignement privé sous contrat s’était présentée à la session 2016 du concours interne d’accès à l’échelle de rémunération correspondant au certificat d’aptitude au professorat d’éducation physique et sportive (CAER-CAPEPS) et avait été inscrite sur la liste complémentaire établie par le jury en étant classée première ex aequo avec un autre candidat.

 

Alors que, à la suite du désistement d’un candidat admis sur la liste principale, le candidat classé ex aequo avec elle avait été nommé en qualité de professeur d’éducation physique et sportive stagiaire, le recteur de l’académie de Bordeaux avait refusé de procéder à la nomination de la requérante. Cette dernière demandait au tribunal administratif de Bordeaux l’annulation de la décision du recteur d’académie refusant de la nommer en qualité de professeur d’éducation physique et sportive stagiaire.

 

Le tribunal a jugé qu’en retenant, pour départager les deux candidats ex aequo, le critère tiré de l’ancienneté des fonctions d’enseignement qu’ils avaient occupées, qui n’est prévu par aucun texte, le recteur de l’académie de Bordeaux avait privé sa décision de base légale.

 

N.B. : Le principe d’égalité d’accès aux emplois publics est consacré par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (cf. C.E. Assemblée, 21 décembre 1990, Amicale des anciens élèves de l'école normale supérieure de Saint-Cloud et autre et Association des anciens élèves de l'école nationale d'administration, nos 72834 et 72897, au Recueil Lebon).

 

Le Conseil d’État a cependant admis que les règles d’un concours soient différenciées pour tenir compte de la variété des situations, ainsi que des besoins du service public (C.E. Assemblée, 12 décembre 2003, Amicale des anciens élèves de l’École nationale supérieure agronomique de Rennes, n° 245607, au Recueil Lebon).

 

Il a également eu l’occasion de juger que, pour départager deux candidats classés ex aequo par un jury de concours, l’administration pouvait légalement tenir compte, entre autres éléments d’appréciation, de ce qu’un candidat était plus jeune et pourrait donc exercer plus longtemps les fonctions (C.E., 12 février 1958, Sieur Valade, n° 31842, au Recueil Lebon). Ce critère de l’âge doit toutefois être manié avec la plus grande précaution puisqu’il ne saurait en tout état de cause être retenu seul pour départager des candidats classés ex aequo : en effet, bien que d’apparence objectif, ce critère est regardé comme discriminatoire lorsqu’il n’est pas en lien avec l’intérêt du service ou la nature des fonctions. carre

 

Positions

DÉTACHEMENT

fleche Positions – Détachement – Structuration par grades différente entre les deux corps – Équivalence de grade – Critères d’appréciation de l’équivalence entre deux grades (indice terminal de chacun des deux grades, ainsi que, notamment, leur échelonnement indiciaire et leur place dans chacun des deux corps)

C.E., 25 mai 2018, n° 410972, aux tables du Recueil Lebon


Un ingénieur d’études et de fabrications du ministère de la défense, classé dans le premier des deux grades de ce corps, avait été placé en position de détachement dans le corps des ingénieurs d’études du ministère chargé de l’enseignement supérieur et classé dans le premier des trois grades que comportait alors ce corps (en vertu de l’article 23 du décret n° 85-1534 du 31 décembre 1985 fixant les dispositions statutaires applicables aux ingénieurs et aux personnels techniques et administratifs de recherche et de formation du ministère chargé de l'enseignement supérieur, dans sa rédaction alors applicable, le corps des ingénieurs d’études comportait le grade d'ingénieur d'études de 2e classe comprenant treize échelons, le grade d'ingénieur d'études de 1re classe comprenant cinq échelons et le grade d'ingénieur d'études hors classe comprenant quatre échelons).

 

Estimant qu’il aurait dû être classé dans le grade d’ingénieur d’études de 1re classe, l’intéressé avait demandé en vain au tribunal administratif de Paris et à la cour administrative d’appel de Paris d’annuler la décision le classant dans le grade d’ingénieur d’études de 2e classe. Par un arrêt n° 15PA04828 du 28 mars 2017, la cour administrative d’appel de Paris avait notamment jugé que le premier grade du corps des ingénieurs d’études et de fabrications du ministère de la défense était équivalent au premier grade du corps des ingénieurs d’études du ministère chargé de l’enseignement supérieur, alors même que l’indice sommital était plus élevé dans le grade d’ingénieur d’études et de fabrications du ministère de la défense.

 

Saisi d’un pourvoi contre cet arrêt, le Conseil d’État, après avoir rappelé les dispositions de l’article 26-1 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l’État, à la mise à disposition, à l’intégration et à la cessation définitive de fonctions, a jugé que, pour apprécier si le grade détenu par un fonctionnaire dans son corps d’origine et celui dans lequel il est classé lors de son détachement dans un autre corps sont équivalents au sens et pour l’application des dispositions du décret du 16 septembre 1985, il y a lieu de prendre en compte non seulement l’indice terminal de son grade dans son corps d’origine et du grade du corps d’accueil, mais aussi des éléments tels que, notamment, l’échelonnement indiciaire de chacun des grades d’origine et d’accueil et la place des grades dans les deux corps d’origine et d’accueil.

 

Le Conseil d’État a en outre précisé que ni la circonstance que le grade dans lequel a été prononcé le détachement d'un fonctionnaire comporte un indice terminal inférieur à celui du grade détenu par l'intéressé dans son corps d'origine, ni celle que la structuration par grades du corps d'accueil du fonctionnaire détaché soit différente de celle de son corps d'origine ne font obstacle, par elles-mêmes, à ce que les deux grades soient regardés comme équivalents.

 

En l’espèce, le Conseil d’État a relevé qu’il ressortait des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger que le grade d'ingénieur d'études de 2e classe du corps des ingénieurs d'études du ministère chargé de l'enseignement supérieur était équivalent au grade d'ingénieur d'études et de fabrications du corps des ingénieurs d'études et de fabrications du ministère de la défense, alors même que leurs indices terminaux étaient respectivement de 750 et 801 et que le corps d'origine du requérant comprenait deux grades tandis que son corps d'accueil en comprenait trois, la cour s'était fondée sur la place de ces deux grades dans le déroulement de la carrière des fonctionnaires relevant des statuts des deux corps en cause, le nombre d'échelons de chacun de ces deux grades ainsi que leurs échelonnements indiciaires respectifs. Il en a déduit que, par suite, la cour administrative d’appel de Paris n’avait pas commis d’erreur de droit et n’avait entaché son arrêt d’aucune erreur de qualification juridique des faits.

 

Le Conseil d’État a, en conséquence, rejeté le pourvoi dont l’avait saisi le fonctionnaire.

 

N.B. : La présente décision est l’occasion pour le Conseil d’État de préciser les critères permettant d’apprécier, en cas de détachement dans un corps de fonctionnaires de l’État, la condition d’équivalence de grade prévue par les dispositions de l’article 26-1 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985. carre

 

Obligations des fonctionnaires

CUMUL D’ACTIVITÉS OU D’EMPLOIS

fleche Personnel enseignant – Cumul d’activités

T.A. Marseille, 26 mars 2018, n° 1606105


Un professeur certifié de mathématiques a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler la décision par laquelle le recteur de l’académie d’Aix-Marseille avait rejeté sa demande de cumul d’activités pour exercer ponctuellement en qualité de vétérinaire.

 

Après avoir rappelé les dispositions de l’article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa version alors applicable, qui interdisaient aux fonctionnaires d’exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit sous réserve des exceptions que cet article législatif prévoyait et que précisait le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l’État, le tribunal administratif a rejeté la demande de l’intéressé.

 

Le tribunal a jugé que le recteur de l’académie d’Aix-Marseille n’avait pas entaché sa décision d’illégalité en refusant le cumul d’activités sollicité dès lors que la profession de vétérinaire ne relevait d’aucune des activités accessoires dont le cumul était susceptible d’être autorisé par l’article 2 du décret du 2 mai 2007 alors en vigueur. Il a en outre relevé que la circulaire du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique n° 2157 du 11 mars 2008 relative au cumul d’activités dont l’intéressé se prévalait et qui, en tout état de cause, était dépourvue de valeur réglementaire, avait pour seul objet de préciser la façon dont il convenait d’appliquer le décret du 2 mai 2007 sans pour autant recommander de « porter une attention bienveillante aux demandes comme [celle du requérant] ».

 

N.B. : À l’occasion de ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a rappelé que, dans le cadre de la réglementation applicable en 2016 au cumul d’activités,  la liste des activités accessoires que les agents publics étaient susceptibles d’être autorisés à cumuler avec leurs fonctions était limitative.

 

Désormais, l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983, créé par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (article 7), prévoit dans son IV que : « Le fonctionnaire peut être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à exercer à titre accessoire une activité, lucrative ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées et n’affecte pas leur exercice. (…). »

 

En application de ce nouveau dispositif législatif, c’est l’article 6 du décret n° 2017-105 du 27 janvier 2017 relatif à l'exercice d'activités privées par des agents publics et certains agents contractuels de droit privé ayant cessé leurs fonctions, aux cumuls d'activités et à la commission de déontologie de la fonction publique qui précise les activités dont l’exercice à titre accessoire par les agents publics est susceptible d’être autorisé  et l’activité de vétérinaire n’y figure pas davantage que dans la réglementation précédemment en vigueur. carre

 

Droits et garanties

DROITS SYNDICAUX

fleche E.P.L.E. – Droit syndical – Conseil d’administration – Représentants élus du personnel de l’établissement – Conseiller principal d’éducation – Membre de droit

C.E., 13 avril 2018, Fédération des syndicats généraux de l'éducation nationale et de la recherche publique, n° 404783


Une organisation syndicale avait demandé au Premier ministre d’abroger les dispositions des articles R. 421-14, R. 421-16, R. 421-17 et R. 421-26 du code de l’éducation en tant qu’elles ne permettent pas au conseiller principal d’éducation (C.P.E.) le plus ancien d’un établissement public local d’enseignement (E.P.L.E.), lorsqu’il siège au conseil d'administration en qualité de membre de droit,  d’être candidat aux opérations électorales en vue de la désignation des représentants du personnel à ce conseil d’administration. L’organisation requérante soutenait que ces dispositions méconnaissaient les garanties légales définies par l’article L. 421-2 du code de l’éducation qui prévoit que le conseil d’administration de l’E.P.L.E. est composé, pour un tiers, des représentants élus du personnel de l’établissement.

 

Le Conseil d’État a jugé que les dispositions réglementaires attaquées ne méconnaissent pas les garanties légales définies par l’article L. 421-2 du code dans la mesure où elles n’ont pas pour effet de priver les C.P.E. siégeant en tant que membres de droit au conseil d’administration de l’établissement de leur qualité d’électeurs et de leur droit à participer à la désignation des représentants des personnels et ne les privent pas davantage de leur droit à siéger à ce conseil d’administration.

 

Il a en outre signalé que le conseil d’administration d’un E.P.L.E. n’a pas pour objet d’assurer la détermination collective des conditions de travail au sens du huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. carre

 

PROTECTION CONTRE LES ATTAQUES

Protection fonctionnelle

fleche Enseignant – Protection fonctionnelle – Abrogation – Faute personnelle d’une exceptionnelle gravité

T.A. Lyon, 28 février 2018, n° 1608046


Deux lycéens étaient décédés en suivant, dans le cadre d’un stage, leur professeur d’éducation physique et sportive qui avait emprunté une piste noire fermée en raison d’un fort risque d’avalanche, fermeture matérialisée par une signalétique en plusieurs langues, un panneau de sens interdit et un filet fermant l’accès de la piste, outre un drapeau à damier signalant le risque d’avalanche.

 

À la suite d’un arrêt rendu par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Grenoble que le procureur de la République avait communiqué aux autorités académiques, lequel arrêt mettait en évidence les faits commis par cet enseignant et  reconnus par lui, la rectrice d’académie avait abrogé la décision par laquelle elle avait initialement accordé la protection fonctionnelle à ce professeur.

 

L’enseignant demandait au tribunal administratif de Lyon d’annuler pour excès de pouvoir cette décision ainsi que la décision implicite de rejet née du silence gardé par le ministre de l’éducation nationale sur le recours hiérarchique qu’il avait formé.

 

Le tribunal administratif a d’abord rappelé que l’administration peut mettre fin pour l’avenir à la protection qu’elle a accordée à un agent public si elle constate postérieurement, sous le contrôle du juge, l’existence d’une faute personnelle au sens de l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires.

 

En l’espèce, le tribunal a retenu, en se fondant notamment sur les mentions de l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Grenoble, que l’enseignant qui, au cours de l’instruction pénale, avait reconnu avoir délibérément violé une obligation particulière de prudence ou de sécurité, avait commis une très lourde imprudence constitutive d’une faute d’une particulière gravité, compte tenu, d’une part, de la mission d’encadrement qui lui incombait qui impliquait qu’il fasse preuve de la plus grande prudence même si le groupe d’élèves dont il avait la responsabilité était expérimenté et, d’autre part, des risques qu’il avait fait courir à ce groupe sans aucune justification.

 

Le tribunal administratif a ainsi jugé que l’administration avait  pu légalement, au vu des éléments nouveaux portés à sa connaissance dans le cadre de la procédure pénale, abroger en raison de la faute personnelle de l’enseignant la décision lui accordant le bénéfice de la protection fonctionnelle. carre

 

Rémunérations, traitement et avantages en nature

PRIMES ET INDEMNITÉS

fleche Personnel enseignant – Professeur agrégé – Traitement – Indemnités – Maxima de service d’enseignement hebdomadaire – Classes préparatoires

C.A.A. Bordeaux, 6 février 2018, n° 16BX01081


Un professeur agrégé hors classe d’anglais, qui enseignait en classe préparatoire techno-bio et en classe préparatoire au diplôme supérieur de comptabilité et de gestion, avait demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l’État à lui verser les heures supplémentaires qu’elle soutenait avoir effectuées au cours des années scolaires 2011-2012, 2012-2013, 2013-2014 et 2014-2015.

 

Par un jugement du 4 février 2016, le tribunal administratif avait rejeté sa demande.

 

Par un arrêt rendu le 6 février 2018, la cour administrative d’appel a rejeté l’appel formé par l’intéressée. Après avoir cité les dispositions des articles 1er, 2 et 7 du décret n° 50-581 du 25 mai 1950 portant règlement d’administration publique pour la fixation des maxima de service hebdomadaire du personnel enseignant des établissements d’enseignement du second degré, elle a rappelé que la fixation des obligations de service d’enseignement et, notamment, de leur durée hebdomadaire constitue l’un des éléments du statut des personnels enseignants qui relève de ces dispositions.

 

La cour a retenu que les classes préparatoires techno-bio et celles préparant au diplôme supérieur de comptabilité et de gestion dans lesquelles enseigne la requérante ne sont pas au nombre de celles mentionnées à l’article 7 du décret du 25 mai 1950 qui ouvrent droit, pour les professeurs de langues vivantes donnant l’intégralité de leur enseignement dans lesdites classes, à un maximum de service d’enseignement de huit heures lorsque l’effectif des classes est supérieur à trente-cinq.

 

La cour a également relevé que, contrairement à ce que soutenait le professeur, les décrets des 22 décembre 2006 et 17 novembre 2010 relatifs, d’une part, au diplôme de comptabilité et de gestion et au diplôme supérieur de comptabilité et de gestion (n° 2006-1706) et, d’autre part, à l’attribution du grade de licence aux titulaires de diplôme de comptabilité et du grade de master aux titulaires du diplôme supérieur de comptabilité et de gestion (n° 2010-1423) n’ont ni pour objet ni pour effet de fixer les maxima de service  hebdomadaire des enseignants préparant les candidats à l’obtention de ces diplômes.

 

Elle a en outre indiqué que l’enseignante ne pouvait utilement invoquer la circulaire n° 2004-056 du 29 mars 2004 relative aux obligations hebdomadaires de service des professeurs des classes préparatoires aux grandes écoles, d’ailleurs abrogée par la circulaire n° 2007-080 du 6 avril 2007, dès lors que cette circulaire ne saurait légalement déroger aux dispositions sus-rappelées du décret du 25 mai 1950.

