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Bulletin Officiel
de l'Education Nationale
 

N°7 du 17 février

2000

www.education.gouv.fr/bo/2000/7/orga.htm - vaguemestre@education.gouv.fr


ORGANISATION GÉNÉRALE



DIFFUSION DES DONNÉES PUBLIQUES
Institution d'un médiateur de l'édition publique
NOR : PRMX9903863C
RLR : 104-4
CIRCULAIRE DU 9-12-1999
JO DU 21-12-1999
PRM
MEN - BDC


Texte adressé aux ministres et aux secrétaires d'État
1 - Dans ma circulaire du 20 mars 1998 relative à l'activité éditoriale des administrations et établissements publics de l'État, j'ai fixé les orientations qui doivent être respectées en cette matière.
J'ai notamment rappelé que les administrations et établissements dont ce n'est pas la vocation ne doivent pas entreprendre des activités éditoriales. Lorsqu'ils souhaitent publier et diffuser des ouvrages, il leur faut soit faire appel aux organismes publics qui sont investis statutairement d'une mission éditoriale, soit recourir à des éditeurs privés, notamment dans le cadre de coéditions, en veillant au respect des règles relatives aux marchés publics et aux délégations de service public.
Pour les éditeurs publics institutionnels, c'est-à-dire l'ensemble des organismes de droit public ayant vocation à exercer une activité éditoriale en vertu des textes législatifs ou réglementaires qui les régissent (tels que la direction des Journaux officiels, la direction de la Documentation francaise, la Réunion des musées nationaux, la Caisse nationale des monuments historiques et des sites, le Centre national de la recherche scientifique, le Centre national et les centres régionaux de documentation pédagogique, l'Institut géographique national et le Service hydrographique et océanographique de la marine), la circulaire a précisé les règles à observer afin de ne pas fausser le jeu de la concurrence sur le marché du livre. Afin d'assurer concrètement le respect de ces règles, j'ai prescrit à ces organismes de développer des méthodes de comptabilité analytique.
Un groupe de travail a été constitué, sous la présidence de M. Bemard Gournay, conseiller maître à la Cour des comptes, afin de mettre au point les instruments méthodologiques permettant d'assurer la transparence des coûts pour les produits éditoriaux émanant des éditeurs publics. Ce groupe, qui comprenait des représentants de toutes les institutions principalement concernées, s'est largement inspiré des usages en vigueur dans le secteur privé, en vue de faciliter les comparaisons avec ce dernier.

2 - À l'issue de ses travaux, le groupe a établi une note de synthèse, destinée à servir de guide pour les responsables d'institutions publiques à vocation éditoriale, ainsi qu'un modèle de "fiche-produit". Une telle fiche, qui retrace l'intégralité des coûts pris en compte pour établir le prix de revient d'un ouvrage, doit normalement être confectionnée pour chaque titre à éditer ou pour chaque collection lorsque l'ensemble des titres d'une même collection présentent des caractéristiques identiques de fabrication et de diffusion. Un glossaire, annexé à la fiche, précise le contenu de chacune des rubriques figurant dans celle-ci.

Enfin, le groupe a bâti un modèle de compte d'exploitation prévisionnel sur trois ans, pour illustrer l'articulation entre les éléments contenus dans la "fiche-produit" et les prévisions de vente d'un ouvrage ou d'une collection.
Vous trouverez, en annexe (1) à la présente circulaire, tous les documents élaborés par le groupe de travail. Ils serviront désormais de référence à tous les éditeurs publics.
Les orientations contenues dans ces documents peuvent, bien entendu, être ajustées en fonction de la spécificité des activités propres à chaque organisme. Toutefois, ces ajustements devront être strictement justifiés. Ils devront avoir pour objet d'assurer au mieux la transparence des coûts, par une présentation traduisant de manière pertinente sur le plan économique les particularités de l'activité éditoriale considérée. Ils ne devront en aucun cas rendre plus malaisées les comparaisons avec le secteur privé.

3 - Ainsi que je l'annonçais dans ma circulaire du 20 mars 1998, il convient, maintenant qu'un cadre méthodologique a été défini pour la comptabilité analytique des éditeurs publics, de mettre en place un dispositif de suivi et d'évaluation des activités de ces derniers.

À cette fin, sur proposition de la ministre de la culture et de la communication, j'ai décidé qu'un médiateur de l'édition publique serait placé auprès d'elle. Ce médiateur pourra faire appel aux services de la direction du livre et de la lecture et, en tant que de besoin, aux directions des autres départements ministériels intéressés.
3.1 Le médiateur de l'édition publique réunira périodiquement les responsables des éditeurs publics, en présence de représentants de la direction du livre et de la lecture et de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, pour faire le point sur leurs activités de production et de diffusion d'ouvrages, pour examiner l'évolution de la part du secteur public dans le marché du livre, et pour harmoniser les méthodes de détermination des coûts de revient et des prix de vente.
La mission du médiateur ne sera pas de fixer des orientations ou de porter une appréciation sur la politique éditoriale propre à chaque organisme. Les décisions en cette matière relèvent en effet exclusivement des dirigeants desdits organismes, agissant sous le contrôle de leurs autorités de tutelle respectives. Toutefois, lorsqu'il estimera que tel ouvrage ou telle collection ne correspond pas à la vocation de l'institution publique qui l'édite, il pourra faire part de ses interrogations sur ce point aux responsables concernés et, le cas échéant, aux. autorités de tutelle.

