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Bulletin Officiel du ministère de
l'Education Nationale et
du ministère de la Recherche

N°33 du 13 septembre

2001

www.education.gouv.fr/bo/2001/33/encarte.htm - nous écrire



ENCART B.O. n°33 du 13-09-2001

MISE EN ŒUVRE DE L'ENSEIGNEMENT BILINGUE PAR IMMERSION DANS LES ÉCOLES ET ÉTABLISSEMENTS "LANGUES RÉGIONALES"
C. n° 2001-168 du 5-9-2001
NOR : MENE0101627C

RLR : 514-6 ; 525-6

MEN - DESCO A2


Texte adressé aux rectrices et recteurs d'académie ; aux inspectrices et inspecteurs d'académie, directrices et directeurs des services départementaux de l'éducation nationale ; aux inspectrices et inspecteurs d'académie, inspectrices et inspecteurs pédagogiques régionaux ; aux chefs d'établissement ; aux inspectrices et inspecteurs chargés des circonscriptions du premier degré ; aux directrices et directeurs d'école
r L'enseignement bilingue par immersion constitue une des modalités d'apprentissage de la langue régionale permettant l'accès à la pratique d'un bilinguisme équilibré.
Il peut être dispensé dans les écoles et établissements "langues régionales" qui ont été définis par arrêté.

Ces écoles et établissements publics issus du réseau des écoles, collèges, lycées mis en place par le réseau associatif, dans le cadre de leur mode d'organisation pédagogique spécifique, sont intégrés, à législation constante, au dispositif général de l'enseignement des langues vivantes de l'école maternelle à l'université. L'enseignement bilingue par immersion que ces établissements proposent contribue, au même titre que les autres formes d'enseignement par immersion qui peuvent être pratiquées dans les autres écoles ou établissements publics, à l'élargissement de la politique d'offre publique d'enseignement des langues vivantes préconisé dans ce plan.


I - ORIENTATIONS GÉNÉRALES


L'enseignement de la langue régionale offert dans les établissements "langues régionales" participe aux évolutions que sera susceptible de connaître, au cours des prochaines années, l'enseignement des langues vivantes. Dans ce cadre, l'ouverture sur d'autres cultures dans un esprit de tolérance ainsi que l'acquisition d'une maîtrise dans l'expression de la communication constituent des éléments fondamentaux du projet pédagogique.

L'enseignement bilingue dispensé selon la méthode dite de l'immersion se caractérise par l'utilisation de la langue régionale comme langue véhiculaire pour les autres apprentissages et enseignements ainsi que pour la vie scolaire.

Cette utilisation de la langue régionale puis le transfert des compétences ainsi acquises au français favorisent dans l'enseignement bilingue par immersion l'acquisition d'une bilingualité équilibrée dès la fin de l'école élémentaire.


II - ORGANISATION DES ENSEIGNEMENTS À L'ÉCOLE PRIMAIRE


a) Implantation des écoles "langues régionales"


Les écoles "langues régionales" sont inscrites au sein de la carte départementale et académique des sites bilingues qui sera progressivement construite pour assurer de façon cohérente la continuité et le développement de l'enseignement bilingue selon ses diverses modalités.

Les inspecteurs d'académie, directeurs des services départementaux de l'éducation nationale, auxquels il revient de s'assurer que l'ensemble des conditions énoncées ci-dessous se trouvent effectivement réalisées, veilleront avec la plus grande attention à la cohérence de ces sites avec les autres sites bilingues existant dans le département, ainsi qu'à une bonne répartition des diverses modalités d'enseignement bilingue.

Les règles définies par l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale obéissent aux principes généraux indiqués ci-dessous.

La création d'une école bilingue qui pratique l'enseignement par immersion peut être envisagée à l'initiative des enseignants et/ou des parents du secteur concerné, de leurs représentants ou des représentants de la collectivité locale.

Le projet fera l'objet d'une concertation entre les partenaires concernés. Parents et municipalités doivent être bien informés des objectifs de l'enseignement bilingue par immersion. Leur adhésion au projet est une des conditions de sa réussite. Une information approfondie sera donc menée par les conseillers pédagogiques de langue régionale ou, à défaut, les maîtres-formateurs et maîtres itinérants, l'inspecteur de la circonscription, l'inspecteur chargé des écoles bilingues et l'inspecteur ou le chargé de mission d'inspection pédagogique régionale de langue et culture régionales ; le conseil académique des langues régionales apportera son concours.