 

Enfin, la cour a rappelé que l’intéressée ne pouvait utilement se prévaloir de ce que des enseignants d’autres matières, exerçant dans les mêmes classes que celles dans lesquelles elle enseigne, bénéficieraient d’une durée maximale d’enseignement hebdomadaire moindre que la sienne dès lors que les obligations de service d’enseignement hebdomadaire qui lui ont été fixées ne méconnaissent pas les dispositions réglementaires applicables à sa situation. carre

 

fleche Personnel enseignant de l’enseignement privé sous contrat – Rémunération pour participation à des jurys d’examen – Non-cumul avec les heures supplémentaires d’enseignement

C.A.A. Marseille, 13 mars 2018, Syndicat national de l’enseignement initial privé (SNEIP) - C.G.T. et M. X, n° 16MA01788



Le Syndicat national de l’enseignement initial privé (SNEIP) - C.G.T. et M. X avaient interjeté appel du jugement du tribunal administratif de Marseille rejetant leur demande tendant à l’annulation de la décision par laquelle le recteur de l’académie d’Aix-Marseille avait refusé de supprimer la retenue de 1/30e des indemnités pratiquée sur les heures supplémentaires année (H.S.A.) des personnels enseignants de l’enseignement privé sous contrat à raison de leur participation à des jurys d’examen.

 

La cour administrative d’appel de Marseille a rejeté leur requête.

 

Après avoir cité les dispositions de l’article 1er du décret n° 2010-235 du 5 mars 2010 relatif à la rémunération des agents publics participant, à titre d'activité accessoire, à des activités de formation et de recrutement et de l’article 5 de l’arrêté du 13 avril 2012 fixant la rémunération des intervenants participant à titre d'activité accessoire à des activités liées au fonctionnement de jurys d'examen conduisant à la délivrance de diplômes ou certificats relevant du ministre chargé de l'éducation nationale, la cour administrative d’appel a rappelé que les personnels enseignants, lorsqu’ils sont autorisés à s’absenter pour participer à ces activités de jury d’examen, ne peuvent en aucun cas, pour une même période, cumuler les indemnités spécifiques prévues pour de telles activités avec les indemnités pour heures supplémentaires prévues par l’article 1er du décret du 6 octobre 1950 fixant les taux de rémunération des heures supplémentaires d’enseignement effectuées pour les personnels enseignants des établissements d’enseignement du second degré.

 

Elle a en conséquence retenu que le recteur d’académie était tenu d’effectuer, le cas échéant, la retenue de 1/30e des indemnités pratiquées sur les H.S.A. des personnels enseignants de l’enseignement privé sous contrat à raison de leur participation à des jurys d’examen.

 

N.B. : La cour administrative d’appel fait ici application d’une décision du Conseil d’État, qui applique logiquement à des maîtres contractuels de l’enseignement privé sous contrat sa jurisprudence relative à la rémunération des agents pour leur participation à des activités liées au fonctionnement de jurys d’examen et à des activités de recrutement d’agents publics relevant du service public de l’éducation prévue par l’article 5 de l’arrêté du 13 avril 2012 (C.E., 23 octobre 2013, Syndicat national des enseignements du second degré, n° 360610 et n° 360828). carre

 

Discipline

fleche Professeur de chaire supérieure – Discipline – Condamnation pénale – Suspension – Sanction disciplinaire – Mise à la retraite d’office

C.A.A. Paris, 10 avril 2018, n° 16PA03380 et n° 17PA01541


Un professeur de chaire supérieure exerçant en classes préparatoires aux grandes écoles avait été reconnu coupable par un jugement du tribunal de grande instance de Paris, devenu définitif, de faits d’agression sexuelle sur mineur de quinze ans par ascendant ou personne ayant autorité et avait été condamné à quatre ans d’emprisonnement dont deux avec sursis.

 

La ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche l’avait d’abord suspendu à titre conservatoire pour une durée maximale de quatre mois, puis avait prononcé à son encontre la sanction de mise à la retraite d’office.

 

Saisi de deux recours pour excès de pouvoir contre ces décisions ministérielles, le tribunal administratif avait rejeté les demandes de l’intéressé par deux jugements du 10 avril 2018.

 

Par l’arrêt rendu le 10 avril 2018, la cour administrative d’appel de Paris a rejeté les requêtes d’appel formées par l’intéressé.

 

Après avoir rappelé les termes de l’article 29 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, la cour a relevé que les faits commis par un fonctionnaire en dehors du service pouvaient constituer une faute passible d’une sanction disciplinaire lorsqu’« eu égard à leur gravité, à la nature des fonctions de l’intéressé et l’étendue de ses responsabilités, ils ont eu un retentissement sur le service ou ont gravement porté atteinte à l’honneur et à la considération qui lui sont portées ».

 

Elle a ainsi jugé que la ministre pouvait légalement sanctionner le professeur, soumis à l’obligation de dignité s’imposant à tout fonctionnaire, compte tenu de la nature de ses fonctions, des obligations incombant au personnel enseignant, de la nécessité d’assurer le bon fonctionnement du service public de l’éducation nationale et de préserver la confiance des usagers, et ce, alors même que les faits qui lui étaient reprochés avaient été commis en dehors du service.

 

La cour a par ailleurs précisé que la circonstance que les faits reprochés à l’enseignant s’étaient déroulés plus de huit ans avant qu’il ne soit sanctionné ne faisait pas obstacle au prononcé d’une sanction disciplinaire en l’absence de disposition en vigueur à la date de à laquelle a été prise cette sanction, ou d’un principe général du droit enfermant l’action disciplinaire dans un délai déterminé.

 

La cour a également jugé, après avoir cité les dispositions de l’article 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, que la sanction de la mise à la retraite d’office retenue par le ministre était proportionnée à la gravité des fautes commises par l’enseignant en dépit des bonnes appréciations portées sur sa manière de servir.

 

Enfin, la cour, après avoir rappelé les termes de l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983 a considéré que la mesure de suspension de fonctions destinée à écarter provisoirement le fonctionnaire en cause constituait une mesure conservatoire prise dans l’intérêt du service en attendant qu’il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation et pouvait être prise dès lors que « l’administration [était] en mesure d’articuler à l’encontre de l’intéressé des griefs qui [avaient] un caractère de vraisemblance suffisant et qui permett[ai]ent de présumer que celui-ci a[vait] commis une faute grave ». carre

 

Cessation de fonctions

fleche Suspension de l’exécution d’une mesure d’éviction du service d’un fonctionnaire ordonnée par le juge des référés – Jugement rendu au principal rejetant la demande – Faculté de retirer les décisions prises pour l’exécution de la décision du juge des référés – Conditions

C.E., 23 mai 2018, Ministre d’État, ministre de l’intérieur, n° 416313, aux tables du Recueil Lebon


Une élève gardien de la paix avait été exclue du service pendant sa scolarité à l’École de police. Elle avait obtenu du juge des référés du tribunal administratif de Besançon  la suspension de l’exécution de cette mesure d’éviction du service et une injonction adressée à l’administration de la réintégrer dans ses fonctions. Pour l’exécution de cette ordonnance de référé du 9 juin 2015, l’administration avait, par un arrêté du 30 juin 2015, réintégré l’intéressée dans ses fonctions à l’École de police. À la fin de sa scolarité, l’intéressée avait été nommée gardien de la paix stagiaire par un arrêté du 4 mars 2016, puis, à l’issue de son stage, elle avait été titularisée dans le grade de gardien de la paix à compter du 1er avril 2017 par un arrêté du 29 juin 2017.

 

Entre-temps, le tribunal administratif de Besançon avait rejeté la demande de l’intéressée tendant à l'annulation de l'arrêté prononçant son éviction du service, par un jugement qui avait été notifié à l’administration le 14 avril 2016. Se fondant sur ce jugement, le ministre de l’intérieur avait, par un arrêté du 28 septembre 2017, remis en vigueur à compter du 14 avril 2016, date de la notification du jugement, l'arrêté du 30 juin 2015 excluant l'intéressée du service et avait mis fin, également à compter du 14 avril 2016, à l'arrêté du même jour qui avait prononcé la réintégration provisoire de l'intéressée dans ses fonctions.

 

Cette dernière avait demandé au juge des référés d’ordonner la suspension de l’exécution de l’arrêté du 28 septembre 2017. Le ministre de l’intérieur avait formé un pourvoi en cassation contre l’ordonnance par laquelle le juge des référés avait fait droit à sa demande.

 

Ce pourvoi a donné l’occasion au Conseil d’État d’apporter d’utiles précisions sur les conditions dans lesquelles l’administration peut tirer les conséquences d’une décision juridictionnelle rendue au principal qui lui est favorable lorsque le juge des référés avait, pour sa part, ordonné la suspension de l’exécution de sa décision et qu’elle avait, en conséquence, pris des mesures pour l’exécution de cette ordonnance de suspension.

 

Il a ainsi jugé que, compte tenu de son caractère par nature provisoire, la décision de réintégration prise par l’administration après que le juge des référés a suspendu l’exécution d’une mesure excluant du service un agent public et lui a enjoint de réintégrer cet agent peut être retirée par l'autorité compétente si le recours tendant à l'annulation de la décision initiale d'exclusion du service est ensuite rejeté et qu’il en va de même de l'ensemble des mesures prises dans le cadre du déroulement de la carrière de l'intéressé entre sa réintégration dans ses fonctions et la notification à l'administration du jugement rejetant la demande d'annulation de la décision d’exclusion du service, à l'exception de celles qui se bornent à tirer les conséquences du service fait (ce qui signifie que la rémunération perçue par l’agent durant la période d’éviction n’est pas remise en cause et ne peut faire l’objet d’un ordre de reversement).

 

Le Conseil d’État a cependant rappelé que le retrait doit intervenir dans un délai raisonnable, qui ne peut, dans un tel cas, excéder quatre mois à compter de la date à laquelle le jugement rejetant la demande d'annulation a été notifié à l'administration et il a précisé que des décisions créatrices de droits prises postérieurement à cette date ne sauraient être regardées comme provisoires et, par suite, ne peuvent être retirées, conformément au droit commun, que si elles sont entachées d'illégalité et dans un délai de quatre mois à compter de leur signature.

 

En l’espèce, le Conseil d’État a relevé que le ministre, qui disposait d’un délai de quatre mois à compter du 14 avril 2016 pour retirer les décisions, par nature provisoires, qu’il avait prises en exécution de l’ordonnance de référé du 9 juin 2015, s'était abstenu de prononcer dans ce délai le retrait de la décision de réintégration provisoire du 30 juin 2015 et de la décision du 4 mars 2016 nommant l'intéressée en qualité d’agent de la paix stagiaire, de sorte que ces décisions étaient devenues définitives.

 

Le Conseil d’État a en outre jugé que l’arrêté du 29 juin 2017 titularisant la requérante dans le grade de gardien de la paix, intervenu postérieurement à la notification au ministre du jugement du 14 avril 2016, n'aurait pu légalement être retiré, dans les quatre mois suivant sa signature, que s'il était entaché d'illégalité et que, contrairement à ce que soutenait le ministre, cet arrêté de titularisation du 29 juin 2017  n'était pas illégal du seul fait qu'il était intervenu alors que le jugement du 14 avril 2016  rejetant la demande dirigée contre la mesure initiale d'exclusion du service avait mis fin à la suspension de cette mesure.

 

Le Conseil d’État a par conséquent retenu qu’en s’abstenant de retirer dans le délai de quatre mois qui lui était imparti les décisions réintégrant l'intéressée dans ses fonctions et la nommant en qualité d’agent de la paix stagiaire, puis en décidant de la titulariser, le ministre ne pouvait qu'être regardé comme ayant abrogé la mesure d'exclusion du service, ainsi qu'il lui était loisible de le faire.

 

Le Conseil d’État en a déduit que le juge des référés du tribunal n’avait pas commis d’erreur de droit en estimant qu’était propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté attaqué du 28 septembre 2017 le moyen tiré de ce  que, à cette date du 28 septembre 2017, le ministre ne pouvait pas légalement retirer les mesures prises à la suite de la suspension d’exécution de la décision du 30 juin 2015 prononçant l’exclusion du service de la requérante.

 

N.B. : Par cette décision, le Conseil d’État continue de clarifier les conditions dans lesquelles l’administration peut tirer les conséquences d’une décision juridictionnelle statuant au principal en sa faveur après que le juge des référés a ordonné la suspension de l’exécution de sa décision.

 

Par une décision de Section du 7 octobre 2016, Commune de Bordeaux, n° 395211, au Recueil Lebon, le Conseil d’État avait précisé les conditions dans lesquelles peut être retirée  une autorisation d’urbanisme délivrée à la suite d’un réexamen ordonné en conséquence d'une mesure de suspension prise par le juge des référés.

Par la décision ici commentée, il juge que les décisions intervenues pour assurer l’exécution d’une mesure de suspension d’une décision excluant du service un agent public ordonnée par le juge des référés, ainsi que l’ensemble des mesures prises dans le cadre du déroulement de la carrière de l'intéressé après sa réintégration dans ses fonctions revêtent, par leur nature même, un caractère provisoire jusqu’à ce qu’il soit statué sur le recours en annulation présenté parallèlement à la demande en référé, et qu’elles peuvent par conséquent être retirées, à l’exclusion des décisions de rémunération qui se bornent à tirer les conséquences du service fait, après la notification de la décision rendue au principal. Ce retrait doit toutefois intervenir dans un délai raisonnable qui ne peut dans un tel cas excéder quatre mois.

 

La solution dégagée par le Conseil d’État dans cette décision a vocation à s’appliquer tant lorsque le juge statuant au principal met fin à la suspension d’exécution ordonnée par le juge des référés que lorsqu’il donne acte d’un éventuel désistement de l’instance au fond par le requérant, comme l’avait précisé le Conseil d’État dans sa décision du 7 octobre 2016.

 

En matière d’éviction du service d’un agent public, il avait déjà précisé que lorsque le juge des référés suspend l'exécution de la décision par laquelle un agent public a été révoqué, l'intéressé a droit de percevoir la rémunération correspondant à ses fonctions jusqu'à ce que la mesure ordonnée en référé cesse de produire effet. Il ne peut en aller différemment qu'en cas d'absence de service fait, lorsque cette absence de service fait résulte du refus de l'agent d'effectuer les missions qui lui sont alors confiées ou lorsqu'une mesure ordonnée par l'autorité judiciaire fait obstacle à l'exercice par l'intéressé de toute fonction au sein des services de son administration. Les sommes ainsi versées à titre de rémunération en exécution de la suspension d’exécution de la mesure de révocation ordonnée par le juge des référés ne peuvent, sauf absence de service fait dans les conditions qui viennent d’être énoncées, faire l'objet d'une répétition après que la mesure de référé a cessé de produire effet (C.E., 17 mai 2017, n° 397053, aux tables du Recueil Lebon). carre

 

Pensions

PENSION DE RETRAITE

fleche Personnels – Prolongation d’activité sur le fondement de l’article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 – Liquidation des droits à pension – Maintien en activité illégalement au-delà de la durée de services liquidables permettant d’obtenir une pension civile de retraite à taux plein – Absence d’acquisition de nouveaux droits à pension du fait d’une promotion d’échelon obtenue au cours de la période de maintien en activité illégale

T.A. Toulouse, 27 février 2018, n° 1604437


Un professeur des universités-praticien hospitalier qui avait atteint la limite d’âge de son grade sans justifier des 160 trimestres requis pour bénéficier d’une retraite à taux plein avait été autorisé, en application notamment des dispositions de l’article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, à prolonger son activité jusqu’au 3 janvier 2015, puis à être maintenu en surnombre jusqu’au 31 août 2016. Au cours de sa prolongation d’activité, l’intéressé avait bénéficié d’une promotion d’échelon et de chevron à effet du 1er septembre 2014. Admis à la retraite à compter du 1er septembre 2016, il contestait les modalités de calcul de la pension civile de retraite figurant sur son titre de pension, en soutenant  que sa pension aurait dû être calculée sur la base du nouvel échelon qu’il avait obtenu au cours de la période de prolongation de son activité.

 

Le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa requête.


Le tribunal a d’abord cité les dispositions de l’article L. 952-10 du code de l’éducation, de l’article 4 de la loi n° 86-1304 du 23 décembre 1986 relative à la limite d'âge et aux modalités de recrutement de certains fonctionnaires civils de l'État, de l’article L. 26 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite (C.P.C.M.R.) et, enfin, de l’article 1-1 susmentionné de la loi du 13 septembre 1984, aux termes duquel : « Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. / La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l'article L. 13 du même code ni au-delà d'une durée de dix trimestres. / Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension. »


Le tribunal a rappelé qu’il résulte de ces dispositions qu’« un fonctionnaire qui a atteint la limite d’âge applicable au corps auquel il appartient ne peut, en application de ces dispositions, être maintenu en activité au-delà de la date à laquelle il est susceptible de bénéficier d’une pension calculée au taux maximum ».

 

En l’espèce, le requérant ayant atteint le 2 janvier 2013 la limite d’âge de son corps (65 ans) et ne justifiant pas des 160 trimestres requis pour bénéficier d’une retraite à taux plein, avait été autorisé à prolonger son activité jusqu’au 3 janvier 2015, puis à être maintenu en surnombre jusqu’au 31 août 2016. Il justifiait toutefois, le 22 mars 2014, des 160 trimestres nécessaires pour obtenir une pension au taux maximal et avait ainsi été illégalement maintenu en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l’article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite lui permettant d’obtenir une retraite à taux plein.