Tous les éditeurs publics institutionnels devront adresser annuellement au médiateur de l'édition publique un document d'information sur leur politique éditoriale, sur la diffusion de leurs ouvrages, sur le développement de leurs instruments de comptabilité analytique, sur l'évolution de leurs coûts et sur leur politique de prix. L'envoi de ce document interviendra dans les quatre mois suivant la clôture de l'exercice comptable. Le premier, portant sur l'exercice 1999, devra donc être transmis
avant le 30 avril 2000 .
Un cadre de présentation de ce document d'information annuel des éditeurs publics pourra être défini ultérieurement par le médiateur, afin d'assurer une présentation homogène des données et de rendre leur analyse plus aisée.
3.2 Les éditeurs privés ainsi que le directeur du livre et de la lecture pourront s'adresser au médiateur de l'édition publique pour lui faire part de leurs observations ou interrogations concernant l'activité éditoriale d'une institution publique. Ils pourront, par exemple, lui signaler les cas concrets dans lesquels ils estiment qu'un ou plusieurs ouvrages mis sur le marché par un éditeur public ne correspondent pas à la mission de ce dernier, ou bien que les prix de vente pratiqués leur semblent anormalement bas.
Le médiateur s'efforcera de répondre aux demandes qui lui seront ainsi transmises dans un esprit de dialogue. Son intervention se situera sur un plan différent de celle du Conseil de la concurrence. Il n'aura pas pour mission d'assurer l'instruction contradictoire d'un dossier dans le cadre d'une instance quasi-juridictionnelle, mais simplement de donner un avis extérieur et impartial sur les pratiques éditoriales publiques. Son rôle sera de lever les incompréhensions réciproques, d'aboutir à des analyses partagées et de formuler, le cas échéant, des recommandations faisant l'objet d'un consensus.
Les entreprises privées auront toujours la faculté de saisir le médiateur de l'édition publique, elles n'en auront jamais l'obligation.
Je rappelle, à cet égard, qu'en vertu de l'article 53 de l'ordonnance n' 86-1243 du 1 er décembre 1986 modifiée, les activités éditoriales de l'État et de ses établissements publics sont soumises aux règles de droit commun de la concurrence. Par conséquent, si un éditeur privé estime qu'une institution publique met sur le marché des ouvrages à un prix abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation et que cette offre peut avoir pour effet de l'éliminer ou de l'empêcher d'accéder à un marché, il peut saisir le Conseil de la concurrence, en application de l'article 11 de l'ordonnance précitée, pour que celui-ci, se prononce sur le bien-fondé de sa plainte et ordonne, le cas échéant, les mesures propres à faire cesser les pratiques anti concurrentielles contestées. La saisine du Conseil pourra intervenir, le cas échéant, après l'échec d'une démarche auprès du médiateur de l'édition publique, mais une telle démarche ne sera en aucun cas un préalable nécessaire.
À l'inverse, le médiateur ne pourra pas émettre d'avis ni examiner de réclamation dès lors que le Conseil de la concurrence aura été saisi d'un dossier.
Quand le médiateur recevra une réclamation d'un éditeur privé concernant le prix d'un ouvrage mis sur le marché par une institution publique, il prendra contact avec l'organisme mis en cause afin d'examiner les méthodes employées pour fixer ce prix. Il pourra obtenir, de la part de celui-ci, communication des éléments d'information, et notamment des documents de comptabilité analytique établis conformément aux principes directeurs définis en annexe à la présente circulaire, en vue de se forger une opinion sur la pertinence de ces méthodes. Il pourra également comparer le prix incriminé avec les prix pratiqués sur le marché pour des ouvrages de nature similaire, diffusés selon les mêmes modalités et tirés à un nombre d'exemplaires équivalents. S'il le juge utile, il pourra organiser des séances de travail réunissant des représentants de l'organisme mis en cause et des représentants de l'éditeur privé l'ayant saisi.
Le médiateur sera évidemment tenu de respecter la confidentialité des chiffres qui lui seront fournis par les éditeurs publics.
Dès qu'il s'estimera suffisamment informé, le médiateur fera part de ses conclusions et de ses éventuelles recommandations à l'éditeur privé et à l'organisme public concernés. S'il estime que la transparence des coûts est insuffisante chez ce dernier ou que les méthodes d'établissement des prix sont critiquables, il pourra lui proposer des mesures pour mettre fin à cette situation, en indiquant, le cas échéant, le délai dans lequel il lui paraîtrait souhaitable que leur mise en œuvre intervienne. Si, au contraire, il considère que les pratiques de l'éditeur public mis en cause ne prêtent pas le flanc à la contestation, il expliquera à l'entreprise privée l'ayant saisi les raisons de sa conviction.
Lorsque le médiateur aura formulé des recommandations à l'intention d'un éditeur public, je souhaite que ce dernier lui fasse part, dans un délai de trois mois au plus, des suites qu'il leur aura réservées. Si l'éditeur public concerné entend s'écarter des recommandations reçues, il devra justifier de manière détaillée sa position dans cette réponse.
3.3 Le médiateur m'adressera, ainsi qu'à la ministre de la culture et de la communication, un rapport périodique sur son activité.

Ce document, qui sera rendu public, rendra compte de l'activité éditoriale des services et établissements publics de l'État en prenant notamment pour base les documents d'information adressés annuellement en application du point 3.1 ci-dessus. Il indiquera la teneur des affaires soumises par les éditeurs privés et donnera le sens des avis émis à ces occasions. Enfin, il contiendra, le cas échéant, des propositions en vue de compléter les orientations fixées dans la circulaire du 20 mars 1998 et dans la présente circulaire.




Le Premier ministre

Lionel JOSPIN
(1) Les annexes sont publiées au JO du 21-12-1999, pages 18984 à 18989.