La demande de création d'école avec un enseignement bilingue par immersion, qui comporte la liste des parents intéressés et l'accord de la commune ou de la structure intercommunale concernée, est ensuite transmise par la voie de l'inspecteur chargé des écoles bilingues à l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale. Ce dernier prend sa décision en liaison avec le recteur, en référence au plan pluriannuel de développement, après consultation du conseil académique des langues régionales et avis des comités techniques paritaires départementaux et du comité départemental de l'éducation nationale.


b) Principes


L'enseignement bilingue dispensé qui implique, pour les conditions de son exercice, l'existence d'un cadre homogène, repose sur une logique d'établissement. La langue régionale est langue d'enseignement et de vie quotidienne dans l'école.

L'entrée dans une école bilingue immersive se fait dès la petite section ou la moyenne section. Il n'est normalement pas prévu d'intégrer le cursus bilingue par immersion après la grande section. Cependant, l'entrée plus tardive dans le cursus peut être acceptée à titre exceptionnel après avis positif de l'équipe pédagogique. Les modalités susceptibles de fonder l'avis émis sont de la responsabilité du directeur de l'école en liaison avec l'inspecteur chargé des écoles bilingues.

À l'école maternelle,
phase la plus intensive d'acquisition de la langue régionale, l'ensemble des activités scolaires et leur accompagnement s'effectuent en intégralité dans cette langue.
À l'école élémentaire,
où l'introduction du français s'effectue progressivement, les enseignements de langue régionale et en langue régionale sont modulés en fonction de la spécificité du projet pédagogique. Cette intensification devra toutefois être compatible avec l'exigence pour les élèves ayant suivi cette méthode d'enseignement de posséder, à l'issue du CM2, une compétence en français identique à celle des élèves des classes correspondantes de l'enseignement monolingue ou des classes bilingues fonctionnant selon le principe de la parité horaire. Les compétences acquises dans les disciplines enseignées en langue régionale seront réinvesties lors des séquences en français pour permettre l'acquisition et l'utilisation du vocabulaire français. Cette disposition demande de renforcer les liens entre les enseignants en langue régionale et les enseignants en français qui interviennent dans ces classes ; elle permet également la compréhension des notions à acquérir dans ces disciplines.

c) L'organisation


L'enseignement est organisé selon les modalités suivantes :

L'alternance des enseignements

L'enseignement en français est réparti de façon équilibrée sur la semaine. Les modalités d'alternance des enseignements en langue régionale et en français relèvent de la compétence de l'équipe pédagogique et sont établies en fonction des conditions locales de fonctionnement.

Exemple de répartition des activités ou champs disciplinaires entre les deux langues :

Cycle 1

- Enseignement en langue régionale :

Les activités des différents domaines prévus par les programmes sont pratiquées en langue régionale.

- Le recours au français par l'enseignant pourra se faire de façon exceptionnelle et ponctuelle, dans le cadre de relations individuelles avec un élève, par exemple pour le réconfort d'un jeune élève ayant récemment intégré l'école.

Cycle 2

- Enseignement en langue régionale :

l'ensemble des activités, hormis l'enseignement en français mentionné au paragraphe ci-après, se déroule en langue régionale.

- Enseignement en français :

Français (réinvestissement des compétences acquises en langue régionale, étude comparative des codes des deux langues : sons, graphies, vocabulaire, conjugaison, accords) selon les progressions établies pour l'enseignement bilingue langue régionale-français par immersion.

L'apprentissage de la lecture se fera en langue régionale, selon les objectifs définis dans le cadre des cycles à l'école. Le transfert des compétences acquises en langue régionale à la lecture et à l'écriture en français commence au cours du CE1. Cet apprentissage s'appuie sur des textes adaptés au niveau et aux intérêts des élèves.

Cycle 3

- Enseignement en langue régionale

L'ensemble des matières est étudié en langue régionale.

- Enseignement en français

Français : selon les progressions établies pour l'enseignement bilingue langue régionale-français. L'apprentissage de l'écrit se poursuit jusqu'au CM2 par des activités de lecture et d'écriture en français.