 

Le tribunal administratif a par conséquent fait application de la jurisprudence du Conseil d’État et jugé que « ainsi, [le requérant] ne pouvait bénéficier de la prise en compte de son maintien d’activité [au-delà du 22 mars 2014, date à laquelle il justifiait de la durée de services nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein] au titre de la constitution et de la liquidation de ses droits à pension ; (…) s’il a bénéficié ultérieurement à la limite d’âge de son emploi d’une promotion d’échelon et de chevron (…), cette circonstance n’est pas de nature à lui permettre d’acquérir de nouveaux droits à pension postérieurement au 22 mars 2014 (…) ».

 

N.B. : Par la décision du 19 novembre 2010 n° 316613 (aux tables du Recueil Lebon), le Conseil d’État a jugé que le bénéfice de la prolongation d'activité ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables lui permettant d'obtenir une pension à taux plein et que le maintien en activité d’un fonctionnaire sur le fondement de l’article 1-1 de la loi du 13 septembre 1984 alors qu’il justifie d’une durée de services lui permettant d’obtenir une pension à taux plein est illégal et ne permet pas à ce fonctionnaire d’acquérir de nouveaux droits à pension postérieurement à la limite d’âge.

 

Sur l’ensemble de cette question, voir le III du Point sur «  La limite d’âge applicable aux agents publics et sur les dispositifs particuliers aux personnels du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche », dans la LIJ n° 195 de novembre 2016. carre

 

Questions propres aux agents non titulaires

LICENCIEMENT – NON-RENOUVELLEMENT D’ENGAGEMENT

fleche Absence de personnalité morale d’un GRETA – Établissement support du GRETA – Agent non titulaire en contrat à durée déterminée (C.D.D.) – Promesse de renouvellement – Non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée – Promesse non tenue – Engagement de la responsabilité de l’administration

T.A. Strasbourg, 8 février 2018, n° 1603690


La requérante, agent contractuel au sein d’un groupement d’établissements scolaires (GRETA), s’est vu proposer le 17 novembre 2015 le renouvellement de son contrat à durée déterminée, à compter du 1er janvier 2016, pour une année. Le 4 janvier 2016, le GRETA lui a verbalement signifié le non-renouvellement de son contrat de travail.

 

Elle a alors demandé l’annulation de la décision du 4 janvier 2016 et a présenté des conclusions à fin d’indemnisation de ses préjudices financier, de carrière et moral à l’encontre du GRETA et de l’État.

 

Le tribunal a relevé que la requérante devait être regardée comme demandant la condamnation de l’établissement public local d’enseignement(E.P.L.E.) support du GRETA dans la mesure où ce dernier n’a pas de personnalité morale. Quant aux conclusions de la requérante dirigées contre l’État, elles ont été rejetées au motif qu’elles étaient mal dirigées, la décision de procéder au licenciement ou de ne pas renouveler le contrat des personnels recrutés par un GRETA constituant un acte de gestion autonome de l’E.P.L.E. support du groupement, qui possède la personnalité morale.

 

Après avoir également rejeté les conclusions à fin d’annulation de la requérante, le tribunal administratif de Strasbourg a rappelé qu’une promesse non tenue envers un agent constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la puissance publique.

 

Dans la mesure où il résultait de l’instruction que le conseil d’administration du GRETA avait autorisé le renouvellement du contrat de la requérante et qu’une proposition en ce sens lui avait été adressée  par le chef de l’établissement support du groupement, qui donnait à l’intéressée des assurances claires et précises qu’il n’a pas respectées, le tribunal a condamné l’établissement scolaire support du GRETA à verser à la requérante une somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral qu’elle avait subi du fait de cette promesse non tenue.

 

N.B. : Ce jugement du 8 février 2018 du tribunal administratif de Strasbourg s’inscrit dans la ligne d’une jurisprudence bien établie dont il résulte que la promesse non tenue envers un agent constitue une faute susceptible d’engager la responsabilité de l’administration.

 

Ainsi, une lettre par laquelle une autorité administrative indique à un agent dont le contrat est susceptible d’être renouvelé qu’elle lui fera parvenir prochainement son nouveau contrat constitue une promesse d’engagement et cette promesse n’est pas tenue si le contrat n’est finalement pas renouvelé (cf. C.A.A. Versailles, 10 novembre 2005, Commune de Montfort-l’Amaury, n° 04VE00895). Une promesse non tenue constitue une faute de nature à engager sa responsabilité (C.E., 2 octobre 2002, n° 233883, aux tables du Recueil Lebon). carre

 

fleche  Agent contractuel – Licenciement pour inaptitude physique – Obligation de reclassement

T.A. Châlons-en-Champagne, 5 décembre 2017, n° 1602647


Un agent recruté par contrat à durée indéterminée par un centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) avait été déclaré physiquement inapte à ses fonctions à l’issue d’un congé de maladie professionnelle. Il a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le CROUS à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu’il estimait avoir subi du fait de l’illégalité qui entachait, selon lui, la décision de la directrice du CROUS prononçant son licenciement pour inaptitude physique et de la perte de son emploi en résultant.

 

Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa requête.

 

Après avoir rappelé les termes du 3° de l’article 17 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'État pris pour l'application de l’article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, le tribunal administratif a indiqué qu’il résulte de ces dispositions que lorsqu’un agent est déclaré inapte physiquement à l’exercice de ses  fonctions, l’administration ne peut prononcer son licenciement qu’après avoir constaté l’impossibilité de le reclasser dans un autre emploi.  Il a précisé qu’il appartient à l’administration, à l’issue de l’entretien préalable et après la consultation de la commission consultative paritaire compétente, de notifier à l’agent sa décision par une lettre dans laquelle elle doit également l’inviter à présenter une demande écrite de reclassement dans un délai qu’elle fixe en fonction de la durée du préavis prévu à l’article 46 du décret du 17 janvier 1986  et que ce n’est que dans cette hypothèse que l’administration peut alors licencier l’agent s’il n’a pas formulé de demande écrite de reclassement dans le délai qui lui était imparti.

 

En l’espèce, le tribunal administratif a jugé que le CROUS était tenu d’engager des recherches en vue d’un reclassement de l’intéressé préalablement à son licenciementdès lors que ce dernier avait formulé par écrit une demande de reclassement et que, dans ces conditions, il n’avait pas entendu renoncer au bénéfice du reclassement au sens des dispositions du d) du 3° de l’article 17 du décret du 17 janvier 1986 qui prévoient qu’« (…) en cas d’absence de demande formulée dans le délai indiqué (...), l’agent est licencié (…) ».

 

Le tribunal administratif a par ailleurs rappelé qu’il résulte des dispositions de l’article 17 du décret du 17 janvier 1986 qu’une offre de reclassement doit être écrite, précise et personnalisée et que l’administration est seulement tenue de proposer un emploi relevant de la même catégorie hiérarchique que celui précédemment occupé par l’agent, ou d’une catégorie inférieure avec l’accord exprès de ce dernier, adapté à son état de santé et à ses compétences professionnelles, et relevant des services de l’autorité l’ayant recruté.

 

Enfin, le tribunal administratif a précisé « qu’il résulte des dispositions du e) de l’article 17-3° du décret [du 17 janvier 1986] que, lorsqu’une demande de reclassement a été formulée par l’agent, l’administration ne peut le licencier qu’après avoir constaté soit son refus de l’emploi proposé, soit l’impossibilité de le reclasser à l’issue d’un congé sans traitement de trois mois », relevant « que la seule circonstance que l’impossibilité de reclassement de l’intéressé ne soit pas visée dans l’arrêté (…) prononçant son licenciement pour inaptitude physique est sans incidence sur la légalité de ce licenciement ».

 

N.B. : Par la décision ici commentée, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne précise le régime juridique de l’obligation de reclassement des agents contractuels reconnus physiquement inapte à leur emploi tel qu’il est défini par les dispositions du décret du 17 janvier 1986 dans sa rédaction issue du décret n° 2014-1318 du 3 novembre 2014.

 

Sur l’ensemble de cette question, voir le III du Point sur « L’obligation de reclassement des agents publics », dans la LIJ n° 193 de mai 2016. carre

 

QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

Personnels enseignants

QUESTIONS COMMUNES

fleche Indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire – Décret n° 71-685 du 18 août 1971 relatif à la rémunération des cours professés dans les établissements pénitentiaires et instituant une indemnité d'enseignement en milieu pénitentiaire – Régime indemnitaire des directeurs d’école – Avantage financier illégal

T.A. Nancy, 7 novembre 2017, n° 1602851


Un professeur des écoles affecté en qualité de responsable local d’enseignement (RLE) d’un centre de détention avait bénéficié du régime indemnitaire des directeurs d’école composé de l’indemnité de sujétion spéciale, de l’indemnité de fonction particulière et de la bonification indiciaire. Le recteur d’académie l’a informé qu’il n’était plus éligible à ce régime indemnitaire et a rejeté le recours gracieux par lequel l’intéressé avait demandé le rétablissement des versements correspondant au régime indemnitaire des directeurs d’école.

 

Par un jugement du 7 novembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête.

 

Il a rappelé qu’il résulte de l’article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, de l’article 64 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, de l’article 2 du décret n° 85-730 du 17 juillet 1985 relatif à la rémunération des fonctionnaires de l'État et des fonctionnaires des collectivités territoriales régis respectivement par les lois n° 84-16 du 11 janvier 1984 et n° 84-53 du 26 janvier 1984, et de l’article 4 du décret n° 48-1108 du 10 juillet 1948 portant classement hiérarchique des grades et emplois des personnels de l'État relevant du régime général des retraites qu’un fonctionnaire ne peut légalement bénéficier d’une indemnité qui n’est pas prévue par une disposition législative ou réglementaire ou par le statut du corps auquel il appartient.

 

Le tribunal a précisé que le régime indemnitaire des responsables locaux d’enseignement fixé par les dispositions de l’article 2 du décret n° 71-685 du 18 août 1971 relatif à la rémunération des cours professés dans les établissements pénitentiaires institue une indemnité d'enseignement en milieu pénitentiaire pour les personnels enseignants des premier et second degrés qui exercent tout ou partie de leurs fonctions dans des unités pédagogiques régionales en milieu pénitentiaire.

 

Il a par ailleurs relevé qu’aucune disposition législative ou réglementaire se rattachant au corps des professeurs des écoles auquel appartient l’intéressé ou au régime des enseignants exerçant des fonctions de responsable local d’enseignement en milieu pénitentiaire n’avait prévu l’attribution d’une autre indemnité que l’indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire.

 

Écartant l’argumentation de l’intéressé qui se prévalait de la circulaire interministérielle d’orientation n° 2011-239 du 8 décembre 2011 dès lors qu’elle n’a pas instauré, en tout état de cause, l’attribution de l’indemnité sollicitée au bénéfice des responsables locaux d’enseignement des centres de détention, le tribunal a jugé que le requérant ne pouvait se prévaloir d’un droit acquis au maintien d’un avantage financier illégal, que l’administration a toujours la faculté d’abroger sans préjudicier aux intérêts de son bénéficiaire, ni de la circonstance, à la supposer établie, que d’autres agents exerçant les mêmes fonctions dans d’autres académies en auraient bénéficié de manière indue.

 

Le tribunal a enfin précisé que l’intitulé du poste qu’occupait l’intéressé (« direction d’une école »), les mentions portées sur son relevé de carrière (« directeur d’établissement spécialisé »), ainsi que son inscription sur la liste d’aptitude aux fonctions de directeur d’école ne suffisaient pas à établir qu’il occupait les mêmes fonctions qu’un directeur d’école justifiant le versement du régime indemnitaire afférent ou qu’un directeur d’école spécialisée. carre

 

Personnels d’éducation et de surveillance

fleche  Décision de retrait de l’agrément pour l’encadrement des activités de natation dans le cadre scolaire – Motivation des actes administratifs – Dispositions de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration

T.A. Grenoble, 27 mars 2018, n° 1602221


Une éducatrice territoriale des activités physiques et sportives employée par une communauté d’agglomération a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la décision par laquelle le recteur de l’académie de Grenoble avait décidé de lui retirer l’agrément qu’il lui avait accordé pour l’encadrement des activités de natation dans le cadre scolaire.

 

La requérante faisait notamment valoir que la décision attaquée était insuffisamment motivée et ne satisfaisait pas aux exigences posées par les dispositions de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration (C.R.P.A.).

 

Le tribunal administratif a rappelé que les dispositions de l’article L. 211-2 du C.R.P.A. prévoient que les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent et que, à cet effet, les décisions qui retirent ou abrogent une décision créatrice de droits doivent être motivées.

 

Il a jugé que les décisions qui retirent un agrément à un intervenant encadrant des activités sportives dans un cadre scolaire sont au nombre de celles qui doivent être motivées en application de ces dispositions. En s’abstenant de préciser les éléments de droit fondant sa décision, le recteur de l’académie de Grenoble, n’avait donc pas satisfait aux exigences de motivation prévues par cet article législatif.

 

Le tribunal administratif de Grenoble a, en conséquence, annulé la décision du recteur d’académie pour illégalité externe. carre

 

QUESTIONS PROPRES AUX PERSONNELS DE L’ENSEIGNEMENT UNIVERSITAIRE

Enseignants-chercheurs

QUESTIONS COMMUNES

fleche Recrutement des enseignants-chercheurs – Comité de sélection – Jury d’examen lorsqu’il établit la liste des candidats qu’il souhaite entendre – Règles de composition et de quorum – Irrégularité concernant l’examen d’autres candidatures ne pouvant être utilement invoquée à l’encontre de la délibération écartant une candidature

C.E., 26 janvier 2018, n° 404004


Un requérant avait vu sa candidature à un poste de professeur des universités rejetée par le comité de sélection qui avait décidé de ne pas l’auditionner, conformément aux pouvoirs qu’il tient de l’article 9-2 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences. L’intéressé avait notamment demandé au Conseil d’État d’annuler la délibération du comité de sélection refusant de l’auditionner.

 

Le Conseil d’État a rejeté sa requête

 

Par cette décision du 26 janvier 2018, le Conseil d’État a apporté des précisions sur le fonctionnement et la composition, notamment sur la règle de quorum, du comité de sélection, lorsque, sur le fondement de l’article 9-2 du décret statutaire du 6 juin 1984, il examine les dossiers des candidats à une nomination et établit la liste des candidats qu’il souhaite entendre.

 

Après avoir rappelé les termes de l’article L. 952-6-1 du code de l’éducation, puis ceux de l’article 9-2 du décret du 6 juin 1984, le Conseil d’État a réaffirmé tout d’abord « qu’au stade de l’établissement de la liste des candidats qu’il souhaite entendre, le comité de sélection se prononce en qualité de jury d’examen, alors qu’après audition des candidats retenus, il se prononce en qualité de jury de concours, par avis motivé unique sur l’ensemble des candidats » (cf. C.E., 7 juin 2017, n° 382986, aux tables du Recueil Lebon, commenté dans la LIJ n° 200 de novembre 2017).

 

Il en résulte que, lors de la première phase d’examen des candidatures qui conduit le comité de sélection à établir la liste des candidats qu’il souhaite entendre, le principe d’unicité du jury de concours n’est pas applicable : comme l’a rappelé le Conseil d’État, aucune règle ni aucun principe n’impose que, lorsqu’il se prononce sur les mérites des candidats pour choisir, ou non, de les entendre, le comité de sélection statue dans une composition identique pour tous les candidats (cf. C.E., n° 382986, précédemment mentionnée).

 

En l’espèce, le comité de sélection était composé de dix membres, à raison de cinq membres extérieurs à l’établissement et de cinq membres internes à l’établissement. Lors de la séance au cours de laquelle le comité de sélection avait arrêté la liste des candidats retenus pour être auditionnés, deux de ses membres, dont l’un extérieur à l’établissement, étaient absents. Le Conseil d’État a relevé que cette double absence n’avait pas eu pour effet de porter atteinte aux règles de composition du comité de sélection et de quorum qui imposent la présence en séance de la moitié au moins des membres du comité de sélection et d’au moins la moitié de membres extérieurs à l’établissement.

 

Le Conseil d’État a ajouté, que si le requérant soutenait qu'un troisième membre du comité de sélection, extérieur à l'établissement, s'était abstenu de participer à cette délibération lorsqu’elle avait porté sur les décisions d’auditionner deux autres candidats que lui-même, l’irrégularité qui avait pu, le cas échéant, en découler, ne pouvait être utilement invoquée à l’encontre de la délibération en tant qu’elle refuse de procéder à l’audition du requérant lui-même.

 

Enfin, le Conseil d’État a rappelé le principe selon lequel il n’appartient pas au juge de l’excès de pouvoir de contrôler l’appréciation faite par un jury de la valeur des candidats, à la différence du contrôle de l’adéquation de la candidature au profil du poste qui fait l’objet d’un contrôle restreint à l’erreur manifeste d’appréciation (cf. C.E., 26 mars 2003, n° 232663, aux tables du Recueil Lebon ; C.E., 9 février 2011, n° 317314, aux tables du Recueil Lebon). carre

 

fleche Enseignants-chercheurs – Classement dans le corps des maîtres de conférences – Prise en compte d’activités de recherches à l’étranger en qualité de chercheur post-doctorant – Actes de recrutement et de gestion des personnels des universités – Décisions prises au nom de l’État par les présidents d’université sur délégation du ministre en application de l’article L. 951-3 du code de l’éducation – Université ayant la qualité d’observateur et non de partie à l’instance – Frais irrépétibles mis en conséquence à la charge ou au bénéfice de l’État et non de l’université

C. E., 1er juin 2018, n° 403554, aux tables du Recueil Lebon


Un maître de conférences contestait la décision par laquelle la présidente de l’université avait décidé son reclassement sur le fondement de l’article 14 du décret n° 2009-462 du 23 avril 2009 relatif aux règles de classement des personnes nommées dans les corps d'enseignants-chercheurs des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche relevant du ministre chargé de l'enseignement supérieur, en retenant pour moitié seulement une période de vingt-trois mois passés au Canada, sous couvert d’un contrat de travail en qualité de chercheur post-doctorant.

 

Le requérant soutenait que cette période qu’il avait passée au Canada devait, en application de l’article 5 du décret du 23 avril 2009, être prise en compte pour son classement dans le corps dans sa totalité et non pour moitié comme l’avait jugé la cour administrative d’appel de Versailles dans l’arrêt n° 14VE02977 du 19 juillet 2016 objet du pourvoi en cassation.

 

En premier lieu, après avoir rappelé les termes des articles 5, 14 et 15 du décret du 23 avril 2009, le Conseil d’État a jugé qu’il résulte de ces dispositions que « lorsqu’une personne remplissant les conditions prévues à l’article 5 du décret du 23 avril 2009 a effectué des recherches à l'étranger, dans un État non membre de la Communauté européenne ou non partie à l'accord sur l'Espace économique européen, le temps consacré à la recherche est pris en compte dans la limite de quatre ans prévue à cet article, sans préjudice, au-delà de cette limite, de la prise en compte des services remplissant les conditions prévues à l’article 14 du même décret ».

 

Le Conseil d’État a en conséquence retenu qu’en jugeant que les recherches effectuées au Canada, dans le cadre d’un contrat de travail, par le requérant, après l’obtention de son doctorat, d’une durée inférieure à quatre ans, relevaient exclusivement de l’article 14 du décret du 23 avril 2009, compte tenu du pays où ces recherches avaient été effectuées, la cour avait entaché son arrêt d’une erreur de droit.

 

En second lieu, après avoir cité les termes de l’article L. 951-3 du code de l’éducation qui permettent au ministre de déléguer par arrêté aux présidents des universités et aux présidents ou directeurs des autres établissements publics d'enseignement supérieur, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, tout ou partie de ses pouvoirs en matière de recrutement et de gestion des personnels titulaires, stagiaires et non titulaires de l’État qui relèvent de son autorité et qui prévoient que « les compétences ainsi déléguées aux présidents des universités s’exercent au nom de l’État et leur exercice est soumis au contrôle financier », le Conseil d’État a rappelé que, dès lors que les compétences ainsi déléguées aux présidents des universités s’exercent au nom de l’État, l’université ne peut pas être regardée comme ayant la qualité de défendeur dans l’instance en cause et que sa présence en qualité d’observateur ne lui confère pas davantage la qualité de partie, dès lors qu’elle n’aurait pas eu, à défaut d’être présente, qualité pour faire tierce opposition du présent arrêt.

 

Le Conseil d’État en a déduit que l’université ne pouvait, dans le présent litige, réclamer que soit mis à la charge du requérant le versement d’une somme en application des dispositions de l’article 761-1 du code de justice administrative, ni être condamnée à verser une somme sur ce fondement. Il a, en revanche, estimé que, dans les circonstances de l’espèce, il y avait lieu de mettre à la charge de l’État le versement de la somme demandée par le requérant en application de ces dispositions du code de justice administrative. carre

 

QUESTIONS PROPRES À CHAQUE CORPS ET CATÉGORIE

Questions propres aux personnels hospitalo-universitaires

fleche Personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires – Sanction disciplinaire – Faits indétachables de l’activité universitaire – Compétence exclusive de la juridiction spécialisée instituée par l’article L. 952-22 du code de l’éducation

C.E., 13 avril 2018, n° 406887, aux tables du Recueil Lebon


Un professeur des universités-praticien hospitalier avait été poursuivi devant la chambre disciplinaire de première instance d’Île-de-France de l’ordre des médecins à la suite d’une plainte déposée par le conseil départemental de la Ville de Paris de l’ordre des médecins. Cette plainte dénonçait, d’une part, le libellé d’un sujet d’examen donné par l’intéressé à ses étudiants et, d’autre part, les termes d’une tribune qu’il avait diffusée sur internet. La chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des médecins lui avait infligé un blâme en se fondant sur ces deux griefs.

 

La chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins avait rejeté l’appel du professeur contre cette sanction disciplinaire en estimant que même si le second grief n’était pas fondé, le premier grief justifiait à lui seul la sanction du blâme prononcée à son encontre. L’intéressé s’est pourvu en cassation contre cette décision.

 

Le Conseil d’État a tout d’abord cité les dispositions de l’article L. 952-2 du code de l’éducation, aux termes desquelles : « Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d'objectivité », et celles de l'article L. 952-22 du même code qui instituent, pour les membres du personnel enseignant et hospitalier, une juridiction disciplinaire nationale unique pour leurs deux activités hospitalière et universitaire.

 

Après avoir rappelé que l'article 22 du décret n° 84-135 du 24 février 1984 portant statut des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires fixe la composition de cette juridiction disciplinaire, composée pour la moitié de ses membres de professeurs des universités-praticiens hospitaliers et de maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers lorsqu'elle examine le cas d'un professeur des universités-praticien hospitalier, et que l’article 24-1 du même décret dispose que les compétences dévolues à cette juridiction disciplinaire « ne font pas obstacle à l'exercice de l'action disciplinaire, en raison des mêmes faits, devant la chambre de discipline du conseil de l'ordre professionnel dont il relève », le Conseil d’État a jugé qu’il résulte de ces dispositions, interprétées au regard du principe fondamental reconnu par les lois de la République de l’indépendance des enseignants-chercheurs, que si les professeurs des universités-praticiens hospitaliers ou les maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers sont susceptibles de faire l'objet de poursuites devant les juridictions de l'ordre dont ils relèvent pour tout fait lié à l'exercice de leurs fonctions, il n'en va toutefois pas de même pour ceux de ces faits qui seraient indétachables de leur activité universitaire, lesquels ne sont susceptibles de fonder régulièrement des poursuites que devant la juridiction spécialisée instaurée par l’article L. 952-22 du code de l'éducation.

 

En l’espèce, le Conseil d’État a relevé qu’il ressortait des termes mêmes de la décision attaquée que, pour infliger à M. X la sanction litigieuse, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins avait jugé que le libellé d'un sujet d'examen donné à ses étudiants, dans le cadre de son enseignement universitaire, avait méconnu les principes déontologiques qui résultent des articles R. 4127-3 et R. 4127-31 du code de la santé publique. Il en a déduit que l'agissement mis en cause par ce grief, portant exclusivement sur la connotation politique du libellé d'un sujet d'examen, n'était pas détachable des fonctions d'enseignement de M. X en sa qualité de professeur des universités et que par conséquent, ce grief n'était pas recevable devant la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins.

 

N.B. : Par cette décision du 13 avril 2018, le Conseil d’État vient préciser que les professeurs des universités-praticiens hospitaliers et les maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers ne peuvent être poursuivis devant les juridictions de l'ordre professionnel dont ils relèvent pour des faits qui sont indissociables de leurs fonctions universitaires, de tels faits relevant de la compétence exclusive de la juridiction disciplinaire unique instituée par l’article L. 952-22 du code de l’éducation. carre

 

Établissements d’enseignement privés

PERSONNELS

Maîtres contractuels

fleche Maîtres contractuels des établissements privés sous contrat – Contentieux relatif au paiement d’heures supplémentaires non autorisées par le recteur d’académie – Compétence de la juridiction administrative

Cass. soc., 28 mars 2018, nos 16-16571,16-16577, 16-16578 et 16-16579, au Bulletin


Plusieurs maîtres contractuels d’un lycée privé sous contrat avaient saisi la juridiction administrative de requêtes tendant à la condamnation de l’État au paiement d’heures supplémentaires qu’ils avaient effectuées  sans que le chef de l’établissement ait obtenu l’accord préalable du recteur d’académie et, par conséquent, irrégulièrement.

 

À la suite du rejet au fond de leurs requêtes par le tribunal administratif, les requérants avaient saisi la juridiction prud’homale des mêmes demandes, cette fois dirigées contre la personne morale de droit privé gestionnaire de l’établissement privé d’enseignement.

 

La cour d’appel, refusant de renvoyer l’affaire au Tribunal des conflits, avait rejeté leurs requêtes comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître au motif que leurs demandes avaient pour fondement des règles liées au statut d’agent public dont bénéficient les maîtres contractuels de l’enseignement privé sous contrat.

 

La chambre sociale de la Cour de cassation a validé l’analyse des juges du fond en jugeant que, dès lors que les enseignants avaient accompli les heures supplémentaires dont ils réclamaient le paiement en tant que maîtres contractuels d’un établissement d’enseignement privé sous contrat d’association avec l’État,  ils n’étaient pas, en leur qualité d’agents publics, liés à l’établissement par un contrat de travail, et ce, « quand bien même les heures supplémentaires avaient été accomplies du fait de l’annualisation du temps de travail à la demande du chef de l’établissement privé d’enseignement sans l’accord du rectorat ».

 

La Cour a en outre jugé que les juges du fond avaient à bon droit refusé de renvoyer au Tribunal des conflits – en prévention d’un conflit négatif – la question de l’ordre juridictionnel compétent pour connaître du litige dès lors que le tribunal administratif avait reconnu sa compétence en rejetant au fond les requêtes dont il était saisi.

 

N.B. : S’ils détiennent la qualité d’agents publics au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l’État, les maîtres contractuels des établissements d’enseignement privés sous contrat d’association peuvent accomplir certaines activités en dehors de leur temps de service d’enseignement.

 

S’agissant des heures de délégation syndicale qu’ils accomplissent pour l’établissement privé conformément aux dispositions du code du travail, lesquelles ne se confondent pas avec les décharges  de service accordées à ces personnels en leur qualité d’agents publics de l’État en application de l’article 16 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique, leur prise en charge financière incombe à l’établissement au sein duquel ces maîtres exercent les mandats prévus par le code du travail dans l’intérêt de la communauté de travail constituée par l’ensemble du personnel de l’établissement (cf. Cass. soc., 8 décembre 2016, n° 15-10165, au Bulletin, commentée dans la LIJ n° 197 de mars 2017). carre

 

fleche Nouvelle-Calédonie – Maîtres délégués des établissements privés sous contrat – Agents relevant d’un statut de fonction publique ou d’un statut de droit public (non) – Compétence de la juridiction judiciaire

T.C., 14 mai 2018, M. X c/ Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie et Vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie, n° C4121


Un enseignant recruté en qualité de maître délégué des établissements d’enseignement privés par le vice-rectorat de la Nouvelle-Calédonie, avait saisi le tribunal du travail de Nouméa d’une demande tendant à la condamnation de l’État à lui verser des dommages et intérêts à la suite du non-renouvellement de son contrat de travail.

 

Le tribunal du travail de Nouméa s’étant déclaré incompétent pour connaître du litige, l’enseignant intéressé avait saisi le tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie. Ce dernier, considérant au contraire que l’affaire relevait de la compétence de la juridiction judiciaire, avait, sur le fondement de l’article 32 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015 relatif au Tribunal des conflits et aux questions préjudicielles, renvoyé au Tribunal des conflits le soin de décider quel ordre de juridiction était compétent.

 

La décision du 14 mai 2018, par laquelle le Tribunal des conflits a jugé que le litige relevait de la compétence de la juridiction judiciaire, s’inscrit dans la droite ligne de sa jurisprudence relative à l’application du droit du travail local aux agents publics non titulaires en Nouvelle-Calédonie (T.C., 19 février 1996, Délégué du Gouvernement pour la Nouvelle-Calédonie c/ X, n° 02998, au Recueil Lebon ; T.C., 15 mars 1999, Délégué du Gouvernement pour la Nouvelle-Calédonie et les îles Wallis et Futuna, Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, n° 03146, au Recueil Lebon ; T.C., 15 novembre 2004, X c/ Institut de formation des personnels administratifs, n° C3423, aux tables du Recueil Lebon ; T.C., 12 avril 2010, Mlle X c/ État, n° C3747, au Recueil Lebon).

 

Il en résulte que si l’article Lp. 111-3 du code du travail de la Nouvelle-Calédonie exclut du champ d’application de ce code les « personnes relevant d’un statut de fonction publique ou d’un statut de droit public », le Tribunal des conflits juge de façon constante « qu’un agent contractuel de l’État exerçant en Nouvelle-Calédonie ne relève pas, au sens et pour l’application de ces dispositions, d’un statut de fonction publique ou d’un statut public ».

 

En outre, comme l’a déjà jugé le Tribunal des conflits dans une décision du 12 décembre 2011 (n° C3819), la circonstance que le contrat de travail de l’enseignant intéressé prévoyait l’applicabilité des dispositions du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 modifié relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’État (pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État) ne permet pas de regarder cet agent comme relevant d’un « statut de fonction publique ou d’un statut de droit public » au sens des dispositions précitées de l’article

Lp.  111-3 du code du travail de la Nouvelle-Calédonie.

 

N.B. : Par cet arrêt, le Tribunal des conflits applique pour la première fois sa jurisprudence relative à l’application du droit du travail local aux agents publics non titulaires en Nouvelle-Calédonie à un maître délégué recruté pour exercer des fonctions d’enseignant dans un établissement d’enseignement privé sous contrat. carre

 

fleche Établissements d’enseignement privés sous contrat – Résiliation d’un contrat d’enseignement d’un maître contractuel – Condamnation pénale pour des faits d’agressions sexuelles sur mineurs – Article L. 911-5 du code de l’éducation

T.A. Lille, 29 novembre 2017, n° 1502767


Un maître contractuel exerçant les fonctions de professeur de physique-chimie dans un collège privé sous contrat a demandé au tribunal administratif de Lille d’annuler l’arrêté par lequel le recteur de l’académie de Lille a résilié son contrat au motif qu’il avait été condamné pénalement pour des faits d’agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans par personne abusant de l’autorité de sa fonction.

 

Le tribunal administratif de Lille a d’abord rappelé que, pour l’application des dispositions de l’article L. 911-5 du code de l’éducation en vertu desquelles ne peuvent être employées dans un établissement d’enseignement du premier et du second degré ou un établissement d’enseignement technique, qu’ils soient publics ou privés, les personnes qui ont subi une condamnation judiciaire pour crime ou délit contraire à la probité et aux mœurs, il appartient à l’autorité compétente d’apprécier, sous le contrôle du juge, si les faits qui ont valu à la personne intéressée une condamnation judiciaire pour crime ou délit doivent être qualifiés de contraires à la probité ou aux mœurs (cf. C.E., 4 avril 2012, n° 356637).

 

Il appartenait donc en l’espèce au recteur d’académie, en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de recrutement des maîtres contractuels de l’enseignement privé sous contrat, de décider, le cas échéant, de la résiliation d’un contrat définitif d’enseignement sur le fondement des dispositions de l’article L. 911-5 du code de l’éducation.

 

Le tribunal a également rappelé que la décision de résiliation d’un contrat d’enseignement d’un agent qui résulte de sa condamnation judiciaire à raison d’un délit pour des faits qualifiés de contraires à la probité ou aux mœurs ne présente pas de caractère disciplinaire et, à ce titre, n’a pas à être entourée des garanties afférentes à la procédure disciplinaire.

 

Enfin, le tribunal a jugé que, dès lors que des faits pour lesquels l’agent a été condamné peuvent être qualifiés de « crime ou délit contraire à la probité ou aux mœurs », un recteur d’académie est tenu de prendre acte de son incapacité à être employé dans un établissement scolaire, et ce, quelles qu’en soient les conséquences sur sa situation personnelle (cf. C.A.A. Nantes, 14 avril 2011, n° 09NT01353).