Mathématiques : les enseignants en français consacrent une partie de leur horaire à l'enseignement des mathématiques. L'introduction de notions nouvelles se fait en langue régionale. Des exercices d'application devant permettre l'acquisition et l'utilisation du vocabulaire sont ensuite réalisés en français. Les élèves sont entraînés par la résolution de problèmes à la maîtrise des outils numériques et géométriques en français et en langue régionale.

Les enseignants en langue régionale peuvent recourir à l'utilisation de textes et documents en français dans le cadre des enseignements d'histoire-géographie, éducation civique, sciences et technologie. Une collaboration entre les enseignants en langue régionale et en français dans le cadre de ces enseignements est possible. Les élèves sont ainsi amenés à transférer en français les compétences acquises en langue régionale dans ces disciplines.

Une langue vivante étrangère pourra être enseignée dans la limite d'une heure hebdomadaire prise sur l'horaire de l'ensemble des disciplines.

De façon exceptionnelle, une activité pourra être proposée en français en dehors du temps normalement consacré à l'enseignement dans cette langue si elle ne peut l'être en langue régionale de façon équivalente (par exemple, visionnement d'un film, intervention d'un animateur extérieur). Cette activité sera auparavant préparée en langue régionale et elle fournira matière à une exploitation ultérieure en langue régionale.


d) Objectifs linguistiques de l'enseignement bilingue par immersion et recommandations pédagogiques


Les objectifs linguistiques sont, dans l'enseignement bilingue par immersion, de même nature que dans l'enseignement bilingue à parité horaire, tels qu'ils ont été définis dans la circulaire relative aux modalités de mise en œuvre de l'enseignement bilingue à parité horaire.

Les voies pour les atteindre diffèrent compte tenu de l'organisation particulière de cet enseignement, précisée ci-dessus. Néanmoins, les recommandations pédagogiques énoncées dans la circulaire pour l'enseignement bilingue à parité horaire s'appliquent pleinement à l'enseignement bilingue par immersion : une pédagogie active, une démarche d'apprentissage progressif, une démarche coordonnée et comparative et une évaluation régulière constituent les conditions clés de la réussite des apprentissages.


III - ORGANISATION DES ENSEIGNEMENTS AU COLLÈGE ET AU LYCÉE


a) Implantation des établissements "langues régionales"


Dans le prolongement de l'enseignement bilingue par immersion dans les écoles "langues régionales" et de manière à en assurer la continuité nécessaire, des collèges "langues régionales" sont ouverts dans le cadre de la carte retenue par le recteur d'académie pour les sites bilingues. Leur implantation doit s'effectuer en étroite articulation avec le réseau d'écoles assurant ce type d'enseignement.


b) Modalités pédagogiques


Au niveau pédagogique et éducatif, la langue principale, non exclusive du français, de communication de l'établissement est la langue régionale qui est donc utilisée lors des différents moments pédagogiques ou éducatifs de la vie scolaire (réunions de classe, formation des délégués des élèves, conseils de classe, conseils d'établissement, conseil de discipline...).

C'est en effet grâce à l'utilisation de la langue régionale lors des différentes plages horaires non consacrées à l'enseignement que l'on peut réellement parler d'immersion et aider les élèves à maîtriser la langue cible dans toutes les situations de communication, et particulièrement dans les situations où celle-ci est valorisée et ressentie comme importante.

L'enseignement dans les établissements secondaires, comme à l'école primaire, est effectué principalement en langue régionale mais il inclut obligatoirement au moins deux disciplines enseignées en français par niveau, choisies par le conseil d'administration. Ce choix se fait en fonction du projet spécifique de l'établissement et des compétences des enseignants mais exclut les mathématiques, l'histoire-géographie et l'EPS afin de préserver une unité d'action pédagogique et de résultats entre les différents collèges "langues régionales".

La langue régionale est une discipline à part entière. Son enseignement bénéficie des mêmes horaires que le Français et est défini par des programmes spécifiques.

Comme dans les filières européennes, l'enseignement des langues vivantes étrangères est assuré le plus rapidement possible dans la langue elle-même et peut se voir adjoindre, lors des deux dernières années de collège, l'enseignement d'une autre discipline dans la langue cible.