 

Le tribunal administratif de Lille a donc rejeté la requête.

 

N.B. : Ce jugement est l’occasion de rappeler que les dispositions de l’article L. 911-5 du code de l’éducation, qui instituent dans certains cas une incapacité de plein droit pour être employé dans un établissement d’enseignement, s’applique aussi bien aux personnels des établissements publics qu’à ceux des établissements d’enseignement privés liés à l’État par contrat. carre

 

Constructions et marchés

EXÉCUTION DES MARCHÉS

fleche Marché public – Cession de créance – Régime particulier de notification des cessions de créance – Absence d’obligation de transmission au comptable public assignataire d’une notification adressée directement à un établissement public

C.E, 9 mars 2018, Société Banque Delubac et Cie, n° 407842, aux tables du Recueil Lebon


Un centre régional des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) avait attribué un marché public de travaux portant sur la réhabilitation d’une résidence universitaire à une société de construction qui avait elle-même sous-traité un lot de ce marché à une autre société. Cette dernière société avait cédé à une banque les créances qu’elle détenait en sa qualité de sous-traitante sur le CROUS, en application des articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier.

 

Ayant demandé en vain au tribunal administratif de Nice, puis à la cour administrative d’appel de Marseille de condamner le CROUS à lui verser une somme de 44 952,21 euros, au titre de l’une de ces créances ou, à défaut, à titre de dommages et intérêts, la banque a saisi le Conseil d’État d’un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour.

 

Après avoir rappelé les dispositions des articles L. 313-23, L. 313-27, L. 313-28 et R. 313-17 du code monétaire et financier et de l’article 108 du code des marchés publics, alors en vigueur, relatives aux cessions de créances professionnelles, qui prévoient notamment que la notification des créances doit être faite au comptable public assignataire, le Conseil d’État a jugé que ces dispositions, qui s’appliquent également aux créances détenues sur des personnes morales de droit public, instituent un régime particulier de notification, y compris lorsque cette notification est accomplie auprès d’une autorité administrative. Il a ajouté qu’une telle notification ne tend pas à la prise d'une décision par cette autorité administrative, mais constitue une information destinée à faire obstacle à ce qu'elle règle sa dette auprès d'une autre personne que l'organisme cessionnaire, ce dont il a conclu que cette notification n'entre pas dans le champ d'application des articles 18 et 20 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, aujourd’hui repris aux articles L. 110-1 et L. 114-2 du code des relations entre le public et l’administration qui prévoient que lorsqu’une demande est adressée à une autorité administrative incompétente, cette dernière doit la transmettre à l’autorité administrative compétente.

 

En l’espèce, il ressortait des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Banque Delubac et Cie avait notifié la cession de créance en litige directement au CROUS et non à son comptable assignataire. Le Conseil d’État en a déduit que la cour administrative d’appel n’avait pas commis d’erreur de droit en jugeant qu’une telle notification ne constituait pas une demande au sens et pour l'application des dispositions de la loi du 12 avril 2000 et que la société requérante ne pouvait pas par conséquent utilement invoquer la faute qu'aurait commise le CROUS en s'abstenant de la transmettre à son comptable.

 

Il a, en conséquence, rejeté le pourvoi en cassation dont il était saisi. carre

 

Procédure contentieuse

COMPÉTENCE DES JURIDICTIONS

fleche Centre national d’enseignement à distance (CNED) – Établissement public à caractère administratif – Formation continue – Compétence de la juridiction administrative

T.C., 14 mai 2018, n° C4120, aux tables du Recueil Lebon


Saisi d’un litige concernant une inscription à une formation préparant au certificat d’aptitude professionnelle de la spécialité « petite enfance », et au concours d’accès au cadre d’emplois des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles, proposées par le CNED, le tribunal administratif de Poitiers a renvoyé au Tribunal des conflits le soin de déterminer l’ordre de juridiction compétent. Le tribunal administratif considérait en effet que la circonstance qu’une telle formation était également proposée par des prestataires de formation relevant du secteur privé était susceptible de conduire à exclure le rattachement du contrat en cause à la mission de service public administratif confiée au CNED.

 

Le Tribunal des conflits a jugé que la formation à laquelle s’était inscrite la requérante relevait bien de la mission de service public administratif  du CNED, établissement public administratif chargé, en application de l’article R. 426-2 du code de l’éducation, de dispenser un enseignement et des formations à distance dans le cadre de la formation initiale et de la formation professionnelle tout au long de la vie, à tous les niveaux de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur dans le cadre de formations complètes ou particulières.

 

Le litige, dès lors qu’il opposait un établissement public assurant un service public administratif à un usager, relevait donc bien de la compétence du juge administratif.

 

N.B : Le Tribunal des conflits avait déjà eu l’occasion de se prononcer sur une question similaire à propos des contrats de formation conclus par l’École nationale d’ingénieurs de Brest, établissement public à caractère administratif chargé de dispenser des enseignements supérieurs relevant de la formation initiale ou de la formation continue des ingénieurs. Il avait jugé que, dans la mesure où ces contrats de formation portent sur une prestation de formation continue qui constitue l’objet même du service public administratif dont cet établissement est chargé, les litiges relatifs à ces contrats à caractère administratif relèvent de la compétence des juridictions de l’ordre administratif (T.C., 29 décembre 2004, X c/ École nationale d’ingénieurs de Brest, n° C3437, au Recueil Lebon). carre

 

RECEVABILITÉ DES REQUÊTES

fleche Introduction de l’instance – Point de départ des délais de recours – Décision mise en ligne sur le système d’information et d’aide pour les promotions (SIAP) – Publication permettant l’opposabilité au requérant (oui)

C.A.A. Bordeaux., 20 mars 2018, n° 16BX00203


Une professeure de lycée professionnel avait sollicité son inscription au titre de l’année 2013 sur la liste d’aptitude pour l’accès au corps des professeurs certifiés dans les disciplines « Histoire-Géographie et Lettres modernes ». Le recteur d’académie n’avait pas proposé au ministre chargé de l’éducation nationale son inscription sur la liste d’aptitude et avait expressément rejeté, le 9 juillet 2013, le recours gracieux qu’elle avait formé contre cette décision.

 

Par un jugement du 17 novembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux avait rejeté les conclusions de cette professeure tendant à l’annulation de l’avis défavorable émis par le recteur d’académie sur sa candidature, de la décision du même recteur de ne pas proposer son inscription sur la liste d’aptitude établie au titre de l’année 2013 et de la liste d’aptitude pour l’accès au corps des professeurs certifiés au titre de l’année 2013comme irrecevables à défaut notamment pour la requérante d’avoir produit la liste d’aptitude en application de l’article R. 412-1 du code de justice administrative.

 

Par un arrêt rendu le 20 mars 2018, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté l’appel formé par cette enseignante contre le jugement du 17 novembre 2015.

 

La cour a d’abord cité les dispositions de l’article R. 421-1 du code de justice administrative avant de rappeler que la publication d’une décision administrative dans un recueil autre que le Journal officiel fait courir le délai de recours contentieux à l’égard de tous les tiers si l’obligation de publier cette décision dans ce recueil résulte d’un texte législatif ou réglementaire lui-même publié au Journal officiel de la République française et que, en l’absence d’une telle obligation, cet effet n’est attaché à la publication que si le recueil peut, eu égard à l’ampleur et aux modalités de sa diffusion, être regardé comme aisément consultable par toutes les personnes susceptibles d’avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester la décision.

 

La cour a ensuite relevé que, selon les indications du ministre de l’éducation nationale que la professeure de lycée professionnel n’avait pas contestées, les résultats des opérations de promotion des personnels enseignants, d’éducation et d’orientation pour la rentrée scolaire 2013-2014, dont la liste d’aptitude d’accès au corps des professeurs certifiés établie par arrêté ministériel du 21 juin 2013, avaient été mis en ligne le 26 juin 2013 sur le site internet du ministère chargé de l’éducation nationale (education.gouv.fr), via le système d’information et d’aide pour les promotions (SIAP) auquel l’intéressée avait librement accès.

 

Elle a retenu qu’eu égard à l’objet et à la nature du SIAP qui est un système d’information et d’aide pour les promotions destiné aux personnels enseignants, d’éducation et d’orientation du second degré et instituteurs et professeurs des écoles, et à ses conditions d’accessibilité et d’utilisation, notamment pour les professeurs, cette publication avait fait courir les délais de recours à l’égard de l’intéressée.

 

Dans la mesure où la demande présentée par l’intéressée contre la liste d’aptitude n’avait été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 11 septembre 2013, soit après l’expiration du délai de recours contentieux de deux mois courant à compter du 26 juin 2013, et que ce délai n’avait pas pu être prorogé par le recours gracieux exercé auprès du recteur avant la publication des résultats que l’enseignante contestait et qui avait été rejeté expressément le 9 juillet 2013, la demande de la professeure de lycée professionnel avait donc bien été présentée tardivement.

 

N.B. : Conformément à la jurisprudence du Conseil d’État en matière de publication permettant l’opposabilité aux tiers d’une décision administrative (C.E. Section, 27 juillet 2005, n° 259004, au Recueil Lebon), la cour, se livrant à une appréciation concrète des circonstances de l’espèce, juge que la date de mise en ligne d’une décision du ministre de l’éducation nationale sur le système d'information et d'aide pour les promotions (SIAP)accessiblesureducation.gouv.frfait courir les délais de recours contentieux à l’égard de tous les personnels enseignants, d’éducation et d’orientation du second degré et instituteurs et professeurs des écoles, dès lors que ce support de publication peut être regardé, eu égard à l’ampleur et à ses modalités de diffusion, comme aisément consultable par les personnels susceptibles d'avoir un intérêt leur donnant qualité pour agir contre la décision. carre

 

fleche Fonctionnaires et agents publics – Personnel enseignant – Avancement de grade – Tableau d’avancement de grade – Caractère indivisible lorsque le tableau d’avancement comporte un nombre maximum d’agents – Conséquence – Irrecevabilité des conclusions d’un agent tendant à l’annulation du tableau d’avancement en tant qu’il n’y figure pas

C.A.A. Nantes, 13 avril 2018, n° 16NT01248


Une professeure certifiée de classe normale avait sollicité son inscription au tableau d’avancement à la hors classe. Après avis de la commission administrative paritaire académique compétente, le recteur d’académie avait arrêté le tableau d’avancement, tableau sur lequel la professeure ne figurait pas. Cette dernière avait formé un recours gracieux contre cette décision que le recteur avait rejeté.

 

L’enseignante avait alors demandé au tribunal administratif de Caen d’annuler pour excès de pouvoir l’avis de la commission administrative paritaire académique ainsi que le refus du recteur de l’inscrire sur le tableau d’avancement, ensemble la décision rejetant son recours gracieux. Par un jugement du 16 février 2016, le tribunal avait rejeté les conclusions dirigées contre l’avis de ladite commission comme irrecevables, mais avait annulé la décision du recteur d’académie.

 

Saisie d’un recours présenté par le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, la cour administrative d’appel de Nantes a annulé ce jugement et rejeté la demande de l’enseignante.

 

Après avoir rappelé les dispositions de l’article 34 du décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 relatif au statut particulier des professeurs certifiés, dans leur rédaction en vigueur jusqu’au 25 mai 2016, et de l’article 1er du décret n° 2005-1090 du 1er septembre 2005 relatif à l’avancement de grade dans les corps des administrations de l’État, la cour a relevé que le tableau d’avancement au grade de hors classe du corps des professeurs certifiés comporte un nombre maximum de fonctionnaires promus et présente de ce fait un caractère indivisible.

 

La cour a par conséquent jugé que les conclusions présentées par l’enseignante tendant à l’annulation pour excès de pouvoir du tableau d’avancement en tant qu’il ne comporte pas son nom étaient irrecevables.

 

N.B. : Cet arrêt fait application de la jurisprudence du Conseil d’État qui considère que les conclusions présentées par un fonctionnaire tendant à l’annulation d’un tableau d’avancement en tant qu’il n’y figure pas sont irrecevables dès lors que le tableau d’avancement doit comporter un nombre maximum d’agents et présente ainsi un caractère indivisible (C.E., 27 avril 2011, n° 326936, aux tables du Recueil Lebon). carre

 

POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE

fleche Éviction illégale du service – Évaluation du préjudice – Office du juge

C.E., 28 mars 2018, n° 398851, aux tables du Recueil Lebon


Un agent contractuel de l’École des Mines de Nantes avait demandé au tribunal administratif de Nantes d’annuler la sanction disciplinaire du licenciement qui lui avait été infligée par le directeur de l’école et de condamner l’école à l’indemniser du préjudice résultant de l’illégalité de cette décision.

 

Par un jugement du 19 juillet 2013, le tribunal administratif de Nantes avait annulé la décision du directeur de l’école, condamné l’école à indemniser partiellement le requérant du préjudice subi et avait rejeté le surplus de ses demandes.

 

Par un arrêt rendu le 1er décembre 2015, la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté l’appel formé par l’intéressé contre ce jugement en  tant qu’il rejetait le surplus de ses conclusions en retenant que le comportement excessif de l’agent, notamment ses outrances verbales et la remise en cause des décisions du directeur de l’école, était fautif et exonérait l’administration d’une partie de sa responsabilité.

 

Saisi d’un pourvoi en cassation par l’agent, le Conseil d’État a rejeté son pourvoi  : il a retenu que, alors même qu’elle n’avait pas indiqué la sanction qui aurait pu être légalement prononcée à l’encontre de l’agent, la cour administrative d’appel n’avait pas commis d’erreur de droit, ni entaché son arrêt d’une insuffisance de motivation en jugeant que les fautes relevées à l’encontre de celui-ci étaient de nature à exonérer l’administration d’une partie de sa responsabilité.

 

Le Conseil d’État a en effet rappelé qu’en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu’il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre et que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l’illégalité commise présente, compte tenu de l’importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l’encontre de l’intéressé, un lien direct de causalité (cf. C.E. Section, 6 décembre 2013, Commune d’Ajaccio, n° 365155, au Recueil Lebon, LIJ n° 183, mai 2014).

 

Il a en outre précisé que, « pour apprécier à ce titre l’existence d’un lien de causalité entre les préjudices subis par l’agent et l’illégalité commise par l’administration, le juge peut rechercher si, compte tenu des fautes commises par l’agent et de la nature de l’illégalité entachant la sanction, la même sanction, ou une sanction emportant les mêmes effets, aurait pu être légalement prise par l’administration, mais que, en revanche, le juge n’est jamais tenu, pour apprécier l’existence ou l’étendue des préjudices qui présentent un lien direct de causalité avec l’illégalité de la sanction, de rechercher la sanction qui aurait pu être légalement prise par l’administration ».

 

N.B. : La décision du 28 mars 2018 du Conseil d’État ici signalée rappelle les contours de l’office du juge saisi de conclusions tendant à l’indemnisation du préjudice subi par un agent exclu irrégulièrement du service à la suite d’une faute disciplinaire.

 

Pour apprécier l’étendue du préjudice subi par l’agent irrégulièrement sanctionné ainsi que le caractère direct du lien de causalité entre ce préjudice et le motif d’annulation de la sanction prononcée par l’administration afin de déterminer le quantum de l’indemnisation à laquelle a droit cet agent, le juge doit tenir compte de la faute qu’il a commise et de son degré de gravité. Cette faute commise par l’agent est en effet de nature à atténuer la responsabilité de l’administration.

 

Le juge n'est, en revanche, jamais tenu, pour apprécier l'existence ou l'étendue des préjudices qui présentent un lien direct de causalité avec l'illégalité de la sanction, de rechercher la sanction qui aurait pu être légalement prise par l'administration. carre

 

Actes

fleche Consultation – Projet de texte réglementaire – Consultation anticipée d’un organisme consultatif avant promulgation de la loi fondant la compétence du pouvoir réglementaire

C.E., 17 novembre 2017, Syndicat national des établissements et résidences privés pour les personnes âgées, n° 400939 , aux tables du Recueil Lebon


Saisi par le Syndicat national des établissements et résidences privés pour les personnes âgées (SYNERPA) d’un recours pour excès de pouvoir contre le décret n° 2015-1873 du 30 décembre 2015 définissant le taux maximal d’évolution annuelle des prix des prestations relatives à l’hébergement de certains établissements accueillant des personnes âgées, décret pris en application de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, le Conseil d’État a été amené à préciser les obligations de l’administration lorsqu’elle consulte pour avis un organisme sur un projet de texte réglementaire avant la promulgation de la loi dont ce texte fait application.

 

Il a jugé que si l'organisme rend son avis sur un projet de texte réglementaire avant la promulgation de la loi pour l'application de laquelle ce texte doit être pris, l'autorité compétente n'est tenue, dans l'hypothèse d'une consultation obligatoire, de le saisir de nouveau que si le texte législatif porté à la connaissance de ses membres a ultérieurement fait l'objet d'une modification susceptible d'avoir une incidence sur l'appréciation à laquelle l’organisme consultatif s'est livré.

 

Il a précisé qu’en revanche, dans l'hypothèse d'une consultation facultative, l'administration n'est pas tenue de saisir de nouveau l'organisme consulté, mais apprécie librement l'utilité pour elle d'être éclairée par un nouvel avis compte tenu de la modification du texte législatif. En outre, dans cette hypothèse d'une consultation facultative, elle conserve la possibilité d'apporter à son projet les modifications qui lui paraissent utiles, quelle qu'en soit l'importance, sans être dans l'obligation de saisir à nouveau l'organisme consulté.

 

Dans le cas d’espèce, le Comité national des retraités et des personnes âgées (C.N.R.P.A.) avait été consulté sur le projet de décret et avait rendu son avis trois jours après l’adoption définitive par le Parlement de la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement, promulguée le 28 décembre 2015 suivant, loi sur le fondement de laquelle le décret contesté avait été adopté.

 

Le Conseil d’État a jugé que, dès lors que la consultation du C.N.R.P.A. sur ce projet de décret n’était pas obligatoire, le Premier ministre pouvait apporter au projet de décret, après la consultation de cet organisme, toutes les modifications qui lui semblaient utiles, quelle qu’en soit l’importance, sans être tenu de consulter à nouveau cet organisme consultatif.

 

Le Conseil d’État a par conséquent écarté le moyen du syndicat requérant selon lequel le comité aurait été irrégulièrement consulté au motif que la loi fondant la compétence du pouvoir réglementaire n’était pas encore promulguée et que le projet de décret soumis au comité aurait été ultérieurement modifié. carre

 

Technologies de l’information et de la communication (TIC)

FICHIERS (TRAITEMENTS AUTOMATISÉS DE DONNÉES)

fleche Témoins de connexion (cookies) – Traitement de données à caractère personnel – Responsable de traitement – Obligation d’information des personnes concernées

C.E., 6 juin 2018, Société Éditions Croque Futur, n° 412589, au Recueil Lebon


Le Conseil d’État a été saisi par l’éditeur d’un site internet d’une demande tendant à l’annulation d’une délibération de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) lui infligeant une sanction pécuniaire, notamment pour manquement à l’obligation d’information des utilisateurs en cas de dépôt sur leurs terminaux de témoins de connexion, aussi appelés « cookies ».

 

Par cette décision, le Conseil d’État a jugé que l’utilisation de cookies constitue un traitement de données à caractère personnel devant respecter les dispositions de l’article 6 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

 

Il a par ailleurs précisé que les éditeurs des sites internet sur lesquels les cookies sont déposés doivent être considérés comme responsables de traitement, y compris lorsqu’ils sous-traitent à des tiers la gestion de cookies mis en place pour leur compte ou lorsqu’ils autorisent d’autres tiers à déposer et à utiliser des cookies à l’occasion de la visite de leur site internet.

 

Le Conseil d’État a par ailleurs rappelé qu’aux termes des dispositions du II de l’article 32 de la loi du 6 janvier 1978, les utilisateurs des sites internet doivent être informés de manière claire et complète par le responsable du traitement des finalités des cookies qui sont susceptibles d’être déposés, notamment sous forme de fichiers, sur leurs terminaux lorsqu’ils visitent un site internet et des moyens dont ils disposent pour s'y opposer.

 

Il a en outre précisé que le consentement des utilisateurs doit être recueilli avant tout dépôt de cookies sur le site internet, sauf dans l’hypothèse où ces témoins de connexion sont essentiels au fonctionnement technique du site ou lorsqu’ils correspondent à la fourniture d'un service de communication en ligne à la demande expresse de l'utilisateur.


Le Conseil d’État a estimé à cet égard que les cookies utilisés à des fins publicitaires, nécessaires à la viabilité économique du site, ne pouvaient pas être regardés comme étant strictement nécessaires à la fourniture du service de communication en ligne.

 

N.B : En jugeant que les cookies sont des données à caractère personnel, cette décision du Conseil d’État va dans le sens des dispositions du règlement 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données. Le 1) de l’article 4 du règlement mentionne en effet expressément les identifiants en ligne comme étant des données à caractère personnel. Or, le considérant 30 de ce règlement précise que les témoins de connexion ou « cookies » sont des identifiants en ligne. carre

 

fleche Traitement de données à caractère personnel – Administrateur de page d’un réseau social – Témoins de connexion (cookies) – Responsabilité conjointe du traitement

C.J.U.E., 5 juin 2018, Unabhängiges Landeszentrum für Datenschutz Schleswig-Holstein c/ Wirtschaftsakademie Schleswig-Holstein GmbH, n° C-210/16


Une société allemande spécialisée dans le domaine de l’éducation proposait des services de formation en ligne. Dans ce cadre, elle avait créé une page « fan » hébergée sur le réseau social Facebook, qui lui permettait de communiquer des informations de toute nature, et dont elle était l’administrateur. À ce titre, elle pouvait notamment obtenir des données statistiques quant aux visiteurs de sa page. Les données permettant la réalisation de ces statistiques étaient recueillies par le biais de cookies sauvegardés sur le disque dur de l’ordinateur des utilisateurs (ou sur tout autre support utilisé) qui visitaient la page fan,que ces derniers disposent ou non d’un compte Facebook. Or, ni Facebook, ni l’administrateur de la page n’avaient informé de ce traitement de données à caractère personnel les visiteurs de cette page. C’est dans ces conditions que l’autorité régionale indépendante de protection des données du Schleswig-Holstein, en Allemagne, avait alors ordonné à la société la désactivation de sa page fan.

 

La société avait alors déposé un recours contre cette décision, qui a amené la Cour administrative fédérale d’Allemagne à saisir la Cour de justice de l’Union européenne (C.J.U.E.) de plusieurs questions préjudicielles et, notamment, celle de savoir si l’administrateur d’une page fan Facebook peut être qualifié de responsable conjoint du traitement de données à caractère personnel.

 

La Cour de justice, suivant les conclusions de l’avocat général, a répondu par l’affirmative.

 

La C.J.U.E. a en effet considéré qu’en tant qu’administrateur de la page fan, la société allemande avait accepté la politique d’utilisation des cookies de Facebook (via l’acceptation des conditions générales d’utilisation) et avait par ailleurs la possibilité de paramétrer les critères à prendre en compte pour l’établissement de statistiques (âge, sexe, situation professionnelle ou amoureuse, situation géographique, etc.), ce qui lui permettait de cibler son public et d’influer sur le traitement des données réalisé par Facebook. La C.J.U.E. en a déduit qu’il y avait bien détermination conjointe des finalités et des moyens du traitement des données à caractère personnel des visiteurs de la page fan, au sens du d) de l’article 2 de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données applicable en l’espèce. La Cour a donc conclu que la société administrateur de la page fan hébergée sur Facebook doit être qualifiée de responsable de ce traitement de données au sein de l’Union, conjointement avec Facebook, au sens de l’article 2, sous d), de la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995.

 

La C.J.U.E. a par ailleurs ajouté qu’était sans influence sur la qualification de responsable conjoint du traitement de données le fait que les statistiques fournies par Facebook à la société allemande étaient anonymisées, dans la mesure où l’établissement de ces statistiques reposait sur la collecte et le traitement préalable de cookies installés sur l’ordinateur des personnes ayant visité la page fan administrée par cette société.

 

La C.J.U.E. a en outre souligné que la directive 95/46/CE du 24 octobre 1995 n’imposait pas que les responsables conjoints du traitement de données aient tous accès aux données à caractère personnel des personnes concernées. Partant, elle a considéré que l’administrateur d’une page fan peut être qualifié de « responsable conjoint » du traitement, tout en précisant que cela n’induit pas automatiquement des niveaux de responsabilité équivalents pour chacun de ces responsables conjoints. Les juridictions nationales ont en effet la possibilité de considérer qu’un des responsables conjoints du traitement l’est à titre principal et l’autre à titre secondaire.

 

N.B. : Le présent arrêt est rendu sous l’empire du droit antérieur au règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données (dit « règlement général sur la protection des données » : R.G.P.D.), mais ses apports lui sont parfaitement transposables, dans la mesure où les deux textes (R.G.P.D. et directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995) sont très proches sur ces questions.

 

Par cette décision, la C.J.U.E. conforte l’objectif phare du droit de l’Union européenne dans le domaine de la protection des données personnelles : assurer un degré de protection élevé aux personnes concernées, ce qui passe par une appréciation extensive des responsabilités des différents acteurs et, en l’espèce, celle de l’administrateur d’une page hébergée sur un réseau social. carre

 

Droit communautaire

APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF

fleche  Renvoi préjudiciel – Directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Clauses abusives dans les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur – Notion de « professionnel » en droit communautaire – Contrats conclus avec un étudiant – Étudiant associé à un consommateur – Établissement d’enseignement supérieur dont le financement est assuré, pour l’essentiel, par des fonds publics

C.J.U.E., 17 mai 2018, Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen VZW c/ Susan Romy Jozef Kuijpers, n° C-147/16


Une étudiante inscrite au Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen VZW, (ci-après  « KdG »), établissement d’enseignement libre établi à Anvers (Belgique), avait conclu avec cet établissement un contrat de remboursement calculé selon un plan d’apurement sans intérêt pour une somme totale de 1 546 euros, en vue de s’acquitter de ses droits d’inscription et des frais liés à un voyage d’études. Ce contrat prévoyait également un intérêt de 10 % par an en cas de défaut de paiement ainsi qu’une indemnité pour les frais de recouvrement.

 

En 2015, l’étudiante n’ayant pas remboursé sa dette à l’établissement, ce dernier l’a assignée devant le juge de paix d’Anvers.

 

Ce tribunal a saisi la Cour de justice de l’Union européenne d’une question préjudicielle au titre de l’article 267 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, tendant à ce que la Cour  examine notamment si le contrat conclu entre l’établissement et l’étudiante relève du champ d’application de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs et détermine si un établissement d’enseignement supérieur dont le financement est assuré, pour l’essentiel, par des fonds publics, doit être considéré comme un « professionnel » au sens de cette directive.

 

Par cet arrêt du 17 mai 2018, la Cour a tout d’abord jugé que la notion d’« entreprise », telle qu’utilisée dans le droit belge sur les clauses abusives, doit être interprétée par le juge national d’une manière conforme à celle de « professionnel », à laquelle recourt la directive 93/13, et notamment à la définition figurant à l’article 2, sous c), de cette dernière.

 

La Cour a ensuite jugé qu’en vertu de l’article 2, sous c), de la directive 93/13, la notion de « professionnel » est définie comme visant toute personne physique ou morale qui, dans les contrats relevant de ladite directive, agit dans le cadre de son activité professionnelle, qu’elle soit publique ou privée. Par conséquent, la directive 93/13 s’applique également aux activités professionnelles à caractère public.

 

La Cour a par ailleurs relevé qu’en tout état de cause, l’affaire en question ne porte pas directement sur la mission d’enseignement d’un établissement d’enseignement supérieur, mais sur une prestation fournie par un tel établissement, à titre complémentaire et accessoire de son activité d’enseignement, consistant à offrir, au moyen d’un contrat, un apurement sans intérêts de sommes qui lui sont dues par une étudiante. Or, a jugé la Cour, une telle prestation revient, par nature, à consentir des facilités de paiement d’une dette existante et constitue, fondamentalement, un contrat de crédit. La Cour en a conclu qu’il y a lieu de considérer que, en fournissant, dans le cadre dudit contrat, une telle prestation complémentaire et accessoire de son activité d’enseignement, un établissement tel que le KdG agit en tant que « professionnel » au sens de la directive 93/13, et que le contrat relatif à cette prestation relève du champ d’application de cette directive.

 

N.B. : La directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, modifiée par la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, modifiant la directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, contient en annexe une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives. carre

 

Autres jurisprudences

fleche Nomination aux fonctions de directeur général d’un établissement public – Procédure de recrutement – Examen des candidatures par un comité de recrutement chargé de donner un avis à l’autorité de nomination – Existence de relations de nature professionnelle entre des membres de ce comité et le candidat retenu – Absence de manquement au principe d’impartialité

C.E., 26 janvier 2018, n° 401796, aux tables du Recueil Lebon


Dans le cadre d’une procédure de recrutement du directeur général d’un établissement public précédée d’un examen des candidatures par un comité de recrutement chargé de donner un avis à l’autorité de nomination, un candidat évincé a demandé au Conseil d’État d’annuler le décret de nomination du candidat finalement retenu au motif que ce dernier avait entretenu auparavant des relations de nature professionnelle avec certains membres du comité.

 

Le Conseil d’État a considéré que s'il n'était pas contesté que certains des membres siégeant au sein de ce comité de recrutement connaissaient préalablement la candidate finalement retenue pour l'avoir côtoyée, pour l'un, alors qu'elle exerçait au sein d’une entreprise et, pour trois autres, dans le cadre du conseil d'administration de l’établissement public concerné au sein duquel elle siégeait en qualité de personnalité qualifiée, leur présence au sein de l'organe consultatif chargé d'examiner des candidatures ne pouvait être regardée par elle-même comme caractérisant un défaut d'impartialité au seul motif qu'ils avaient auparavant entretenu des relations de nature professionnelle avec cette candidate. Il a relevé qu’au demeurant, il ne ressortait pas des pièces du dossier que l'avis émis par le comité de recrutement soit intervenu pour des motifs étrangers à la valeur respective des candidats révélant de la part de ses membres un manque d'impartialité.

 

Le Conseil d’État a en outre jugé que, alors qu'aucune disposition n'interdit à un membre du conseil d'administration de l’établissement public considéré de se porter candidat au poste de directeur général de cet établissement public, la circonstance que la candidate retenue pour ce poste était membre du conseil d'administration ne caractérisait, par elle-même, aucune rupture d'égalité entre les candidats.

 

N.B. : Cette décision peut être rapprochée de celle par laquelle le Conseil d’État, à propos du recrutement d’un professeur des universités, a jugé que la présence au sein de commissions de spécialistes (devenues comités de sélection) d’un professeur ayant examiné la candidature de deux personnes travaillant dans son laboratoire ne peut être regardée par elle-même comme entachant d’irrégularité la délibération de ces commissions (C.E., 23 avril 1997, n° 167862, aux tables du Recueil Lebon).

 

Sur la question du respect du principe d’impartialité par le comité de sélection, voir l’« Étude de la jurisprudence du Conseil d’État sur la question de l’impartialité des comités de sélection pour le recrutement des enseignants-chercheurs » (rubrique Le Point sur, LIJ n° 199, juillet 2017). Voir également la décision du Conseil d’État du 7 juin 2017, n° 382986, aux tables du Recueil Lebon, commentée dans la LIJ n° 200 de novembre 2017. carre



  jurisprudence   Consultations
 

Enseignement scolaire

SECOND DEGRÉ

Administration et fonctionnement des établissements scolaires

fleche Logiciels informatiques – Prise en charge des dépenses – Filières professionnelles – Répartition des compétences entre l’État et la région

Note DAJ A1 n° 2018-066 du 26 février 2018


La DAJ a été interrogée sur la répartition des compétences entre l’État et la région en matière de prise en charge des dépenses relatives aux logiciels informatiques utilisés en lycée dans certaines filières professionnelles. Elle a apporté les précisions suivantes.

 

Aux termes de l’article L. 214-6 du code de l’éducation, la région a la charge des lycées et établissements d’éducation spéciale, pour lesquels elle assure notamment « l’acquisition et la maintenance des infrastructures et des équipements, dont les matériels informatiques et les logiciels prévus pour leur mise en service, nécessaires à l’enseignement et aux échanges entre les membres de la communauté éducative ».

 

En application de l’article L. 211-8 du même code : « L'État a la charge : / (…) / 5° Des dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique dans les collèges, les lycées et les établissements d'éducation spéciale, dont celles afférentes aux ressources numériques, incluant les contenus et les services, spécifiquement conçues pour un usage pédagogique, ainsi que de la fourniture des manuels scolaires dans les collèges, les établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole mentionnés à l'article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime et les établissements d'éducation spéciale et des documents à caractère pédagogique à usage collectif dans les lycées professionnels / (…). »

 

Il résulte de ces dispositions que la région a la charge des logiciels qui se révèlent indispensables au fonctionnement du matériel informatique des lycées.