La scolarité suivie dans un collège "langues régionales" fera l'objet d'une évaluation au diplôme national du brevet dans le cadre d'un dispositif réglementaire à élaborer en référence à la réforme du brevet prévue dans le cadre de la rénovation du collège.

À l'issue des quatre années de collège, les élèves peuvent s'orienter selon leurs choix vers les différentes filières générales, techniques ou professionnelles et donc continuer leur scolarité en langue régionale ou en français. Ceci est rendu possible par la pratique active des transferts de connaissance tout au long de leur scolarité.


c) Un rôle privilégié de l'internat


En tant qu'outil pédagogique et éducatif particulièrement bien adapté à l'immersion, l'internat bénéficie d'un traitement particulier : sa fréquentation est encouragée et il s'organise autour d'un véritable projet permettant l'aide aux devoirs et assurant de réelles missions linguistiques (multiplication des types de communication et des locuteurs) et éducatives (loisirs, sécurité, santé, orientation...).

Un projet spécifique d'internat voté chaque année par le conseil d'administration fixe les objectifs et les modalités de fonctionnement de l'internat.


d) Prolongements possibles en lycée


Dans le prolongement des collèges "langues régionales" et selon des dispositions identiques, des lycées "langues régionales" sont ouverts selon le même schéma.

Pour les élèves ayant effectué leur scolarité dans un lycée "langues régionales", la scolarité fera l'objet d'une évaluation au baccalauréat, dans le cadre d'un dispositif réglementaire à élaborer selon des modalités inspirées de celles qui auront été retenues pour les élèves des sections européennes.


IV - RECRUTEMENT ET FORMATION DES MAÎTRES


1 - Premier degré


L'enseignement tant en français qu'en langue régionale est confié à des enseignants qualifiés recrutés selon les procédures décrites dans les circulaires relatives au programme de développement de l'enseignement des langues et cultures régionales à l'école, au collège et au lycée.

Ces enseignants bénéficient, dans les mêmes conditions, des formations mises en place dans les IUFM. L'un des objectifs de la formation initiale est d'assurer la parfaite maîtrise, dans chacune des langues, des éléments notionnels et lexicaux pour chacune des matières enseignées à l'école élémentaire. De même, dans le domaine de la formation continue, ils bénéficient de manière adaptée, des dispositions prévues pour tous les enseignants.

Dans ce cadre, on s'efforcera de favoriser l'organisation de stages interdépartementaux pour les enseignants intervenant dans les établissements langues régionales et de stages pour les formateurs dans une perspective d'échanges et d'harmonisation académiques.

Des recherches-formations sur des thèmes relatifs à l'enseignement bilingue seront également encouragées.

Enfin, les écoles des sites bilingues et leurs enseignants bénéficient du soutien des inspecteurs de circonscription, de leurs équipes et, plus particulièrement pour la langue régionale, de l'aide des conseillers pédagogiques et des maîtres-formateurs du département. L'emploi d'assistantes maternelles (ATSEM) bilingues sera conseillé aux municipalités par l'inspecteur d'académie, directeur des services départementaux de l'éducation nationale.


2 - Second degré


Les enseignements de ou en langue régionale sont assurés par les personnels titulaires de qualifications telles qu'elles ont été mentionnées dans les circulaires rappelées ci-dessus.

Dans les établissements "langues régionales" l'ensemble de l'encadrement pédagogique est assuré par des enseignants, dont les enseignants- documentalistes, qui sont locuteurs de la langue régionale, et ce, même quand la langue régionale n'est pas la langue qu'ils utilisent dans leur enseignement.

Les postes de maîtres d'internat, de surveillants d'externat et de conseillers principaux d'éducation sont pourvus par des personnels dont la compétence linguistique a été attestée par la mission d'inspection pédagogique régionale. De même tout le personnel de l'établissement est locuteur de la langue régionale.

Selon les mêmes dispositions que pour les autres formes d'enseignement bilingue, les établissements "langues régionales" bénéficieront du dispositif d'accompagnement destiné à promouvoir l'enseignement bilingue, comme vecteur privilégié du développement de la pratique des langues régionales et des actions visant à l'inscrire plus étroitement dans son environnement.


Pour le ministre de l'éducation nationale

et par délégation,

Le directeur de l'enseignement scolaire

Jean-Paul de GAUDEMAR