 

Concrètement, il s’agit des logiciels dits « pilotes » (par exemple, selon le prestataire, pour des imprimantes) ou des systèmes d’exploitation (par exemple, Windows pour les ordinateurs), et de l’ensemble des logiciels permettant la communication entre les différentes composantes du matériel connecté au serveur informatique de l’établissement (dont le service de messagerie électronique).

 

Les outils de traitement de texte et les tableurs informatiques (par exemple les logiciels Word et Excel), susceptibles d’être installés sur tout poste informatique de l’établissement, sont également au nombre des matériels et logiciels informatiques dont l’acquisition est à la charge de la région en application de l’article L. 214-6 du code de l’éducation.

 

En revanche, les logiciels conçus spécifiquement pour un usage pédagogique et utilisés comme support de l’enseignement avec les élèves afin de leur permettre l’apprentissage dans une matière qui leur est enseignée doivent être pris en charge par l’État.

 

Dans les filières professionnelles, les logiciels spécifiquement conçus pour un usage pédagogique s’entendent, au regard de leurs caractéristiques pratiques, des logiciels dont les élèves ont vocation à manipuler les fonctionnalités en milieu professionnel, ou d’applications de simulation informatique ayant pour objet de donner la possibilité aux élèves d’acquérir les connaissances qui leur seront nécessaires en milieu professionnel. carre

 

Enseignement supérieur et recherche

ADMINISTRATION ET FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Questions propres aux différents établissements

fleche Délivrance d’une formation à l’étranger – Possibilité de déléguer à un État étranger la gestion administrative et financière de cette formation

Note DAJ B1 n° 2018-27 du 23 avril 2018


Une université a demandé à la direction des affaires juridiques s’il était légalement possible de déléguer à un État étranger la gestion administrative et financière d’une formation qu’elle délivre dans ce pays.

 

Cette formation y est assurée par ses propres enseignants, appuyés par des formateurs locaux, et délivre des diplômes nationaux aux étudiants qu’elle a régulièrement inscrits.

 

1. Rappel des règles relatives aux diplômes en partenariat international

Conformément aux articles L. 123-7 et L. 123-7-1 du code de l’éducation, les universités peuvent délivrer un diplôme issu de leur offre de formation (diplôme national ou diplôme d’établissement) sur le territoire d’un pays  étranger.

 

Ces actions de coopération ont lieu sous la responsabilité des présidents d’université ou directeurs des établissements intéressés (article D. 123-20 du code de l’éducation). L’établissement d’enseignement supérieur français qui offre une formation à l’étranger est entièrement responsable de sa conception, de sa délivrance et de sa qualité dans le pays d’accueil.

 

Aux termes des articles L. 123-7 et L. 123-7-1 du code de l’éducation, un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel (E.P.S.C.P.) peut passer un accord avec des « institutions étrangères ou internationales, universitaires ou non ». Toutefois, compte tenu de la compétence générale du ministère des affaires étrangères en matière de relations internationales, issue de l’arrêté du 22 messidor an VII et du décret du 25 décembre 1810 toujours en vigueur et rappelés par la circulaire du 30 mai 1997 relative à l’élaboration et à la conclusion des accords internationaux, et auxquels ne dérogent pas les dispositions susmentionnées du code de l’éducation, il n’est pas possible de considérer que les termes « institutions étrangères » puissent désigner directement un État.

 

Il est donc nécessaire de veiller à ce que l’ambassade de France dans le pays étranger concerné soit étroitement associée à la négociation. En effet, si la circulaire de 1997 prévoit exceptionnellement la possibilité, pour un ministre, de signer un arrangement administratif, cette tolérance ne paraît pas pouvoir être étendue au dirigeant d’un établissement public et, en conséquence, seul l’ambassadeur de France devrait pouvoir légalement signer un accord avec un État étranger. Il serait au demeurant souhaitable que les « accords internationaux » passés par l’université soient conclus avec une structure relevant du droit du pays étranger partenaire.

 

En tout état de cause, les projets d’accord de coopération ne peuvent être conclus que si le ministre chargé de l’enseignement supérieur et le ministre chargé des affaires étrangères ne s’y sont pas opposés dans les conditions prévues aux articles L. 123-7-1 et D. 123-19 du code de l’éducation.

 

En revanche, les conventions d’enseignement fondées sur l’article L. 718-16 du code de l’éducation ne trouvent pas à s’appliquer dans le cadre d’une formation délocalisée à l’étranger.

 

En effet, si l’article L. 718-16 du code de l’éducation prévoit la possibilité pour un E.P.S.C.P. de conclure une convention avec un autre établissement public ou privé en matière de formation, cette disposition législative française ne peut toutefois s’imposer sur le territoire d’un État étranger, a fortiori à l’égard d’un établissement étranger soumis au seul droit de l’État dans lequel il est établi. Il en résulte qu’un E.P.S.C.P. ne peut pas conclure de convention d’association avec un partenaire étranger à l’étranger.

 

2. La délivrance par l’université de diplômes en partenariat international ne peut pas conduire l’établissement à se dessaisir de la responsabilité de ses actions de formation en vue de la délivrance de l’un de ses diplômes.

 

2.1. Respect du principe de spécialité des établissements publics à caractère administratif

 

Le principe de spécialité consacré comme principe général du droit (cf. C.E. Section, 4 mars 1938, Consorts Le Clerc, n° 55677 et n° 56288, au Recueil Lebon) fait traditionnellement obstacle à ce qu’un établissement public exerce une activité distincte de son objet statutaire. En sa qualité d’établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel, une université ne peut donc exercer que les seules missions qui lui sont conférées par la loi (article L. 711-1 du code de l’éducation) au nombre desquelles figurent la « formation initiale et continue tout au long de la vie » ainsi que la coopération internationale (article L. 123-3 du même code).

 

Par un arrêt du 8 mars 2016 n° 13PA04846, la cour administrative d’appel de Paris a jugé que le principe de spécialité devait également être lu comme impliquant que, sauf disposition législative expresse, les établissements publics exercent leurs missions statutaires de manière directe. Après avoir relevé que les dispositions de l'article L. 711-1 du code de l’éducation n’autorisent les universités à créer des filiales que pour faire connaître les réalisations afférentes aux missions qui leur sont dévolues par l'article L. 123-3 du code de l'éducation, elle a ainsi annulé la délibération par laquelle un E.P.S.C.P. avait créé une filiale dans le but de lui confier des activités de formation qui relevaient de ses missions statutaires.

 

S’il convient de rester prudent quant à la portée de cet arrêt qui demeure isolé, il paraît clair qu’un E.P.S.C.P. ne saurait transférer une compétence qui est au cœur de celles que le législateur a entendu lui confier.

 

2.2. La gestion des enseignants-chercheurs ne peut être subdéléguée.

 

La délocalisation des formations de l’université ne peut en tout état de cause conduire à confier la gestion des personnels enseignants de l’université à une entité distincte.

 

Il n’est en effet pas possible pour le président de l’université de subdéléguer la délégation de pouvoirs qu’il a reçue du ministre chargé de l’enseignement supérieur pour la gestion des enseignants-chercheurs dès lors que cette subdélégation n’est pas prévue par un texte.

 

Enfin, il peut être observé que la seule position statutaire permettant d’envisager la gestion d’un agent de l’université par un pays étranger partenaire serait celle du détachement, ce qui impliquerait une gestion totalement autonome et non déléguée, l’agent détaché perdant, le temps de son détachement, tout lien fonctionnel avec son établissement d’origine. carre

 

Accès aux documents administratifs

COMMUNICATION DE DOCUMENTS ADMINISTRATIFS

fleche Communication de documents administratifs – Rapports portant sur la recevabilité des dossiers d’habilitation à diriger des recherches (H.D.R.) – Nécessité d’occulter les nom et prénom des rapporteurs (non)

Note DAJ A3 n° 2018-05 du 3 janvier 2018


La direction des affaires juridiques a été interrogée par une université sur les modalités de communication des rapports portant sur la recevabilité des dossiers d’habilitation à diriger des recherches (H.D.R.), et plus particulièrement sur la nécessité d’occulter les nom et prénom des rapporteurs avant de communiquer ces documents.

 

Les éléments de réponse suivants ont été apportés à l’université :

 

L’article 5 de l’arrêté du 23 novembre 1998 relatif à l’habilitation à diriger des recherches prévoit que l’autorisation de se présenter devant le jury est accordée par le président ou le directeur de l’établissement après examen des travaux du candidat par au moins trois rapporteurs choisis en raison de leur compétence, dont deux au moins doivent être habilités à diriger des recherches. Il prévoit par ailleurs que deux de ces rapporteurs doivent ne pas appartenir au corps enseignant de l’établissement dans lequel le candidat a déposé sa demande.

 

À titre liminaire, il convient de rappeler que dès lors qu’ils ne présentent plus le caractère de document préparatoire, ces rapports constituent des documents administratifs communicables, en application des dispositions des articles L. 300-2 et L. 311-2 du code des relations entre le public et l'administration (C.R.P.A.).

 

En outre, dans la mesure où ces rapports portent une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique nommément désignée, ils ne sont communicables qu’à l’intéressé, conformément aux dispositions de l’article L. 311-6 du même code.

 

L’article L. 311-7 du C.R.P.A. prévoit que : « Lorsque la demande porte sur un document comportant des mentions qui ne sont pas communicables en application des articles L. 311-5 et L. 311-6 mais qu'il est possible d'occulter ou de disjoindre, le document est communiqué au demandeur après occultation ou disjonction de ces mentions. »

 

En l’espèce, les nom et prénom des rapporteurs ne paraissent entrer dans aucune des catégories d’informations non communicables  prévues par les articles L. 311-5 et L. 311-6 du C.R.P.A. La divulgation de ces informations ne semble en particulier pas être de nature à porter préjudice aux rapporteurs concernés.

 

Dans la mesure où, comme indiqué précédemment, la désignation des rapporteurs doit répondre à des conditions strictement définies par l’article 5 de l’arrêté du 23 novembre 1998, dont l’intéressé est en droit de vérifier le respect, ce motif ne saurait être invoqué pour occulter les nom et prénom des personnes désignées en qualité de rapporteurs.

 

La CADA considère par exemple que des experts désignés pour donner un avis sur un projet de recherche doivent assumer la responsabilité des avis qu’ils émettent et que cette transparence est de nature à contribuer à garantir l’impartialité et l’objectivité de l’avis de ces derniers (conseil n° 20071946 du 26 juillet 2007).

 

Il ne paraît ainsi pas possible d’occulter les nom et prénom des personnes ayant rédigé les rapports autorisant les candidats à l’H.D.R. à se présenter devant le jury. carre



  le point sur   ActualitÉs
 

TEXTES OFFICIELS
Enseignement supérieur et recherche

ÉTUDES

Inscription des étudiants

fleche Inscription prioritaire des meilleurs bacheliers

Décret n° 2018-563 du 29 juin 2018 relatif aux modalités d’accès prioritaire dans les formations initiales de l’enseignement supérieur public des meilleurs bacheliers dans chaque série et spécialité de l’examen et modifiant le code de l’éducation

J.O.R.F. du 1er juillet 2018


Ce décret du 29 juin 2018 est pris en application de l’article L. 612-3-1 du code de l’éducation dans sa rédaction issue de l’article 3 de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants qui a modifié le dispositif qu’avait créé la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche en instituant un droit d’accès dans les formations sélectives du premier cycle de l’enseignement supérieur public au bénéfice des meilleurs bacheliers de chaque série ou spécialité du baccalauréat de chaque lycée, sur la base de leurs résultats à cet examen.

 

Dans sa rédaction issue de la loi du 8 mars 2018, l’article L. 612-3-1 du code de l’éducation prévoit désormais un accès prioritaire, mis en œuvre dans le cadre de la procédure nationale de préinscription prévue au deuxième alinéa du I de l'article L. 612-3 du même code (procédure Parcoursup), à l'ensemble des formations du premier cycle de l'enseignement supérieur public, et plus seulement aux formations sélectives, au bénéfice des meilleurs bacheliers de chaque lycée, dans chaque série et spécialité de l’examen du baccalauréat.

 

Le décret du 29 juin 2018 fixe ainsi les conditions et modalités d’application de ce dispositif dit des « meilleurs bacheliers », qui  prévoit que les meilleurs bacheliers de chaque lycée, au vu de leurs résultats au baccalauréat dans chaque série ou spécialité de l’examen, bénéficient d’un accès prioritaire dans les formations sélectives et non sélectives du premier cycle de l’enseignement supérieur dispensées par les établissements publics.

 

Il définit notamment les meilleurs bacheliers comme ceux qui, dans chaque lycée, ont obtenu une mention très bien, bien ou assez bien et les meilleurs résultats dans chaque série ou spécialité du baccalauréat dans la limite de 10 % des élèves admis au premier groupe d'épreuves de l'examen de cette série ou spécialité dans l'établissement.

 

Le décret prévoit que c’est le recteur d’académie qui arrête, après les résultats du premier groupe d'épreuves du baccalauréat, la liste des meilleurs bacheliers des lycées de son académie et renseigne ces données sur la plateforme Parcoursup.  Il précise également que c’est le recteur d’académie et, pour les formations des établissements publics d'enseignement supérieur relevant de l'autorité du ministre chargé de l'agriculture, le directeur régional de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt qui déterminent, pour les formations des établissements publics d'enseignement supérieur relevant de leur ministère, le nombre de places consacrées à la mise en œuvre de ce dispositif d’accès prioritaire, en tenant compte de la capacité d'accueil de chaque formation et après consultation du chef ou du directeur de l'établissement d’enseignement supérieur concerné.

 

Le décret précise enfin les modalités selon lesquelles les propositions d’admission dans une formation sont faites aux candidats distingués comme meilleurs bacheliers, notamment les règles permettant de les départager lorsque plusieurs meilleurs bacheliers sont candidats à une même formation.

 

Pour mémoire, il est rappelé que le décret n° 2018-371 du 18 mai 2018 relatif au pourcentage des meilleurs bacheliers de chaque lycée bénéficiant d’un accès prioritaire dans les formations de l’enseignement supérieur public avait déjà fixé à 10 %, pour l’année universitaire 2018-2019, le pourcentage des meilleurs bacheliers bénéficiant de ce droit d’accès prioritaire (cf. LIJ n° 202, mai 2018).  Le décret du 29 juin 2018 a repris ce pourcentage qu’il codifie à l’article D. 612-1-31. carre

 

Questions propres aux études médicales et odontologiques

fleche Textes réglementaires relatifs à l’expérimentation de modalités particulières d’admission dans les études de santé

Décret n° 2018-423 du 30 mai 2018 modifiant le décret n° 2014-189 du 20 février 2014 tendant à l’expérimentation de modalités particulières d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques
J.O.R.F. du 31 mai 2018

 

Le décret n° 2018-423 du 30 mai 2018 modifie le décret n° 2014-189 du 20 février 2014 tendant à l'expérimentation de modalités particulières d'admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et de maïeutique afin de prendre en compte la modification apportée à l'article 39 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche par l'article 16 de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants.

 

Le décret du 30 mai 2018 actualise par conséquent les dispositions du décret du 20 février 2014 qui avait été pris pour l’application de l’article 39 de la loi du 22 juillet 2013 dans sa rédaction initiale :


– Il prend en compte la prolongation de deux ans de l’expérimentation, décidée par l'article 16 de la loi du 8 mars 2018, en la portant à une durée de huit ans.  L’expérimentation, qui devait prendre fin au terme de l'année universitaire 2019-2020, est ainsi prolongée jusqu'au terme de l'année universitaire 2021-2022.

 

– Il précise également les principes d’organisation de la première année commune aux études de santé adaptée (PACES adaptée), qui constitue une PACES partiellement dérogatoire aux dispositions prévues par l’arrêté du 28 octobre 2009 relatif à la PACES, et qui peut comporter notamment des enseignements complémentaires à ceux fixés par cet arrêté du 28 octobre 2009, ainsi que des modules de préparation aux concours de fin de première année.

 

– Enfin, le décret prévoit un dispositif expérimental qui combine une PACES adaptée, prévue par le 1° bis de l’article 39 de la loi du 22 juillet 2013 dans sa rédaction issue de l’article 16 de la loi du 8 mars 2018, laquelle permet aux étudiants qui ont validé cette première année commune sans être admis en deuxième année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou maïeutiques de poursuivre leurs études dans une formation conduisant à un diplôme national de licence, et la possibilité de se présenter une seconde fois, par le biais du dispositif d'admission directe en deuxième année prévu par le 2° de l'article 39 de la loi du 22 juillet 2013, aux épreuves d'admission en deuxième année des études de santé après, selon le dispositif expérimenté par l'université intéressée, un à six semestres d'études accomplis après la première année des études de santé dans un cursus conduisant à un diplôme national de licence.

 

Arrêté du 30 mai 2018 modifiant l’arrêté du 20 février 2014 relatif à l’expérimentation de nouvelles modalités d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques
J.O.R.F. du 31 mai 2018


Cet arrêté du 30 mai 2018 actualise la liste des universités autorisées à mettre en œuvre des modalités expérimentales d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques sur le fondement des 1° bis et 2° de l’article 39 de la loi du 22 juillet 2013 dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 (article 16).

 

Il précise l’organisation de la première année commune aux études de santé adaptée, les conditions et modalités d’admission en deuxième année des études de santé à l’issue d’une PACES ou d’une PACES adaptée, ainsi que les conditions et modalités d’admission directe en deuxième ou en troisième année des études de santé au cours d’un premier cycle universitaire adapté conduisant à un diplôme national de licence. carre

 

VIE ÉTUDIANTE

Droits d’inscription

fleche Contribution de vie étudiante et de campus

Décret n° 2018-564 du 30 juin 2018 relatif à la contribution prévue à l’article L. 841-5 du code de l’éducation

J.O.R.F. du 1er juillet 2018


Ce décret du 30 juin 2018 est pris en application de l’article L. 841-5 du code de l’éducation, article créé par l’article 12 de la loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, qui institue une contribution destinée à favoriser l'accueil et l'accompagnement social, sanitaire, culturel et sportif des étudiants et à conforter les actions de prévention et d'éducation à la santé réalisées à leur intention (cf. LIJ n° 202, mai 2018).

 

Le décret précise les conditions de paiement de cette « contribution de vie étudiante et de campus », qui est acquittée sur le portail numérique des démarches et services de la vie étudiante etudiant.gouv.fr.

 

Lors de son inscription à une formation initiale dans un établissement d’enseignement supérieur, l’étudiant doit justifier qu’il s’est acquitté du paiement de la contribution de vie étudiante et de campus ou qu’il en est exonéré, en produisant une attestation qu’il télécharge sur le même portail numérique. Si l’étudiant s’inscrit dans plusieurs formations au titre de la même année universitaire, la contribution n’est due que lors de la première inscription.

 

Le décret précise également les conditions dans lesquelles le produit de cette contribution est reversé aux catégories d’établissements d'enseignement supérieur qui en bénéficient en application de l’article L. 841-5 du code de l’éducation, en l’espèce les établissements publics d'enseignement supérieur, les établissements mentionnés aux articles L. 443-1 et L. 753-1 du code de l’éducation ou à l'article L. 1431-1 du code général des collectivités territoriales dispensant des formations initiales d'enseignement supérieur, les établissements d'enseignement supérieur privés d'intérêt général et les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires.

 

Le décret entre en vigueur le 1er juillet 2018.  Son article 3 prévoit, pour l’année 2018-2019, des dispositions transitoires relatives à la constatation des effectifs d’étudiants inscrits dans les établissements bénéficiaires de la contribution. carre

 

Personnels

QUESTIONS COMMUNES

Instances représentatives

fleche Maîtres des établissements d’enseignement privés sous contrat – Instances consultatives – Représentation équilibrée des hommes et des femmes

Décret n° 2018-235 du 30 mars 2018 relatif à la représentation des femmes et des hommes au sein des organismes consultatifs des maîtres des établissements d’enseignement privés sous contrat

J.O.R.F. du 1er avril 2018


Ce décret n° 2018-235 du 30 mars 2018 prévoit pour les organismes consultatifs des maîtres des établissements d’enseignement privés sous contrat, à savoir le comité consultatif ministériel des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat (C.C.M.M.E.P.C.) et les commissions consultatives mixtes (C.C.M.), des règles assurant une représentation équilibrée des femmes et des hommes, équivalentes à celles édictées par le décret n° 2017-1201 du 27 juillet 2017 relatif à la représentation des femmes et des hommes au sein des organismes consultatifs de la fonction publique. À cette fin, le décret modifie la partie réglementaire du code de l’éducation relative au comité consultatif des maîtres des  établissements d’enseignement privés sous contrat et aux commissions consultatives mixtes départementales ou interdépartementales et académiques.

 

Le décret précise ainsi les règles permettant l'élection, parmi les représentants du personnel au C.C.M.M.E.P.C. et aux C.C.M., d’une part de femmes et d'hommes correspondant à la proportion de femmes et d'hommes composant les effectifs représentés au sein du comité consultatif ministériel des maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat et de chacune des commissions consultatives mixtes.

 

Le décret prévoit notamment, d’une part, que les parts respectives de femmes et d’hommes composant les effectifs représentés au sein du C.C.M.M.E.P.C. sont indiquées par l’arrêté du ministre chargé de l'éducation nationale qui fixe le nombre des représentants du personnel de cette instance consultative tandis qu’elles sont fixées par l’autorité académique auprès de laquelle chaque commission consultative mixte est placée et, d’autre part, que les listes de candidats à l’élection devront être composées dans les mêmes proportions de femmes et d’hommes que le corps électoral concerné.

 

Les dispositions de ce décret sont applicables lors du prochain renouvellement général des instances de représentation du personnel dans la fonction publique, qui auront lieu en décembre 2018. carre

 

Affectation et mutation

fleche Corps enseignants et corps relevant de statuts spéciaux – Affectation – Critères de priorité

Décret n° 2018-303 du 25 avril 2018 relatif aux priorités d’affectation des membres de certains corps mentionnés à l’article 10 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État

J.O.R.F. du 27 avril 2018


L’article 10 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État dispose, en son troisième alinéa, dans sa rédaction issue de l’article 28 de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, que : « Pour répondre aux besoins propres à l’organisation de la gestion des corps enseignants et des corps relevant de statuts spéciaux, les statuts particuliers ajoutent aux priorités mentionnées au quatrième alinéa de l’article 60 des priorités liées notamment à la situation personnelle des fonctionnaires justifiant du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie. »

 

L’article 10 renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de déterminer les conditions et modalités de son application.

 

C’est dans ces conditions que le décret n° 2018-303 du 25 avril 2018 relatif aux priorités d’affectation des membres de certains corps mentionnés à l’article 10 de la loi susmentionnée du 11 janvier 1984 est venu préciser, dans ses articles 1er et 2, les modalités de traitement des demandes d’affectation présentées par les personnels enseignants titulaires en créant un nouvel article à insérer dans chacun des décrets statutaires relatifs à ces corps de fonctionnaires.

 

Afin de répondre aux besoins propres à l’organisation de la gestion des corps enseignants et des corps relevant de statuts spéciaux, ce décret définit des critères de priorité dont il est tenu compte, outre les priorités prévues par l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984, dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service.

 

Ce décret du 25 avril 2018 a ainsi fixé les « critères de priorité suivants :

 

1° La situation de l’agent qui sollicite un rapprochement avec le détenteur de l’autorité parentale conjointe dans l’intérêt de l’enfant ;
2° La situation de l’agent affecté dans un territoire ou une zone rencontrant des difficultés particulières de recrutement ;
3° La situation de l’agent affecté dans un emploi supprimé en raison d’une modification de la carte scolaire ;
4° Le caractère répété d’une même demande de mutation ainsi que son ancienneté ;
5° L’expérience et le parcours professionnel de l’agent. »

 

Le décret précise en outre que les demandes de mutation des membres de ces corps de fonctionnaires sont classées préalablement à l’aide d’un barème rendu public. carre

 

Avancement – Reclassement

fleche Fonctionnaires de l’État – Inaptitude à l’exercice des fonctions – Mise en œuvre de la période de reclassement

Décret n° 2018-502 du 20 juin 2018 instituant une période de préparation au reclassement au profit des fonctionnaires de l'État reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions

J.O.R.F. du 22 juin 2018


Le décret n° 2018-502 du 20 juin 2018 fixe les modalités de mise en œuvre de la période de préparation au reclassement des fonctionnaires de l’État dont l’état de santé, sans leur interdire l’exercice de toute activité, ne leur permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de leur corps. Cette période de préparation au reclassement a été créée par l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique (cf. LIJ n° 198, mai 2017).

 

Pour ce faire, le décret du 20 juin 2018 modifie, d’une part, les articles 2, 3 et 5 du décret n° 84-1051 du 30 novembre 1984 modifié pris en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État en vue de faciliter le reclassement des fonctionnaires de l'État reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions et, d’autre part, l’article 27 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986 modifié relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires.

 

La période de préparation au reclassement a pour objet de préparer et, le cas échéant, de qualifier son bénéficiaire en vue de lui permettre d’occuper de nouveaux emplois compatibles avec son état de santé. Elle vise aussi à accompagner la transition professionnelle du fonctionnaire vers le reclassement.

 

Le décret du 20 juin 2018 détermine le point de départ de la période de préparation au reclassement (à compter de la réception de l'avis du comité médical si l'agent est en fonction, ou à compter de sa reprise de fonctions si l'agent est en congé de maladie lors de la réception de l'avis du comité médical) et son terme (à la date de reclassement de l'agent et au plus tard un an après la date à laquelle elle a débuté ; l'agent qui a présenté une demande de reclassement peut être maintenu en position d'activité jusqu'à la date à laquelle ce reclassement prend effet, dans la limite de la durée maximum de trois mois).

 

Le décret apporte également des précisions quant au contenu de la période de préparation au reclassement, en prévoyant notamment qu’un projet de préparation au reclassement est établi conjointement entre l’administration et l’agent. carre

 

Établissements d’enseignement privés

RELATIONS AVEC L’ÉTAT

fleche Loi – Décret d’application – Établissements d’enseignement scolaire privés hors contrat – Régime d’ouverture – Contrôle de l’État

Loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat
J.O.R.F. du 14 avril 2018


Décret n° 2018-407 du 29 mai 2018 pris pour l'application de la loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements d'enseignement scolaire privés hors contrat

J.O.R.F. du 30 mai 2018

 

1. La loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat

 

Cette loi du 13 avril 2018 vise à simplifier et mieux encadrer le régime d’ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat.

 

Elle modifie notamment les articles L. 441-1 à L. 441-4, l’article L. 442-2 et les articles L. 914-3 à L. 914-5 du code de l’éducation.

 

1.1. L’ouverture d’un établissement privé d’enseignement scolaire relève d’un régime déclaratif, qui permet à l’administration de s’opposer à l’ouverture de l’établissement.

 

La loi du 13 avril 2018 simplifie la législation en fusionnant les trois procédures de déclaration qui existaient jusqu’alors, qui étaient issues de lois anciennes (la loi dite « Goblet » du 30 octobre 1886 portant sur l'organisation de l'enseignement primaire – pour l’enseignement primaire –, la loi dite « Falloux » du 15 mars 1850 sur l’enseignement – pour l’enseignement secondaire général –, et la loi dite « Astier » du 25 juillet 1919 relative à l'organisation de l'enseignement technique industriel et commercial – pour l’enseignement technique et professionnel).

 

La loi du 13 avril 2018 institue un « guichet unique » pour recevoir les déclarations d’ouverture d’un établissement d’enseignement privé, tout en laissant à quatre autorités (le maire, le recteur d’académie, le préfet de département et le procureur de la République) la possibilité de s’y opposer.

 

La loi renforce le contrôle exercé par le maire et les services de l’État en allongeant le délai d'opposition de un à trois mois et en unifiant les motifs d'opposition. Elle substitue aux motifs d’opposition devenus obsolètes d’« hygiène » et de « bonnes mœurs », sur lesquels ces autorités pouvaient fonder leur opposition à l’ouverture d’un établissement, les notions plus adaptées au monde d’aujourd’hui et à l’état du droit d'« intérêt de l’ordre public » et de « protection de l’enfance et de la jeunesse ».

 

La loi du 13 avril 2018 fixe elle-même les pièces justificatives qui doivent accompagner le dossier de déclaration d’ouverture d’un établissement d’enseignement privé.

 

Elle prévoit par ailleurs qu’une déclaration d’ouverture doit être faite en cas de changement de locaux ou d’admission d’élèves internes, et que l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation doit être informée du changement d’identité du directeur ou du responsable légal de l’établissement.

 

1.2. La loi du 13 avril 2018 affirme le principe d’un contrôle annuel des classes hors contrat des établissements d’enseignement scolaire privés et prévoit que ce contrôle sera systématiquement réalisé au cours de la première année d’exercice de l’établissement.

 

Elle renforce aussi le contrôle de l’État sur ces établissements privés d’enseignement qui ne porte plus seulement sur les titres exigés des directeurs et des enseignants, sur le respect de l'obligation scolaire, de l'instruction obligatoire, de l'ordre public, de la prévention sanitaire et sociale, mais également sur la protection de l’enfance et de la jeunesse.

 

1.3. La loi du 13 avril 2018 unifie les conditions de capacité, d’âge, de nationalité, de diplôme, de pratique ou connaissances professionnelles et d’exercice de fonctions pour diriger un établissement d’enseignement scolaire privé et y enseigner.

 

La loi prévoit notamment que des dérogations aux conditions de nationalité ou d’exercice professionnel peuvent être accordées par l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État.

 

Elle prévoit toutefois que ces nouvelles dispositions ne s’appliquent pas aux directeurs et aux enseignants en fonction dans un établissement d’enseignement scolaire privé à la date de son entrée en vigueur, personnels qui peuvent par conséquent continuer à exercer leurs fonctions au sein de l’ établissement privé d’enseignement dans lequel ils exerçaient à la date de publication de la loi.

 

2. Le décret n° 2018-407 du 29 mai 2018 pris pour l'application de la loi n° 2018-266 du 13 avril 2018 visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements d'enseignement scolaire privés hors contrat

 

Ce décret en Conseil d’État a été pris pour l’application de la loi du 13 avril 2018.

 

2.1. Le décret du 29 mai 2018 précise d’abord la procédure du guichet unique qui confère au recteur d’académie la responsabilité de recevoir le dossier de déclaration d'ouverture de tout établissement d'enseignement scolaire privé hors contrat, de s'assurer qu'il est complet et de le transmettre au maire, au procureur de la République et au préfet.

 

Le décret précise également la composition du dossier d'ouverture d’un établissement privé d’enseignement s’agissant notamment des modalités de financement de l’établissement et il précise également la composition des dossiers de changement de locaux ou de dirigeants de l'établissement.

 

Il fixe également le régime spécifique applicable aux établissements d’enseignement scolaire privés comportant un internat. Il prévoit que, dans ce cas, le dossier de déclaration d’ouverture de l’établissement doit comporter les pièces attestant de l’identité de la ou des personnes qui assurent la responsabilité de l’internat.

 

2.2. Le décret précise ensuite les conditions à remplir, de nationalité, d’âge, de titre et de diplôme ou de pratique ou de connaissances professionnelles, et d’exercice antérieur de fonctions propres à la direction, pour diriger un établissement d’enseignement scolaire privé ou y être chargé de fonctions d’enseignement.

 

Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, des dérogations peuvent être demandées au recteur d’académie selon le dispositif prévu par le décret.

 

2.3. Le décret de mai 2018 précise enfin les conditions dans lesquelles les établissements d’enseignement scolaire privés communiquent chaque année au recteur d’académie les informations prévues par la loi concernant leurs élèves et leurs enseignants. carre

 

 

 

 

Rédaction de la LIJ :
Ministère de l'éducation nationale - Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation – Secrétariat général – Direction des affaires juridiques
99, rue de Grenelle – 75357 Paris 07 S.P. – Tél. : 01 55 55 05 37
Directrice de la publication : Natacha Chicot
Rédacteurs en chef et adjoint : Fabienne Thibau-Lévêque, Timothée Gallaud, Mohammed Bouzar, Sonia Bonneau-Mathelot
Responsable de la coordination éditoriale : Frédérique Vergnes
Secrétariat de rédaction, maquette et mise en page : Anne Vanaret
Ont participé à ce numéro : Liliane Aubignac, Manon Belgodère, Jennifer Bême, Cédric Benoit, Claudette Berland, Valérie Blaise, Sonia Blanchet, Lionel Blaudeau, Louis Cazeils, Benjamin Charrier, Diankenba Condé, Annaïck David, Sophie Decker-Nomicisio, Yann Delhaye, Philippe Dhennin, Antoine Douglas, Jean-Eudes Foumentèze, Stéphanie Frain, Aurélie Garde, Alexandra Gaudé, Fabrice Gibelin, Sophie Goyer-Jennepin, Coralie Guerreiro, Stéphanie Gutierrez, Valérie Halimi, Francine Leroyer-Gravet, Chloé Lirzin, Saamia Maleck, Alice Minuzzo, Roxane Noverraz, Cécile Parriat, Maxime Passerat de Silans, Florence Perrin, Audrey Pinter, Bintou Sako, Virginie Simon, Maude Tissandier-Le Nech, Dana Zeitoun


N° ISSN : 1265-6739

pdf    

 

© 2018 Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse - Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation – Tous droits réservés – Mentions légales